x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Économie Publié le samedi 29 janvier 2011 | Nord-Sud

Exploitation forestière - L’industrie du bois agonise, les acteurs accusent Gbagbo

Les effets pervers de la crise post-électorale impactent gravement l’industrie du bois qui croule sous le poids des difficultés dans la région des Montagnes.


L’industrie du bois agonise dans l’ouest montagneux à cause des effets néfastes de l’impasse politique. Le blocus politico-économique né de l’obstination de Gbagbo à ne pas quitter le pouvoir, paralyse dangereusement ce secteur au point où les entreprises de cette filière sont confrontées à une baisse drastique de leurs activités à l’image de la scierie Covalma située à Zélé, à quelques cinq kilomètres de Man. Cette structure a vu ses commandes chuter. Selon Mme Akoua Véronique, responsable du personnel, rencontrée ce mercredi 26 janvier, «la situation qui était moins alarmante lors du premier tour de la présidentielle, s’est aggravée après le second tour qui a donné naissance à une crise post-électorale. Les commandes européennes se sont carrément arrêtées. Or, le vieux continent constitue un vaste marché pour nous».

Les commandes européennes stoppées

Conséquences : le chiffre d’affaires de Covalma s’est érodé. A telle enseigne qu’elle n’arrivait plus à régler les salaires de ses 200 employés. Face à une telle situation, des mesures d’austérité s’imposaient : 55 ouvriers ont été mis au chômage technique, il y a quelques semaines. Une décision qui n’a pas changé grand-chose. D’autant que les 145 travailleurs restant ne sont pas rémunérés convenablement. «Cela fait deux mois que nous n’avons pas perçu nos salaires. Nous traversons une situation terrible», s’offusque Koné T., un ouvrier de l’usine qui ne fonctionne pratiquement plus. En dépit du tableau non reluisant, Mme Akoua se veut rassurante : «nous nous battons tant bien que mal, pour pouvoir reprendre les activités de l’usine. Au niveau des salaires, la société, malgré les difficultés actuelles, fait l’effort d’honorer ses engagements, même si nous constatons par moments du retard indépendant de notre volonté». A cinq minutes de route à moto, se trouve la scierie Smci. Certes, ici, nos tentatives pour rencontrer les responsables sont restées vaines. Mais, si l’usine fonctionne apparemment, cela ne donne aucune assurance quand au traitement salarial du personnel. L’un d’entre eux qui a requis l’anonymat, laisse entendre qu’il faut travailler au moins trois mois pour espérer avoir un maudit salaire dérisoire d’un mois. «Il vaut mieux chômer que travailler ici», s’emporte un ex-employé de l’entreprise qui dit avoir laissé plus de trois mois de salaire avec ses anciens patrons.
A l’espace du Capen (Centre d’appui à la promotion des entreprises nationales) le visiteur qui arrive, pour la première fois, en ce lieu, où se trouvent 26 unités de scieries appelées «scie mobile», peut constater le beau monde qui y grouille. Mais, il faut y pénétrer pour découvrir les réalités de ces petites et moyennes entreprises (Pme) qui exercent presque dans l’informel avec des moyens très limités. Le déchargement du bois des grumiers se fait de façon manuelle avec les risques que cela comporte. S’il y a des entreprises durement éprouvées par cette crise, c’est bien celles qui sont regroupées au sein de la Cotranbo (Coopérative des transformateurs du bois de l’ouest) située à la Capen. Kaba Ibrahim est détenteur d’une unité de transformation qui, en temps normal, emploie 70 personnes. Avec le conflit politico-économique, il est obligé de faire tourner son usine avec 30 personnes. «La crise a fait que nos clients ne viennent plus. Chose grave, il nous est aussi impossible d’évacuer le bois vers Abidjan à cause du blocus politico-économique. Les camions sont devenus rares. Actuellement, nous tournons juste pour la survie de l’entreprise et le maintien de l’outil de production», déplore-t-il. Et d’ajouter : «c’est difficile dans ces conditions d’inactivité de payer les salaires normalement. Nous donnons aux employés juste de quoi se nourrir et payer leurs loyers». Dramatique, avoue Kaba Ibrahim, visiblement impuissant. Dans la mesure où sa structure ne produit que le quart de sa production habituelle et son chiffre d’affaires a fortement régressé de 20 à moins de 5 millions de Fcfa.

«Gbagbo doit reconnaître sa défaite…»

Lauhe Guy, propriétaire de Scie mobile et directeur de la Cotranbo, regrette le ralentissement de la commercialisation du bois du fait de l’impact de la crise. «Nos meilleurs clients qui viennent aussi du Niger, sont bloqués chez eux à cause de l’enlisement de l’impasse politique. Les propriétaires de gros camions refusent également de faire partir leurs véhicules à Abidjan. Craignant pour la sécurité de leurs engins et de leurs conducteurs», relève-t-il. Certains clients en provenance de la Mauritanie se rabattent sur Biankouma où les grumes sont moins coûteuses et les conditions de travail sont plus aisées. Le bois de type «samba», par exemple, se négocie à 18.000 Fcfa contre 22.000 Fcfa à Man. Les bois rouges coûtent 22.000 Fcfa au lieu de 25.000 Fcfa à Man. Quant au transport, il connaît une hausse. Le transport des grumes est passé de 180.000 à 240.000 Fcfa. Toute chose qui complique la situation des opérateurs économiques de la filière. Les prix du charbon de bois ont flambé à la Capen en passant de 2500 Fcfa à 3500 Fcfa le sac. Des clients mauritaniens qui étaient annoncés à Man au lendemain de la présidentielle, ont battu en retraite à Bamako. Et ce, après avoir constaté le blocage politique. Pour le vieux Touré Tièmoko qui dit avoir perdu environ 80% de sa production, il faut utiliser tous les moyens légaux possibles pour faire rétablir le président élu, Alassane Ouattara, dans ses droits afin d’assurer le redécollage économique du pays. «A cause du blocage occasionné par le clan Gbagbo, je n’arrive plus à évacuer le bois vers le port de San Pedro pour l’exporter vers le Sénégal et l’Espagne où j’ai une bonne partie de ma clientèle. Nous espérons que le président élu, une fois installé, nous accordera des exonérations fiscales afin de relancer notre activité», espère-t-il. Dans leur ensemble, les opérateurs de l’industrie du bois estiment que Laurent Gbagbo, en toute humilité, doit reconnaître sa défaite et remettre le pouvoir à Alassane Ouattara. Dans le cas contraire, l’ex-chef de l’Etat et ses proches seront responsables du drame socio-économique qui, progressivement, est en train de décimer de nombreuses familles dans le pays.

Kindo Ousseny à Man

PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Économie

Toutes les vidéos Économie à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