La dernière image publique que les Ivoiriens gardent du général Mathias Yéhamun Doué, l'ex-chef d'état-major des Forces armées nationales de Côte d'Ivoire (Fanci), est celui d'un patient, interné dans une clinique de la place, où il était sous perfusion, avec pour seule tenue, celle que portent les malades. C'était en novembre 2004, l'homme sortait d'une mauvaise passe après les événements douloureux que venait de connaître la Côte d'Ivoire. Son successeur, le général Philippe Mangou, alors colonel-major, lui rendait une visite au nom de la solidarité d'armes. Mais surtout, une visite pour casser l'idée d'une fracture profonde au sein de l'armée qui circulait après le débarquement inattendu du général Doué. On garde de lui également, à tort ou à raison, l'idée d'un « traitre », accusé de vouloir faire un coup d'Etat commandité par la France en novembre 2004. Mais l'ancien Cema des Fanci était avant tout un officier très aimé de la troupe. D'un calme énigmatique et toujours bien mis, on le disait fédérateur, mobilisateur et surtout charismatique. Les visites du « Chinois » (le nom affectueux de Mathias Doué) dans les casernes militaires, sursurrait-on, étaient des moments de joie pour les soldats. Depuis le coup d'Etat de décembre 1999 où il est apparu comme l'un des hommes forts de la junte militaire (Conseil national de salut public, Cnsp), jusqu'à sa montée au pinacle, Mathias Doué était le bien-aimé officier général des Fanci. « Aujourd'hui, c'est le jour de notre jour; IB est sous contrôle », sont quelques unes des phrases, célèbres, de Doué, lancées en pleine crise, qui ont accru la célébrité de l'ancien Cema au sein de l'armée, voire auprès des populations ivoiriennes. Qui avaient fini par le surnommer « Mathias le doué ».
Le géant au pied d'argile
Cette grande célébrité, et cette emprise de l'ancien patron de l'armée sur ses hommes, va cependant fondre comme du beurre au soleil, après l'échec de l'opération « dignité » de novembre 2004. Mathias Doué ne sera donc plus le célèbre général, encore moins le chef charismatique qu'il était. Il a même été perçu comme un officier qui a manqué une double chance d'entrer dans l'histoire. D'abord avec les Fanci pour n'avoir pas pu libérer le pays, pas même son village Yorozon à l'Ouest qui avait été dévasté par l'ex-rébellion. Ensuite, il était soupçonné d'être le pion de la France, qui aurait cependant manqué de courage pour n'avoir pas conclu un coup d'Etat décelé dans les événements de novembre 2004, par l'ancien régime. Le général des Fanci était en effet annoncé dans un char de l'armée française en partance pour les locaux de la télévision nationale, en vue de faire une déclaration pour démettre l'ancien président Laurent Gbagbo. Dans les faits, les malheurs de Doué commencent à l'issue d'une offensive des Fanci lancée dans la zone de M'Bahiakro en direction de Bouaké, fief de l'ex-rébellion. Les forces régulières s'étaient alors heurtées aux soldats français qui voulaient les empêcher d'avancer. Cela avec l'accord du général Doué qui aurait sommé ses hommes d'obtempérer. Des combats s'en sont suivis, avec un revers subi par les Fanci. Doué a alors été accusé de soutenir la force française contre ses propres hommes, suscitant des grincements de dents au sein de la troupe. L'incident de M'Bahiakro venait ainsi de briser le mystère Doué. La suite se passe de commentaire. A la télévision nationale, des soldats mécontents venus du front tiennent des propos violents à l'encontre de leur Cema et demandent sa démission. L'étoile du natif de Yorozon s'éteignait petit à petit. Le coup de grâce lui sera porté à l'issue des événements de novembre 2004, où il a été obligé de démentir publiquement une accusation de coup d'Etat, face au président de l'Assemblée nationale, Mamadou Koulibaly, et au général de la force Licorne, Henri Poncet. C'est donc un Doué humilié, qui a reçu beaucoup de coups, sans pouvoir en donner véritablement, qui a pris le vol pour l'exil. Après 6 ans d'absence de Côte d'Ivoire, le général revient à la faveur du changement de régime. Comme on le dit cependant, beaucoup d'eau a coulé sous le pont. Est-il encore le Doué adulé par la troupe comme c'était le cas avant son débarquement ? Peut-il rebondir ? Où Ouattara va-t-il mettre l'ancien Cema des Fanci qu'il a reçu le mardi dernier ? La donne, en tout cas, est désormais tout autre. Les Forces républicaines de Côte d'Ivoire (Frci), qui ont abattu presque tout le travail sur le terrain, se positionnent du coup comme les nouveaux maîtres, et entendent jouer à fond cette carte auprès des nouvelles autorités. Autant dire que le général Doué arrive trop tard dans un monde trop vieux.
