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Politique Publié le vendredi 27 mai 2011 | Soir Info

Interview : Traoré Zanga (Cdt des Frci) crie sa colère: "Nous avons été oubliés"

© Soir Info Par Emma
Opérations de pacification: patrouilles des Forces républicaines (Frci) dans les rues d`Abidjan
Mercredi 13 avril 2011. Abidjan.
« Beaucoup de soldats sont impatients »
C’est dans son bureau situé dans les locaux du Commissariat du 1er Arrondissement au Plateau qu’il nous a reçu. Accompagné de ses camarades de lutte, Traoré Zanga, Commandant du « Groupement guerrier pour la dignité et la justice en Côte d’Ivoire » a dit regretter que ses éléments soient délaissés aujourd’hui. A dire vrai, il n’est pas content et il demande un minimum de reconnaissance. Interview.

Comment se fait la cohabitation entre vous et les policiers du Commissariat du 1er arrondissement ?

Traoré Zanga : Il faut dire que c’est suite à de durs combats avec les miliciens et mercenaires de Gbagbo que nous nous sommes retrouvés ici. Et, comme les policiers tardaient à reprendre le travail après l’appel du président de la République, nous avons estimé qu’il était bon d’être ici pour les rassurer. C’est étant ici que Mme la commissaire est arrivée. Depuis lors, elle fait son travail normalement. Quant à nous, nous faisons les interventions sur le terrain en cas de vols, bien sûr en collaboration avec la Police. La cohabitation se passe bien.

C’est quand vous allez céder le 1er Arrondissement à l’ensemble des policiers ?
T. Z : Lorsque tout va se stabiliser et que le président de la République va estimer que le pays est réunifié et maîtrisé, nous allons retourner dans les casernes.
Mais le président Ouattara, il y a au moins trois semaines, vous a demandé de retourner dans les casernes.

T. Z : Effectivement, il avait demandé de le faire. Et beaucoup sont rentrés dans les casernes. Mais, tout le monde ne peut pas y rentrer parce qu’il y a des velléités. Ce qui fait qu’il y a encore des check-points. En plus, certaines personnes nous demandent de rester un peu. Elles disent ne pas être assurées par la présence des autres (ex-Fds, Ndlr).
Vous dites que certaines personnes vous demandent de rester un peu, mais il y a que d’autres personnes qui se plaignent des pillages et autres exactions commmis par des éléments des Frci. N’êtes-vous pas informés ?

T. Z : Oui, nous sommes informés. Il faut reconnaître que dans tout groupe, il y a toujours des éléments incontrôlés. Nous travaillons d’arrache-pied pour que cela cesse. Il est important que les uns et les autres sachent qu’aujourd’hui, nous sommes dans un climat apaisé et qu’il faut collaborer avec tout le monde. Ce n’est plus la chasse aux sorcières. Nous passons ce message tous les jours pour que tout le monde revienne à la raison. Mais n’oublions pas que beaucoup de personnes ont subi des préjudices par la faute de voisins ou de collègues « corps habillés ». A la Pj (Police judiciaire, Ndlr) par exemple, bien que le président de la République ait lancé un appel, la reprise est difficile. Le problème, c’est que, entre eux-mêmes, ils n’ont pas été bien. Certains passaient au domicile de leurs collègues avec les escadrons de la mort pour les menacer. Aujourd’hui, on leur demande de venir, mais ils ne viennent pas.

Au 1er Arrondissement où vous êtes, est-ce que tous les policiers ont repris le travail ?
T. Z : Non. Il y a à peine 30% de l’effectif qui a repris.

Et les autres policiers, où sont-ils?

T. Z : Moi, je ne gère pas les Policiers.

Vous êtes combien d’éléments des Frci présents au 1er Arrondissement ?
T. Z : C’est une section, c’est-à-dire 25 éléments.

Comment vous vous êtes retrouvés dans ce commissariat ?

T. Z : Dans la stratégie d’attaque, depuis Abobo, un groupe devait progresser vers Williamsville et un autre vers le Plateau avec le commandant Chérif Ousmane. Donc, nous faisions partie du groupe qui devait progresser vers le Plateau. Après avoir conquis le Plateau, étant donné que le Commissariat du 1er Arrondissement est un poste stratégique, nous avons posté des éléments-là.

Vous êtes venus de Bouaké ou vous étiez à Abidjan et depuis quand avez-vous commencé votre combat?

