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Politique Publié le vendredi 12 février 2010 | Nord-Sud

Crise à la CEI : Les parties ivoiriennes exposent leurs griefs au médiateur Compaoré

Les principaux protagonistes de la crise ivoirienne ont rencontré jeudi 11 février 2010 à Ouagadougou, le président burkinabé, Blaise Compaoré, facilitateur du dialogue politique interivoirien. Chacun lui a exposé ses griefs liés à la crise au sein de la Commission électorale indépendante (CEI).

Cette crise est née suite à des accusations du camp présidentiel selon lesquelles le président de la Commission électorale indépendante (CEI) Robert Mambé Beugré aurait inscrit en "toute illégalité" 429.000 personnes sur la liste électorale. "L'affaire Mambé et les 429.000 inscrits" s'est transportée à Ouagadougou chez le facilitateur. Hier jeudi 11 février 2010, alors que le monde entier célébrait les vingt ans de sortie de prison de Nelson Mandela embastillé à Robben Island pendant 27 ans par le régime ségrégationniste alors en place en Afrique du Sud, les principaux acteurs politiques de la crise ivoirienne se sont rendus chez le médiateur dans la crise ivoirienne à Ouagadougou. Ce voyage dans la capitale burkinabé a été décidé à l'issue d'un entretien vendredi entre le Premier ministre Guillaume Soro et M. Compaoré. Le chef du gouvernement qui est garant de l'Accord politique de Ouagadougou (APO) avait rencontré le médiateur dans la crise ivoirienne à qui il avait demandé de "s'impliquer personnellement" dans la résolution de la crise née des "429.000 incrits". Du camp présidentiel, -qui ne veut plus voir le président de la CEI, même en peinture-, aux Houphouétistes qui ne jurent que par Mambé pour offrir à la Côte d'Ivoire sa première élection présidentielle véritablement ouverte, en passant par le mis en cause himself, tout le monde est passé voir le président Compaoré dans son palais présidentiel de Kossyam. Temps mis par chaque partie: environ une heure et demie.

Tout a commencé par les disciples du président Laurent Gbagbo. Conduit par le patron du Front populaire ivoirien (FPI), Pascal Affi N'Guessan, le camp présidentiel a dit au président Compaoré qu'il n'avait plus confiance au président Mambé accusé d'avoir fraudé en inscrivant à l'insu de la Sagem Sécurité et de l'Institut national des statistiques (INS), 429.000 personnes sur la liste électorale en cours de confection alors qu'il n'en avait pas le droit. "Nous avons réaffirmé au facilitateur que le président Mambé ne jouit plus de la confiance de la majorité présidentielle, que nous ne lui faisons plus confiance, que nous considérons qu'il est une menace pour la paix et pour les élections libres et transparentes et qu'il faut donc qu'on le remplace pour que le processus (électoral) reprenne sur des bases stables dans l'intérêt de tous les acteurs", a déclaré M. N'Guessan à la presse peu avant de quitter Ouagadougou.

Comme on le constate, le FPI est clair. Mambé doit partir. Il est même devenu "une menace pour la paix" en Côte d'Ivoire et son processus électoral, foi de Affi. Mais la démission de Mambé n'est pas la seule révendication du FPI. Les "frontistes" réclament également une refonte totale de la CEI.

"Au-délà de M. Mambé, il faut rééquilibrer la Commission électorale indépendante, parce que manifestement, une commission électorale chargée d'organiser la compétition entre les acteurs politiques ne peut pas être viable si elle est composée des mêmes acteurs", a-t-il poursuivi.
"On ne peut pas être juge et partie à la fois", a lancé M. N'Guessan.

"Si on maintient l'organisation actuelle, les risques de futurs dérapages ne seront pas écartés, chaque acteur peut être tenté d'utiliser sa position pour essayer d'influencer les choses au profit de son camp", a justifié le premier et unique Premier ministre FPI du président Gbagbo. "La meilleure façon de stabiliser la Commission électorale est de lui donner les moyens de sa neutralité et de son impartialité, c'est de réorganiser le fonctionnement interne notamment de donner droit de vote à tous les autres acteurs qui sont neutres, qui relèvent de la société civile de manière à ce qu'ils servent de régulateurs internes avec les représentants des partis et que la commission redevienne véritablement impartiale", a-t-il proposé.

Mambé s'accroche

Face à cette demande insistante et principielle du FPI, le mis en cause rappelle qu'il a été élu et qu'il entend faire son travail jusqu'au bout. "Je vous ai dit que je ne démissionnais pas. Un travail m'a été confié, je le fais dans le respect du mécanisme établi", a-t-il dit.

