La résidence du ministre de la Juistice, Jeannot Ahoussou-Kouadio,
ne désemplit pas depuis sa nomination à la primature.
Il y a deux semaines, lorsqu’à la Riviera III vous demandiez où se trouve la résidence de Charles Konan Banny, tout indicateur aurait ajouté à la fin : « c’est la maison avec beaucoup de véhicules devant ». Mais depuis quelques semaines, si on ne vous précise pas que les imposants portails du domicile de l’ex-gouverneur de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bcedao) sont verts, vous vous retrouverez directement chez son voisin d’en face : le Premier ministre Jeannot Ahoussou-Kouadio. Selon des voisins, dès l’évocation du nom de ce dernier pour succéder à Guillaume Soro à la Maison Blanche, un ballet de personnalités et d’amis a commencé. Le mouvement, indiquent-ils, s’est accentué depuis le 13 mars, date de la nomination de l’avocat à la primature.
Vendredi 16 mars, nous rendons une petite visite au chef du gouvernement. La nuit enveloppe Abidjan, peu à peu. Les fidèles musulmans accourent dans les mosquées pour la prière quotidienne du coucher du soleil. Au même moment, des véhicules continuent de stationner devant la résidence de Jeannot Ahoussou. Leurs propriétaires viennent dire leurs félicitations au nouveau promu. L’espace tout le long du mur de la bâtisse est occupé par les voitures de visiteurs. «C’est comme cela depuis quelques jours. Lorsque le crépuscule approche, nous assistons à un ballet de véhicules. Ça dure jusque tard dans la nuit », confie un manœuvre qui travaille sur un chantier pas loin de là. Les conducteurs garent comme ils peuvent. Certains chauffeurs ont préféré se mettre plus loin dans le prolongement de la résidence de Konan Banny. Là, un papier collé sur le pare-brise d’un mini-car appelé Massa, porte cette inscription : « Convoi Ong Koviessou Yopougon ». Le chauffeur d’une personnalité a stationné son véhicule juste à côté du mini-car. Il fait ses ablutions et se prépare pour la prière. « On ne partira pas d’ici de si tôt. Le Premier ministre n’est pas encore-là », croit-il savoir. « Le patron prend soin de finir ce qu’il a à faire au bureau avant de rentrer. C’est pendant son temps libre qu’il reçoit les visiteurs », précise un de ses proches.
Comme dans un palais…
Les personnalités venues, ce jour, attendent devant le portail. Elles causent en attendant l’arrivée du maître des lieux. Nous en reconnaissons certaines, bien connues : le secrétaire général du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci), Alphonse Djédjé Mady, l’ancien ministre des Affaires étrangères, Gervais Kacou, etc. La délégation du Pdci est venue adresser ses félicitations à Jeannot Ahoussou. Comme elle, plusieurs corporations et des personnes sont venues à titre individuel. Les visiteurs causent par petits groupes. Pour d’autres, l’heure est aux présentations. « Procureur Silué, colonel Konan. colonel Konan, procureur Silué », dit un homme à deux personnes qu’il connaît déjà, apparemment. Tout le monde regagne l’intérieur de la cour lorsque retentit la sirène du cortège du Premier ministre. Les amis de parti sont conduits dans le salon principal tandis que les autres visiteurs sont emmenés dans la cour annexe. La décoration de la maison principale dégage un éclat royal. Il y a une table couverte de vitre juste derrière la porte. A l’intérieur du meuble, des apparats de roi Akan sont rangés : chaussures, tissus, bijoux, chasse-mouches… La table se trouve entre deux énormes ivoires. Les visiteurs donnent les nouvelles à leur hôte. A côté du chef du gouvernement, se trouve son épouse. Il y a comme une atmosphère de cour royale. Comme le roi ne parle pas en public, Yoboué Kouamé Pascal, président du conseil général de Tiébissou, fait office de porte-voix du ‘’roi’’ pour la circonstance. Il transmet les propos de la délégation du Pdci à Jeannot Ahoussou et reprend le rituel dans le sens inverse. Sauf qu’à la différence d’un vrai palais royal, en lieu et place du vin, les convives se désaltèrent au champagne et… à la sucrerie pour ceux qui ne touchent pas à l’alcool. Le Premier ministre et sa femme ne sont pas en tenue traditionnelle. Monssieur est en veste et madame porte un ravissant ensemble bazin où le jaune et le violet se côtoient harmonieusement. Les gardes du corps ne sont pas torse nu mais habillés en treillis. Ils sont issus des forces onusiennes, de la gendarmerie et de l’armée.