Hamadou ZIAO
Le géant au pied d'argile
Cette grande célébrité, et cette emprise de l'ancien patron de l'armée sur ses hommes, va cependant fondre comme du beurre au soleil, après l'échec de l'opération « dignité » de novembre 2004. Mathias Doué ne sera donc plus le célèbre général, encore moins le chef charismatique qu'il était. Il a même été perçu comme un officier qui a manqué une double chance d'entrer dans l'histoire. D'abord avec les Fanci pour n'avoir pas pu libérer le pays, pas même son village Yorozon à l'Ouest qui avait été dévasté par l'ex-rébellion. Ensuite, il était soupçonné d'être le pion de la France, qui aurait cependant manqué de courage pour n'avoir pas conclu un coup d'Etat décelé dans les événements de novembre 2004, par l'ancien régime. Le général des Fanci était en effet annoncé dans un char de l'armée française en partance pour les locaux de la télévision nationale, en vue de faire une déclaration pour démettre l'ancien président Laurent Gbagbo. Dans les faits, les malheurs de Doué commencent à l'issue d'une offensive des Fanci lancée dans la zone de M'Bahiakro en direction de Bouaké, fief de l'ex-rébellion. Les forces régulières s'étaient alors heurtées aux soldats français qui voulaient les empêcher d'avancer. Cela avec l'accord du général Doué qui aurait sommé ses hommes d'obtempérer. Des combats s'en sont suivis, avec un revers subi par les Fanci. Doué a alors été accusé de soutenir la force française contre ses propres hommes, suscitant des grincements de dents au sein de la troupe. L'incident de M'Bahiakro venait ainsi de briser le mystère Doué. La suite se passe de commentaire. A la télévision nationale, des soldats mécontents venus du front tiennent des propos violents à l'encontre de leur Cema et demandent sa démission. L'étoile du natif de Yorozon s'éteignait petit à petit. Le coup de grâce lui sera porté à l'issue des événements de novembre 2004, où il a été obligé de démentir publiquement une accusation de coup d'Etat, face au président de l'Assemblée nationale, Mamadou Koulibaly, et au général de la force Licorne, Henri Poncet. C'est donc un Doué humilié, qui a reçu beaucoup de coups, sans pouvoir en donner véritablement, qui a pris le vol pour l'exil. Après 6 ans d'absence de Côte d'Ivoire, le général revient à la faveur du changement de régime. Comme on le dit cependant, beaucoup d'eau a coulé sous le pont. Est-il encore le Doué adulé par la troupe comme c'était le cas avant son débarquement ? Peut-il rebondir ? Où Ouattara va-t-il mettre l'ancien Cema des Fanci qu'il a reçu le mardi dernier ? La donne, en tout cas, est désormais tout autre. Les Forces républicaines de Côte d'Ivoire (Frci), qui ont abattu presque tout le travail sur le terrain, se positionnent du coup comme les nouveaux maîtres, et entendent jouer à fond cette carte auprès des nouvelles autorités. Autant dire que le général Doué arrive trop tard dans un monde trop vieux.
Hamadou ZIAO