“Toute existence, toute âme humaine, si on les étudie avec exactitude, offre de beaux modèles, mais l’existence d’un grand homme offrent toujours et encore plus’’, disait André Maurois. Voilà une assertion qui rime bien avec la vie du professeur Mireille Dosso. Découvrons ensemble une femme passionnée de sciences.
Bien peu sont les Ivoiriens qui connaissent cette compatriote. Et pourtant ! La vie du professeur Mireille Dosso, dont la personnalité, longtemps plongée sous le voile de la discrétion, représente probablement l’un des modèles les plus accomplis de toute l’histoire de la science en Côte d’Ivoire et en Afrique. Sa réelle volonté de demeurer dans le silence des médias est un mur de méfiance qu’il a fallu défoncer avec peine pour parvenir à une kaléidoscopie de sa vie. Femme de rigueur et d’abnégation einsteinienne qui a passé toute sa vie derrière les microscopes dans les hôpitaux et laboratoires de recherches, cette virtuose des sciences dont les travaux et publications sont innombrables, n’a été révélée à la nation ivoirienne qu’à l’occasion de la cérémonie de décoration du 7 Août 2008.
Directeur de l’institut Pasteur de Côte d’Ivoire, Professeur titulaire agrégée en microbiologie (la science qui étudie les micro-organismes), membre du CAMES, responsable du doctorat d’Etat en biologie humaine et chef du laboratoire central du chu de Yopougon (son poste hospitalier), le Pr Mireille Dosso est la première femme microbiologiste et virologue ivoirienne. Pour en arriver là, Bretin Mireille Carmen, de son nom de jeune fille, a dû consentir d’énormes privations personnelles, mettre en évidence son enthousiasme au travail et sa bonne humeur contagieuse.
Une virtuose des sciences
C’est en 1969, à Paris, que mademoiselle Bretin obtient le baccalauréat série A4 à l’âge de 17 ans (déjà). Elle rejoint immédiatement la faculté de médecine d’Abidjan pour y entamer ses études universitaires qui sont sanctionnées par le doctorat d’Etat en 1980. Mariée, en 1974 à monsieur Dosso, pilote d’avion, elle avait la possibilité de se contenter de son simple poste de médecin ou de s’abandonner aux tâches du foyer étant donné la classe sociale de son époux. Que non !
Femme d’ambitions plurielles, Mme Dosso décide d’entreprendre des études de spécialisation en microbiologie et virologie, un domaine très complexe. Une bourse lui est alors accordée pour se rendre successivement à Marseille (1981), Montpellier (1984 et 1988) et Paris où elle obtient le certificat d’Etude spécialisé (CES) en bactériologie, la maitrise de microbiologie, le diplôme d’Immunologie Générale, le diplôme d’immunologie microbienne et son 2ème doctorat d’Etat mais cette fois en biologie humaine à la faculté de médecine de Montpellier. Revenue définitivement au pays en 1988, Mme Dosso Mireille est admise au concours du CAMES et passe au titre de Maître de conférences agrégé de microbiologie. Quatre années plus tard, elle accède au poste de Professeur titulaire de microbiologie et devient, en 1997 , membre du Comité africain et malgache pour l’Enseignement supérieur (CAMES). Dans cette palpitante odyssée cartésienne, le professeur reconnaît avoir solidement bénéficié du soutien de Monsieur Dosso, son époux ; soutien sans lequel l’aventure aurait, selon elle, été un échec. “J’ai eu la chance, l’avantage d’avoir un mari compréhensif, qui m’a donné la possibilité d’aller jusqu’où ma tête me permettrait”, révèle-t-elle. Malgré tout ce bagage intellectuel, Mme Dosso Mireille reste lucide et modeste, et joue pleinement son rôle de femme au foyer.
La vie de famille
Mère accomplie, le professeur Dosso Mireille est génitrice d’une fille et de trois garçons. Résidant en toute logique à proximité de l’aéroport international Félix Houphouët Boigny (son mari fut le pilote du président Houphouët et elle, toujours entre deux avions), le professeur parvient parfaitement à concilier vie professionnelle et vie conjugale. Tout est question, selon elle, d’organisation scientifique du temps et des tâches. “Les travaux ménagers ne se passent pas seulement dans la journée. Pour moi, le travail de la femme est basé sur les tâches d’avant réveil du mari et des enfants, et c’est ce que je fais tous les jours, très tôt”, précise-t-elle. Pour le reste, étant donné la distance entre le domicile et le lieu de travail (Port-Bouét – Cocody ou Port-Bouét Yopougon), la famille Dosso a conçu un système qui consiste à garder les enfants à la cantine jusqu’à l’heure des retrouvailles en famille à 19h.
