Le secteur privé ivoirien pourra-t-il tirer la classe politique vers le haut, pour sortir la Côte d'Ivoire du labyrinthe? Certes, la tâche semble difficile, mais les opérateurs économiques pour cette fois-ci, n'entendent pas lâcher prise. Et l'atelier sur «Côte d'Ivoire 2040 » initié du 26 au 28 avril à Yamoussoukro par le patronat ivoirien, apparaît comme un signal fort.
La Côte d'Ivoire pourra-t-elle atteindre en l'espace de 30 ans, le niveau de développement des quatre dragons asiatiques? Les grandes entreprises de Côte d'Ivoire sont visiblement convaincues que le pays peut se rapprocher de la Corée du Sud, de Singapour, de Taïwan et de Hong Kong (rétrocédé à la Chine depuis juillet 1997), ces quatre pays d'Extrême-Orient à forte croissance industrielle. Justement, l'empire du milieu est de plus en plus associé à ces Etats qui font partie des nouveaux pays industrialisés d'Asie. Ils ont, en effet, suivi le modèle économique développé par le Japon auquel ils font concurrence dans les activités industrielles les plus sophistiquées (automobile, électronique grand public), depuis 1980. Pour le patronat ivoirien, tout est possible à condition que l'on crée un environnement propice au développement des affaires. Ainsi donc, devant les «tergiversations» de la classe politique qui tarde à trouver un dénouement définitif à la crise qui secoue le pays, depuis sept ans et avec pour conséquences, des fondamentaux économiques gravement fragilisés, la Confédération générale des entreprises de Côte d'Ivoire (Cgeci) veut renverser cette tendance et prendre la direction des opérations. Pour l'ensemble des dirigeants d'entreprises, il fallait, cette fois-ci, oser à travers «un rêve» et chercher à calquer d'autres modèles économiques tels que susmentionnés pour bâtir la Côte d'Ivoire de demain.
Le privé prend le gouvernail
Du 26 au 28 avril, le secteur privé, dans toute sa composante, s'est réuni, à Yamoussoukro, pour donner forme et relief à leur vision de la Côte d'Ivoire du futur dénommée «Côte d'Ivoire 2040 : le défi du meilleur». Avant de dresser la mouture de ce que sera ce nouveau plan stratégique de développement, en préparation depuis novembre 2008, les acteurs économiques ont fait l'état des lieux avec les diagnostics macroéconomique, microéconomique et sectoriel de l'économie ivoirienne. Il ressort que les voyants virent au rouge. Toute chose qui compromet dangereusement la reprise économique. Si au niveau du Doing business (2009-2010), la Côte d'Ivoire occupe le 168ème rang sur 183 pays, les indices du développement humain se sont également effondrés avec le taux de malnutrition et l'espérance de vie situés à 48% et 47 ans contre 13% et 73 ans en Tunisie. Les études menées, par le cabinet Onpoint africa group sur l'évolution socioéconomique du pays, montrent bien qu'en termes de création d'entreprises, pendant qu'en Côte d'Ivoire, l'on doit attendre au moins 62 jours, ce délai est respectivement de 36 jours et d'une semaine dans l'Ocde (Organisation de coopération et de développement économique qui regroupe 30 pays) et à Singapour. «Si on ne fait rien, nous irons droit dans le mur», alerte Jean Kacou Diagou, président la Cgeci, ajoutant qu'Abidjan doit s'inspirer des bons modèles. Selon lui, l'appareil productif est à la recherche de ses repères du fait de l'instabilité politique du pays. Une situation qui a eu des conséquences incalculables sur les populations. «La moitié des enfants ne mange pas à sa faim et n'est pas scolarisée. Bon nombre de nos enfants n'ont pas accès aux soins de santé de base ni à l'eau potable. Un grand nombre des filles se prostitue parce qu'elles ont faim», dépeint-il, apparemment affecté par un tel tableau. D'autant qu'il déplore également la montée de «l'impunité, du favoritisme et du gaspillage des deniers publics». Face à un décor aussi sombre qu'impotent, l'indolence des opérateurs économiques, poursuit le premier responsable du patronat, serait