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Économie Publié le jeudi 29 avril 2010 | Le Mandat

Achat d’armes, enrichissement illicite… : Comment le camp présidentiel et les rebelles pillent le pays - Tout sur leur réseau de financement

La crise déclenchée en septembre 2002 favorise un pillage des ressources naturelles de la Côte d’Ivoire tant du côté du camp gouvernemental que de celui de l’ex-rébellion. Ces pillages constituent aujourd’hui une source d’enrichissement et de financement d’achat d’ armes des belligérants de la crise ivoirienne. Dans une enquête menée par un groupe d’experts onusiens dont le rapport à mi-parcours a été remis au Conseil de sécurité de l’Onu, en début du mois d’avil, un coin de voile est levé sur ces magouilles qui ne favorisent en aucun cas une sortie de crise souhaitée par les Ivoiriens. Pis, la pauvreté gagne du terrain dans les foyers alors qu’une minorité s’empiffre.

Ressources financières

En vertu de l’alinéa b) du paragraphe 7 de la résolution 1727(2006) du Conseil de sécurité, le Groupe a pour mandat de faire des recherches sur « les sources de financement, notamment de l’exploitation des ressources naturelles en Côte d’Ivoire, consacrées à l’acquisition d’armes et de matériels connexes ou se rapportant à des activités apparentées ».

A cet égard, le Groupe note que, même si le Gouvernement et les Forces nouvelles prétendent prendre des mesures fermes en vue de la réunification du pays, en réalité, les intérêts économiques de chaque camp vont à l’encontre de cet objectif. Il est encore à craindre que des fonds importants servent à acheter des armes et matériels connexes. Dans la première partie de son mandat, le Groupe a axé ses recherches sur plusieurs secteurs économiques de la Côte d’Ivoire : le gaz et le pétrole, les mines (or, manganèse, nickel et cuivre) et l’agriculture (en particulier la production et l’exploitation de cacao). Le Groupe enquête également sur d’autres questions d’ordre financier susceptibles d’avoir des incidences sur l’embargo sur les armes et matériels connexes, le détournement des recettes de l’Etat, par exemple.

A / Principaux secteurs

1.Gaz et pétrole

Le Groupe a entrepris des enquêtes approfondies sur le terrain afin de dresser le tableau de ce secteur important de l’économie. Il a adressé de nombreuses demandes d’information à ce sujet au Ministère ivoirien des mines, à trois sociétés partiellement ou entièrement contrôlées par l’Etat et à six entreprises privées. Il attend les réponses de la majorité des destinataires et constate notamment que les organismes publics, en particulier PETROCI refuse de fournir les renseignements demandés.

2.Or
Aux paragraphes 199 et 200 de son apport final (S/2009/521), le précédent Groupe d’experts notait l’existence d’une nouvelle mine d’or à Tongon, à une soixante de kilomètres au nord de Korhogo, dans la zone 10 du nord de la Côte d’Ivoire, sous le contrôle des Forces nouvelles. Son rendement annuel est estimé à 3.160.000 onces troy.

Sachant que la production doit démarrer au premier trimestre 2010, le Groupe a écrit aux entreprises publiques et privées afin de déterminer le montant des recettes que pourrait générer le projet et le montant des impôts que pourrait percevoir le Commandant de zone des Forces nouvelles de la région, Matin Kouakou Fofié, une des trois personnes inscrites sur la liste du comité des sanctions depuis le 7 février 2006 et visées par une interdiction de voyager et un gel des avoirs.

3.Manganèse, nickel et cuivre
Des entreprises privées prospectent actuellement quatre sites dans les zones sous contrôle du Gouvernement ou des Forces nouvelles pour y chercher du manganèse. Un grand projet d’extraction de nickel et de cuivre est situé à 600 kilomètres au nord-ouest d’Abidjan dans une zone contrôlée par les Forces nouvelles. Le Groupe entend continuer à surveiller ces activités.

