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Politique Publié le lundi 29 mars 2010 | Le Nouveau Réveil

Vaste escroquerie au mouvement patriotique “Akounda Ouflè” / Raoul Kahoulou (ex-associé du président Kouamé N`guessan) : “Voici comment Kouamé N’Guessan a réussi à gruger des milliers de personnes”

Après l'arrestation de Kouamé N'guessan, président du mouvement patriotique Akounda Ouflè, ses ex-partisans confirment l'existence effective de malversations. Dans cette interview, M. Kahoulou Raoul en donne les preuves, soutient l'adhésion de certaines hautes autorités de ce pays, dénonce la légèreté de l'Etat dans cette affaire et demande que le prévenu soit jugé au Plateau et non à Yopougon.

M. Kahoulou Raoul, vous avez travaillé avec M. Kouamé N'guessan dans le cadre de Akounda Ouflè. Comment est venue l'idée de créer cette structure ?

Avant que je ne vienne, Akounda Ouflè existait déjà. J'ai appris l'existence de ce mouvement à travers les médias. La télévision ivoirienne faisait passer des spots. J'ai apprécié les idées parce qu'à travers cette organisation, les Ivoiriens pouvaient effectivement s'autofinancer. Au départ, l'esprit était bon. Voilà pourquoi j'ai adhéré.

Aujourd'hui, c'est le divorce. Vous avez quitté Akounda Ouflè et son président Kouamé N'guessan. Qu'est-ce qui s'est passé ?

J'ai adhéré à 325.000 francs pour avoir un prêt d'un million de francs Cfa. Comme moi, il y a eu plusieurs milliers d'Ivoiriens qui ont adhéré. Mais finalement, j'ai découvert que c'était une arnaque. Parce que chaque fois que les gens adhéraient, ils n'étaient pas financés. Sur mille personnes par exemple, il organise une cérémonie de financement, il donne de l'argent à trois personnes. Les images sont récupérées et diffusées par la Rti et cela attire encore d'autres personnes. C'est ce que j'ai constaté pendant plus d'un an que je suis resté avec lui. Je suis donc parti parce j'ai découvert qu'il n'y avait rien de sérieux. Il profitait de cette organisation pour soutirer de l'argent à la population.

Vous parlez d'arnaque. Pourtant, il y a eu des souscripteurs qui ont été financés. Certains ont eu des taxis, des camions Kia ?

C'est ce que j'explique. Dans le projet transport, il promet un taxi pour 600 000 francs. Ce taxi est géré par le mouvement, le temps qu'il retire le prix d'achat. C'est-à-dire mille jours après pour devenir propriétaire du taxi. Mais entre-temps, pendant les mille jours que le taxi est géré, on te reverse 5000 francs par jour. Donc 35000 francs par semaine. C'est ce qu'il dit. A ce projet, 2000 personnes ont adhéré. 2000 personnes multipliées par 600 000 francs, cela fait des milliards, 1,2 milliard pour être précis. Logiquement, il devrait avoir plus de 2000 taxis puisqu'au bout de trois (3) ans, chaque personne doit avoir son taxi. Mais jusqu'à ce jour, il n'a acheté que dix (10) taxis.

Ce sont ces dix (10) taxis qu'il filme et fait croire à la population que c'est une première livraison et que le reste va venir. Les dix (10) taxis ont été achetés pour arnaquer les populations. Si Kouamé N'guessan dit le contraire, qu'il nous apporte les preuves.

Il y a aussi d'autres projets qui ont été initiés. Les a-t-il exécutés ?
Il y a le cas de construction. Avec 325.000 francs, le mouvement propose un modèle de maison. Avec ton accord, on évalue le coût et on construit la maison. Le souscripteur paye 11000 par mois jusqu'à épuisement du coût de la maison. C'était une idée noble. Plus de 1500 personnes ont adhéré à ce projet. Mais aucune maison n'est sortie de terre. Qu'on me montre là où une seule maison est sortie de terre. Je dis bien qu'aucune maison n'est sortie de terre. C'est cela qui a fait démissioner M. Koffi Joël qui était le chargé de la Construction au niveau du mouvement patriotique. Tout cet argent qui a été ramassé par Kouamé N'guessan à raison de 325.000 francs par personne multiplié par plus de 1500 personnes, vous comprenez combien de centaines de millions cela fait. Ce projet n'a pas été repris. Il n'en a plus parlé.

Qu'est-ce qu'il fait avec cet argent que lui ont confié des Ivoiriens ?

C'est ce qui nous a poussé à ne plus travailler avec lui. En réalité, il était dit que nous allons constituer un fonds de garantie à la Bni. Pour cela, le mouvement a ouvert un compte dans cette banque. Toutes les adhésions, tous les apports qui se trouvaient au niveau du mouvement devraient être virés sur le compte ouvert à la Bni pour constituer un fonds de garantie en vue de demander à la Bni de financer le projet des membres. Ce compte a été effectivement ouvert, mais le fonds de garantie n'a pas été constitué. Donc personne ne sait où cet argent est parti.

