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Économie Publié le mercredi 21 avril 2010 | Le Patriote

Interview / Diakité Yacouba (président du CFSCP-CI): "Notre lutte a été vendue à 20 millions"

© Le Patriote Par DR
Hausse du prix du carburant - Les transporteurs observent un arrêt de travail à Abidjan
Après la reprise du travail des transporteurs, les accusations et les contrevérités fusent de partout. Dans une interview qu’il nous a accordée au siège du CFSCP-CI, Diakité Yacouba, le premier responsable dit sa part de vérité et accuse.

LP : Un confrère affirmait hier que le RHDP serait à vos trousses pour avoir fait échouer « leur grève », que répondez- vous ?

Diakité Yacouba : Effectivement j’ai lu ce matin, chez l’un de vos confrères que le RHDP serait à mes trousses. Je ne sais pas où le journaliste tire cette information. D’ailleurs, je l’ai invité pour qu’il vienne pour une confrontation, mais jusque-là, il n’a pas encore répondu à mon invitation. Pour le moment, je ne peux accuser un tel ou un tel de vouloir attenter à ma vie. C’est pourquoi, je ne peux pas accepter que quelqu’un, fût- il journaliste, accuse les responsables politiques. Il faut éviter de salir des gens. Ce que je veux dire, c’est que le samedi dernier j’ai échappé à un enlèvement par des personnes en armes. Je ne sais pas qui ils sont. Comme nous sommes dans un pays, les enquêtes sont ouvertes et j’espère que les résultats seront connus bientôt. L’enquête peut, pourquoi pas, désigner des responsables syndicaux que je dérange. Parce qu’on n’a pas la même vision. Il y en a qui se font de l’argent en parcourant les ministères et il y a nous autres qui luttons pour le bien de notre corporation. Je voudrais avant tout dire merci à tous les Ivoiriens qui ont soutenu notre combat. Je remercie aussi les partis politiques qui ont compris notre souffrance. Ils ont trouvé que notre combat était noble. Aussi, ont-ils jugé utile de nous soutenir. Je voudrais ensuite dire que nous n’avons pas fait de faux bond au RHDP. Tout simplement parce que contrairement à ce qui se dit, notre grève n’est pas celle du RHDP. Aucun parti politique n’était derrière la grève. Je voudrais dire que l’augmentation du prix du carburant est l’affaire de tous. Ce sont tous les Ivoiriens qui en sont victimes. Il est normal que des partis politiques soutiennent notre mouvement même s’ils n’en sont pas les initiateurs.

LP : Il se raconte également que le RHDP vous aurait financé. Quelle est votre version des faits ?

DY : Personne n’a financé notre grève. Ce sont les chauffeurs de Côte d’Ivoire et le collectif qui a financé la grève. Notre objectif n’était pas de nous faire de l’argent. La preuve, quand on nous a proposé de l’argent pour briser la grève, j’ai dit non.

LP : Combien vous a-t-on proposé?

DY : On nous a proposé 20 millions de FCFA. On a demandé à chaque syndicat de prendre sa part pour reprendre le travail. J’ai répondu que nous ne faisions pas de grève pour de l’argent, mais pour la baisse du prix du carburant.

LP : Qui vous a proposé cette somme ?

DY : Il y a eu des discussions avec des personnes autres que nous tard dans la nuit au ministère des Mines et de l’Energie. C’est à la suite de cette réunion et après s’être partagé l’argent que ces individus ont fait des déclarations pour la reprise du travail. Parmi ces personnes, il y a Touré Adama qui, au début du mouvement, était à Korhogo et qui a dit qu’il n’était pas concerné par la grève. On n’a pas compris pourquoi il s’est fait passer pour notre interlocuteur. On a répondu que notre objectif en allant en grève était d’obtenir la baisse du prix du carburant et non pas de nous partager de l’argent. C’est dans leur habitude de prendre de l’argent et de briser nos grèves. Souvenez-vous que dans la matinée du vendredi dernier, ils appelaient à la reprise du travail. Malheureusement pour eux, les chauffeurs ne les ont pas suivis.