Mireille Dosso et la politique
“En toute honnêteté, je n’ai aucune coloration politique et je suis disponible pour tout le monde. Personnellement, je n’ai pas le temps de faire la politique étant donné que j’adhère totalement à la maxime du pasteur selon laquelle la science n’a pas de patrie, parce que le savoir est le patrimoine de l’humanité ”. En vérité, la passion du professeur Dosso pour les sciences et les études ne donnait aucune chance à l’activité politique d’émerger. Et elle le reconnaît : “je n’ai pas pu mettre la politique dans mon programme ”.
La décoration du 07 août 2008
Lors de la célébration de la fête de l’indépendance, le président de la République a voulu manifester la reconnaissance de la nation ivoirienne à l’égard de certaines personnalités du milieu médical pour le rôle combien important et significatif joué dans le développement de la santé en Côte d’Ivoire. Cet événement solennel a permis de voir le professeur Dosso Mireille élevée au rang de chevalier de l’Ordre du mérite national de Côte d’Ivoire. Une distinction que l’icône de la science reconnaît avoir ressentie avec beaucoup d’émotion. “Nous étions beaucoup de récipiendaires ce jour-là et personne n’était sûr d’être choisi. Avec l’effet de surprise, la décoration du Président m’a beaucoup touchée. Lorsque j’ai entendu mon nom cité par le Président de la République, j’ai un peu sursauté, j’étais émue et très contente pour ma famille, mon mari, mes enfants, mes jeunes étudiants et pour toute la grande famille, témoigne-t-elle. Elle dit éprouver particulièrement beaucoup de satisfaction parce que cette distinction allait permettre dorénavant à la grande famille de percevoir son action sur le terrain professionnel. “La grande famille ne percevait pas trop mon métier, on ne me voyait pas avec un stéthoscope au cou et elle avait assez d’appréhension et donc s’interrogeait sur le genre de médecin que j’étais. La famille avait un peu l’impression que je perdais mon temps”. Par ailleurs, le professeur a tenu à manifester sa reconnaissance au Président de la République, au ministre de la santé et de l’hygiène publique et à celui de l’enseignement supérieur pour leur intérêt particulier en faveur de la recherche scientifique. “Je pense que le ministre voulait, à travers moi, encourager les biologistes qui sont très modestes” soutient le professeur. Dans cet élan de remerciements, le Pr Dosso Mireille n’a pas voulu oublier ses collègues pour leur soutien, et ses étudiants à qui elle demande de persévérer car si le cursus est long et fastidieux, mais au bout se trouve une reconnaissance.
Léon Saki
Bien peu sont les Ivoiriens qui connaissent cette compatriote. Et pourtant ! La vie du professeur Mireille Dosso, dont la personnalité, longtemps plongée sous le voile de la discrétion, représente probablement l’un des modèles les plus accomplis de toute l’histoire de la science en Côte d’Ivoire et en Afrique. Sa réelle volonté de demeurer dans le silence des médias est un mur de méfiance qu’il a fallu défoncer avec peine pour parvenir à une kaléidoscopie de sa vie. Femme de rigueur et d’abnégation einsteinienne qui a passé toute sa vie derrière les microscopes dans les hôpitaux et laboratoires de recherches, cette virtuose des sciences dont les travaux et publications sont innombrables, n’a été révélée à la nation ivoirienne qu’à l’occasion de la cérémonie de décoration du 7 Août 2008.
Directeur de l’institut Pasteur de Côte d’Ivoire, Professeur titulaire agrégée en microbiologie (la science qui étudie les micro-organismes), membre du CAMES, responsable du doctorat d’Etat en biologie humaine et chef du laboratoire central du chu de Yopougon (son poste hospitalier), le Pr Mireille Dosso est la première femme microbiologiste et virologue ivoirienne. Pour en arriver là, Bretin Mireille Carmen, de son nom de jeune fille, a dû consentir d’énormes privations personnelles, mettre en évidence son enthousiasme au travail et sa bonne humeur contagieuse.
Une virtuose des sciences
C’est en 1969, à Paris, que mademoiselle Bretin obtient le baccalauréat série A4 à l’âge de 17 ans (déjà). Elle rejoint immédiatement la faculté de médecine d’Abidjan pour y entamer ses études universitaires qui sont sanctionnées par le doctorat d’Etat en 1980. Mariée, en 1974 à monsieur Dosso, pilote d’avion, elle avait la possibilité de se contenter de son simple poste de médecin ou de s’abandonner aux tâches du foyer étant donné la classe sociale de son époux. Que non !
