Dans quelques années, on parlera d’elle au passé. C’est d’ailleurs la volonté de ses auteurs qui ont tenu un conclave les 10 et 11 septembre dernier, dans la ville de Bouaké pour se pencher sur leur avenir et ‘’se fondre’’ dans le RHDP. L’ex-rébellion ivoirienne-puisque c’est bien d’elle qu’il s’agit- a fait sa mue. Lorsqu’elle éclatait un 19 septembre 2002, beaucoup d’Ivoiriens et d’observateurs de la scène politique ivoirienne ont pensé qu’il s’agissait d’un mouvement qui durerait juste quelques jours, voire quelques mois. Elle a duré près de dix ans. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’elle a apporté aux Ivoiriens l’un des scrutins les plus démocratiques de sa jeune histoire. En effet, c’était l’un des objectifs de Guillaume Soro et ses camarades. Lorsqu’ils prenaient les armes, ils l’ont clairement signifié. Dans son livre intitulé ‘’ Pourquoi je suis devenu un rebelle, la Côte d’Ivoire au bord du gouffre’’, le secrétaire général de l’ex-mouvement rebelle, le dit si bien. Il voulait que prenne fin, le délit de faciès et de patronyme dont étaient victimes beaucoup de personnes, surtout les ressortissants du nord du pays: «Si nous avons nos papiers -entendez les cartes nationales d’identité- à 12 heures, à 12 h 5, nous déposons les armes’’ avait-il dit dans l’une de ses nombreuses interviews accordées à la presse étrangère. Et il s’y est attelé durant toute la crise. Le couronnement? L’organisation des deux tours de la présidentielle de 2010. Un scrutin que tous les spécialistes et les observateurs s’accordent à reconnaître qu’il a connu un taux de participation record au monde. Comme s’ils voulaient dire à tous ceux qui ne voulaient pas sortir de cette crise qu’ils en ont assez, les Ivoiriens se sont massivement rendus aux urnes pour choisir celui qu’ils jugent apte à les diriger. Ils ont porté leur choix sur Alassane Ouattara au second tour, avec 54 % des suffrages. Des élections certifiées par l’ONU mais que Laurent Gbagbo n’a pas trouvé suffisamment transparentes au point de demander à son ‘’ami Pablo’’, Paul Yao-N’Dré, président du Conseil constitutionnel d’invalider les résultats de 13 régions et de le proclamer élu. Seulement voilà, la CEI qui a organisé de fond en comble ce scrutin avait déjà, de son côté, et selon la loi, proclamé Ouattara vainqueur. Une victoire aussitôt reconnue par la communauté internationale qui a demandé au perdant de reconnaître sa défaite. On connaît la suite. Laurent Gbagbo a été déchu du pouvoir auquel il s’accrochait tant, un 11 avril. Et depuis lors, le nouveau président de la République s’est installé et est à la tâche, après sa prestation de serment le 21 mai dernier. A cette cérémonie, la quasi-totalité des chefs d’état africains ont effectué le déplacement. Et le président français Nicolas Sarkozy aussi. Le pays venait ainsi d’ouvrir une page nouvelle de son histoire. Mais que de chemin parcouru. Des accords de Lomé en 2003, à l’Accord politique de Ouagadougou le 7 mars 2007, à la suite duquel Guillaume Soro a été nommé Premier ministre, en passant par ceux de Pretoria, Accra, Dakar, et Linas-Marcoussis, les négociations ont buté sur le refus du clan Gbagbo. Il a fallu la détermination, la témérité, la pugnacité de Guillaume Soro pour arriver à bout d’une décennie de crise politique et de cinq mois de crise post-électorale. Aujourd’hui, les Ivoiriens qui ont été divisés réapprennent à vivre ensemble, comme le leur demande leur président.
Yves-M. ABIET
Yves-M. ABIET
