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Politique Publié le vendredi 3 avril 2009 | Notre Voie

Michel Gbagbo, enseignant à l’Université, militant du FPI : "Je veux être député"

Notre Voie : Vous êtes très présent dans la commune de Yopougon et actif dans les sections du FPI. Qu’est-ce qui explique cette présence et pourquoi le choix de Yopougon ?

Michel Gbagbo : Vous avez sans doute connaissance que j’ai milité au sein de la Jeunesse du Front populaire ivoirien (FPI) et j’ai été également membre de la FESCI. Nos activités se déroulaient particulièrement à Yopougon qui était notre base sociologique. Donc c’est tout naturellement que lorsque j’ai voulu faire de la politique, je suis retourné à Yopougon où je me sens le mieux et où il y a des défis socio-économiques à relever. Yopougon, c’est le symbole multiethnique et multi-social de la Côte d’Ivoire.


N.V. : Vous avez donc, comme il se raconte, des ambitions politiques dans cette commune ?

M.G. : Effectivement, je veux être député. Je souhaiterais me présenter aux législatives à Yopougon. J’y suis avec tous les élus et les camarades. Nous travaillons d’abord à l’élection présidentielle. Après, on verra, car c’est la base qui décide au FPI.


N.V. : Et les municipales, ça ne vous intéresse pas ?

M.G. : Pas du tout. Seulement les législatives, et avec l’accord de la base. Parce que je ne suis pas un gestionnaire d’argent, mais de dossiers.


N.V. : Ok ! Voilà deux ans que les accords de Ouaga ont été signés et ils n’ont pas encore sorti le pays de la crise comme on le souhaite. Les préfets n’ont pas de pouvoir, alors ne craignez-vous pas que Ouaga connaisse l’impasse de Marcoussis ?

M.G. : Vous êtes trop sévère ! Reconstruire, est toujours plus difficile que détruire. Le redéploiement du corps préfectoral est un fait. Celui des fonctionnaires, une réalité. La circulation des personnes sans laissez-passer entre les zones CNO et le sud est quotidienne. Les marchandises empruntent régulièrement, dans les deux sens, les axes Abidjan-Bamako et Abidjan Ouagadougou. Le véritable problème a trait à des intérêts pécuniaires de certains individus. C’est cela l’enjeu de la réunification des caisses de l’Etat, du redéploiement des agents des douanes, et du désarmement ainsi que de la réinsertion des miliciens et des commandants de zone des rebelles. La négociation, pour l’instant, est un moyen puissant pour faire avancer les choses.


N.V. : Le rythme lent avec lequel avance l’application de Ouaga fait dire à certains, notamment à l’opposition, que le président Gbagbo et le Premier ministre Soro gèrent le temps pour ne pas organiser les élections. Avez-vous le même sentiment ?

M.G. : C’est cette même opposition qui a refusé de voter le texte relatif à la Commission électorale indépendante, dans laquelle elle est fière d’être majoritaire aujourd’hui. C’est elle qui chante l’houphouétisme, mais qui a cautionné une guerre pour revenir aux affaires. Elle réclame la rapidité de l’enrôlement des populations, en même temps qu’elle revendique sa reprise pour que tout le monde y accède. Elle prend les Ivoiriens pour des idiots et joue sur la lassitude des populations. Elle ne fait que défendre des intérêts personnels en se servant du nom d’Houphouet. Le moment venu, démocratiquement, le peuple jugera.


N.V. : Le président du MFA, Anaky Kobéna, appelle à un nouvel ordre institutionnel. Quel est, à cet effet, votre commentaire ?

M.G. : C’est son droit de se précipiter à la télévision pour tricher l’idée du Professeur Wodié d’une IIIème République. Mais je pense que son appel à l’insurrection est irresponsable, et que c’est une honte pour nous Ivoiriens, d’avoir ce genre de politiciens-là ! Pendant que certains se faisaient violer et tuer, que les soldats mourraient au front, lui et sa famille étaient protégés par l’ONUCI. Je trouve inacceptable qu’il vienne encore appeler à la violence. M. Anaky est vraiment le prototype de la vieille Côte d’Ivoire, qui ne regarde qu’un seul côté de la vérité : celui de ses propres intérêts. Il devrait demander pardon aux Ivoiriens à la télévision, surtout s’il prétend être de nouveau ministre ou candidat à la présidentielle. La violence, la guerre, ça suffit, on a déjà trop donné !


N.V. : Beaucoup d’Ivoiriens pensent que l’espoir de paix et d’une vie décente réside dans la tenue des élections. Croyez-vous que celles-ci puissent avoir lieu cette année 2009 ?
M.G. : Excusez-moi, mais j’évite de mêler les croyances à la politique. En tout état de cause, chacun doit œuvrer pacifiquement, et honnêtement, de toutes ses forces, à la tenue rapide d’élections justes. Cela permettra à la Côte d’Ivoire de revenir sur les rails de la démocratie durable.


