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Politique Publié le samedi 18 avril 2009 | Nord-Sud

Bouaké - Elections présidentielle et locale : PDCI, RDR, FPI… La guerre des femmes

A Bouaké, les femmes refusent d’être des laissées pour compte dans le jeu politique. Devenues ambitieuses, elles affûtent leurs armes pour conquérir des postes électifs.

Une nouvelle race de militantes ivoiriennes a vu le jour. Devenues plus ambitieuses, elles ne veulent plus rester dans l’arrière cour. Ces cadres et militantes de base des partis politiques poursuivent toutes le même but. Porter d’abord leur candidat au sommet de l’Etat. Et en deuxième lieu briguer des postes dans les scrutins locaux Il ne se passe plus de week-end sans que l’une de ces nouvelles amazones ne se manifeste dans la Capitale de la paix. L’appétit des unes et des autres est d’autant aiguisé que Bouaké qui comptait 5 postes de député, a été subdivisée récemment en 4 communes par un décret. Il s’agit des communes d’Ahougnassou, de Belleville, de Gbékékro et de Koko. La vallée du Bandama compte également 5 conseils généraux, de nombreuses communes de plein exercice et aussi des circonscriptions rurales, sans oublier d’autres sièges de député. On le voit, la décentralisation qui a crée de nouvelles entités territoriales a boosté des ambitions. Commençons par le Pdci-Rda.


Les «Tigresses» du parti doyen

‘’Député Colette’’ comme ses partisans l’appellent affectueusement, est certainement au sein du vieux parti, l’une des plus en vue dans la Capitale du Centre. Kouakou Akissi Colette, à l’état civil, originaire de Bouaké est entrée en politique au Pdci-Rda en 1990. Près qu’aussitôt, elle est élue présidente d’un comité de base Ufpdci (Union des femmes Pdci) de N’gattakro. Cinq ans plus tard, elle devient présidente de la section, Trainou Est. A l’époque elle fut la seule dame à occuper un tel poste dans la vallée du Bandama. Elue député de Bouaké sous-préfecture en 2000, c’est tout naturellement que cette secrétaire de formation entre au bureau politique du Pdci-Rda. Avec la guerre qui éclate en 2002, ‘’Député Colette’’ se replie sur Abidjan. Mais pas pour longtemps. Car elle se sent éloignée des militants et des électeurs. Elle vient donc régulièrement à Bouaké, surtout dans la sous-préfecture pour dire «yako » à ceux qui n’ont pas bougé. L’élue nationale constate que les parents se sont considérablement appauvris et que le parti est en perte de vitesse. Dès lors, elle multiplie les visites les mains chargées de vivres. Elle exhorte les parents à envoyer les enfants à l’école. Elle réhabilite certaines écoles comme celle de Yangakro. De gros villages et des écoles primaires sont électrifiés à l’énergie solaire par son concours.
Les actions de l’élue visent un double objectif. Se maintenir dans l’estime de ses électeurs, et préparer le lit de son président. «Pour ma reconduction, on verra après. Pour l’instant, c’est l’élection du président Henri Konan Bédié (HKB) qui compte», clame-t-elle.


“Tantie Affoué” la pédagogue

Au sein du parti doyen, il y a aussi ‘’Tantie N’guessan Affoué Jacqueline’’ présidente locale de l’union des femmes. Originaire de Languibonou à 35km de Bouaké, où elle est secrétaire de section, Jacqueline n’a jamais été candidate à une élection nationale. Membre du bureau politique depuis le congrès des femmes en août 2003, cette « guerrière » n’a qu’un objectif, le retour à la paix. Ce qui pour elle, ne se fera qu’avec l’élection à la magistrature suprême du sphinx de Daoukro. En sa qualité de conseiller pédagogique, concepteur de manuels scolaires à la Dren de Bouaké, ce membre du conseil général est reconnue de tous pour son commerce facile.
Elle est toujours en mouvement. Elle ne cesse de dire à ses interlocuteurs qu’elle a besoin « de femmes d’engagement, de femmes motivées et déterminées » à ses cotés pour porter le président de son parti aux affaires. Le reste semble ne pas l’intéresser. A la question de savoir si elle ne vise pas un poste électif à Languibonou la « Tantie » tranche: « Le président n’est pas encore élu. Et vous parlez d’autre chose. Mon objectif c’est l’élection du président Bédié».