"J'ai été élu", insiste-t-il encore comme pour rappeler au camp d'en face que le président Gbagbo s'est lui aussi basé sur son élection en 2000 pour se maintenir au perchoir malgré l'expiration de son mandat. "Un travail m'a été confié, je le fais dans le respect de tous les mécanismes qui ont été établis", a-t-il poursuivi. Rappelant que la Côte d'Ivoire est partie d'une situation où il y avait des problèmes d'identité pour arriver à une situation où 5.300.000 personnes sont assurées qu'elles auront des cartes d'identité et 1.033.000 attendent d'en avoir si tout va bien.

"Nous avons fait du parcours. Nous sommes à près de 95% du chemin. Le travail qui m'a été confié, il faut l'achever dans de bonnes conditions en faisant en sorte que tous ceux qui savent apprécier de façon sereine les résultats et la qualité du résultat puisse en rendre témoignage", a-t-il indiqué. Pour le président de la CEI, ses déboires actuels relèvent à la limite du normal. "Pour faire des élections, il y a toujours, à un moment donné, ce type de pression, ce type de situation mais il faut savoir rester serein mais travailler en ayant conscience qu'on le fait en son âme et conscience parce que c'est la clé", a-t-il dit. "Il faut travailler en son âme et conscience et ne pas chercher à favoriser qui que ce soit en mettant tout le monde sur le même pied d'égalité", a-t-il indiqué.

Même si le président Mambé dit ne pas connaître qui sont ses soutiens face à la fronde déclenchée contre lui par le FPI, il sait qu'il peut compter sur celui indéfectible des houphouétistes qui, soit dit en passant, sont des anciens camarades de combat. "Le Rassemblement des houphouétistes vient d'être reçu par le président (Blaise) Compaoré pour faire connaître sa version des faits, sa compréhension de la situation et c'est ce que nous avons fait avec le président Compaoré. Nous lui avons dit les principaux problèmes qui se posaient sur le processus (électoral). Il y a le fait que la Commission électorale indépendante est mise en cause à partir d'une disquette de travail qui comporterait 429.000 personnes; lesquelles n'ont pas été intégrées à la liste établie par l'INS et la Sagem Sécurité mais qui était un document de travail qui se trouvait à l'intérieur de la Commission électorale indépendante", a expliqué le président du directoire du RHDP (Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix, opposition), le professeur Alphonse Djédjé Mady.

"Le camp présidentiel en a fait un sujet de guerre pour demander la démission du président de la CEI, Robert Mambé Beugré. L'opposition qui ne sait pas encore pour le moment quelle est la faute qu'on reproche à M. Mambé, dit non, parce que le président Mambé et la CEI n'ont commis aucune faute qui soit jusque-là justifiée qu'on nous a prouvée et que ce faisant on ne peut partir de prétextes pour bloquer le processus qui est en cours", a déclaré M. Mady. "Nous pensons que les Ivoiriens doivent faire preuve de lucidité, surtout les acteurs politiques pour que nous allions effectivement vers la sortie de crise sans chercher d'alibi, sans chercher de prétexte", a-t-il poursuivi.

Pour le secrétaire général du PDCI/RDA, ce qu'il faut comprendre c'est que le traitement de ce dossier est moins un fait électoral qu'une question d'identité. "Le vote n'est pas obligatoire en Côte d'Ivoire, donc que vous alliez voter ou pas, ce n'est pas ça le problème, mais c'est d'avoir droit à une nationalité et de ne pas se voir frustrer de cette nationalité et de ne pas être un apatride", a-t-il déclaré.

"Le problème de fond c'est celui-là qu'il faut régler avec sérénité. On ne peut pas, à partir d'une patronymie, sans avoir consulté, sans avoir vu les personnes faire ce qu'on fait sans oublier que le mode opératoire a prévu que les 5.392.000 personnes qui sont sur la « liste blanche » si quelqu'un veut les récuser c'est le récusateur qui vient avec les preuves. Par contre, la liste dite grise de 1.033.000 personnes, ceux-là qui sont dessus, leur nationalité n'a pas été retrouvée. Ceux-là s'ils veulent prouver qu'ils sont Ivoiriens, c'est à eux d'apporter la preuve de leur nationalité, donc, il ne faudrait pas inverser les choses. On ne peut commettre des juges d'office et regarder des listes, sélectionner des noms et puis les radier, c'est pas normal", a-t-il déclaré.
Cette explication remet en cause les personnes radiées par la justice à Divo lors d'un procès auquel elles étaient pour la majorité absentes.

Après avoir écouté tous les arguments qui militent en faveur du départ de M. Mambé et les contre-propositions de l'opposition ivoirienne, le président Compaoré a promis de faire des propositions "pertinentes" pour sortir de l'impasse dans laquelle le processus électoral est plongé en Côte d'Ivoire. "Le président Compaoré ne nous a pas appelés pour le moment pour nous proposer quelque chose. Il nous a appelés pour nous écouter. Il nous a bien écoutés", a dit M. Djédjé Mady.


Andy Traoré à Ouaga
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