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Économie Publié le mercredi 22 avril 2009 | Le Nouveau Navire

Interview - Marius Comoé (pdt par intérim de la Faca-ci) : "Nous décrions la politique du ministre du Commerce"

Face à l'augmentation des prix des denrées de première nécessité sur le marché ivoirien, le président par intérim de la fédération de consommateurs, M. Marius Comoé Brou, mobilise ses troupes et tire sur la sonnette d'alarme …


Monsieur le président, pouvez-vous nous dire comment vous êtes arrivé à la tête de la fédération des consommateurs.

Je suis Marius Comoé Brou, président par intérim de la Fédération des associations de consommateurs actifs de Côte d'Ivoire (Faca-ci). En effet, suite au décès du véritable père fondateur du mouvement consommateur en Côte d'Ivoire, maître N'Goran N'Da, j'ai été choisi lors d'une assemblée générale, en mars 2008, pour assurer l'intérim du président. C'est cette tâche que nous assurons afin de conduire la fédération au prochain congrès qui est prévu pour fin avril début mai 2009.


Depuis votre prise du pouvoir, qu'est ce qui a changé à la fédération ?

Nous pouvons dire qu'à la suite de notre intérim, les consommateurs de Côte d'Ivoire ont eu un regain d'espoir dans le mouvement consommateur. C'est vrai que les résultats sont mitigés et laissent entrevoir encore beaucoup de travail à faire. Mais il faut reconnaître que depuis avril 2008 date à laquelle nous avons lancé un mot d'ordre de mouvements sociaux largement suivi par les populations, le gouvernement a pris des mesures allant dans le sens de la réduction du coût de la vie. Par ailleurs, nous nous sommes attelés à exécuter un certain nombre de tâches dans l'intérêt des populations. Malheureusement, le gouvernement, dans sa quête d'un processus de sortie de crise perd de vue les préoccupations des populations. Notamment leur volonté d'avoir accès à la nourriture, aux soins de santé, à l'éducation, aux sources d'énergie, en un mot au bien-être social. Aujourd'hui, nous constatons que le prix du carburant a baissé à quatre reprises sans que les transporteurs ne répercutent cette baisse sur le coût du transport. Nous restons donc dans la perspective de la lutte.


On a l'impression que vos actions ne portent jamais de fruits.

Il revient aujourd'hui aux consommateurs eux-mêmes de comprendre que nos actions ne sauraient donner les résultats escomptés sans leur participation active. Les Ivoiriens sont trop passifs, admiratifs et spectateurs des efforts des autres. Il y a des gens qui acceptent librement d'aller au charbon en vue de défendre leurs intérêts. Mais les Ivoiriens doivent prendre conscience du fait qu'ils doivent accompagner le processus en répondant à nos mots d'ordre. A preuve, le 2 février 2009, nous avions lancé un mot d'ordre allant dans le sens du boycott du transport en Côte d'Ivoire. Mais le jour J, nous nous sommes retrouvés orphelins. Tout s'est passé comme si les Ivoiriens n'avaient pas de problèmes de transport. Or les informations qui nous parvenaient, les plaintes que nous recevions nous faisaient état de ce que les Ivoiriens avaient un véritable problème de transport. Ainsi ils doivent comprendre que malgré toute notre volonté, même avec nos familles dans les rues, nous ne pouvons pas obtenir des résultats pour eux sans leur mobilisation. Ils doivent cesser d'être des spectateurs et abandonner leurs maisons, leurs bureaux, les maquis pour se plaindre en disant que tout est cher. C'est sur le terrain des actions qu'on obtient les résultats. c'est pourquoi la mobilisation des Ivoiriens a fait reculer la communauté internationale à un moment donné de la crise ivoirienne.


N'est-ce pas un manque de communication entre vous et les consommateurs?

On ne saurait parler d'un manque de communication entre les organisations de consommateurs que nous dirigeons et les consommateurs. Ce d'autant plus qu'avant le 2 février 2009, nous étions sur les médias d'Etat pour annoncer la paralysie du transport en Côte d'Ivoire.

Malheureusement, nous étions seuls dans les rues d'Abidjan. Et pourtant, aucun Ivoirien ne peut dit ignorer que le 2 février les consommateurs prévoyaient un boycott des véhicules de transport en commun. Je crois que les Ivoiriens ont plutôt eu une formation politique. Seuls les politiques les mobilisent, mais ils oublient une chose, c'est que cette mobilisation profite seulement aux hommes politiques qui bénéficient totalement de leurs actions. Or nous, nos actions de mobilisation sont bénéfiques pour l'ensemble des populations. Il faut qu'on arrête de servir de courroie d'évolution des hommes politiques au détriment de nos propres intérêts. En Europe, personne ne se mobilise pour aller soutenir un individu sauf si ce dernier subit une injustice. Personne ne se lève pour aller dire merci à un homme politique. Là où on parle de véritable démocratie, aucune délégation ne va saluer les hommes politiques. En Afrique, les gens doivent comprendre plutôt qu'il faut se mobiliser pour dire aux hommes politiques de concevoir un programme de gouvernement qui prend en compte leurs préoccupations au lieu d'aller leur dire merci.