La maire «choc» de Djébonoua

A 15km de la Capitale de la paix, à l’entrée de l’ex ’’rideau de fer’’ se trouve une autre «panthère» du parti sexagénaire. Il s’agit de la maire de Djébonoua : Konan-Brou Amoin Annabelle est née en 1956 dans le Pdci-Rda. Si elle a accepté de venir s’installer à Djébonoua en cette période de sortie de crise, clame-t-elle, c’est pour prouver à ses électeurs que le parti pense à eux. Titulaire d’un master en biologie et marine obtenu au Québec, cette dame a un riche parcours universitaire, politique, syndical et religieux. Militante de base à Adjamé, elle a gravi les échelons au sein du Pdci pour devenir membre du bureau politique et vice-présidente de l’Ufpdci chargée de la région. Tantie Annabelle est la seule dame maire de la vallée du Bandama. Sa disponibilité et son franc parler captivent ceux qui la fréquentent. Pourtant, elle n’hésite pas à sortir des vérités crues. « Le Pdci n’apporte rien du tout aux militants. La population a faim et soif », se désole-t-elle sans détour. Elle a pour objectif le retour de HKB au pouvoir. Son poste de maire, Konan-Brou n’en fait pas une fin en soi. Candidate malheureuse aux dernières élections de l’Ufpdci, elle avait lancé un appel à ses camarades militantes pour l’union et la discipline.


Kissigna sur deux fronts

Il y a aussi Kissigna Coulibaly Marie qui vit à Bouaké. Elle a pour rôle principal d’attirer et maintenir l’électorat nordiste du parti doyen. Cette protégée du général Ouassenan Koné et de Dao Henriette joue sur deux fronts. A Katiola, elle est la présidente Ufpdci de la sous-préfecture de Timbé. A Bouaké, elle a contribué au retour au premier plan des houphouétistes. Cela aux côtés des militants de la Jpdci comme Ismaël Ouattara et N’da Eric qui avaient mis sur pied le « Renouveau- Pdci-Rda ». Kissigna y a occupé le poste de la mobilisation jusqu’au retour de la délégation départementale dirigée par Kouamé Kra Joseph.


Fpi : ‘’Adjoua Sukkhoi’’

C’est le chef de l’Etat Laurent Gbagbo qui appelle Hemos Adjoua Suzanne ainsi : ‘’Adjoua Sukkhoi’’. Militante de première heure, elle a gravi les marches dans un environnement hostile. C’est que cette fille de Bendékouassikro à 12km de Bouaké sur l’axe Sakassou, est audacieuse et déterminée. ‘’La dame de fer’’ a été colistière du ministre Amani Michel aux élections du conseil général. En 2000, elle a défendu farouchement les couleurs du parti à la rose. Pendant, la crise elle a dirigé à Abidjan la coordination Fpi du grand Centre. Elle est actuellement la « Fédérale » de la commune d’Ahougnansou ou elle cumule le poste de Directeur départemental de campagne (Ddc) du candidat Laurent Gbagbo. A propos l’Opération Inondation’’ qui a fait l’objet d’une polémique nationale a été menée par cette dame dans la Capitale de la paix. Dans le canton Donhoun où elle est Ddc, la Fédérale a sensibilisé ses parents sur la nécessité de se faire identifier ou enrôler. De fait, ils seront prêts à élire Laurent Gbagbo le moment venu. Sukkhoi ne cache pas sa passion pour son champion. Cette diplômée de l’Inset était membre de la commission restauration et logistique lors de la tournée en septembre 2008 de la Première dame dans le pays Baoulé. Elle envisage de conquérir un poste électif dans la commune d’Ahougnassou. Celui de député semble la faire rêver plus particulièrement.