Seulement, nous voyons que Kouamé N'guessan roule dans des Hummers, il a des fonds, des biens pour lui seul. Aucune personne en dehors de moi ne peut dire là où l'argent est parti. Kouamé N'guessan n'a jamais fait une assemblée générale, ni bilan moral, ni financier. Il était la seule personne qui gérait l'argent. Mon rôle de président de coordination consistait à sensibiliser la population de la commune d'Attécoubé à adhérer au mouvement. J'ai fait adhérer plus de 69 personnes pour les 12 mois que j'ai duré avec lui. Mais d'autres ont fait adhérer plus de 1000 personnes. On gérait ensemble le mouvement mais, lui seul gérait l'argent. Et c'est ce que nous avons revendiqué. J'ai revendiqué une assemblée générale bilan pour savoir combien de membres nous sommes actuellement et quel est le dernier membre, combien d'argent est rentré, combien qui est sorti, ce qui est sorti, cela a servi à quoi, ça revient quand et comment ? C'est ce que j'ai revendiqué et cela a créé des désaccords entre lui et moi. Quand je suis parti, d'autres coordinateurs ont suivi.

Vous n'êtes pas parti seulement. Puisque vous avez porté plainte et contribué à le faire arrêter.

Je ne peux pas le nier puisque j'ai fait adhérer plusieurs personnes. Et ces dernières ont commencé à porter plainte contre moi. J'ai avec moi plusieurs convocations que je lui ai présentées. Elles pensent que je suis en complicité avec lui. J'ai été obligé d'être solidaire de ces personnes pour montrer que je ne suis pas son complice. Il y a eu des plaintes collectives mais aussi individuelles. Le tribunal de Yopougon nous a donné un soit-transmis que nous avons envoyé à la police économique. Cela a duré, nous n'avons pas eu de suite. J'ai été obligé de porter une autre plainte au niveau de la police criminelle et plusieurs autres au tribunal du Plateau.

C'est lorsque les gens ont vu que les plaintes étaient nombreuses sur la même personne qu'ils ont compris que l'affaire a commencé à prendre de l'ampleur. C'est ainsi que la police s'en est saisie et a commencé à faire des investigations.

Combien de plaintes ont été déposées au total ?

Pour être honnête, les plaintes n'étaient pas déposées à Abidjan seulement. Il y a d'autres coordinateurs qui sont à Abidjan et qui sont toujours poursuivis. Il y a celui de Bonoua qui fait toujours l'objet d'arrestation. Il y a plusieurs plaintes. C'est pour ne pas être désordonné que j'ai préféré que nous les responsables qui avions travaillé avec lui et qui n'étions pas d'accord avec son système de fonctionnement, qu'on se mette ensemble pour faire une plainte collective.

C'est depuis 2008 que les souscripteurs ont commencé à porter plainte. Comment se fait-il que c'est maintenant que la police met fin à sa liberté ?

C'est ce que nous n'avons pas compris. J'ai adhéré le 14 janvier 2009 à l'association. Bien avant, il y avait des plaintes contre lui. Mais lorsque j'ai adhéré, il a été arrêté aussitôt. Je l'ai trouvé dans sa cellule de prison pour lui demander les raisons de son arrestation. Il m'a dit que c'est le ministre Amani N'guessan qui l'a fait arrêter parce que, selon lui, Amani N'guessan l'accuse d'utiliser l'appellation professeur N'guessan, c'est-à-dire son nom pour soutirer de l'argent aux Ivoiriens.

Ça m'a paru injuste. Puisque nous sommes tous des patriotes. On a lutté pour le pays, alors je ne comprenais pas pourquoi un ministre fait arrêter un patriote qui veut aider les Ivoiriens. On a mené des démarches auprès de certains leaders de la galaxie patriotique pour voir ce qui se passait réellement. Nous avons tout fait pour qu'il soit mis en liberté provisoire. On a payé une caution de 100.000 francs. C'est de cette liberté qu'il bénéficie. Mais on a découvert par la suite qu'il n'était pas sérieux parce qu'il a repris les mêmes actes pour lesquels il a été arrêté. Nous avons même appris que le motif pour lequel il avait été arrêté était très loin de ce qu'il avait dit. On a appris qu'il a grugé plus de 1500 familles. Parce qu'il avait créé un projet qu'il appelait "La cellule familiale". Tout le monde adhère et fait adhérer tous ses enfants à hauteur de 33.500 francs par personne. Donc c'était des centaines de millions qu'il a grugées. Il promettait de donner 300.000 Fcfa par mois. Il a dit que cet argent allait servir à créer de l'emploi, des entreprises pour le retourner aux Ivoiriens. Ce qu'il n'a pas fait. Et c'est quand il ne payait plus les familles que des plaintes ont été portées contre lui et il a été arrêté. J'ai découvert qu'il n'était pas honnête.

