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Editorial Publié le lundi 28 juin 2010 | L’expression

L’Editorial - La nouvelle aventure

En politique, avoir l’initiative est un avantage certain. Depuis, l’affaire Beugré Mambé qui a défrayé la chronique en février 2010, et agité en profondeur le pays, la situation en Côte d’Ivoire était redevenue relativement calme. Les choses suivaient leur cours quand le chef de l’Etat, lui, semblait cette fois les subir. Bringuebalant, la commission électorale s’adossant sur sa béquille, le Premier ministre, avait fini par lancer et achever le contentieux de la liste grise, celle des personnes dont la nationalité n’avait pu être vérifiée au travers des fichiers dits historiques de référence. La pression se tournait vers le champion du parti au pouvoir, et candidat à sa succession pour demander, réclamation essentielle, la date des élections. Il était difficile cette fois-ci à Laurent Gbagbo de fignoler. Et comme par un heureux hasard, les Ivoiriens ont été informés de l’ouverture d’une enquête aux fins d’éclairer la lanterne de chacun sur des allégations de fraudes. Le choix du moment ne fut pas fortuit. C’est au journal de vingt heures sur la première chaine de la télévision nationale qu’est apparu Gervais Coulibaly, le porte-parole du chef de l’Etat pour dire que, suite aux accusations portées contre le ministre de l’Intérieur par le président de l’Assemblée nationale, le 2 juin 2010, lors d’un colloque sur les vingt ans du multipartisme en Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo a décidé de saisir le procureur de la République. Raymond Tchimou devra, entre autres, démontrer si le ministre Tagro a favorisé le recrutement des membres de sa tribu à l’école de police, s’il a détourné les sommes mises à la disposition de l’organisation du Hadj, tout comme les sommes payées à l’Etat de Côte d’Ivoire par la société Trafigura pour l ’indemnisation des victimes des déchets toxiques, « et si le ministre de l’Intérieur a perçu seul, ou avec autrui,(notamment le Premier ministre), la somme de dix milliards de Fcfa qui lui aurait été versée à titre de commission par la société Sagem sécurité ». Les Ivoiriens étaient encore sous le choc de l’élimination quasi certaine de leur équipe nationale, les Eléphants par les diables de Brésiliens, dont la tâche a été rendue facile par un arbitre français aveugle sur une faute manifeste de main du buteur de la Seleçao, Luis Fabiano. La population abattue ne sera-t-elle pas soulagée par un acte fort venu du chef, et pourtant sur des hauts placés dont les forfaits supposés seront châtiés comme ceux de Monsieur tout le monde ? Le numéro un ivoirien a cherché à jouer sur ce clavier.
Veillée d’armes
Mais, cet impact du moment était l’objectif le moins important. Tout le monde aura compris que, se référant à l’intervention de Mamadou Koulibaly sur le bilan du multipartisme, Gbagbo a réussi l’exploit d’inclure le Premier ministre et la société Sagem dans l’enquête ordonnée au procureur de la République. Le chef de l’Etat n’est donc pas allé avec le dos de la cuillère. Il a livré le chef du gouvernement à la vindicte populaire en l’accusant, à mots à peine couverts, de malversations. L’accusation détournée, portée par voie de média, qui plus est, sur les antennes de la télévision nationale à une heure de grande écoute, à la suite d’un événement sportif national, a été particulièrement bien menée. Pas possible de rater la cible. Le porte-parole de Soro Guillaume, pris de cours, ou tentant de ménager des intérêts nouveaux, a beau essayer de sauver les apparences en parlant de parfait accord entre le chef de l’Etat et le chef du gouvernement sur la nécessité de moraliser la vie publique, le mal était consommé. On ne porte pas de simples rumeurs à l’attention du procureur de la République pour enquête ! On ne peut citer le chef du gouvernement dans une affaire de commission occulte par la voie de media, avec les détails sur les montants et les acteurs sans avoir à l’idée de porter un coup à ce dernier. D’ailleurs, l’accusation de Mamadou Koulibaly qui arrive comme l’élément déclencheur a-t-elle évoqué de présumées commissions versées par la société Sagem ? Sans présager la véracité de cette accusation, ce qui est sans équivoque en revanche, c’est la portée politique de l’attaque contre le dépositaire de l’Accord politique de Ouagadougou. La sortie de Gervais Coulibaly ouvre en effet un nouveau front dans l’interminable processus de sortie de crise dans le pays. Le camp du Premier ministre, les ex-rebelles, et celui du chef de l’Etat, le Front populaire ivoirien et ses satellites ont là de quoi s’éperonner à nouveau. La coalition de l’opposition, le Rhdp, a déjà donné de la voix. Les héritiers politiques de Houphouët-Boigny se sont insurgés contre une manœuvre visant à déstabiliser le Premier ministre et mettre en péril la sortie de crise. Le pays retrouve cette atmosphère de veillée d’arme et de tension croissante comme lors de l’affaire Mambé. Un environnement que Gbagbo adore particulièrement. Il a repris la main, et donc l’initiative. C’est lui le maître de la partie. Il a ramené au centre, la balle qui se trouvait à la surface de réparation des élections. C’est lui qui fixera l’orientation du match et le rythme du jeu. Une nouvelle aventure s’annonce donc. Simple rappel ! Lors de l’exercice précédant l’affaire Mambé, Gbagbo avait gagné deux mois, et fait oublier les élections prévues pour fin avril début mai 2010. C’est tout dire !
D. Al Seni
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