LP : Pourtant Touré Adama parlait en votre nom, avec la caution d’Eric Diabaté…

DY : Je suis désolé, je ne suis pas de la Coordination des gares routières. Touré Adama ne peut donc pas parler en mon nom. Je suis un conducteur. Je ne peux pas comprendre que le président de la coordination parle en notre nom. Je voudrais faire remarquer par exemple que le Syndicat national des transporteurs et de marchandises de Côte d’Ivoire peut parler des transporteurs et non des conducteurs. Nous, les conducteurs sommes les plus nombreux…. Eric Diabaté était certes avec moi au départ, mais vous savez, c’est l’argent. Vous savez que l’argent peut détourner certaines personnes de leurs préoccupations. Face à l’argent, peu de personnes sont capables de garder leur dignité. Moi, j’ai une vision, c’est lutter pour le peuple et notamment pour les chauffeurs. C’est un engagement que j’ai pris et que je ne suis pas prêt à trahir. Eric Diabaté s’est retrouvé avec Adama Touré parce que le ministre des Mines et de l’Energie cherchait une occasion pour nous diviser et nous affaiblir pour avoir une baisse du prix du carburant en deçà de notre exigence qui était de 75 ou de 100 FCFA. Notre doléance était en bonne voie d’aboutissement quand Eric Diabaté et les autres ont décidé de choisir une autre voie ce qui a donné le résultat que nous avons eu avec la baisse de 30 FCFA.

LP : Peut-on parler de trahison ?

DY : Effectivement. Et le mot n’est pas fort. Je l’ai dit, alors que nous étions en négociation avec le Premier ministre, il y a eu des discussions parallèles et surtout par des personnes qui n’avaient rien à voir avec la grève. Une discussion qui a eu lieu tard dans la nuit. Ces discussions ont fait que nous n’avions pas eu ce que nous voulions.

LP : Qui a déposé le mot d’ordre de grève ?

DY : C’est le collectif des fédérations des syndicats des chauffeurs professionnels de Côte d’Ivoire qui a déposé le mot d’ordre de grève. Tout à l’heure, je vais vous présenter les preuves que c’est nous qui sommes les initiateurs de cette grève. Que ceux qui soutiennent en être les initiateurs, nous présentent leurs preuves. C’est pourquoi, je demande à l’Etat d’être vigilant. C’est pourquoi, je voudrais dire merci au président Fologo qui a tenu, malgré les multiples déclarations, à nous recevoir et dire officiellement que c’est nous qui sommes les initiateurs de cette grève.

LP : Qu’en est- il de votre sécurité ?

DY : Pour le moment, je peux dire que je suis en de bonnes mains. L’enquête sur ceux qui ont voulu attenter à ma vie samedi dernier se poursuit. Seulement que je n’ai pas encore regagné mon domicile, qui est aujourd’hui très exposé. Je suis actuellement dans un lieu sécurisé par des autorités.

LP : Avec la fin de la grève, à quoi doivent s’attendre les usagers ?

DY : Le président du Conseil économique et social a promis une rencontre entre nous et le Chef de l’Etat. Ce sera pour nous l’occasion de faire le point de nos revendications. Il s’agit du rééchelonnement du paiement des vignettes et patentes, faire en sorte que le permis format carte de crédit soit reconnu dans la sous-région et sur le plan international, le changement à la tête de l’Agence de gestion du territoire urbain (AGETU), pour n’avoir pas respecté toutes les conventions avec le Collectif des fédérations des syndicats des chauffeurs professionnels de Côte d’Ivoire, notamment la construction des aires de stationnement et les relations conflictuelles avec les acteurs du transport. Il s’agit aussi de mettre en place une seule carte de stationnement pour les véhicules de transport…

LP : Les chauffeurs vous soutiennent-ils ?

DY : Ils me font encore confiance, la preuve ils n’ont repris le travail samedi dernier qu’après ma déclaration mettant fin à la grève. En plus, depuis qu’ils ont appris mon enlèvement manqué, ils ne cessent de m’apporter leur soutien. Actuellement, les chauffeurs de Côte d’Ivoire m’écoutent beaucoup. C’est pourquoi, je leur demande de rester à l’écoute parce que la lutte continue. Surtout qu’il se murmure que le prix du carburant va augmenter bientôt. J’espère qu’ils ne vont pas en arriver là, sinon, ils nous trouveront sur leur chemin. On est dans un pays de droit. On ne peut pas accepter des augmentations, sans explications, du prix du carburant.

LP : Vous le ferez au risque de votre vie ?

DY : La grève fait partie de la vie du syndicaliste. Un syndicaliste, c’est un défenseur. Si l’Etat ne veut pas nous écouter, nous allons toujours revendiquer pour obtenir ce qui nous revient. Si pour cela, on veut nous tuer, nous sommes prêts à mourir. Et puis, si on meurt, la relève, je suis convaincu sera bien assurée. Nous luttons pour notre bien-être. Il faut arracher notre corporation de la main des opportunistes. En tant que leader, je crois que je dois bannir la peur. J’ai une mission, je dois l’assumer aussi longtemps que les chauffeurs placeront leur confiance en moi. Je me confie à Dieu. Que les chauffeurs restent à l’écoute.

Par Thiery Latt
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