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Politique Publié le jeudi 19 janvier 2012 | Le Temps

Pr Hubert Oulaye : Paul Antoine Bohoun Bouabré, mort pour la Côte d’Ivoire

© Le Temps
Paul-Antoine Bohoun Bouabré ex-ministre de l’économie et des finances ivoirien
Après Tagro Désiré, après Tapé Gozé, après Gnan Raymond, la Côte d’Ivoire, le département d’Issia, le Grand Ouest, le Fpi, le Président Laurent Gbagbo, pleurent à nouveau la mort précoce et injuste, d’un digne fils de la Côte d’Ivoire, le ministre d’Etat Paul Antoine Bohoun Bouabré, le «fer de lance de la résistance économique», qui vient de s’éteindre à jamais, en Israël, en Terre Sainte. Paul est mort en exil, en Israël, loin des siens, loin de sa femme Léa, de ses enfants, de ses parents, loin de ses amis, loin de ses camarades du Fpi , emprisonnés en Côte d’Ivoire pour certains, exilés et traqués en Afrique et de par le monde pour les autres, sur la base de motifs fantaisistes. Paul est mort loin de son pays, la Côte d’Ivoire, qu’il a tant aimé, tant servi et à qui il a sacrifié on peut le dire une partie de sa vie.

Paul est mort loin de ceux qu’il aimait, après un combat solitaire, courageux et silencieux contre un mal pernicieux et tenace. Mais au regard des circonstances Paul est mort, victime finalement du système de répression absurde et aveugle Ouattara-Sarkozy. Oui, Paul est la grande victime d’une méthode de «crime parfait et silencieux» mise au point par Nicolas Sarkozy et Alassane Ouattara et expérimentée avec succès pendant la crise post-électorale en Côte d’Ivoire avec la fermeture sans préavis des banques françaises ainsi que l’embargo sur les médicaments, mesures décidées par le président français pour soutenir son poulain en difficulté, au mépris de la vie des Ivoiriens. Qui pense aujourd’hui à toutes ces personnes mortes pendant cette période , privées par les banques françaises de leur argent et qui n’ont pu se soigner ou secourir un parent ou un ami malade, ou mortes par manque de médicaments dans les pharmacies ? Qui même songe à rattacher ces morts,en réalité ces meurtres, à la fermeture des banques et à l’impossibilité pour ces personnes de se soigner ou de se procurer des médicaments. Aucune Ong Humanitaire n’a crû devoir dénoncer ces méthodes hautement criminelles ? Pour le ministre d’Etat Paul Antoine Bohoun Bouabré, c’est l’un des membres et non des moindres de la Grande Confrérie Françafricaine, Radio France Internationale (Rfi), qui a révélé au monde le rejet par Ouattara de la demande de dégel, qu’il avait formulée pour ses soins hospitaliers. Qu’il crève ce Bohoun Bouabré ! Le gel des biens des proches du Président Gbagbo, relève de la même méthode et du pur cynisme .

Affamer pour réduire à la mendicité, priver du minimum financier pour empêcher de se soigner, bref, «tuer sans être vu et désigné comme criminel». En droit pénal le crime est affaire d’intention. Je soutiens que derrière la décision prise par Ouattara de geler les comptes, il y a l’intention secrète d’éliminer ses opposants «par privation des moyens de se nourrir, de se soigner…». Le Procureur de la République lui-même sait qu’en matière de saisie, le droit qui reste malgré tout une discipline sociale et non pas criminelle, prévoit toujours une quotité non saisissable qui correspond aux moyens laissés par la loi au «saisi» pour lui préserver le minimum vital (nourriture, logement, soins médicaux..). Et pourtant rien de cela n’est prévu. Mais peut-on encore parler de droit dans ce pays pour les vaincus de la France et des Frci (?). J’ai entretenu avec Paul, durant mon passage au gouvernement, plus que d’excellents rapports de travail.