Vous pensez que la population est coupable de ce qu'elle vit ?

Absolument ! Les Africains et particulièrement les Ivoiriens sont coupables de leurs propres malheurs. Ils sont coupables de la situation qu'ils vivent parce qu'ils sont spectateurs. Aujourd'hui, en Côte d'Ivoire, on ne peut pas dire qu'il n'y a pas de véritables responsables d'associations de consommateurs.


Certains estiment que toutes vos actions sont du bluff et que vous recevez des dessous de tables pour fermer les yeux sur certaines situations. Qu'en dites-vous ?

Moi Marius Comoé, c'est vrai que je ne suis pas un saint, mais je n'ai rien à me reprocher dans la gestion de cette fédération. Je ne me reproche rien dans mes rapports avec l'Etat, avec les opérateurs économiques. Aucun ministre de la République de Côte d' Ivoire ne peut prétendre m'avoir reçu chez lui ou dans son bureau pour me tendre des enveloppes. Personne ne m'a donné de l'argent afin d'assouvir mes intérêts personnels. Jamais. Chaque fois que j'ai été voir l'administration publique ou privée, c'est pour parler de consommateurs et de droits de consommateurs. Uniquement cela et rien d'autre.


En tant que médiateur du litige Orange-Ci et le Synacotel, pouvez nous dire à quel niveau se trouvent les négociations ?

Oui, effectivement nous sommes par le biais de l'Acotelci (Association des Consommateurs de Télécommunications de Côte d'Ivoire), médiateur entre l'opérateur de téléphonie mobile Orange-CI et le Synacotel (Syndicat national des commerçants de produits télécoms). Les négociations avancent. Nous avons demandé aux responsables d'Orange-Ci de trouver un cadre de discussion avec le Synacotel. Ce qu'Orange-Ci tardait à faire quand son directeur commercial M. Charles Guéret a été limogé. Son intérimaire, Mme Fadika Florence, nous a donné l'assurance de recevoir le Synacotel le plus vite possible. Ce, dans l'intérêt des consommateurs. Il est bon de reconnaître le professionnalisme avec lequel l'Acotelci a traité ce dossier en évitant un giga sit-in qu'avait prévu le Synacotel devant les locaux de l'opérateur. Le plaidoyer a été de qualité pour une trêve raisonnable.


Mais comment expliquez-vous le fait que certains gérants de cabine prélèvent 10% sur le montant des transferts sollicités par les abonnés Orange ?

En réalité, c'est une vision du Synacotel et nous profitons pour leur dire que c'est une voie suicidaire. Nous préférons que les négociations se fassent dans un climat saint pour une satisfaction mutuelle.


Un dernier mot ?

Pour avoir participé à la rédaction du DSRP (Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté / Ndlr) qui a permis à la Côte d'Ivoire d'être éligible à l'initiative PPTE (Pays pauvres très endettés/ Ndlr), nous en tant qu'organisation de consommateurs, attendons du gouvernement un véritable rôle, c'est-à-dire l'application effective d'une politique allant dans le sens de l'amélioration des conditions de vie des populations. Nous ne voulons plus de ce gouvernement '' n'zassa''. Un gouvernement dans lequel vous aviez des rats, des tigres, des tilapias, des silures…qui se mangent entre eux au lieu de travailler dans l'intérêt des populations. Vous aviez un ministre du Commerce dont nous avons de tout temps décrié la politique, ce n'est pas une politique véritable en vue d'asseoir les bases d'un ministère du Commerce tourné vers le bien-être des populations à travers un contrôle de régulation du marché. Elle ne permet pas aux populations d'avoir des produits de grande consommation à coûts réduits. Une ordonnance a été prise par le chef de l'Etat, les résultats ont été en dents de scie, d'ailleurs aucun résultat n'a été obtenu. Tout le mérite que nous avons eu, nous fédération de consommateurs, c'est d'avoir réussi à stabiliser les prix. Mais aujourd'hui (interview réalisée le 1er avril2009 / Ndlr) le riz, le savon et le sucre viennent de connaître une petite augmentation. Nous appelons l'Etat à résoudre les problèmes des populations qui souffrent du manque d'eau et d'électricité. C'est de leur droit d'avoir de l'eau potable et l'électricité.


Yenon R. Assi
assyelie@yahoo.fr
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