Laure Adler est journaliste et écrivain français. Elle est née à Abidjan où elle a passé toute son enfance. Elle a travaillé en 1989 avec le Président Mitterrand comme conseillère à la culture.
Auteur de plusieurs livres dont “A ce soir”, “Marguerite Duras”. Elle séjourne en ce moment sur les bords de lagune Ebrié, à l'occasion de Noël du Livre, organisée par l'association des écrivains de Côte d'Ivoire. Le Temps l'a rencontrée. Entretien.
Comment peut-on expliquer votre présence à Abidjan ?
Je travaille à France culture, le département culturel du Quais d'Orsay, dirigé par Olivier Poivre d'Avord. Ce département propose chaque année à 10 écrivains français de choisir la destination de leur choix avec une durée qui de 15 jours. Pour essayer de conter tout ce qui se passe dans le pays que les écrivains ont choisi. Aussi, essayer de faire un cours à l'université, au centre culturel français et ramener une sorte de rapport et une liste de gens ; des artistes pas assez connus en France. Pour éventuellement, les aider et les faire connaitre.
Dans l'espace francophone ?
Non, ça peut être n'importe quel pays. Moi, j'ai choisi la Côte d'Ivoire. On peut aller en Chine ou au Brésil dans n'importe quel pays. Mais moi , quand on m'a fait la proposition, j'ai choisi la Côte d'Ivoire parce que j'ai vécu ici. J'ai passé mon enfance et mon adolescence ici. Et je ne voulais pas y revenir sans quelque chose de spécial. Je ne voulais pas venir comme un touriste. Alors, quand on m'a proposé la bourse, j'ai tout de suite dit la Côte d'Ivoire.
Quelle est votre appréhension par rapport à la situation sociopolitique?
Mais justement, c'est ce que j'ai essayé de dire cet après-midi à l'occasion de la réunion des associations des écrivains de Côte d'Ivoire (lundi 21 décembre). En France, il y a beaucoup de clichés sur la Côte d'Ivoire. Encore, aujourd'hui, quand vous dites à quelqu'un, que je vais en Côte d'Ivoire, il vous dit, c'est très dangereux là-bas. Et les événements de 2004 sont restés dans les mémoires. Les médias français ont beaucoup mis en boucle, les familles des français qui partaient. Et beaucoup d'entre eux ne sont plus revenus. Donc pour certains, c'est un pays où il y a beaucoup de distinctions. Où il ne serait pas bon d'aller quand on est français. Or moi, j'aperçois qu'il y a beaucoup d'écrivains ivoiriens, très intéressants. Il y a beaucoup d'enseignants, d'intellectuels universitaires et d'artistes. Et que ces artistes ne sont pas connus en France. Donc je n'aurais pas de difficulté à faire mon rapport. Un rapport criard de révolte parce que je trouve que la Côte d'Ivoire est un peu mise au banc des nations africaines dont certaines ont très bonne réputation. Notamment dans le domaine culturel. Par exemple, les artistes maliens sont très connus (les artistes plasticiens…). En Côte d'Ivoire, il y a beaucoup de talents et qu'on ne connait pas assez. Le jour où je suis venue, le Président Gbagbo a accordé une interview au Figaro. Dans cet entretien, il a indiqué qu'il se sent beaucoup mieux avec Sarkozy par rapport à Chirac. C'est bien dit. Il a aussi confirmé qu'il faut les élections. Et on sent qu'il y a un rapprochement ivoiro-français, par l'intermédiaire des deux présidents. Dans Jeune Afrique, j'ai lu aussi qu'au cours du sommet international de l'Onu, le président Sarkozy est allé vers le président Gbagbo, il lui a fait comprendre qu'il était pour un rapprochement. On sent bien qu'il y a des choses qui sont en train de se passer, et c'est peut-être une nouvelle étape pour la relation franco-ivoirienne
En venant en mission en Côte d'Ivoire, aviez-vous une idée des artistes ivoiriens ?
