Pour la préservation du couvert forestier ivoirien, il ne ménage aucun effort. Samedi dernier, le ministre des Eaux et Forêts, Nabo Clément, était encore sur le terrain. Cette fois, à Adzopé. Dans cette localité située, à une centaine de kilomètres d'Abidjan, le garant de la forêt de Côte d'Ivoire s'est rendu dans quatre grosses unités industrielles, qui constituent visiblement la pierre angulaire de l'industrie locale du bois. C'est d'abord la société Inprobois(IPB), qui accueille, après une brève escale au cantonnement des Eaux et Forêts de cette localité, le ministre Nabo Clément et sa délégation. Dirigée par M. Patrice Fervant, PDG, elle emploie 550 personnes. Sa spécialité, la fabrication de plaquage déroulé, contreplaqué ou encore panneaux lattés. Après un tour d'horizon de ses installations, le ministre Nabo Clément, en compagnie du Préfet de région Boni Kouadio, met le cap sur la Nouvelle Scierie d'Adzopé (NSA). Sous la conduite du DAAF Sahly Samer, il sillonne les locaux de cette entreprise, forte d'au moins 400 employés, qui produit du plaquage simple et des contreplaqués. Troisième usine à ouvrir ses portes à l'illustre visiteur, Tropical Bois(IB) dont le PDG est Ricardo Tropeni. Pas moins de 800 personnes y travaillent, pour faire des tranches, des planches et du sciage. Ensuite, direction : la FIP (Fabrique Ivoirienne de Parquet), située juste à deux pas, en face. Là, sous la houlette de M. Bruno Morizio, PDG, le ministre Nabo Clément sillonne les installations et s'imprègnent du processus de fabrication des « carreaux » en bois. Ici, on compte au minimum 650 salariés. Fini la visite, place aux échanges. Au mon de ses pairs, M. Morizio profite de cette opportunité, qui ne s'offre pas toujours à eux, pour égrener leurs difficultés. Il s'agit, à l'en croire, pêle-mêle de l'approvisionnement en bois, l'abattage de petites tiges, qui empêche la régénération de la forêt, du sciage clandestin de bois, qui, regrette t-il, est devenu « un business, une économie souterraine». Ensuite, il préconise une table-ronde de concertation avec la tutelle afin de trouver des solutions à ces obstacles au bon fonctionnement de leurs entreprises. D'un ton rassurant, le ministre Nabo dissipe les inquiétudes de ses hôtes, en réaffirmant sa farouche volonté d'assainir l'industrie du bois. « C'est vrai que des gens refusent de se conformer à la loi, mais ils seront poursuivis », prévient-il. Avant de marteler : « Le sciage clandestin doit s'arrêter. Nous allons mettre aux arrêts tous les fraudeurs». Aussi promet-il de tout mettre en œuvre pour que les industriels, qui exercent dans la légalité, puissent avoir du bois. Le ministre des Eaux et Forêts va même plus loin : « A la longue, nous allons proposer au gouvernement de suspendre l'exportation du bois en grume pour que les usines qui n'ont pas fermé pendant la crise puissent continuer à travailler ». Après les industriels, place aux revendeurs de bois qui sont également en proie à quelques soucis. Sur la place de la nouvelle gare d'Adzopé, par la voix d'Ali Ouattara, leur porte-parole, ils lancent un véritable cri du cœur au ministre Nabo Clément. « Aucune scierie ne veut nous vendre du bois. Même le bois de chauffe n'existe plus ici à Adzopé», calme t-il, d'une voix empreinte d'émotion. «Pour avoir une feuille de contreplaqué, c'est un vrai parcours du combattant, alors que nous devrions bénéficier des retombées des usines», insiste Ali Ouattara. «Nous n'avons même pas un chevron. Nous sommes orphelins », renchérit Diakité, un autre revendeur, tout en menaçant de marcher s'il le faut, contre les scieries ou encore les incendier. Avec des mots apaisants, le ministre Nabo Clément décrispe l'atmosphère. «Ne marchez pas, ne brûlez pas. Je vais parler aux industriels, nous allons trouver des solutions qui arrangent toutes les parties », rassure t-il, à la grande joie de ces opérateurs du bois.
Y.Sangaré, envoyé spécial
Y.Sangaré, envoyé spécial