Les convives se bousculent
Pendant que l’avocat et ses amis de parti échangent, les autres invités attendent dans la cour annexe. Trois tentes sont dressées à leur intention. L’obscurité envahit encore plus la capitale économique. Les ampoules blanches dissipent difficilement le noir. Cette atmosphère contraste avec celle du salon annexe où la lumière est éclatante. Pour rendre moins longue l’attente, un service-traiteur sert le rafraîchissement. Le bruit des glaçons rend irrésistible l’envie de prendre un verre. Nous ne pouvons pas nous empêcher de héler un serveur : « un jus d’orange s’il vous plaît ! ». Jeannot Ahoussou rejoint, enfin, le lieu où l’attendent tous ces gens. Les chaises sous les bâches sont toutes occupées. D’autres ont été installées à côté. Lorsque le patron de la Primature arrive, il se dirige directement dans le salon. Des religieux (nous reconnaissons le bishop Benjamin Boni de l’église méthodiste) et des membres du barreau l’y attendent déjà. A mesure qu’ils présentent leurs félicitations, les invités se retirent. Un membre du protocole vient informer ceux qui attendent sous les tentes que ce sera bientôt leur tour. Il demande aux différentes organisations présentes de se signaler. « Que font ceux qui, comme nous, sont venus à titre individuel ? », interrogent des messieurs. «Vous passerez après les groupes constitués ». « Après tout ce monde ? ». «Ne vous inquiétez pas, ça passe vite ». « Je crois que je vais me glisser dans un des groupes. L’essentiel est de saluer le Premier ministre ». Il est 19 h 30 et des délégations continuent d’arriver. Nous décidons de quitter les lieux. Devant le portail, nous croisons un homme dont la présence ne passe pas inaperçue. Il a la peau blanche. Accroché à son téléphone, il demande à son interlocuteur de faire « remonter » un dossier. Son accent et le chapelet qu’il égraine laissent croire qu’il s’agit d’un Libanais. Un ami de longue date de l’avocat ? Le lendemain, samedi, le ballet continue. L’ambiance est la même : plusieurs véhicules et un grand monde. Des officiers de l’armée sont de la partie. Dimanche, ‘’le roi Ahoussou’’ offre un déjeuner. Le festin est royal !
Bamba K. Inza
ne désemplit pas depuis sa nomination à la primature.
Il y a deux semaines, lorsqu’à la Riviera III vous demandiez où se trouve la résidence de Charles Konan Banny, tout indicateur aurait ajouté à la fin : « c’est la maison avec beaucoup de véhicules devant ». Mais depuis quelques semaines, si on ne vous précise pas que les imposants portails du domicile de l’ex-gouverneur de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bcedao) sont verts, vous vous retrouverez directement chez son voisin d’en face : le Premier ministre Jeannot Ahoussou-Kouadio. Selon des voisins, dès l’évocation du nom de ce dernier pour succéder à Guillaume Soro à la Maison Blanche, un ballet de personnalités et d’amis a commencé. Le mouvement, indiquent-ils, s’est accentué depuis le 13 mars, date de la nomination de l’avocat à la primature.
Vendredi 16 mars, nous rendons une petite visite au chef du gouvernement. La nuit enveloppe Abidjan, peu à peu. Les fidèles musulmans accourent dans les mosquées pour la prière quotidienne du coucher du soleil. Au même moment, des véhicules continuent de stationner devant la résidence de Jeannot Ahoussou. Leurs propriétaires viennent dire leurs félicitations au nouveau promu. L’espace tout le long du mur de la bâtisse est occupé par les voitures de visiteurs. «C’est comme cela depuis quelques jours. Lorsque le crépuscule approche, nous assistons à un ballet de véhicules. Ça dure jusque tard dans la nuit », confie un manœuvre qui travaille sur un chantier pas loin de là. Les conducteurs garent comme ils peuvent. Certains chauffeurs ont préféré se mettre plus loin dans le prolongement de la résidence de Konan Banny. Là, un papier collé sur le pare-brise d’un mini-car appelé Massa, porte cette inscription : « Convoi Ong Koviessou Yopougon ». Le chauffeur d’une personnalité a stationné son véhicule juste à côté du mini-car. Il fait ses ablutions et se prépare pour la prière. « On ne partira pas d’ici de si tôt. Le Premier ministre n’est pas encore-là », croit-il savoir. « Le patron prend soin de finir ce qu’il a à faire au bureau avant de rentrer. C’est pendant son temps libre qu’il reçoit les visiteurs », précise un de ses proches.