J'ai beaucoup travaillé avec l'attaché culturel de l'ambassade de Côte d' Ivoire en France. Et celui pour l'éducation aussi. Ces deux personnes ont été remarquables. Dès que j'ai su que je partirai en Côte d' Ivoire j'ai pris contact avec eux. L'attaché pour l'éducation, c'est M. Gaston Foua Bi qui a été admirable avec moi. Il m'a tout de suite donné rendez-vous et on s'est passé beaucoup de contacts. Donc j'ai beaucoup préparé le voyage par internet. Il y a aussi Mme Kady Diallo qui est à l'ambassade de Côte d'Ivoire en France et qui a beaucoup de relations. Je crois donc que Mme Diallo et M Foua Bi m'ont tout donné. En appelant en Côte d'Ivoire.
Vous parlez de l'Afrique à partir d'une réappropriation de sa culture ?
Oui, je trouve qu'on voit ça dans des pays africains comme le Congo parce que moi j'ai la chance d'être éditeur à Douala. Et j'ai eu la chance de venir connaître Amadou Kourouma. Et que tous les jeunes écrivains sont en train de porter le vent de la modernité. Et ce n'est pas la tradition vernaculaire qui les intéresse. C'est d'être les écrivains d'aujourd'hui et de demain. Ce sont des écrivains qui ont lu James Joyce, Céline, Jean Paul Sartre. Ce sont des écrivains vraiment modernes.
C'est peut-être la lecture que vous faites de part votre profession, dans le domaine des arts et de la culture. Mais est-ce que cette vision est partagée par l'européen, le français et le Canadien ?
Oui, c'est le cliché qui est le plus répandu. Parce que les français ne connaissent pas assez la Côte d'Ivoire. Ils ont bien connu la Côte d'Ivoire du temps de Houphouët. Et je crois qu'il y a beaucoup de français qui étaient ici avec plus de 40 mille communautés. Qui apprécient la beauté du pays, la fraternité des gens, la capacité d'accueil. C'est très rare en Afrique. Je connais des pays africains. J'ai vécu au Tchad longtemps et dans d'autres pays africains. Mais particulièrement en Côte d'Ivoire, il y a une grande hospitalité.
Mais vous, Laure Adler, en tant que journaliste donc communicateur quel rôle avez-vous joué auprès des gens qui ne connaissent pas encore la Côte d'Ivoire ?
Mais c'est en rentrant que je vais expliquer au Quais d'Orsay, tout ce que j'ai vu et entendu. Pour qu'ils changent un peu d'attitude. Afin qu'ils fassent venir un peu plus d'écrivains en France. En leur consacrant plus des missions, parce que je pense qu'il n'y a pas assez de reconnaissance et d'autres part, je pense que nous avons, vous et moi, beaucoup de chance. Car je vais seulement faire mon rapport au Quais d'Orsay. Mais j'ai fait aussi des émissions que je vais passer à radio France inter. Sur Bruly Bouabré Angèle et Were Wêrê-Liking. Je vais enregistrer plus de personnes pour qu'elles soient attendues des français. Et je vais voir Jacques Toubon pour lui dire que le cinquantenaire c'est quand même la Côte d'Ivoire.
A part les enregistrements, est-ce que vous visiez d'autres domaines culturels. Est-ce que vous avez prévu des ateliers d'écriture ?
Je n'ai pas prévu les ateliers d'écritures. Je l'avais demandé, mais cela n'a pas été possible en raison des vacances. Mais je pense que je reviendrai. Par contre, je suis en relation avec des gens qui préparent un spectacle.
Vous êtes née en Côte d'Ivoire où vous y avez même passé une grande partie de votre vie. Est-ce que cette nostalgie n'a pas touché votre carrière d'écrivain et de journaliste ?
J'ai beaucoup appris. J'étais au Lycée Jean Mermoz. C'était une période bénie. Parce qu'il y avait autant d'enseignants français qu'ivoiriens et d'élèves français qu'ivoiriens. On s'entendait très bien. C'était une période extraordinaire. Pour moi, ça a beaucoup compté. Moi, je ne me sens pas française, je me sens africaine. Quand on a vécu de 0 à 18 ans ici, toutes vos racines sont là. Les lumières, les odeurs, les paysages et les arbres.
