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Société Publié le vendredi 8 mai 2009 | Le Repère

Laïcité et bonne gouvernance - Pr Germain Kouassi (Docteur d`Etat en Grammaire-stylistique, Président de LAPACI) : “Que le gouvernement cesse le paiement de voyages à caractère religieux”

Platonicienne de l'ordre des choses, caractérisée par l'idée, une forme de transcendance divine, modèle dans lequel se coulera plus tard l'église catholique, la laïcité va opposer une conception aristotélicienne des choses, marquée par la réalité telle qu 'elle est, porteuse donc en elle d'un certain relativisme et, par voie de conséquence, d'une forme de tolérance ". C'est à partir de cette acception de neutralité, de non partialité, d'indépendance et, finalement, de tolérance que le mot a pu acquérir toutes ses lettres de noblesse à partir de ses nombreuses virtualités et potentialités démocratiques. " La laïcité, a dit Dominique Augiron, doit montrer qu'elle peut permettre à un individu de s'engager dans la société en dehors de toute appartenance politique ou religieuse en rejetant tout dogmatisme (...) La laïcité doit permettre l'émancipation de l'homme, elle doit l'amener à la conquête de sa liberté dans le respect d'autrui. C'est une éthique de vie reposant sur la liberté de conscience ". C'est par ses conceptions profanes, c'est-à-dire courantes du mot en tant que non porteur d'étiquette partisane que l'on a pu en découvrir l'importance pour l'équilibre et l'harmonie des sociétés humaines.


importance de la laïcité en société démocratique

La laïcité a été, de toute évidence, l'un des plus grands leviers pour le développement humain en Europe et, partant, dans le monde. Les quelques faits et autres constats suivants en portent un éloquent témoignage. Déjà Epicure, au IIIème siècle avant Jésus-Christ, dénonçait : "La crainte des dieux, qui génère l'angoisse " et sclérorise la pensée. Lucrèce, son disciple, écrit plus incisif encore, dans le De natura rerum que " La vie humaine gît lamentablement sur la terre écrasée sous le poids des Eglises " ; toutes choses pour dénoncer la mainmise de l'ordre religieux sur les consciences et, partant, leur atrophie par le fait de la sclérose. C'est preuve, a contrario, que la laïcité défait tous les nœuds autour de la pensée humaine pour la laisser se déployer à l'air libre(…) La laïcité n'étouffe pas l'expression religieuse. Elle les fait s'exprimer toutes en harmonie sans impérialisme quelconque tiré soit du nombre de fidèles, soit d'affinités avec les gouvernants. On voit, comme il a été dit précédemment, que laïcité n'est pas synonyme d'antireligiosité. C'est dans ce cadre qu'en France, une loi de 1989 dite Loi Jospin d'orientation sur l'éducation accorde le droit d'expression religieuse et politique, y compris celle des particularismes, aux élèves. En 2003, est également promulguée une loi portant création du Conseil Français du Culte Musulman, consacrant ainsi le pluralisme et l'égalité des religions, consubstantiels à une société démocratique. (…) La laïcité est gardienne de l'impartialité et de l'égalité réelle des chances ; c'est ainsi qu'elle est hostile à tout ce qui peut servir à étiqueter les citoyens au sein de la société soit en vue d'une discrimination défavorable soit en vue d'une distinction à visée de favoritisme. On en a vu les preuves en France avec la loi récente (2004) interdisant le port des signes religieux à l'école. La laïcité œuvre à l'harmonie sociale par l'enrichissement naturel par le culte des différences. C'est un état d'esprit positif envers autrui, fondé sur " l'ouverture à l'autre dans la tolérance, une tolérance dévêtue de son aspect de condescendance. (…) " La laïcité n'implique pas l'uniformité. Elle réunit ce qui semble épars dans la cité. C'est, en cela, un acte de confiance en l'état de liberté des hommes, des centres citoyens, chacun étant intimement convaincu que l'espace public ne peut être envahi par les particularismes identitaires, les communautarismes. De la vient que les conceptions ethnicistes, intégristes ne peuvent prospérer en régime de laïcité. (…) L'éthique laïque reste donc indissociable du principe cardinal d'égalité. Il en résulte un refus impératif du racisme, de la xénophobie et de la discrimination sous toutes leurs formes, lesquels sont l'expression du sectarisme ethnico - religieux. La laïcité prône donc l'égalité sociale sous deux formes essentielles à savoir : L'égalité des droits : droit à la santé, droit à l'instruction, droit au logement, droit au minimum vital pour assurer à chacun l'assurance d'une dignité humaine décente ; Egalité de chances fondée essentiellement sur la compétence et le mérite individuels. D'où le bannissement, en régime de laïcité, des favoritismes et autres népotismes. C'est au nom de la notion essentielle de l'égalité des chances par le mérite individuel que l'idée de Nicolas Sarkozy relative à la discrimination dite positive n'a pas connu de succès en France. L'égalité des chances est l'expression d'un souci de justice, d'équilibre et de solidarité dans l'organisation des sociétés humaines, etc.