T. Z : Nous étions à Abobo. Avec l’entêtement de Laurent Gbagbo à rester au pouvoir, nous avons pris des dispositions. Nous avons commencé à Abobo Pk 18, ensuite à Abobo avocatier, à Abobo gare jusqu’au Samanké où nous avons détruit des chars.
Vous faites partie du « commando invisible » ?

T. Z : Ce sont les journalistes qui ont donné ce nom-là. Parce qu’ils ne savaient pas qui combattaient. Sinon, moi le groupe que je dirige, c’est le « Groupement guerrier pour la dignité et la justice en Côte d’Ivoire ».

Après avoir mené le combat qui était juste, selon vous, est-ce que vous avez été récompensés ?

T. Z : Aujourd’hui, les pères de la victoire sont connus. Il y a, entre autres, moi, Traoré Zanga, Coulibaly Sindou à Abobo derrière rails avec Sangaré Fousseni. Quand on évolue vers Adjamé, il y a Coulibaly Ibrahim, Ouattara Lacina dit Barbu et Abass. Ce sont les personnes-là qui ont combattu et qui continuent de combattre.
N’aviez-vous pas de liens avec feu Ibrahim Coulibaly dit IB ?

T. Z : Pas du tout. Je ne le connais même pas.

Comment se fait votre identification aujourd’hui ?

T. Z : L’identification se fait avec beaucoup de désordre. Les initiateurs de l’offensive sont là. Ils savent ceux avec qui ils ont commencé et progressé. Pour l’identification d’Abidjan, il aurait fallu contacter les initiateurs.

Vos éléments n’ont donc pas encore été identifiés ?

T. Z : Ils n’ont pas encore été identifiés. Il y a des éléments qui sont postés au Palais présidentiel. Il y a d’autres à Azito et à la base navale à Yopougon…
N’avez-vous pas de contacts avec les responsables des Frci comme Wattao, Chérif Ousmane sur le sujet ?

T. Z : J’ai de bons rapports avec le commandant Wattao avec qui j’échange. Tout comme avec le commandant Chérif avec qui j’évoluais dans l’offensive. Ils m’ont dit que les dispositions sont en train d’être prises pour que tout le monde soit enrôlé. Mais, il faut dire que beaucoup de soldats sont impatients. Ils n’arrivent pas à comprendre qu’étant au Plateau, leur enrôlement n’ait pas été fait au moment où l’opération se faisait dans cette commune. Je vous apprends que ceux qui font l’enrôlement ont fini au Plateau et se trouvent aujourd’hui à Abobo. Donc, il y a lieu de s’inquiéter…
Vous pensez avoir été oubliés ?

T. Z : Certainement !

Comment vos éléments vivent depuis que vous avez commencé votre combat ?
T. Z : Depuis que nous avons commencé, je n’ai reçu aucune ration alimentaire. D’autres commandants vont venir confirmer ce que je dis. C’est donc nous-mêmes qui soignons nos blessés et nourrissons nos soldats.
D’où tirez-vous alors vos moyens ?

T. Z : De nombreuses personnes, qui épousent notre combat, nous aident avec le peu de moyens qu’elles ont.

A vous entendre, on se rend compte que vous êtes frustrés et déçus ?
T. Z : C’est vrai qu’il n’y a pas eu d’engagement entre nous et quelqu’un. Mais il faut un minimum de reconnaissance.

Vous voulez quoi concrètement ?

T. Z : Le pays est dirigé quand même. Nous pensons qu’ils savent au moins tout ce que nous avons fait. Ils doivent se demander au moins qui sont ces jeunes-là. Et, après s’il y a d’autres paramètres, on pourra en discuter.
L’argent par exemple ?

T. Z : Moi, je ne suis pas trop accroché à l’argent. Si j’étais trop porté sur l’argent, j’aurais abandonné la lutte. Ce que nous avons fait, c’est grand. Donc, on mérite un merci.
Souhaitez-vous, en plus de la réinsertion, intégrer l’armée, la Police, la Gendarmerie et les autres corps para-militaires ?

T. Z : La réinsertion, c’est tout à fait normal. D’autres méritent d’entrer aussi dans l’armée, s’ils le souhaitent et s’ils remplissent les conditions.
Avez-vous posé ces revendications au commandant Chérif Ousmane qui le responsable du Plateau avec qui vous êtes ?

T. Z : Le commandant Chérif Ousmane ne peut pas décider du sort des combattants d’Abidjan. Il n’a pas lancé un appel pour demander aux jeunes d’Abobo de prendre les armes.

Propos recueillis par SYLLA A.
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