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Politique Publié le mardi 13 mars 2012 | L’Elephant Déchaîné

Après le gouvernement : Soro au parlement pour faire passer «les lois difficiles à prendre»

© L’Elephant Déchaîné Par DR
Guillaume Soro, nouveau président de l`Assemblée Nationale
Lundi 12 mars 2012. Yamoussoukro.
Quand Guillaume Soro était secrétaire général de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI), celle-ci était déclarée hors-la-loi. Dès qu’elle a été reconnue légale par le gouvernement d’alors en 1997, le chef de l’organisation étudiante a quitté la tête de la structure en considérant avoir rempli sa mission. A la tête de la rébellion depuis 2002, Soro obtiendra la reconnaissance de fait des Forces nouvelles par l’Etat de Côte d’Ivoire à l’occasion de l’accord politique de Ouagadougou en mars 2007. Il sera alors nommé Premier ministre et quittera officiellement ses fonctions de chef des forces nouvelles «de la République de Côte d’Ivoire». Alors qu’il n’a pas ses 40 ans révolus comme le stipule la loi pour être président de l’assemblée nationale, Guillaume Kigbafory Soro est depuis hier au perchoir au nom des accords autrefois signés dans le contexte de la crise. Faisant du coup de cette assemblée un parlement de crise en vertu des circonstances exceptionnelles de l’élection de son président. Mais cette interprétation de l’accord de Pretoria qui accorde le droit de candidature à tout signataire de l’accord de Marcoussis aux élections de sortie de crise, semble être la dernière, parce que la validité desdits accords expire à la fin des élections générales. Ainsi le pays devrait franchir un autre cap institutionnel après une décennie de gouvernance chaotique sur la base des multiples accords. On sait en effet que sans le dire officiellement, la classe politique s’est accordée depuis janvier 2003 à l’occasion des négociations de Linas-Marcoussis, pour mettre de côté la gestion constitutionnelle de l’Etat. Obligeant tous les gouvernements successifs à diriger le pays au coup par coup après moult tractations. C’est dans ce sens qu’on comprendra cette surprise d’Alassane Ouattara qui lors du débat télévisé de l’entre deux tours de la présidentielle avec l’ancien chef de l’Etat s’était étonné que Laurent Gbagbo prenne tout seul la décision du couvre-feu sans lui avoir au préalable téléphoné. C’est que les décisions au sommet de l’Etat étaient prises en concertation entre Gbagbo, Ouattara et Bédié. Le gouvernement de la refondation du FPI ayant été renversé par Marcoussis, les différents gouvernements dits de réconciliation ont dirigé le pays en mettant de côté la plupart du temps la Constitution. Comme quand il s’est agi chaque fois de nommer un premier ministre et des membres du gouvernement inamovibles, de mettre en place la Commission électorale indépendante. Pareil à l’occasion des élections ou les critères constitutionnels ont été bafoués. En témoigne cette dernière élection du président du parlement. Que vaudra donc encore cette constitution que les politiciens se sont accordés d’ignorer en permanence, à la désolation d’un Mamadou Koulibaly, président de l’assemblée sortante, qui n’a eu de cesse d’en appeler au respect de l’Etat de droit ? La nouvelle classe politique née des dernières élections acceptera-t-elle de revenir au respect de la loi fondamentale de juin 2000 ? Probablement pas.

Quelle reforme constitutionnelle ?
Si la Côte d’Ivoire ne peut se donner le luxe de fonctionner encore sous le principe d’accords caduques, le pays semble avoir tourné le dos à une loi fondamentale votée, on s’en souvient, dans une atmosphère polémique et jugée par certains comme confligène. Dans ces conditions, il semble tout urgent de voter une nouvelle constitution. Il est cependant peu probable d’organiser dans le contexte actuel un référendum. La nouvelle assemblée nationale aura donc certainement pour mission de procéder à une reforme constitutionnelle pour que très rapidement le pays se retrouve dans une nouvelle ère légale. Vu sous cet angle, l’on pourrait comprendre aisément le choix de Soro. Il s’agira en effet pour celui qui s’est défini comme en mission pour « imposer la démocratie », d’achever ce qu’il a commencé. A la tête de l’institution parlementaire, que le juriste Hans Kelsen a judicieusement appelée « le destin de la démocratie », Soro aura sûrement l’appui de Ouattara pour faire ce qu’il connait le mieux : imposer ce qu’il jugera nécessaire dans sa compréhension de la démocratie. En l’occurrence les lois délicates que le chef de l’Etat avait déclarées de « difficiles à prendre. » Notamment celles concernant la nationalité, le foncier, l’éligibilité, etc. il n’y a donc rien de nouveau sous le soleil. Soro, le « Zorro » de la crise ivoirienne reste l’homme fort des situations périlleuses. Ouattara 1er sait compter sur lui pour faire avaler la pilule des lois pénibles aux conservateurs de l’ancien parti unique. Sûrement que les caciques du PDCI ont mesuré toutes leurs responsabilités en se soumettant au choix de « Guillaume le conquérant ». Certes, ils n’ont pas eu d’autres alternatives, puisque l’octroi de la Primature en dépendait. Les députés PDCI savaient que la désignation du nouveau premier ministre dépendait de l’élection parlementaire. Après donc ce deal parfait, reste maintenant à savoir quelle attitude aura le nouveau président de l’Assemblée nationale vis-à-vis de la loi.

De la rébellion à la législature
Situation toute inédite pour l’ancien patron des forces nouvelles. C’est en tout cas la première fois que Soro sera obligé d’agir dans une situation de parfaite légalité. De surcroit c’est à lui qu’il incombe désormais de veiller à ce que les choses se passent selon la loi. Car le rôle du parlement dans une démocratie est de faire et défaire les lois. Après avoir passé les quarante premières années de sa vie à violer la loi pour faire triompher ses convictions, très souvent au prix d’immenses sacrifices, le nouveau député de Ferkessédougou se retrouve dans une position inédite de donner force à la loi. Sans ses traditionnels moyens de pression. C’est ici que commencera donc véritablement la carrière politique de l’homme. Jusque-là, il agissait à titre exceptionnel dans des situations exceptionnelles. Désormais, l’ancien leader étudiant n’aura plus les manifestations de rue, ni une armée d’insurgés pour se faire entendre. Il devra ne compter que sur la force de ses arguments dans un hémicycle où il est l’un des plus jeunes députés. Même si Ouattara 1er n’a pas eu besoin de prendre une ordonnance présidentielle pour lui attribuer les fameux quarante ans qui n’ont que trop tardé, toujours est-il que Soro vient de boucler l’époque de sa jeunesse rythmée de revendications enflammées et au pas de course. Il est désormais entré dans la cours des hommes d’Etat dont les populations sont en droit d’attendre sagesse et modération. Le temps de la mue ?
BAMBA L WIWA
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