interprétée comme une intolérable démission dans la reconstruction économique du pays. C'est eu égard à cela, que cette étude prospective paraissait à ses yeux, indispensable. «On veut un guide de gouvernance pour chaque ministère, l'économie doit être gérée d'une autre manière sans gaspillage, avec des hommes qu'il faut, à la place qu'il faut. Tout cela va nous permettre de rembourser nos dettes et de relancer notre économie», tape-t-il du poing sur la table. Au total, en plus des brainstormings qui ont permis de présenter d'autres modèles tels que l'île Maurice, le Mexique, la Tunisie, les conclusions ont présenté le nouveau visage que la Côte d'Ivoire devrait avoir en l'espace d'une génération, afin de devenir à l'horizon 2040, un pays émergent. Ainsi donc, au titre du secteur agricole, d'une manière générale, les travaux ont proposé que les filières soient compétitives et rémunératrices pour les masses paysannes dont une frange importante s'engouffre du fait du poids de l'appauvrissement. Pour le réussir, il faut le renforcement de la gouvernance des filières, l'amélioration de la productivité des cultures d'exportation et encourager la transformation. Au sujet des mines et de l'industrie, outre la défiscalisation des produits pétroliers, les experts nationaux ont recommandé une stratégie claire du pétrole en Côte d'Ivoire pour mettre fin aux multiples déperditions et au manque de transparence. Il faut arriver de façon homogène à une industrialisation de l'ensemble du territoire national et faire ainsi de la Côte d'Ivoire, le centre d'intelligence et d'excellence industrielle et technologique de la région. Au titre des services, d'importants projets sortiront de terre. Abidjan sera transformée en hub des transports (tout secteur confondu) avec un réseau ferré maillé. Au plan touristique, la Côte d'Ivoire sera la plus grande destination touristique d'Afrique avec pour ambition de capter 40 millions de visiteurs en 30 ans. La capitale économique entend se positionner comme la plus grande place financière de l'Afrique sur la même période avec un taux de bancarisation de 100%. D'autant qu'on sait que, parmi les 200 plus grandes banques d'Afrique, les banques ivoiriennes répondent encore absentes.
Des projets d'envergure
D'ailleurs, une grande réforme fiscale est prévue dans ce secteur. Pour la relance du système éducatif, ce plan rend obligatoire l'éducation jusqu'à l'âge de 15 ans et gratuite au primaire et opte pour un système adéquat et à moindre coût. Le privé demande à ce que 1% du Pib soit alloué à la recherche. Selon Martin Djedjess, directeur général de Biao et rapporteur de l'atelier 3 sur les services, il n'y aura plus de place pour les petites entreprises dans les secteurs des banques, des assurances, du tourisme. Mais des «big players» (des grosses et performantes structures). Certains prés requis sont à respecter pour mettre en œuvre ces projets et remettre la Côte d' Ivoire sur la voie du développement. A l'en croire, il faut une volonté politique forte et clairement affichée avec un cadre de définition des rôles, des obligations ainsi que des devoirs de l'Etat et du secteur privé. Pour ce faire, la Côte d'Ivoire doit être un Etat de droit dont les institutions fonctionnent de façon régulière. Il s'agira à terme, de hisser le pays parmi les 10 premiers pays les moins corrompus au monde. Il faut souligner qu'à ce niveau, le ministre de l'Industrie et de la Promotion du secteur privé s'est inscrit, dans cette direction, le mardi 27 avril à l'ouverture des travaux. « Les résultats de cette étude prospective ouvriront ainsi les voies aux grands chantiers de développement d'après crise», a soutenu Moussa Dosso. Avant de préciser que son département et le gouvernement tout entier sont prêts à soutenir et à appuyer le secteur privé pour lui redonner sa place dans le processus de relance économique post-conflit. D'autant que l'appareil productif reste le moteur du développement.
