Le metteur en scène ivoirien, Diallo Ticouaï Vincent est monté au créneau pour donner un coup de pouce au processus de reconstruction et de réconciliation postélectorale en Côte d’Ivoire. Aujourd’hui, l’artiste invite ses pairs à faire une exégèse rationnelle et un véritable mea-culpa. Face à la gravité de la crise ivoirienne, Diallo Ticouaï Vincent dit «plus jamais çà !»
«La guerre est terminée ! », dixit le Président de la République. Que pouvez-vous dire aux nouvelles autorités ivoiriennes pour permettre le retour des artistes ayant soutenu l’ancien régime et qui sont en fuite ?
Les nouvelles autorités ivoiriennes doivent nous rassurer au sujet de la sécurité de tous ceux qui ont pris peur, qui ont quitté leur patrie et qui sont en train de souffrir. Je pense que le nouveau Chef de l’Etat est un grand Monsieur et qu’il a un grand cœur. Il connaît la pratique de l’Etat. Qui saura qu’après la bataille, quand on a gagné, l’essentiel est de rassembler tout le monde autour de soi. Quand il prend la parole, il dit : « Mes chers compatriotes… ». Mais, on ne peut pas être compatriote en dehors de sa patrie. Je demande aux autorités leur degré de pardon et de tolérance, pour que ceux qui hésitent, ceux qui peut-être par leurs propos ou par leur engagement ont dû faire des manquements, puissent revenir au pays. Et voir dans quelle condition, ils pourront se rencontrer pour se pardonner mutuellement. Il faut créer les conditions d’un retour pour mettre en confiance les artistes en fuite.
Quel message à l’endroit des artistes que vous dites en fuite qui sont encore dans le doute et la peur ?
Je n’ai pas de moyens de communiquer avec eux. Parce qu’il me faut les voir pour savoir dans quelles conditions ils sont et pourquoi ils sont partis. Aujourd’hui, SEM Alassane Ouattara est le Chef de l’Etat et nous devons tous l’accompagner. Je demande au Président de la République d’amnistier tout le monde. Parce que nous avons tous perdu quelque chose dans cette crise. S’il pense à une amnistie qui est empreinte d’amour et de sincérité, il verra une explosion de joie en Côte d’Ivoire. Parce que dans le pays, tout le monde est méfiant. C’est le Président de la République qui peut décrisper tout le monde.
Quel doit être le nouveau rôle des artistes dans ce processus de reconstruction, de réconciliation et de paix ?
D’abord, il faut que les artistes rejoignent leur place. Moi, je dis à tous mes frères artistes que les clubs de soutien, c’est terminé ! Il faudrait que nous créions des nouvelles conditions d’un art majeur qui demeure dans le temps et dans l’espace. Notre malheur, c’est de vouloir chanter la gloire des hommes. Il faut plutôt chanter ce qui peut aider le peuple et aider les autorités à nous accompagner. Aujourd’hui, il faut que les artistes créent en se disant : « Je dois rester éternellement dans l’esprit de mes concitoyens ». Je n’enlève pas la conviction de tout un chacun de soutenir le programme politique d’un candidat ! On me dira qu’on a vu des artistes français comme Michel Sardou et Johnny Halliday basculer dans le camp de Nicolas Sarkozy. Ou même des historiens et des intellectuels qui ont basculé dans le camp de l’actuel président français, toujours par rapport à son programme de gouvernement. Et ceux-là étaient hier avec François Mitterrand. Lors de mon séjour en France, quand je les ai interrogés, ils m’ont répondu qu’ils soutenaient un programme politique et non un homme politique.
Vous envisagez créer l’Ordre des savants de l’Art. N’est-ce pas une association de trop?
Vous savez, dans un pays, il n’y a jamais de structure en plus. Notre pays est sur un nouveau départ. Il faut faire en sorte que l’art retrouve tout son règne et joue son rôle. L’art ou la culture en général qu’on le veuille ou pas sont des éléments essentiels de l’économie d’un pays. Si on parle de l’industrialisation de l’art, alors il faut parler des hommes qualifiés pour coucher des textes réfléchis. Il faut donc penser à une association dénommée l’Ordre des savants de l’Art. Bientôt nous allons appeler tous les écrivains, tous les cinéastes et autres artistes qui savent utiliser leur savoir pour pondre des textes. Je souhaiterais que l’Art quitte le bouffon. Parce qu’il y a des génies tels Zadi Zaourou, Tiburce Koffi, Jean-Marie Adiaffi, Niangoran Porquet et autres. Je m’adresse à ces personnes qui ont fait de la Côte d’Ivoire un pôle culturel. Nous allons voir l’Art autrement pour que les Ivoiriens prennent les artistes au sérieux.
Etes-vous en train de dire que les artistes ivoiriens ont une part de responsabilité dans la crise postélectorale en Côte d’Ivoire ?
Je suis de nature à ne pas condamner. Parce que moi-même, je me trompe. Chacun de nous peut se tromper. Vous savez, dans un pays, quand il y a une mode, chacun est dans l’élan de la mode. N’oubliez pas que le Président de la République était Premier ministre auparavant et que des artistes l’ont chanté. Je me souviens qu’il y a eu des spectacles organisés par Consty Ecka et Yves Zogbo Junior – entendons les ‘’Africa Music Awards’’.
J’y ai vu SEM Alassane Ouattara et son épouse qui étaient bien accueillis et tout était à leur gloire. Il y a une tendance en Afrique, qui est de vouloir plaire aux chefs, vouloir l’accompagner, mais on ne connaît pas les limites. Souvent, on se perd, parce que la politique est dangereuse. Un Chef d’Etat a un programme culturel, nous nous devons de soutenir ce programme culturel. Nous devons être honnêtes intellectuellement avec celui qui exerce le pouvoir, sans perdre notre âme.