Interview réalisée par
Renaud Djatchi
Auteur de plusieurs livres dont “A ce soir”, “Marguerite Duras”. Elle séjourne en ce moment sur les bords de lagune Ebrié, à l'occasion de Noël du Livre, organisée par l'association des écrivains de Côte d'Ivoire. Le Temps l'a rencontrée. Entretien.
Comment peut-on expliquer votre présence à Abidjan ?
Je travaille à France culture, le département culturel du Quais d'Orsay, dirigé par Olivier Poivre d'Avord. Ce département propose chaque année à 10 écrivains français de choisir la destination de leur choix avec une durée qui de 15 jours. Pour essayer de conter tout ce qui se passe dans le pays que les écrivains ont choisi. Aussi, essayer de faire un cours à l'université, au centre culturel français et ramener une sorte de rapport et une liste de gens ; des artistes pas assez connus en France. Pour éventuellement, les aider et les faire connaitre.
Dans l'espace francophone ?
Non, ça peut être n'importe quel pays. Moi, j'ai choisi la Côte d'Ivoire. On peut aller en Chine ou au Brésil dans n'importe quel pays. Mais moi , quand on m'a fait la proposition, j'ai choisi la Côte d'Ivoire parce que j'ai vécu ici. J'ai passé mon enfance et mon adolescence ici. Et je ne voulais pas y revenir sans quelque chose de spécial. Je ne voulais pas venir comme un touriste. Alors, quand on m'a proposé la bourse, j'ai tout de suite dit la Côte d'Ivoire.
Quelle est votre appréhension par rapport à la situation sociopolitique?
Mais justement, c'est ce que j'ai essayé de dire cet après-midi à l'occasion de la réunion des associations des écrivains de Côte d'Ivoire (lundi 21 décembre). En France, il y a beaucoup de clichés sur la Côte d'Ivoire. Encore, aujourd'hui, quand vous dites à quelqu'un, que je vais en Côte d'Ivoire, il vous dit, c'est très dangereux là-bas. Et les événements de 2004 sont restés dans les mémoires. Les médias français ont beaucoup mis en boucle, les familles des français qui partaient. Et beaucoup d'entre eux ne sont plus revenus. Donc pour certains, c'est un pays où il y a beaucoup de distinctions. Où il ne serait pas bon d'aller quand on est français. Or moi, j'aperçois qu'il y a beaucoup d'écrivains ivoiriens, très intéressants. Il y a beaucoup d'enseignants, d'intellectuels universitaires et d'artistes. Et que ces artistes ne sont pas connus en France. Donc je n'aurais pas de difficulté à faire mon rapport. Un rapport criard de révolte parce que je trouve que la Côte d'Ivoire est un peu mise au banc des nations africaines dont certaines ont très bonne réputation. Notamment dans le domaine culturel. Par exemple, les artistes maliens sont très connus (les artistes plasticiens…). En Côte d'Ivoire, il y a beaucoup de talents et qu'on ne connait pas assez. Le jour où je suis venue, le Président Gbagbo a accordé une interview au Figaro. Dans cet entretien, il a indiqué qu'il se sent beaucoup mieux avec Sarkozy par rapport à Chirac. C'est bien dit. Il a aussi confirmé qu'il faut les élections. Et on sent qu'il y a un rapprochement ivoiro-français, par l'intermédiaire des deux présidents. Dans Jeune Afrique, j'ai lu aussi qu'au cours du sommet international de l'Onu, le président Sarkozy est allé vers le président Gbagbo, il lui a fait comprendre qu'il était pour un rapprochement. On sent bien qu'il y a des choses qui sont en train de se passer, et c'est peut-être une nouvelle étape pour la relation franco-ivoirienne
En venant en mission en Côte d'Ivoire, aviez-vous une idée des artistes ivoiriens ?
