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Société Publié le samedi 20 février 2010 | Nord-Sud

Hôpitaux publics : Les femmes césarisées fuient, faute d’argent

La césarienne est de plus en plus fréquente dans nos hôpitaux. Compte tenu du coût élevé pour la majorité des Ivoiriens qui vivent sous le seuil de pauvreté, certaines femmes fuient les hôpitaux sans soins, après la césarienne..

L’hôpital général d’Abobo est l’un des établissements sanitaires les plus fréquentés dans le district d’Abidjan. Mardi dernier, quand nous nous y rendons, le bureau d’entrée grouille de personnes. Venus nous renseigner sur le nombre de femmes qui, après l’accouchement, quittent les lieux sur la pointe des pieds, sans régler la facture, nous nous heurtons au silence des agents du bureau des entrées. Nous décidons de nous adresser aux agents de santé. M. A, aide-soignant exerçant au sein de cet hôpital nous avoue qu’effectivement, il y a des femmes qui fuient les hôpitaux, mais le nombre est plus élevé chez celles qui ont subi une césarienne. « Il y a quelques mois, une femme a fui pendant la nuit avec son bébé, 5 jours après son opération», confesse-t-il. Selon lui, le manque d’argent est la raison pour laquelle cette femme a déménagé à la cloche de bois de cet établissement sanitaire. Un autre cas pareil s’est produit à Port-Bouët, à l’hôpital général l’année passée. C’était une jeune élève, d’après une source exerçant dans cette structure sanitaire. Elle s’est enfuie avec sa mère et sa fille dès qu’elle a pu marcher. « Sa fuite était probable, dans la mesure où ses parents avaient des difficultés à payer les soins. La césarienne coûte cher. Du kit aux soins, en passant par la chambre d’hospitalisation. Ce sont toutes ces dépenses réunies qui effraient énormément les femmes enceintes et leurs familles », a indiqué la source. Avant de poursuivre que cette technique d’accouchement prend de plus en plus d’ampleur dans nos cités.

Pourquoi tant de césariennes en milieu urbain ?

Ce même agent confie que, sur 5 fem­mes qui viennent accoucher, une d’entre-elles est césarisée. Les hôpitaux généraux ne sont pas les seuls endroits où on pratique couramment les césariennes. Les centres hospitaliers universitaires (Chu) sont réputés pour la césarienne. Autrefois, considérée comme le dernier recours pour sauver la mère et son bébé, la césarienne est désormais pratiquée si souvent que beaucoup la perçoivent comme une opération de routine. C’est comme si l’on ne donnait plus aux femmes le temps d’accoucher. Un autre travailleur du Chu de Cocody qui a requis l’anonymat du fait de la sensibilité du sujet, s’en plaint : « j’ai l’impression que les femmes ne savent plus ou ne peuvent plus accoucher par voie basse. Dès qu’il y a un petit problème, elles sont aussitôt envoyées au bloc pour subir une opération ». Interrogé sur les nombreuses césariennes qui s’y pratiquent, un médecin explique que l’opération n’est faite que s’il y a nécessité. Plusieurs raisons expliquent l’opération qui consiste à extraire directement le bébé du ventre de sa mère. Lorsque le bassin de la mère est trop étroit, l’enfant est en mauvaise position (présentation transversale, cordon ombilical mal placé), ou rencontre un obstacle à la sortie (fibrome), utérus mal formé ou encore la mère est dans un mauvais état de santé: diabète, herpès génital, hypertension artérielle, insuffisance rénale ou maladie au cours de la grossesse. La césarienne est obligée. Selon lui, certaines de ces causes se décèlent lors de la consultation du 8ème mois. La césarienne est alors programmée à l’avance. Mais il y a d’autres causes qui ne se révèlent que le jour J. il faut alors intervenir au pied levé. « On nous accuse souvent à tort. Nous ne faisons que la césarienne pour sauver la vie de la mère et de l’enfant », se justifie-t-il. Il a par contre reconnu le taux très faible de césariennes en milieu rural malgré les nombreux accouchements. A l’opposé, il indique que c’est en cela que les taux de mortalité maternelle et infantile sont plus élevés en milieu rural qu’urbain.

Césarienne, fonds de commerce ?

L’accouchement à la césarienne semble constituer un fonds de commerce pour les médecins des hôpitaux publics. Selon nos investigations, il ressort que la plupart des femmes enceintes qui y vont, sont contraintes d’accoucher par césarienne après le refrain du poids élevé du bébé à mettre au monde ou autre. Après cette formule, commence le calvaire de la femme en travail et de ses parents. Par exemple, au Chu de Cocody, avant toute chose, il faut payer le kit de césarienne qui s’élève à 60.000 Fcfa, la location du bloc à 50.000 Fcfa et l’hospitalisation. Le coût des chambres varie entre 2.000 Fcfa et 10.000 pour 5 jours d’hospitalisation. Ce qui signifie que pour subir une césarienne, il faut au moins 120.000 Fcfa. Sans compter la prescription des produits pour les autres soins. C’est au niveau des soins que surviennent les exploits mercantiles des agents de santé. Une victime raconte : « Nathalie, ma femme a déjà fait deux enfants sans problème. Pour le 3ème, il y a quelques mois, j’ai eu la malchance de venir au Chu de Cocody avec elle. Dès que nous sommes arrivés, après les premières consultations, le docteur nous a dit que le poids de l’enfant, l’oblige à nous conseiller la césarienne ». Mais voyez-vous, à la naissance, le poids du bébé est totalement inférieur à ceux de ses deux frères nés à Adzopé pendant que j’y exerçais », a-t-elle déclaré. Selon l’enseignant, les médecins prescrivent plein de médicaments. Et lorsque je me lamentais, ils disaient que quand on a une femme qui est enceinte, on doit préparer au moins l’argent de césarienne dans la mesure où on ne sait pas comment un accouchement se passe. Seule la gratuité de soins pour l’accouchement à la césarienne pourra permettre de sauver des vies humaines étant donné qu’elle va arrêter la course du gain facile de certains médecins indélicats et cupides.


Adélaïde Konin
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