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Économie Publié le vendredi 16 avril 2010 | Le Nouveau Réveil

Crise du carburant et grève des transporteurs en Côte d`Ivoire / Anaky Kobena parle au collectif des fédérations des syndicats de chauffeurs et à tous leurs camarades grévistes : “Exigez au moins 70F de réduction sur le gasoil et le super”

Le MFA, par ma voix, vous adresse ses sincères félicitations et tous ses encouragements à tenir bon et à persévérer dans cette lutte que vous venez d'engager pour refuser cette énième augmentation du prix du carburant à la pompe (Gasoil : 645 FCFA le Litre et Super : 779 FCFA le Litre).
Votre action est d'abord noble parce que vos revendications ne concernent pas que la seule corporation des chauffeurs ou le milieu professionnel des transports publics, (Gbakas, taxiscompteurs, wôro-wôros, etc.), mais vous prenez surtout la défense des pauvres indigents de Côte d'Ivoire, qui ne font que survivre au quotidien, et que la hausse généralisée des prix qui s'annonce, va plonger dans une détresse insupportable !
Toutes les personnes vivant sur le sol ivoirien sont concernées et touchées par l'augmentation du prix des hydrocarbures, et même le paysan ou la ménagère qui vivent aux fins fond de la savane ou de la forêt, qui n'empruntent que rarement une voiture, un car ou même une mobylette, se trouveront atteints par cette mesure, lorsqu'ils se rendront dans une boutique ou au marché pour faire leurs provisions de sel, de sucre, de savon, ou de riz, ou à la pharmacie pour acheter du paracétamol ou d'autres médicaments. Car, par un effet d'entraînement, il est de coutume que tous les prix des biens et services sans exception augmentent de façon incontrôlée lorsque le prix de l'essence connaît une hausse.
Tout de même, population ivoirienne, pourquoi dans notre pays, où le salaire minimum se situe en dessous de 40 000 FCFA par mois, devons-nous supporter un prix du carburant presque égal à celui pratiqué en France, pays industrialisé et développé, où le salaire minimum est de 1 343 Euros par mois, soit 886 000 FCFA, vingt-deux fois plus élevé que chez nous ? N'est-ce pas nous faire mourir à petits feux ?

Responsables des Syndicats de Chauffeurs de Côte d'Ivoire,
Votre action est noble, belle, mémorable même, et votre combat juste. Vous faites déjà notre fierté à tous, parce que vous avez pu résister jusqu'à ce jour aux menaces et autres intimidations, mais surtout au " choc " des épaisses enveloppes de billets de 10 000 FCFA, qui est l'arme fatale des négociateurs de Laurent GBAGBO toutes les fois que des syndicalistes revendiquent avec fermeté. Ils portent ainsi l'estocade finale pour briser la volonté et la dignité des leaders ou porte paroles de nos syndicats !
En donnant à ces despotes arrogants et mal inspirés cette leçon de dignité, c'est en même temps toute la Côte d'Ivoire que vous interpellez, car vous nous enseignez à tous que pour l'intérêt public, il faut savoir refuser le " mangement ".

Chauffeurs de Côte d'Ivoire,
Vous avez demandé, entre autres, une baisse de 145 FCFA du prix du litre de Gasoil et vos interlocuteurs ne vous concèdent qu'une maigre réduction de 15 FCFA, avec à notre avis, beaucoup de désinvolture et un manque de considération qui frôlent le mépris.
Mais, maintenant ou plus tard, repartez à l'attaque et, dans vos prochaines discussions, au cas où vous accepteriez de faire des concessions, il y a un seuil en dessous duquel, vous ne devriez pas céder : exigez une réduction minimale de 70 FCFA sur le litre de Gasoil et de Super.
Le Chef de l'Etat n'a pas le droit de vous opposer une fin de non recevoir pour les raisons suivantes :

1. PAIEMENT DE LA DETTE DE LA SIR
Les consommateurs consentent au paiement de 40 FCFA par litre d'essence ou de gasoil acheté, en vue de contribuer au paiement des dettes de la Société Ivoirienne de Raffinage (SIR).
Mais, la SIR étant déjà rémunérée par une marge de raffinage calculée à 5% du prix du brut augmenté du fret, de l'assurance et des frais d'approche, elle est donc déjà payée pour son travail d'industriel, et cela doit permettre de couvrir tous ses coûts, et de raffinage, et financiers.
Mais, surtout, la PETROCI, maison-mère de la SIR, a la responsabilité juridique de répondre à ses besoins de financement.
La charge n'incombe donc pas au consommateur ou au citoyen de payer cette dette ; il faut procéder à la suppression pure et simple de ce prélèvement injustifié de 40 FCFA le litre.