Réalisé par Patrick Krou
«La guerre est terminée ! », dixit le Président de la République. Que pouvez-vous dire aux nouvelles autorités ivoiriennes pour permettre le retour des artistes ayant soutenu l’ancien régime et qui sont en fuite ?
Les nouvelles autorités ivoiriennes doivent nous rassurer au sujet de la sécurité de tous ceux qui ont pris peur, qui ont quitté leur patrie et qui sont en train de souffrir. Je pense que le nouveau Chef de l’Etat est un grand Monsieur et qu’il a un grand cœur. Il connaît la pratique de l’Etat. Qui saura qu’après la bataille, quand on a gagné, l’essentiel est de rassembler tout le monde autour de soi. Quand il prend la parole, il dit : « Mes chers compatriotes… ». Mais, on ne peut pas être compatriote en dehors de sa patrie. Je demande aux autorités leur degré de pardon et de tolérance, pour que ceux qui hésitent, ceux qui peut-être par leurs propos ou par leur engagement ont dû faire des manquements, puissent revenir au pays. Et voir dans quelle condition, ils pourront se rencontrer pour se pardonner mutuellement. Il faut créer les conditions d’un retour pour mettre en confiance les artistes en fuite.
Quel message à l’endroit des artistes que vous dites en fuite qui sont encore dans le doute et la peur ?
Je n’ai pas de moyens de communiquer avec eux. Parce qu’il me faut les voir pour savoir dans quelles conditions ils sont et pourquoi ils sont partis. Aujourd’hui, SEM Alassane Ouattara est le Chef de l’Etat et nous devons tous l’accompagner. Je demande au Président de la République d’amnistier tout le monde. Parce que nous avons tous perdu quelque chose dans cette crise. S’il pense à une amnistie qui est empreinte d’amour et de sincérité, il verra une explosion de joie en Côte d’Ivoire. Parce que dans le pays, tout le monde est méfiant. C’est le Président de la République qui peut décrisper tout le monde.
Quel doit être le nouveau rôle des artistes dans ce processus de reconstruction, de réconciliation et de paix ?
D’abord, il faut que les artistes rejoignent leur place. Moi, je dis à tous mes frères artistes que les clubs de soutien, c’est terminé ! Il faudrait que nous créions des nouvelles conditions d’un art majeur qui demeure dans le temps et dans l’espace. Notre malheur, c’est de vouloir chanter la gloire des hommes. Il faut plutôt chanter ce qui peut aider le peuple et aider les autorités à nous accompagner. Aujourd’hui, il faut que les artistes créent en se disant : « Je dois rester éternellement dans l’esprit de mes concitoyens ». Je n’enlève pas la conviction de tout un chacun de soutenir le programme politique d’un candidat ! On me dira qu’on a vu des artistes français comme Michel Sardou et Johnny Halliday basculer dans le camp de Nicolas Sarkozy. Ou même des historiens et des intellectuels qui ont basculé dans le camp de l’actuel président français, toujours par rapport à son programme de gouvernement. Et ceux-là étaient hier avec François Mitterrand. Lors de mon séjour en France, quand je les ai interrogés, ils m’ont répondu qu’ils soutenaient un programme politique et non un homme politique.
Vous envisagez créer l’Ordre des savants de l’Art. N’est-ce pas une association de trop?
Vous savez, dans un pays, il n’y a jamais de structure en plus. Notre pays est sur un nouveau départ. Il faut faire en sorte que l’art retrouve tout son règne et joue son rôle. L’art ou la culture en général qu’on le veuille ou pas sont des éléments essentiels de l’économie d’un pays. Si on parle de l’industrialisation de l’art, alors il faut parler des hommes qualifiés pour coucher des textes réfléchis. Il faut donc penser à une association dénommée l’Ordre des savants de l’Art. Bientôt nous allons appeler tous les écrivains, tous les cinéastes et autres artistes qui savent utiliser leur savoir pour pondre des textes. Je souhaiterais que l’Art quitte le bouffon. Parce qu’il y a des génies tels Zadi Zaourou, Tiburce Koffi, Jean-Marie Adiaffi, Niangoran Porquet et autres. Je m’adresse à ces personnes qui ont fait de la Côte d’Ivoire un pôle culturel. Nous allons voir l’Art autrement pour que les Ivoiriens prennent les artistes au sérieux.
Etes-vous en train de dire que les artistes ivoiriens ont une part de responsabilité dans la crise postélectorale en Côte d’Ivoire ?
Je suis de nature à ne pas condamner. Parce que moi-même, je me trompe. Chacun de nous peut se tromper. Vous savez, dans un pays, quand il y a une mode, chacun est dans l’élan de la mode. N’oubliez pas que le Président de la République était Premier ministre auparavant et que des artistes l’ont chanté. Je me souviens qu’il y a eu des spectacles organisés par Consty Ecka et Yves Zogbo Junior – entendons les ‘’Africa Music Awards’’.
J’y ai vu SEM Alassane Ouattara et son épouse qui étaient bien accueillis et tout était à leur gloire. Il y a une tendance en Afrique, qui est de vouloir plaire aux chefs, vouloir l’accompagner, mais on ne connaît pas les limites. Souvent, on se perd, parce que la politique est dangereuse. Un Chef d’Etat a un programme culturel, nous nous devons de soutenir ce programme culturel. Nous devons être honnêtes intellectuellement avec celui qui exerce le pouvoir, sans perdre notre âme.
Réalisé par Patrick Krou