Cissé Cheick Ely
La Côte d'Ivoire pourra-t-elle atteindre en l'espace de 30 ans, le niveau de développement des quatre dragons asiatiques? Les grandes entreprises de Côte d'Ivoire sont visiblement convaincues que le pays peut se rapprocher de la Corée du Sud, de Singapour, de Taïwan et de Hong Kong (rétrocédé à la Chine depuis juillet 1997), ces quatre pays d'Extrême-Orient à forte croissance industrielle. Justement, l'empire du milieu est de plus en plus associé à ces Etats qui font partie des nouveaux pays industrialisés d'Asie. Ils ont, en effet, suivi le modèle économique développé par le Japon auquel ils font concurrence dans les activités industrielles les plus sophistiquées (automobile, électronique grand public), depuis 1980. Pour le patronat ivoirien, tout est possible à condition que l'on crée un environnement propice au développement des affaires. Ainsi donc, devant les «tergiversations» de la classe politique qui tarde à trouver un dénouement définitif à la crise qui secoue le pays, depuis sept ans et avec pour conséquences, des fondamentaux économiques gravement fragilisés, la Confédération générale des entreprises de Côte d'Ivoire (Cgeci) veut renverser cette tendance et prendre la direction des opérations. Pour l'ensemble des dirigeants d'entreprises, il fallait, cette fois-ci, oser à travers «un rêve» et chercher à calquer d'autres modèles économiques tels que susmentionnés pour bâtir la Côte d'Ivoire de demain.
Le privé prend le gouvernail
Du 26 au 28 avril, le secteur privé, dans toute sa composante, s'est réuni, à Yamoussoukro, pour donner forme et relief à leur vision de la Côte d'Ivoire du futur dénommée «Côte d'Ivoire 2040 : le défi du meilleur». Avant de dresser la mouture de ce que sera ce nouveau plan stratégique de développement, en préparation depuis novembre 2008, les acteurs économiques ont fait l'état des lieux avec les diagnostics macroéconomique, microéconomique et sectoriel de l'économie ivoirienne. Il ressort que les voyants virent au rouge. Toute chose qui compromet dangereusement la reprise économique. Si au niveau du Doing business (2009-2010), la Côte d'Ivoire occupe le 168ème rang sur 183 pays, les indices du développement humain se sont également effondrés avec le taux de malnutrition et l'espérance de vie situés à 48% et 47 ans contre 13% et 73 ans en Tunisie. Les études menées, par le cabinet Onpoint africa group sur l'évolution socioéconomique du pays, montrent bien qu'en termes de création d'entreprises, pendant qu'en Côte d'Ivoire, l'on doit attendre au moins 62 jours, ce délai est respectivement de 36 jours et d'une semaine dans l'Ocde (Organisation de coopération et de développement économique qui regroupe 30 pays) et à Singapour. «Si on ne fait rien, nous irons droit dans le mur», alerte Jean Kacou Diagou, président la Cgeci, ajoutant qu'Abidjan doit s'inspirer des bons modèles. Selon lui, l'appareil productif est à la recherche de ses repères du fait de l'instabilité politique du pays. Une situation qui a eu des conséquences incalculables sur les populations. «La moitié des enfants ne mange pas à sa faim et n'est pas scolarisée. Bon nombre de nos enfants n'ont pas accès aux soins de santé de base ni à l'eau potable. Un grand nombre des filles se prostitue parce qu'elles ont faim», dépeint-il, apparemment affecté par un tel tableau. D'autant qu'il déplore également la montée de «l'impunité, du favoritisme et du gaspillage des deniers publics». Face à un décor aussi sombre qu'impotent, l'indolence des opérateurs économiques, poursuit le premier responsable du patronat, serait interprétée comme une intolérable démission dans la reconstruction économique du pays. C'est eu égard à cela, que cette étude prospective paraissait à ses yeux, indispensable. «On veut un guide