N.V. : On parle de plus en plus d’enrichissement illicite, de vol. Pour une partie de l’opinion, ce sont les Refondateurs. Alors, n’avez-vous pas peur que cela desserve le FPI aux prochaines élections ?

M.G. : En période de guerre, quand des personnes prennent les armes et deviennent subitement riches, vivent protégées par l’ONU, règnent en maîtres absolus dans ‘’leurs’’ zones ou obtiennent des postes ministériels, ils se croient intouchables et deviennent arrogants. L’impunité commence par-là, et comme une gangrène, s’étend dans le corps social.

Face à cela, le président de la République fait sa part. Il ordonne au Procureur de la République de poursuivre tous ceux qui sont soupçonnés d’avoir volé l’argent du contribuable. Car aujourd’hui, voler l’argent public doit être considéré comme un crime. Mais attention, ce n’est pas parce que les gens souffrent, que tous les ministres (MPCI, FPI, RDR, PDCI, MFA…) ou que tous ceux qui réussissent dans la vie sont des voleurs. La justice doit faire son travail, jusqu’au bout, sans état d’âme, et sans pression !

Quant au peuple, il jugera chacun sur ce qu’il aura fait durant cette période !


N.V. : Que dites-vous de ceux qui estiment que, le président de la République, en commençant par nettoyer son écurie, fragilise son régime?

M.G. : Un voleur est un voleur, et en période de guerre, un traître, est un criminel ! Le peuple jugera chacun sur ses actions au moment des élections !


N.V. : Sur la question de la crise armée, l’opposition ivoirienne accuse le FPI et Laurent Gbagbo d’avoir fait basculer le pays dans la guerre en deux ans seulement de pouvoir, alors que pendant 40 ans, Houphouet et le PDCI ont entretenu la paix. Partagez-vous cet avis ?

M.G. : Pourquoi revenir sur des propos aussi fallacieux ? Pourquoi nous obliger à rappeler que l’opposition civile a apporté ason soutien ferme et entier à la rébellion armée en laquelle elle voyait un moyen de revenir aux affaires ? Quarante années de parti unique l’ont habitué aux discours malhonnêtes et simplistes qui jouent avec la peur des gens. Pour l’heure, concentrons-nous sur l’essentiel, la paix, la paix et la paix, pour des élections justes et transparentes.


N.V. : Croyez-vous que le parti au pouvoir, le FPI, peut relever tous les défis qui attendent la Côte d’Ivoire ?

M.G. : D’abord, notez que le FPI n’est plus au pouvoir depuis 2002. Ensuite, que les défis en question sont multiples : économiques, sociaux, politiques, institutionnels, monétaires, financiers, sécuritaires, de gouvernance, … L’unité nationale ne se fera pas autour d’une ethnie contre les autres, d’une religion au détriment des autres, d’un parti politique qui exclura les autres. La Côte d’Ivoire de demain, ne sera pas celle d’un groupe, mais celle des Ivoiriens et de tous ses habitants.


N.V. : De façon générale, avec la persistance des rébellions et des coups d’Etat en Afrique, est-ce qu’on peut penser que le vent de changement en termes de démocratie qui a soufflé sur l’Afrique en 1990 a satisfait les attentes des populations ?

M.G : Vous me ramenez à la question du rôle de la violence dans l’histoire. Soyons simples : la démocratie avance en Afrique et en Côte d’Ivoire, mais le chemin n’est pas aussi rectiligne que nous le croyions en 1990. Si nous tombons, nous devons nous relever. Comme la guerre l’a montré, des gens qu’on croyait au-adessus de tout soupçon sont prêts, pour leurs intérêts, à sacrifier le peuple entier. Mais nous n’allons pas laisser faire ! La route vers la démocratie doit continuer. Il faut des élections démocratiques et la fin des coups d’Etat pour que s’installe la croissance durable.


N.V. : Vous reconnaissez les acquis et les avancées en matière de démocratie en Côte d’Ivoire. Mais l’opposition ivoirienne, elle, parle de dictature avec l’actuel régime.

M.G. : Elle en parle dans la presse et à la télévision nationale. Pourvu qu’elle ne supprime pas de nouveau cette liberté de parole si jamais elle devait revenir au pouvoir !
Pour ma part, je n’ai pas à juger ce que l’opposition ivoirienne pense. Ce que je demande, c’est la fin de la violence et de la haine tribale comme moyen d’accéder au pouvoir.


N.V. : Qu’est-ce qui, selon vous, est plus urgent aujourd’hui pour votre pays?

M.G. : 18 millions d’hectares de forêts en 1960 pour 3 millions d’habitants. 18 millions d’habitants aujourd’hui, pour un million d’hectares de forêts. Notre pays a besoin d’une politique industrielle. Si la Côte d’Ivoire repose sur l’agriculture, l’engrais de cette agriculture, c’est la paix, et sa durabilité dépend de l’industrie. Il faut moins de politique en Côte d’Ivoire et en Afrique, et plus d’économie. Je vous remercie.


Propos recueillis par Benjamin Koré
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