Comme dans un palais…
Les personnalités venues, ce jour, attendent devant le portail. Elles causent en attendant l’arrivée du maître des lieux. Nous en reconnaissons certaines, bien connues : le secrétaire général du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci), Alphonse Djédjé Mady, l’ancien ministre des Affaires étrangères, Gervais Kacou, etc. La délégation du Pdci est venue adresser ses félicitations à Jeannot Ahoussou. Comme elle, plusieurs corporations et des personnes sont venues à titre individuel. Les visiteurs causent par petits groupes. Pour d’autres, l’heure est aux présentations. « Procureur Silué, colonel Konan. colonel Konan, procureur Silué », dit un homme à deux personnes qu’il connaît déjà, apparemment. Tout le monde regagne l’intérieur de la cour lorsque retentit la sirène du cortège du Premier ministre. Les amis de parti sont conduits dans le salon principal tandis que les autres visiteurs sont emmenés dans la cour annexe. La décoration de la maison principale dégage un éclat royal. Il y a une table couverte de vitre juste derrière la porte. A l’intérieur du meuble, des apparats de roi Akan sont rangés : chaussures, tissus, bijoux, chasse-mouches… La table se trouve entre deux énormes ivoires. Les visiteurs donnent les nouvelles à leur hôte. A côté du chef du gouvernement, se trouve son épouse. Il y a comme une atmosphère de cour royale. Comme le roi ne parle pas en public, Yoboué Kouamé Pascal, président du conseil général de Tiébissou, fait office de porte-voix du ‘’roi’’ pour la circonstance. Il transmet les propos de la délégation du Pdci à Jeannot Ahoussou et reprend le rituel dans le sens inverse. Sauf qu’à la différence d’un vrai palais royal, en lieu et place du vin, les convives se désaltèrent au champagne et… à la sucrerie pour ceux qui ne touchent pas à l’alcool. Le Premier ministre et sa femme ne sont pas en tenue traditionnelle. Monssieur est en veste et madame porte un ravissant ensemble bazin où le jaune et le violet se côtoient harmonieusement. Les gardes du corps ne sont pas torse nu mais habillés en treillis. Ils sont issus des forces onusiennes, de la gendarmerie et de l’armée.
Les convives se bousculent
Pendant que l’avocat et ses amis de parti échangent, les autres invités attendent dans la cour annexe. Trois tentes sont dressées à leur intention. L’obscurité envahit encore plus la capitale économique. Les ampoules blanches dissipent difficilement le noir. Cette atmosphère contraste avec celle du salon annexe où la lumière est éclatante. Pour rendre moins longue l’attente, un service-traiteur sert le rafraîchissement. Le bruit des glaçons rend irrésistible l’envie de prendre un verre. Nous ne pouvons pas nous empêcher de héler un serveur : « un jus d’orange s’il vous plaît ! ». Jeannot Ahoussou rejoint, enfin, le lieu où l’attendent tous ces gens. Les chaises sous les bâches sont toutes occupées. D’autres ont été installées à côté. Lorsque le patron de la Primature arrive, il se dirige directement dans le salon. Des religieux (nous reconnaissons le bishop Benjamin Boni de l’église méthodiste) et des membres du barreau l’y attendent déjà. A mesure qu’ils présentent leurs félicitations, les invités se retirent. Un membre du protocole vient informer ceux qui attendent sous les tentes que ce sera bientôt leur tour. Il demande aux différentes organisations présentes de se signaler. « Que font ceux qui, comme nous, sont venus à titre individuel ? », interrogent des messieurs. «Vous passerez après les groupes constitués ». « Après tout ce monde ? ». «Ne vous inquiétez pas, ça passe vite ». « Je crois que je vais me glisser dans un des groupes. L’essentiel est de saluer le Premier ministre ». Il est 19 h 30 et des délégations continuent d’arriver. Nous décidons de quitter les lieux. Devant le portail, nous croisons un homme dont la présence ne passe pas inaperçue. Il a la peau blanche. Accroché à son téléphone, il demande à son interlocuteur de faire « remonter » un dossier. Son accent et le chapelet qu’il égraine laissent croire qu’il s’agit d’un Libanais. Un ami de longue date de l’avocat ? Le lendemain, samedi, le ballet continue. L’ambiance est la même : plusieurs véhicules et un grand monde. Des officiers de l’armée sont de la partie. Dimanche, ‘’le roi Ahoussou’’ offre un déjeuner. Le festin est royal !
Bamba K. Inza