J'ai beaucoup travaillé avec l'attaché culturel de l'ambassade de Côte d' Ivoire en France. Et celui pour l'éducation aussi. Ces deux personnes ont été remarquables. Dès que j'ai su que je partirai en Côte d' Ivoire j'ai pris contact avec eux. L'attaché pour l'éducation, c'est M. Gaston Foua Bi qui a été admirable avec moi. Il m'a tout de suite donné rendez-vous et on s'est passé beaucoup de contacts. Donc j'ai beaucoup préparé le voyage par internet. Il y a aussi Mme Kady Diallo qui est à l'ambassade de Côte d'Ivoire en France et qui a beaucoup de relations. Je crois donc que Mme Diallo et M Foua Bi m'ont tout donné. En appelant en Côte d'Ivoire.
Vous parlez de l'Afrique à partir d'une réappropriation de sa culture ?
Oui, je trouve qu'on voit ça dans des pays africains comme le Congo parce que moi j'ai la chance d'être éditeur à Douala. Et j'ai eu la chance de venir connaître Amadou Kourouma. Et que tous les jeunes écrivains sont en train de porter le vent de la modernité. Et ce n'est pas la tradition vernaculaire qui les intéresse. C'est d'être les écrivains d'aujourd'hui et de demain. Ce sont des écrivains qui ont lu James Joyce, Céline, Jean Paul Sartre. Ce sont des écrivains vraiment modernes.
C'est peut-être la lecture que vous faites de part votre profession, dans le domaine des arts et de la culture. Mais est-ce que cette vision est partagée par l'européen, le français et le Canadien ?
Oui, c'est le cliché qui est le plus répandu. Parce que les français ne connaissent pas assez la Côte d'Ivoire. Ils ont bien connu la Côte d'Ivoire du temps de Houphouët. Et je crois qu'il y a beaucoup de français qui étaient ici avec plus de 40 mille communautés. Qui apprécient la beauté du pays, la fraternité des gens, la capacité d'accueil. C'est très rare en Afrique. Je connais des pays africains. J'ai vécu au Tchad longtemps et dans d'autres pays africains. Mais particulièrement en Côte d'Ivoire, il y a une grande hospitalité.
Mais vous, Laure Adler, en tant que journaliste donc communicateur quel rôle avez-vous joué auprès des gens qui ne connaissent pas encore la Côte d'Ivoire ?
Mais c'est en rentrant que je vais expliquer au Quais d'Orsay, tout ce que j'ai vu et entendu. Pour qu'ils changent un peu d'attitude. Afin qu'ils fassent venir un peu plus d'écrivains en France. En leur consacrant plus des missions, parce que je pense qu'il n'y a pas assez de reconnaissance et d'autres part, je pense que nous avons, vous et moi, beaucoup de chance. Car je vais seulement faire mon rapport au Quais d'Orsay. Mais j'ai fait aussi des émissions que je vais passer à radio France inter. Sur Bruly Bouabré Angèle et Were Wêrê-Liking. Je vais enregistrer plus de personnes pour qu'elles soient attendues des français. Et je vais voir Jacques Toubon pour lui dire que le cinquantenaire c'est quand même la Côte d'Ivoire.
A part les enregistrements, est-ce que vous visiez d'autres domaines culturels. Est-ce que vous avez prévu des ateliers d'écriture ?
Je n'ai pas prévu les ateliers d'écritures. Je l'avais demandé, mais cela n'a pas été possible en raison des vacances. Mais je pense que je reviendrai. Par contre, je suis en relation avec des gens qui préparent un spectacle.
Vous êtes née en Côte d'Ivoire où vous y avez même passé une grande partie de votre vie. Est-ce que cette nostalgie n'a pas touché votre carrière d'écrivain et de journaliste ?
J'ai beaucoup appris. J'étais au Lycée Jean Mermoz. C'était une période bénie. Parce qu'il y avait autant d'enseignants français qu'ivoiriens et d'élèves français qu'ivoiriens. On s'entendait très bien. C'était une période extraordinaire. Pour moi, ça a beaucoup compté. Moi, je ne me sens pas française, je me sens africaine. Quand on a vécu de 0 à 18 ans ici, toutes vos racines sont là. Les lumières, les odeurs, les paysages et les arbres.
Interview réalisée par
Renaud Djatchi