Paul avait pleine conscience de la grande sensibilité des questions touchant l’emploi et les fonctionnaires. Il m’a toujours assuré de son soutien sur les dossiers de mon département, notamment sur la création du Fonds National Pour l’Emploi et sur le lancement des travaux de réforme du Statut Général de la fonction publique. Au-delà, Paul m’a toujours témoigné avant, pendant et après mon passage au gouvernement, une amitié sincère et une grande considération. Lorsque je suis parti du gouvernement, il est passé à la maison le lendemain de l’annonce, à sept heures pour me réconforter. Je voudrais par devoir de mémoire et parce qu’il le mérite, rendre hommage à cet Homme exceptionnel, qui incontestablement aura marqué son temps ainsi que les esprits, par son style, ses œuvres capitales et surtout par son engagement politique sans faille auprès de notre chef, le Président Laurent Gbagbo. Le Président Laurent Gbagbo alors dans l’opposition affirmait souvent, qu’il avait les Idées et les Hommes pour gouverner. Incontestablement, Paul Antoine Bohoun Bouabré était un de ces Hommes sur lesquels il comptait pour refonder la Côte d’Ivoire.

Economiste chevronné, Paul a su allier ses qualités d’enseignant-chercheur d’université à l’exigence de pragmatisme que requiert le «métier de ministre». En effet, au moment où le Président Laurent Gbagbo arrive au pouvoir en octobre 2000, la Côte d’Ivoire déjà mise à l’index par l’Union européenne depuis l’ère Konan Bédié, était ostracisée pour cause de coup d’Etat du Général Guéï. A partir de septembre 2002 le pays était confronté aux conséquences économiques de la guerre civile et de la division en deux du territoire national. Sous l’habillage de concepts universitaires tels que «le budget sécurisé, le budget de stabilisation, le budget d’assainissement, le budget de sauvetage, le budget de normalisation», le ministre de l’Economie qu’il fut, a appliqué à la Côte d’Ivoire, «une démarche méthodologique et des solutions économiques gagnantes» , qui ont permis à notre pays de résister et peu à peu ont ramené la confiance des partenaires financiers tant multilatéraux que bilatéraux en la Côte d’Ivoire.

Par les défis majeurs qu’il a su relever pour notre Pays dans un contexte de crise aigüe, le ministre Paul Antoine Bohoun Bouabré est indiscutablement le meilleur ministre de l’économie que la Côte d’Ivoire ait connu depuis son indépendance. Il suffira de rappeler qu’en presque six mois de gouvernement précisément en juin 2001 il a mis fin à dix (10) années d’injustice dans le milieu enseignant créée par les salaires à deux vitesse , institué le 18 décembre 1991 par le Premier ministre Alassane Ouattara. Il avait obtenu courant 2002 les assurances de l’admission de la Côte d’Ivoire à l’initiative Ppte pour 2003. C’est sur la foi de cette promesse qu’il m’avait permis en tant que ministre de la Fonction publique de démarrer avec les syndicats, dès 2002, les premières discussions en vue de la réforme du Statut général de la Fonction publique. Malheureusement, la guerre imposée à notre pays le 19 septembre 2002, a repoussé cette réforme en 2007. Cependant, avec lui les fonctionnaires n’ont jamais connu une seule fin de mois sans salaire ni de retard. Paul jouissait d’une grande confiance de la part du Président Laurent Gbagbo qui lui confiait souvent des missions de la plus haute importance. Cependant cet Homme politique de Premier Plan restait disponible pour son parti le FPi et pour sa région. C’était un homme de terrain, infatigable, qui «mouillait le maillot». Paul était partout, à Abidjan, à Issia, à Saïoua, à Niakia son village. Paul avait un projet pour le Grand Ouest, à réaliser ensemble me disait-il, aussitôt la paix revenue. Il s’en est allé avec.

Paul, l’économiste, le politique, le camarade, l’ami, part laissant derrière lui un vide difficile à combler. Mais je sais qu’il nous dit alors qu’il part : «résistez, poursuivez le combat jusqu’au bout, car au bout se trouvent la vérité et la liberté, pour la côte d’Ivoire et pour notre Président, Laurent Gbagbo».

Au Président de la République Laurent Gbagbo qui perd un de ses fidèles compagnons, à Léa la femme de Paul , à ses enfants, à ses parents et frères d’Issia, j’adresse mes condoléances les plus attristées et exprime toute ma compassion. A Paul qui nous quitte, je dirai seulement : «va et repose en paix, sur la terre de tes ancêtres. Grand tu as été, Grand tu resteras pour nous tes camarades de combat politique et pour la Côte d’Ivoire vrai. Rien, des manœuvres, calomnies, méchancetés et autres bassesses déployées par nos adversaires pour ternir ton image, ne pourra effacer des mémoires ce que tu as été : un Grand. Mort à cause de la Côte d’Ivoire, Mort pour la Côte d’Ivoire. Ton nom restera à jamais gravé en lettres d’or dans le Livre Ivoire».
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