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Politique Publié le mercredi 10 février 2010 | Nord-Sud

Les défenseurs des droits de l`Homme dénoncent

Me Traoré Drissa, président du Midh : “Ces choses nous replongent dans un repli identitaire”

Ce que nous pouvons dire, c'est que ces dénonciations se déroulent dans un cadre bien précis. Ils se déroulent dans le cadre du contentieux de la liste électorale. Il faudrait donc pour cela que chacun puisse respecter les règles établies. Celles-ci prescrivent que les uns passent d'abord devant la Commission électorale indépendante (Cei) qui examine et surtout qui prend toutes les références concernant celui qui vient porter la réclamation et les éléments dont il dispose. Ces règles stipulent ensuite que les recours devant les juridictions se fassent dans les règles de l'art. Ceci dit, il ne faudrait pas que ce soit les noms qui constituent la preuve de ce que la personne dénoncée ne serait pas de nationalité ivoirienne car ce que nous constatons, c'est que ce sont généralement des personnes porteuses de noms à consonance nordique qui sont dénoncées. Toutes choses qui nous replongent dans ce que la Côte d'Ivoire a connu de pire en son temps, c'est-à-dire le repli identitaire qui a conduit au coup d'Etat de 1999 et à cette crise armée qui ne finit pas depuis lors. Nous pensons donc que les uns et les autres devraient revenir à la sérénité et surtout régler les problèmes, conformément au mode opératoire que les acteurs se sont donné eux-mêmes. C'est dire qu'une première base qui est la liste de 2000, une deuxième base qui concerne les croisements faits par les opérateurs techniques sur des fichiers répertoriés par eux et éviter qu'on en arrive au déchirement de la population. Ce qui pourrait nous entraîner dans une guerre civile que nous ne souhaitons pas. Malheureusement, ce que nous voyons, constitue déjà des prémices qui doivent nous interpeller afin que nous mettions tous balle à terre.

Dr André Kamaté, président Lidho : “99% des noms de personnes dénoncées sont à consonance nordique”

Quand vous regardez la liste des personnes dénoncées, il y a près de 99% des noms qui sont à consonance nordique. Ça c'est dangereux pour l'équilibre de la société, surtout que cette dénonciation se fait à l'insu des concernés. Même si on veut comprendre la volonté de ceux qui veulent extirper les étrangers de la liste électorale, il faut au moins que les personnes visées soient informées, c'est-à-dire qu'on leur donne au moins le moyen de se défendre. La défense est un principe universel de la justice. Comment et pourquoi dresse-t-on ces listes. Avec quelles preuves le juge apprécie-t-il l'opportunité de la radiation, quand les concernés ou les présumés étrangers ne sont pas présents pour prouver leur innocence ? Je pense donc que c'est une pratique qui fait peur. Il y a lieu d'interpeller les uns et les autres à revenir à la raison. Pour la gestion du contentieux de la liste électorale, un mode opératoire consensuelle a été adopté. Ce mode opératoire fait connaître à la fois l'identité de celui qui dénonce et l'identité qui est dénoncée de sorte que celui qui est dénoncé puisse avoir un moyen de recours. En l'état actuel des choses, ce moyen de recours n'existe nulle part. Est-ce pour des raisons électorales qu'on va sacrifier l'unité nationale ? Est-ce nécessaire de brûler le pays pour faire gagner un candidat ? Je pense qu'il faut que les uns et les autres reviennent à la raison, que les politiciens comprennent qu'on ne peut pas abuser du peuple tout le temps. Il faut donc qu'on revienne rapidement au mode opératoire consensuel.