2. DOTATION AUX FORCES ARMEES
Les consommateurs paient encore, 10 FCFA par litre, pour les Forces Armées.
Mais, le financement du carburant de l'armée doit être imputé au budget de l'Etat. Et s'il était nécessaire de lever une contribution citoyenne exceptionnelle pour une urgence spécifique concernant les Forces des Défense et de Sécurité (FDS), elle devrait s'imposer à tous les citoyens et non aux seuls automobilistes.
Il faut donc supprimer ce prélèvement de 10 FCFA par litre de carburant, qui pourrait s'apparenter à des pratiques qui n'honorent personne. Nous voulons une armée propre.

3. REDEVANCE TROISIEME PONT
Sur chaque litre de carburant, les automobilistes paient 20 FCFA de contribution à la construction du troisième pont.
Mais, l'édification d'une telle infrastructure relève de l'investissement public, et, si les moyens lui font défaut, l'Etat peut conclure un BOOT (Build, Own, Operate and Transfer) avec des groupes privés qui peuvent prendre tout en charge et se rémunérer sur une certaine période en encaissant des droits de passage aux seuls utilisateurs de l'ouvrage.
Ce prélèvement de 20 FCFA ne s'imposant pas, il convient également de le supprimer.

Chauffeurs, Automobilistes et Populations de Côte d'Ivoire,
Les 70 FCFA de réduction sur le litre de Super ou de Gasoil, qui représentent le cumul de ces trois taxes abusivement prélevées, sont la revendication citoyenne minimale à exiger des autorités en cette période de grave crise économique et sociale que traverse notre pays.
Aujourd'hui, tout doit être conçu, étudié et développé en Côte d'Ivoire pour faire baisser le coût de la vie et ne pas fragiliser encore plus le maigre pouvoir d'achat des populations ivoiriennes.
Et puisque les prix du carburant et des transports sont intimement liés - leurs augmentations ont une incidence sur quasiment tous les prix des biens et services - il est plus que jamais nécessaire de penser à d'autres mesures à moyen terme, dont, entre autres, une étude sur le rôle et les missions de la PETROCI qui semble afficher une santé financière insolente par rapport aux problèmes qui assaillent les ivoiriens, puisqu'elle a distribué en 2009, près de 35 milliards à son actionnaire principal qu'est l'Etat, a déjà pu injecter près de 100 milliards dans la construction du pipeline devant relier Abidjan à Bouaké, et multiplie les acquisitions immobilières et autres prises de participations.
Il s'impose également que l'on remette même en cause toute la philosophie de tarification des hydrocarbures, à la lumière des informations selon lesquelles, à la sortie de raffinage à la SIR, le litre de Super coûte 295,167 FCFA, et le litre de Gasoil est vendu à 290,510 FCFA !
En taxant trop lourdement les hydrocarbures, l'Etat de Côte d'Ivoire lui-même ne contribue t-il pas à susciter la contrebande et la fraude mais surtout à plomber l'économie, à rendre nos produits moins compétitifs et alimenter un coût de la vie trop élevé pour les maigres salaires et revenus de nos populations qui ne sont pas indexés au prix du carburant ? Ne tue-t-on pas la poule aux œufs d'or ?

FIERS CHAUFFEURS DE CÔTE D'IVOIRE,
Je vous dis encore BRAVO et FELICITATIONS. Cette lutte, que doit prendre à son compte l'ensemble du peuple ivoirien, ne fait que commencer. La lutte contre la vie chère doit devenir, aujourd'hui, dans cette Côte d'Ivoire sinistrée, une cause et un enjeu national.
Vous venez de montrer et de démontrer à toute la Côte d'Ivoire ce qu'il y a à faire, et comment le faire. Vous venez d'ouvrir l'autoroute de la libération et de la réhabilitation de ce pays.
ENCORE BRAVO !
Fait à Abidjan, le 15 avril 2010
Innocent Kobéna ANAKY
Président du MFA
Candidat à l'élection présidentielle




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