de gouvernance pour chaque ministère, l'économie doit être gérée d'une autre manière sans gaspillage, avec des hommes qu'il faut, à la place qu'il faut. Tout cela va nous permettre de rembourser nos dettes et de relancer notre économie», tape-t-il du poing sur la table. Au total, en plus des brainstormings qui ont permis de présenter d'autres modèles tels que l'île Maurice, le Mexique, la Tunisie, les conclusions ont présenté le nouveau visage que la Côte d'Ivoire devrait avoir en l'espace d'une génération, afin de devenir à l'horizon 2040, un pays émergent. Ainsi donc, au titre du secteur agricole, d'une manière générale, les travaux ont proposé que les filières soient compétitives et rémunératrices pour les masses paysannes dont une frange importante s'engouffre du fait du poids de l'appauvrissement. Pour le réussir, il faut le renforcement de la gouvernance des filières, l'amélioration de la productivité des cultures d'exportation et encourager la transformation. Au sujet des mines et de l'industrie, outre la défiscalisation des produits pétroliers, les experts nationaux ont recommandé une stratégie claire du pétrole en Côte d'Ivoire pour mettre fin aux multiples déperditions et au manque de transparence. Il faut arriver de façon homogène à une industrialisation de l'ensemble du territoire national et faire ainsi de la Côte d'Ivoire, le centre d'intelligence et d'excellence industrielle et technologique de la région. Au titre des services, d'importants projets sortiront de terre. Abidjan sera transformée en hub des transports (tout secteur confondu) avec un réseau ferré maillé. Au plan touristique, la Côte d'Ivoire sera la plus grande destination touristique d'Afrique avec pour ambition de capter 40 millions de visiteurs en 30 ans. La capitale économique entend se positionner comme la plus grande place financière de l'Afrique sur la même période avec un taux de bancarisation de 100%. D'autant qu'on sait que, parmi les 200 plus grandes banques d'Afrique, les banques ivoiriennes répondent encore absentes.
Des projets d'envergure
D'ailleurs, une grande réforme fiscale est prévue dans ce secteur. Pour la relance du système éducatif, ce plan rend obligatoire l'éducation jusqu'à l'âge de 15 ans et gratuite au primaire et opte pour un système adéquat et à moindre coût. Le privé demande à ce que 1% du Pib soit alloué à la recherche. Selon Martin Djedjess, directeur général de Biao et rapporteur de l'atelier 3 sur les services, il n'y aura plus de place pour les petites entreprises dans les secteurs des banques, des assurances, du tourisme. Mais des «big players» (des grosses et performantes structures). Certains prés requis sont à respecter pour mettre en œuvre ces projets et remettre la Côte d' Ivoire sur la voie du développement. A l'en croire, il faut une volonté politique forte et clairement affichée avec un cadre de définition des rôles, des obligations ainsi que des devoirs de l'Etat et du secteur privé. Pour ce faire, la Côte d'Ivoire doit être un Etat de droit dont les institutions fonctionnent de façon régulière. Il s'agira à terme, de hisser le pays parmi les 10 premiers pays les moins corrompus au monde. Il faut souligner qu'à ce niveau, le ministre de l'Industrie et de la Promotion du secteur privé s'est inscrit, dans cette direction, le mardi 27 avril à l'ouverture des travaux. « Les résultats de cette étude prospective ouvriront ainsi les voies aux grands chantiers de développement d'après crise», a soutenu Moussa Dosso. Avant de préciser que son département et le gouvernement tout entier sont prêts à soutenir et à appuyer le secteur privé pour lui redonner sa place dans le processus de relance économique post-conflit. D'autant que l'appareil productif reste le moteur du développement.
Cissé Cheick Ely