Normalement, pour que les requêtes soient recevables, il eut fallu d'abord qu'elles passent par la Cei. C'est du moins ce que dit la loi qui encadre les élections. Si quelqu'un reproche à un autre d'être un étranger, il se présente d'abord à la Cei locale avec les preuves qu'il a pour dire qu'un tel est étranger. La Cei à son tour affiche cette requête et le concerné est informé de ce qu'il y a une dénonciation le concernant. Ce qui lui permet lui aussi avec les preuves attestant sa nationalité. Si celui qui dénonce a fait du faux, il est passible de sanctions. Si par contre il a raison, alors, celui qui a fait du faux pour figurer sur la liste électorale est sanctionné. Voilà ce que prescrit en gros le mode opératoire adopté consensuellement par les acteurs de la sortie de crise. Nous ne comprenons donc pas pourquoi on saute cette étape de la Cei pour se référer directement au tribunal.

Ceci dit, je ne crois pas que les juges soient sous une quelconque pression. Je crois à l'indépendance de la justice dans notre pays. La seule motivation qui puisse peut-être pousser les juges à recevoir les requêtes, doit être liée à des sentiments. Sinon le juge est parfaitement formé, il est rompu aux mécanismes du droit. Il sait donc très bien que tant qu'on n'est pas passé par la Cei, celle-ci étant un préalable, la requête ne peut être reçue. Ce n'est quand même pas à un juge qu'on va apprendre cela. Le juge ne peut pas se prononcer sur une affaire si elle n'est pas d'abord passée par la Cei. Je ne crois donc pas à la thèse de la pression sur les juges. Je pense tout simplement que certains juges agissent par zèle.


Me Hervé Gouaméné, président de l'Apdh : “Je ne parlerai donc pas de dénonciation calomnieuse”
Dans le cadre de l'organisation des élections en Côte d'Ivoire, il est donné la possibilité à quelqu'un qui est inscrit sur la liste électorale de contester l'inscription d'une autre personne. Pour ce faire, il y a des règles de procédure. Celles-ci indiquent qu'il faut d'abord saisir la Cei. C'est ce qu'on appelle le recours administratif. C'est après avoir épuisé ce recours qu'on saisit le tribunal. Dans les recours, il y a également ce qu'on appelle les règles de preuves. Ces règles énoncent que c'est celui qui dénonce une inscription qui apporte la preuve que la personne dénoncée ne doit pas être sur la liste. Il est par ailleurs prévu des sanctions pour des contestations fantaisistes. Je ne parlerai donc pas de dénonciation calomnieuse à propos des dénonciations qui suscitent en ce moment débat. Maintenant s'il se trouve que certains individus contestent des inscriptions sur la liste électorale sans passer par la Cei ou sans fournir la moindre preuve, il appartient à la justice d'apprécier la recevabilité de la contestation et son bien-fondé. Tant qu'on empêchera la justice de siéger et de rendre la décision qui sied, on va se mettre dans un engrenage de violence inutile. Dans tous les cas, la loi est claire. Elle dit qu'il faut un recours préalable devant la Cei. Dans le recours que le contestataire adresse à la justice, il doit y avoir la décision de la Cei. Si le dossier de contestation ne contient pas de décision de la Cei, la conséquence est immédiate, le juge doit déclarer irrecevable la contestation.

Je ne sais pas exactement à Divo. Ce que je sais, c'est qu'il avait été prévu une audience au cours de laquelle la section de la justice de Divo devait statuer sur des cas de réclamations portant sur la liste électorale. Malheureusement, cette audience n'a pas pu avoir lieu du fait de manifestations publiques.

Si le procureur de Divo dit qu'il y aura des radiations, c'est que le dossier est fondé en droit. Cela veut dire que les contestataires ont fait des réclamations en bonne et due forme un recours devant la Cei et que ce recours a été rejeté et que le contestataire qui n'entendait pas s'arrêter là, a décidé de saisir la justice. Cela voudrait dire que la personne qui conteste a les preuves que la personne dénoncée n'a pas le droit de figurer sur la liste électorale. Sinon la décision du juge ne sera pas une décision de justice. Un procureur qui est le garant de la légalité ne devait pas pouvoir avancer des choses sans fondements juridiques.

Propos recueillis par Marc Dossa
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