4.Le cacao
Le précédent Groupe d’experts a abondamment traité du secteur ivoirien du cacao dans son rapport (voir S/2009/521) et le Groupe actuel poursuit ces recherches dans les domaines suivant :

Tout d’abord, il continue d’évaluer les mesures que le Gouvernement ivoirien déclare avoir promulguées en vue d’améliorer la transparence du secteur du cacao, dont les recettes sont désormais administrées par le Comité de gestion de la filière café-cacao. En particulier, le Groupe mène des investigations car il a été informé que des dépenses extrabudgétaires et près de 7 millions de dollars auraient été engagées pour l’achat de pièces mécaniques.

Ensuite, le Groupe analyse actuellement les incidences financières pour le Gouvernement et les Forces Nouvelles de la hausse des cours de la fève de Cacao (2009-janvier 2010) sur le marché international, notamment l’existence et l’utilisation des recettes excédentaires.

Enfin, le Groupe étudie le rôle des intermédiaires dans les transactions réalisées avec les sociétés internationales et examine les mesures prises par les pays voisins pour contrôler leurs opérations dans la contrebande de cacao (voir S/2009/521).

B / Autres questions d’ordre financier
Le Groupe enquête actuellement sur plusieurs organisations et activités qui pourraient servir à l’achat d’armes et de matériels connexes.

1.Comité national de soutien aux Forces de réunification
Le comité national de soutien aux Forces de réunification (Conasfor) se présente comme une entreprise privée chargée de lever des fonds destinés à financer l’achat de matériel destiné aux unités des FDS-CI et des FDS-FN.

Lors d’une rencontre avec le Groupe en février 2010, des représentants du Conasfor l’ont informé que leur organisation voulait faciliter le déploiement de 8000 éléments affectés au Centre de commandement intégré. Le président du Conasfor, Evariste Meambly, a fait valoir qu’entre mai et décembre 2009, l’organisation avait mobilisé près de 1,1 million de dollars et investi une partie de ces fonds dans l’achat de tentes, de matériel de couchage et autre pour les unités du Centre et dans l’évaluation des besoins des unités du Centre dans les 10 zones administratives du pays.
Le Groupe poursuit ses investigations sur le matériel fourni par le Conasfor aux Forces de défense et de sécurité, y compris les véhicules, susceptibles d’être utilisées à des fins militaires.

2.La centrale

En janvier 2010, le Groupe a rencontré le Directeur Général de la centrale, André Ouattara. D’après lui, l’organisation, qui a commencé ses activités en février 2004, est une structure centralisée chargée de collecter des fonds destinées à financer les infrastructures militaires et l’administration des Forces nouvelles et d’apporter une aide sociale à la population en répondant à ses besoins essentiels (soins de santé et d’éducation, notamment).

Le Groupe fait toutefois observer que la Centrale n’est ni habilitée à collecter des impôts dans les nombreuses régions placées sous le contrôle des Commandants de zone des Forces nouvelles, ni dotée des capacités nécessaires pour redistribuer les fonds au titre de l’aide sociale invoquée par M.Ouattara. Le Groupe affirme, à cet égard, que les Commandants de zone sont relativement autonomes et qu’ils gardent pour leur usage personnel, semble-t-il, une large part des impôts levées dans les zones qu’ils contrôlent.

Cette observation semble indiquer qu’en mettant l’accent sur l’unicité des caisses de l’Etat (par la fusion des caisses des Forces nouvelles et du Gouvernement), on ne tient pas compte du fait que la Centrale ne représente qu’une faible par des recettes levées et utilisées dans le nord du pays, contrôlé par les Forces de nouvelles.

3.Marchandises de contrebande

Le Groupe continue d’enquêter sur les marchandises de contrebande provenant des pays voisins et introduites dans le nord de la Côte d’Ivoire contrôlé par les Forces nouvelles : carburant, mobilier, véhicules et électroménager. Ces marchandises, qui ne sont soumises ni à l’impôt ni aux droits de douanes, sont ensuite acheminées dans le sud de la Côte d’Ivoire pour y être vendues. Le Groupe étudie les liens éventuels entre l’importation de certaines de ces marchandises et les transferts d’armes.
A suivre…

Lance Touré
lancetoure2006@yahoo.fr
Source : Rapport des Experts sur la Côte d’Ivoire avril 2010
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