7 février 1999. Tout puriste du football africain doit avoir cette date en mémoire. A l’occasion du match de la super coupe africaine mettant aux prises l’Asec d’Abidjan à l’Espérance Sportive de Tunis (EST), le monde entier a découvert, avec une agréable surprise, l’éclosion d’une race de jeunes footballeurs talentueux et prometteurs. Ces jeunes footballeurs ont même battu 3 buts à 1, avec la manière le club tunisien, l’un des meilleurs sur le continent à l’époque. Ce jour-là, le monde entier va découvrir des gamins que d’autres connaissaient déjà parce que les ayant côtoyés depuis le début de leur formation à l’Académie. C’est dans ce cadre que le livre de Michel Alex Kipré, lui-même au cœur du système qui a produit ces gamins, nous édifie et nous apporte des éclairages sur les évènements. Il était leur professeur de français. Ce livre s’ouvre sur une immersion au sein de la formation de l’Asec qui a vécu le fameux match du 7 février 1999. Aligner des jeunes issus d’un centre de formation pour un match aussi important et capital était un pari fou osé par Jean Marc Guillou (JMG) et Roger Ouégnin. Un pari réussi. Alex Kipré, l’auteur, fait revivre les craintes, doutes et angoisses avant et pendant le match et ensuite la grande joie à la fin de la rencontre. L’auteur revient aussi sur sa rencontre avec JMG qu’il qualifie de «rebelle», de personne froide et athée. Alex Kipré passe en revue les différents membres de l’encadrement de ces futurs champions. Entre autres Lambert Amuah, personnage important dans le fonctionnement de l’Académie et bras droit de JMG ; ami d’enfance par ailleurs de l’auteur. C’est après 3 étapes test que les enfants se voient attribuer chacun un sobriquet. Cependant, Alex se privera d’aller en profondeur sur certaines questions. Secrets de l’Académie obligent. Le ‘’professeur’’, avec un autre regard, lève un coin de voile, toujours de l’intérieur, sur la finale de la coupe des champions de 1995. Asec-Orlando Pirates comptant pour le match retour. Il rapproche certains faits et reste interrogateur laissant chacun tirer une conclusion. Quelques jours avant ce match, Alex est victime d’un d’accident mais a la chance d’être en vie. L’Asec quant à elle perdra son match. Une tragédie presque pour le football ivoirien. Il y a ce 11 Octobre 1998. La mort d’Armando, membre de l’Académie et frère cadet de Zokora Didier «Maestro» jette l’émoi sur tout le groupe, la famille du défunt et même JMG, cet être si froid et détaché émotionnellement. Tous sont abattus. Puis survient le 28 Novembre 1998 et la victoire de l’Asec en Ligue des Champions au détriment du Dynamos de Hararé battu 4-0. C’est la joie partout, mais des méditations envahissent l’auteur : « Je réfléchis, et mes pensées m’éloignent de l’euphorie. Trop de coïncidences m’assaillent soudain, qui me donnent à méditer. Octobre 95 : accident de voiture, aucun mort. Décembre 95 : aucune coupe. Octobre 98 : accident par noyade, un mort. Décembre 98 : une coupe. Me revient cette phrase bouleversante d’un encadreur : « mais si vous faites les accidents et puis vous ne voulez pas rester dedans, comment voulez- vous qu’on gagne la coupe ? » Que ceux qui ont des oreilles pour entendre entendent ! », page 224. En 1999, l’Académie est exceptionnellement invitée à participer au prix Goncourt des lycées, prix organisé par la FNAC, le ministère de l’Education nationale, de la recherche et de la technologie avec l’accord de l’Académie Goncourt. Tous des organismes français. Ce prix regroupe près de 50 établissements et l’Académie était le seul établissement africain et le seul qui formait des footballeurs. Avec la victoire du 7 février 1999, les pensionnaires de l’Académie forment dorénavant l’ossature de l’équipe première de l’Asec d’Abidjan. Des conflits vont naître entre les joueurs et dirigeants de l’Asec et les académiciens. Tout ceci a ravivé les tensions nées depuis l’interview de JMG à un quotidien ivoirien où il déclarait que l’Académie n’appartenait pas à l’Asec. Cette phrase avait provoqué le courroux de Roger Ouégnin. Ajouté à cela, l’auteur évoque les sommes d’argent non redistribuées des premiers transferts. Le divorce était inéluctable entre JMG et Roger Ouégnin. ‘’Les Secrets de l’Académie’’ apparaît comme un livre évènement dans le monde sportif ivoirien avec des témoignages édifiants et surprenants. Vivement le tome II pour que les sportifs sachent davantage sur l’arrivée de Jacques Anouma à la tête de la Fédération ivoirienne de football et la vie de l’Académie après leur départ de Sol Béni, le centre d’entraînement de l’Asec.
«Les Secrets de l’Académie»,
Frat-Mat Editions, 2010
Franck. O.
«Les Secrets de l’Académie»,
Frat-Mat Editions, 2010
Franck. O.