Christine, la pionnière

A 42km de Bouaké, dans le siège du royaume Baoulé, Christine Konan essaie de bousculer les habitudes. Elle se bat avec toutes ses forces pour implanter le parti dirigé par Affi N’Guessan en plein coeur du pays Akan. Malgré tout, au cour de son séjour dans la région, la Première dame n’a pas manqué de signifier son mécontentement face au faible taux d’engouement autour du « Front ». Alors que Christine Konan avait annoncé un flux massif des Baoulé au Fpi, Simone Gbagbo fut surprise de ne pas voir d’affluence parmi les sujets de Abla Pokou. Seuls acquis notables, la Fédérale de Sakassou a réussi à faire entrer l’élue d’Abobo chez Abla Pokou 2 où elle a été intronisée Akoua Boni 2. Aujourd’hui, il s’agit pour la secrétaire générale-adjointe du gouvernement de colmater les brèches. Elle a comme mission impossible de conduire ses parents dans le lit du Fpi. N’empêche Christine Konan a ouvert depuis deux mois une radio de proximité pour mieux vendre le programme de la refondation. Mais en face, pour l’élection présidentielle, Félix Akoto-Yao, député et président du conseil général de la cité royale est le candidat déclaré. On peut le dire, ce grand commis de l’Etat a du pain sur la planche, surtout que les femmes du Rdr veillent aussi au grain.


Rdr : Mondeny, retraitée et active

Dans la vallée du Bandama, le Rdr peut compter sur Diomandé Mondeny, la présidente du Rfr district d’Ahougnansou. Pendant la crise en 2002, cette dame a cumulé avec pugnacité et bonheur les postes de Rfr communal, départemental et même régional en lieu et place de Mme N’Douba, partie en exil. Elle est parvenue à garder débout son parti. Même quand les activités politiques étaient suspendues, l’infirmière à la retraite a continué à faire fonctionner son Ong ‘’Notre enfance’’. C’est sous la bannière de cette structure que l’école a repris. Elle a commencé par des cours de mise à niveau dispensés par des enseignants dits ‘’volontaires’’. On la voyait partout oeuvrant dans le social. Discrètement mais efficacement la ‘’Tantie’’ a trouvé les arguments pour sécher les larmes des femmes de son parti qui étaient restées nombreuses dans la zone. Pourtant, Mme Diomandé a été à un moment taxée de ‘’rebelle’’ et déclarée persona non grata dans la partie gouvernementale. Grâce à l’Apo, Mme Diomandé anime aujourd'hui les meetings et réorganise le parti au côté de son leader Fanny Ibrahima. Lors des élections pour la présidence du Rfr, elle était pressentie comme candidate. Mais elle s’est désistée sur les conseils du maire dit-on. Au bureau national Mme Diomandé jouit d’une bonne réputation pour sa fidélité à la rue Lepic. Un cadre du Pdci parlant d’elle a confié : « C’est l’une des femmes que je respecte au Rdr. Elle est valable».


Mmes Jeanne Peuhmond Et N’douba

Mme N’Douba Akissi Marguerite peut être considérée comme une pionnière des républicains dans la Capitale du Centre. Cette couturière de formation a toujours été au côté de Fanny Ibrahima. La collaboration a continué au conseil municipal. Elle est 2e adjoint au maire. Pourtant ses détracteurs, pendant son exil, ne l’ont pas ratée. Ils l’ont accusée de s’être éloignée du Rdr. Revenue aux affaires, elle exerce à l’étal civil central de Koko. Récemment, c’est cette dame, avec la simplicité qui l’habite, qui a parcouru le marché pour demander aux femmes d’accepter le taux de 100 francs comme taxe municipale. Mme N’douba est présentée avec le ministre Jeanne Peuhmond Adjoua comme les «derniers remparts féminins» du Rdr. A cet effet, on pourrait penser que, soucieux de la géopolitique, Alassane Ouattara a nommé la ministre de la Famille et des Affaires sociales à la tête de la campagne des républicains des Lacs et de Sakassou. Originaire de N’Zokossou, dans la commune de Sakassou, Jeanne Peuhmond ne manque aucune occasion de visiter le village et la région. Elle y est devenue fréquente après sa désignation comme Ddc. Dans ses pas, son oncle Brou Agogdobo, secrétaire départemental sur qui elle compte énormément. L’ex-numéro 2 de Kandia Camara à l’Ufr travaille avec discrétion pour l’avènement au pouvoir de son candidat. Elle sait qu’elle a une zone difficile à percer. Ne dit-on pas que cette région est le fief du Pdci-Rda ? En septembre 2008 «Adjoua» comme on l’appelle dans le terroir, a organisé un tournoi de football doté du trophée ADO. Les 172 villages qui composent le département y ont pris part. Grâce à son monde féminin, le Rdr a gagné en vitalité et en audience dans un pays Akan qui vote, dit-on le Pdci presque par réflexe.


Allah Kouamé Correspondant régional
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