Femme d’ambitions plurielles, Mme Dosso décide d’entreprendre des études de spécialisation en microbiologie et virologie, un domaine très complexe. Une bourse lui est alors accordée pour se rendre successivement à Marseille (1981), Montpellier (1984 et 1988) et Paris où elle obtient le certificat d’Etude spécialisé (CES) en bactériologie, la maitrise de microbiologie, le diplôme d’Immunologie Générale, le diplôme d’immunologie microbienne et son 2ème doctorat d’Etat mais cette fois en biologie humaine à la faculté de médecine de Montpellier. Revenue définitivement au pays en 1988, Mme Dosso Mireille est admise au concours du CAMES et passe au titre de Maître de conférences agrégé de microbiologie. Quatre années plus tard, elle accède au poste de Professeur titulaire de microbiologie et devient, en 1997 , membre du Comité africain et malgache pour l’Enseignement supérieur (CAMES). Dans cette palpitante odyssée cartésienne, le professeur reconnaît avoir solidement bénéficié du soutien de Monsieur Dosso, son époux ; soutien sans lequel l’aventure aurait, selon elle, été un échec. “J’ai eu la chance, l’avantage d’avoir un mari compréhensif, qui m’a donné la possibilité d’aller jusqu’où ma tête me permettrait”, révèle-t-elle. Malgré tout ce bagage intellectuel, Mme Dosso Mireille reste lucide et modeste, et joue pleinement son rôle de femme au foyer.
La vie de famille
Mère accomplie, le professeur Dosso Mireille est génitrice d’une fille et de trois garçons. Résidant en toute logique à proximité de l’aéroport international Félix Houphouët Boigny (son mari fut le pilote du président Houphouët et elle, toujours entre deux avions), le professeur parvient parfaitement à concilier vie professionnelle et vie conjugale. Tout est question, selon elle, d’organisation scientifique du temps et des tâches. “Les travaux ménagers ne se passent pas seulement dans la journée. Pour moi, le travail de la femme est basé sur les tâches d’avant réveil du mari et des enfants, et c’est ce que je fais tous les jours, très tôt”, précise-t-elle. Pour le reste, étant donné la distance entre le domicile et le lieu de travail (Port-Bouét – Cocody ou Port-Bouét Yopougon), la famille Dosso a conçu un système qui consiste à garder les enfants à la cantine jusqu’à l’heure des retrouvailles en famille à 19h.
Mireille Dosso et la politique
“En toute honnêteté, je n’ai aucune coloration politique et je suis disponible pour tout le monde. Personnellement, je n’ai pas le temps de faire la politique étant donné que j’adhère totalement à la maxime du pasteur selon laquelle la science n’a pas de patrie, parce que le savoir est le patrimoine de l’humanité ”. En vérité, la passion du professeur Dosso pour les sciences et les études ne donnait aucune chance à l’activité politique d’émerger. Et elle le reconnaît : “je n’ai pas pu mettre la politique dans mon programme ”.
La décoration du 07 août 2008
Lors de la célébration de la fête de l’indépendance, le président de la République a voulu manifester la reconnaissance de la nation ivoirienne à l’égard de certaines personnalités du milieu médical pour le rôle combien important et significatif joué dans le développement de la santé en Côte d’Ivoire. Cet événement solennel a permis de voir le professeur Dosso Mireille élevée au rang de chevalier de l’Ordre du mérite national de Côte d’Ivoire. Une distinction que l’icône de la science reconnaît avoir ressentie avec beaucoup d’émotion. “Nous étions beaucoup de récipiendaires ce jour-là et personne n’était sûr d’être choisi. Avec l’effet de surprise, la décoration du Président m’a beaucoup touchée. Lorsque j’ai entendu mon nom cité par le Président de la République, j’ai un peu sursauté, j’étais émue et très contente pour ma famille, mon mari, mes enfants, mes jeunes étudiants et pour toute la grande famille, témoigne-t-elle. Elle dit éprouver particulièrement beaucoup de satisfaction parce que cette distinction allait permettre dorénavant à la grande famille de percevoir son action sur le terrain professionnel. “La grande famille ne percevait pas trop mon métier, on ne me voyait pas avec un stéthoscope au cou et elle avait assez d’appréhension et donc s’interrogeait sur le genre de médecin que j’étais. La famille avait un peu l’impression que je perdais mon temps”. Par ailleurs, le professeur a tenu à manifester sa reconnaissance au Président de la République, au ministre de la santé et de l’hygiène publique et à celui de l’enseignement supérieur pour leur intérêt particulier en faveur de la recherche scientifique. “Je pense que le ministre voulait, à travers moi, encourager les biologistes qui sont très modestes” soutient le professeur. Dans cet élan de remerciements, le Pr Dosso Mireille n’a pas voulu oublier ses collègues pour leur soutien, et ses étudiants à qui elle demande de persévérer car si le cursus est long et fastidieux, mais au bout se trouve une reconnaissance.
Léon Saki