Vous dites que le président du mouvement patriotique n'était pas honnête. Mais pourquoi, quelqu'un qui n'est pas honnête est-il protégé par des autorités de ce pays ?

Il faut dire les choses telles qu'elles sont. Je venais de dire que quand il avait été arrêté, nous avons vu certaines personnes pour intervenir pour qu'il soit mis en liberté provisoire. Mais lorsqu'il est sorti, il a utilisé les noms de certaines personnes qui l'ont aidé à sortir, que ce sont ces personnes qui sont ses soutiens et que personne ne peut le mettre en prison.

Est-ce que vous pouvez être plus précis ? Quelles sont ces personnes ?

Je préfère taire les noms de ces personnes. Ce sont des autorités qui, honnêtement, sans arrière-pensée, nous ont aidés.

Kouamé N'guessan va être déféré devant le parquet. Vous demandez que ce ne soit pas ne soit pas le parquet de Yopougon. Pourquoi êtes-vous inquiets ?

Lorsque le projet transport a été initié, les Ivoiriens ont adhéré de bonne foi. Et c'est le président lui-même au siège du mouvement qui a annoncé pour la première fois que le procureur Daléba vient d'adhérer à ce projet officiellement. Il l'a dit. Ce jour-là, des journalistes étaient là. Parce qu'il y a des journalistes membres du mouvement, il y a des policiers, des avocats, des greffiers. Mais il a pris le micro pour dire qu'un gros morceau vient d’entrer dans le mouvement patriotique Akounda Ouflè. Et que c'est le procureur Daléla qui va adhérer au projet transport. Il l'a dit publiquement. Dans ce projet, lorsque les gens ont commencé à grogner parce qu'ils ne recevaient pas leur argent, il a fait savoir que le procureur Daleba recevait son argent régulièrement parce qu'il a adhéré au projet transport à raison de dix (10) véhicules. Quand les gens ont commencé à grogner, nous avons écrit au procureur Daleba pour lui dire ce qui se passait dans le mouvement. Il nous a reçus à plusieurs reprises. On a porté plainte au tribunal de Yopougon, il nous a donné un soit-transmis. Mais longtemps après, Kouamé N'guessan n'a jamais été arrêté. Dans son audition après sa récente arrestation, il a dit demander qu'on le défère à Yopougon. Or, nous sommes conscients que le procureur Daleba a adhéré au projet transport et que d'après Kouamé N'guessan celui-ci reçoit régulièrement son argent. Le procureur Daleba ne s'est jamais plaint. Ce sont les populations qui ne reçoivent pas leur argent qui se plaignent. Il a demandé qu'on l'envoie au parquet de Yopougon. Nous ne sommes pas dupes. Nous demandons qu'on le défère pas Kouamé N’Guessan au parquet de Yopougon.

Vous ne faites donc pas confiance au procureur Daleba ?

Non, ce n'est pas que nous n'avons pas confiance au procureur Daleba, mais c'est tout naturellement un homme qui juge. L'esprit du doute existe. Même au niveau de la justice, on libère des gens au bénéfice du doute. Le doute plane dans notre doute. Mais nous n'accusons pas le procureur Daleba.

Et si c'était le cas, que feriez-vous ?

Si c'est le cas, comme la justice c'est la justice, nous allons regarder le procureur Daleba. C'est lui le procureur du tribunal de Yopougon. On a énuméré nos craintes, c'est à lui de dire le droit. Il est conscient de ce qui se passe sur le terrain. Qu'il sache que toute la Côte d'Ivoire le regarde.

Qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse du président d'Akounda Ouflè ?

Il a grugé plus de 1000 personnes. Nous demandons qu'il paye pour les actes qu'il a posés. Que le droit soit dit, qu'il rembourse l'argent des Ivoiriens. On estime que l'argent est là.

Vous les coordonnateurs, est-ce que vous avez peur de votre sécurité ?

Bien sûr. Moi, j'ai peur. Le premier vice-président du mouvement qui est un étudiant a été menacé par Kouamé N'guessan. Il lui a envoyé des chiens de garde et a menacé de l'assassiner. Moi-même, N'guessan m'a aussi menacé, il a dit que je joue avec ma vie.

Est-ce que vous avez un appel à lancer aux autorités ?

Le président de la République a demandé qu'on se prenne en charge. On crée une structure dans laquelle un individu utilise l'argent et en fait ce qu'il veut. L'autorité devrait agir immédiatement.

Elle a laissé faire

Nous sommes tous des patriotes, nous avons lutté pendant longtemps mais, il faut dire que les autorités ont laissé faire pendant longtemps. Ce qui m'écœure encore, c'est qu'il y a certaines autorités qui sont en train de manigancer pour sa libération. Un député était à la police criminelle pour cela. Je lance un appel aux autorités pour qu'elles prennent leur responsabilité. On a toujours négligé ce qui peut créer un soulèvement. Les preuves existent qu'il y a eu malversations.

Interview réalisée par Djè Km
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