Toutes ces avancées sociales ont amélioré la vie matérielle en faisant des citoyens, des hommes épanouis donc, nécessairement, des hommes meilleurs. Ce sont là, indubitablement, des valeurs que toute république laïque, juste et égalitaire se doit d'offrir à ses citoyens. Les Etats africains en général, la Côte d'Ivoire en particulier, en tant que républiques laïques essentiellement, doivent impérativement s'inscrire dans cette mouvance en tant qu'urgence.


recommandations pour une bonne pratique sociale basée sur le principe de laïcité

Pour les sociétés africaines modernes en particulier, pour la société ivoirienne ce n'est un secret pour personne que les maux qui minent les sociétés africaines aujourd'hui ont pour nom : séparatisme, ethnicisme, corruption, misère, famine, épidémies, guerres, etc. Ce n'est, non plus, un secret pour personne que ces maux ont pour dénominateur commun, le déficit de démocratie ; autrement dit, la mauvaise gouvernance étant entendu que mauvaise gouvernance ne signifie pas nécessairement absence de réglementation de la vie publique, mais quelquefois, et peut-être, très souvent non application ou mauvaise application des dispositifs juridiques existants.
En conséquence de ce qui précède, l'Association Laïcité, Paix en Côte d'Ivoire (LAPACI) fait les recommandations suivantes :

I. L'application effective du principe de laïcité contenue dans la Constitution ; ce qui se traduirait entre autres, par :

1) La prise de lois claires visant à réglementer la vie religieuse en société laïque, notamment en ce qui concerne les droits et devoirs de l'Etat envers les associations et groupes religieux;

2) La cessation, par le gouvernement, du paiement de voyages à caractère religieux (pèlerinage, etc.) au bénéfice d'associations ou de groupements ;

3) La cessation, par l'Etat, de l'octroi d'une rémunération quelconque au bénéfice des chefs ou autorités religieuses;

4) L'interdiction de chansons ou d'airs de musique à vocation religieuse sur les antennes de la radio et de la télévision publiques nationales;

5) L'arrêt, par l'Etat et aux frais du contribuable, de la construction d'édifices religieux ;

6) L'interdiction des tapages nocturnes ou diurnes dans les résidences et autres lieux d'habitations ;

7) L'interdiction de l'habitude qui consiste à barrer les voies publiques pour les manifestations religieuses ou même culturelles à vocation privée ;

8) L'extension de la notion de laïcité à tous les domaines de la vie publique, notamment dans les domaines politique, économique et socioculturel en réservant au niveau de chacun de ces domaines un espace carrefour de pratiques et de comportements non partisans.


II. La création et la mise en place effective d'une nouvelle institution nationale dénommée "

Observatoire de la Laïcité " dotée de pouvoirs et de moyens adéquats en vue de la réglementation et du suivi des lois et règlements relatifs à la laïcité.

Il va sans dire qu'une telle politique sincère de laïcité éclatée, de laïcité plurielle et généralisée aura pour conséquence nécessaire la réduction de la pauvreté et, en corollaire, l'éradication des épidémies et autres fléaux liés à l'indigence sociale, l'arrêt des frustrations et des inégalités et autres déséquilibres sociaux, sources de conflits exacerbés, voire armés. Une telle politique résolument portée par un esprit d'équité, de liberté et de fraternité conduira à l'égalité des droits et des chances, c'est-à-dire au culte du travail, plus précisément au culte du mérite et des compétences individuelles, moteur de tout développement. Voilà, pour nos populations, une voie ouverte vers la concorde et l'espérance partagée, une voie d'harmonie et de cohésion, susceptible d'endiguer la saignée actuelle de nos bras valides et de nos intelligences aujourd'hui obligés, par les désespoirs multiformes, de s'exiler vers des horizons meilleurs. Il ne dépend plus que de nous, de saisir cette chance et ainsi d'asseoir durablement la paix à l'intérieur de nos Etats et de nos sociétés.

Pr Germain Kouassi
Docteur d'Etat en Grammaire-stylistique,
Président de LAPACI
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