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Politique Publié le lundi 18 avril 2011 | AFP

Ouest ivoirien : Duékoué enterre encore ses morts après les massacres

© AFP Par Lass Communication
Horreur à Bloléquin: les miliciens libériens massacrent les populations civiles
Mars 2011. Dans leur repli face à l`arrivée des Forces républicaines, les miliciens libériens massacrent les populations civiles. Photo: le tueur, Tako, homme de main de Oulaï Delafosse, l`un des responsables des miliciens de l`ouest
DUEKOUE (Côte d`Ivoire) - "Ils sont arrivés, armés de fusils de chasse. Ils ont fait sortir les femmes et réuni les hommes, dont mon papa. Ils ont tué tout le monde pendant que j`étais caché là", raconte Lopez Glarou, parmi les décombres d`un quartier de Duékoué, dans l`Ouest ivoirien.
Cet électricien de 31 ans s`était caché dans une petite pièce attenante à
une boutique. L`obscurité et une couverture qui le dissimulait ont fait qu`il
n`a pas connu le même sort que son père, qui était le directeur de l`école.
C`est dans cette région instable qu`a démarré fin mars l`offensive des
Forces républicaines (FRCI) d`Alassane Ouattara, conclue à Abidjan par la
chute de l`ex-président Laurent Gbagbo le 11 avril. Mais les combats qui ont
permis aux FRCI de prendre Duékoué se sont accompagnés de massacres. Des ONG
font état d`un bilan pouvant aller jusqu`à 800 morts.
Habité par des guéré, une ethnie considérée comme favorable à M. Gbagbo, le
quartier du Carrefour a été transformé en brasier. Trois semaines plus tard,
il reste dévasté. Maisons, écoles, "maquis" (bars-restaurants), une église
même, au milieu de laquelle gît encore un squelette calciné: tout a brûlé.
Comme plus de 28.000 personnes, dont la quasi-totalité des résidents du
quartier, Michel Diji, 51 ans, est réfugié à la mission catholique de Duékoué,
sous la protection de Casques bleus marocains, dans des conditions sanitaires
très précaires.
Venu se rendre compte de l`état de son quartier, il reste sous le choc.
"J`espère revenir vivre ici, mais je ne sais pas où dormir, tout est
endommagé, brûlé, volé. Ma bicyclette, mes outils d`ouvrier, mes habits, il ne
me reste rien".
A ses côtés, Ales, 14 ans, serre contre son coeur un calendrier à l`effigie
du Christ, seul objet sauvé des décombres de sa maison. Son père a été tué le
28 mars, mais Michel et ses amis n`ont pu l`enterrer que samedi, n`ayant pas
osé revenir plus tôt sur les lieux.
Une tombe sommaire, dans la cour même de sa maison: quelques pelletées de
terre et une couverture.
Des étuis de cartouches de fusil de chasse de calibre 12 jonchent le sol
dans le quartier. D`après de nombreux témoins, les assaillants étaient des
"dozos", des chasseurs traditionnels du nord, munis de fétiches et gris-gris
de cuir et de coquillages, engagés aux côtés des FRCI.
Les murs sont lézardés et les toits de tôle ondulée se sont effondrés. Il
ne reste que quelques vêtements épars, les bribes d`un cahier d`écolier, une
brochure roussie par le feu expliquant "comment s`assurer une vie de famille
heureuse"...
Quelques résidents ont provisoirement quitté la mission, certains balayent
des débris, brûlent des feuilles mortes. D`autres font une nouvelle découverte
macabre. "On a suivi les mouches et senti une odeur atroce": un corps a été
jeté dans un puits.
A l`entrée du quartier, un bulldozer a creusé une fosse commune où reposent
212 victimes, selon un officier marocain de la mission des Nations unies en
Côte d`Ivoire (Onuci).
Des habitants restent portés disparus, enfuis dans la brousse. "Les dozos
les chassent avec des chiens, comme du gibier", affirme Michel.
Le président Ouattara a annoncé qu`il allait demander à la Cour pénale
internationale (CPI) "d`engager des investigations" sur les massacres de
l`Ouest, y compris quand ses propres partisans sont accusés de les avoir
commis.
"On espère qu`il va enquêter, mais à condition que ce soit pour dire la
vérité, pas pour nous culpabiliser encore plus", insiste Roland Adolphe
Glason, 37 ans.
Car avant de voir leurs quartiers dévastés, les guéré sont accusés d`avoir
formé des milices et terrorisé leurs voisins venus du nord, les dioula, tuant
et brûlant leurs villages.
Aux différences ethniques, linguistiques, religieuses (les guéré sont
chrétiens et les dioula majoritairement musulmans), s`ajoute une dimension
sociale primordiale: les guéré possèdent les terres, que les dioula cultivent
pour eux, ce qui occasionne depuis de longues années de nombreux conflits.
"Pendant les dix ans où Gbagbo a été au pouvoir, il n`y a pas eu de jour
sans que les guéré ne tuent un dioula", assure Fofana, un employé de la
mission catholique.
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