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Politique Publié le jeudi 15 octobre 2009 | Notre Voie

Alpha Blondy, star ivoirienne du reggae - “Alain Joyandet n’a pas d’ordre ni de leçon à nous donner”

“Ces élections doivent être organisées absolument telles qu’elles ont été prévues. Vous savez les listes, elles ne sont jamais parfaites. Elles ne sont nulle part jamais parfaites. Que la Côte d’Ivoire aille rapidement à cette élection et ne pas la reporter”. Ces propos prononcés par le Secrétaire d’Etat français, Alain Joyandet, mardi sur le plateau de la télévision TV5-Monde, suscite une vague d’indignation en Côte d’Ivoire. La star du Reggae, Alpha Blondy, compte au nombre des Ivoiriens qui condamnent fermement cette sortie de l’officiel français. Il s’en explique. Notre Voie : Vous vous dites ulcéré par les propos tenus, mardi, par le Secrétaire d’Etat français à la coopération, Alain Joyandet. Des propos relatifs à la tenue de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire. Pourquoi la déclaration de ce vice-ministre français, vous écœure-t-elle ? Alpha Blondy : J’ai été surpris hier (mardi 13 octobre 2009) d’entendre ce claquement de fouet de la part de M. Joyandet qui se comporte en maître d’esclaves s’adressant à ses sujets. Je voudrais lui dire que personne ne l’a sonné. Qu’il apprenne à se mêler de ses affaires. Les élections en Côte d’Ivoire ne sont pas les élections en France. Nous, Ivoiriens, ne nous invitons pas dans le débat électoral français. Nous voulons des élections transparentes et sécurisées en Côte d’Ivoire. Nous n’avons pas besoin de violence ou de dérapage après ces élections. Je voudrais dire à M. Joyandet qu’il n’a pas de leçon à donner ni au Premier ministre ni au Président de Côte d’Ivoire. Il n’a pas d’ordre à donner à qui que ce soit. N.V. : La France est impliquée, depuis le début, dans la résolution de la crise en Côte d’Ivoire. Elle a même un contingent, la Licorne, basé sur le sol ivoirien dans le cadre d’un mandat de l’ONU. On ne peut donc pas soutenir qu’une prise de position de ce pays sur les élections présidentielles ivoiriennes est inappropriée… A.B. : Si M. Joyandet avait dit qu’il viendrait chercher les soldats français de l’opération Licorne, pour s’en aller de notre pays, j’aurais applaudi des pieds et des mains. Mais de grâce, qu’il ne joue pas au pompier pyromane. Pour moi, sa déclaration est nulle et de nul effet. En plus, c’est maladroit de sa part. C’est encore la preuve du mépris que M. Sarkozy (Chef de l’Etat français) a pour les Africains. You Know. Nous n’avons pas d’ordre à recevoir de M. Sarkozy ni de qui que ce soit. Maintenant, j’ignore si l’armée française fait partie des solutions dans la crise en Côte d’Ivoire. J’estime plutôt qu’elle fait partie des problèmes. N.V. : Dans le cadre de l’Union européenne, la France participe au financement de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire. Celui qui apporte l’appui financier n’a-t-il pas aussi son mot à dire? A.B. : Je suis désolé. L’ONU pouvait apporter le soutien financier. D’ailleurs, la France et les autres ont fait remarquer aux Ivoiriens que notre pays a assez d’argent pour financer lui-même ses élections. Alors, on ne peut pas aller dans la précipitation vers ces élections. Même s’ils ont contribué au financement, ils n’ont pas d’ordres à donner. Notre indépendance n’est pas à vendre. Ce n’est pas parce qu’on a remis de l’argent qu’on se croirait tout permis. N.V. : Est-ce dommageable qu’un partenaire extérieur demande aux Ivoiriens de respecter la date qu’ils se sont fixé librement pour la tenue de l’élection présidentielle ? A.B. : Ce n’est pas à lui de nous le demander. Si le 29 novembre est tenable, la présidentielle se fera à cette date-là. Mais si pour des raisons techniques ou autres, ce n’est pas possible, il ne faut pas être les prisonniers d’une date. Pour parler comme le Premier ministre, Soro Guillaume. Il faut réussir ces élections pour ne pas retomber dans la crise. Que l’on nous laisse régler la question des élections, entre nous Ivoiriens. L’ordre qui a été intimé par M. Joyandet est un mépris. Doit-on tenir la présidentielle à nos risques et périls, le 29 novembre, parce que M. Joyandet le veut ? Non, les choses ne se passent pas ainsi. N.V. : Il y a à ce jour 13 candidats déclarés à la CEI pour l’élection présidentielle. Quelle lecture faites-vous de cette multiplicité de candidatures ? A .B. : C’est l’éveil démocratique. Même si toi, Didier, tu as envie d’être candidat et que tu as les moyens, eh bien, tu es libre. C’est pareil pour Sivori. Tout comme Adama Dahico, Drogba ou Aruna Dindané. Pour moi, ces nombreuses candidatures signifient que la machine démocratique est en marche. Tout le monde est candidat d’ailleurs. Dieu merci. Maintenant, que le meilleur gagne. N.V. : Vous êtes un leader d’opinion adulé. A moins de deux mois de l’élection présidentielle, quel message voudrez-vous que les Ivoiriens gardent à l’esprit? A.B. : Mon message aux Ivoiriens est celui de l’unité, de la paix et de la démocratie. En tant que citoyen ivoirien, je voterai pour le candidat qui est en train d’essuyer les larmes des Ivoiriens, qui œuvre pour le retour de la paix. C’est le candidat Laurent Gbagbo. Il est mon choix mais chacun de nous a le droit de voter pour le candidat qu’il préfère. Qu’on arrête de me bâillonner en affirmant qu’en tant que leader d’opinion, je ne dois pas avoir d’opinion. Aux Etats-Unis, Stevie Wonder et Bruce Springsteen ont soutenu Barack Obama. En France, Johnny Hallyday a soutenu Nicolas Sarkozy. Ils n’ont pas été insultés. Pourquoi veut-on en Côte d’Ivoire, guillotiner Alpha Blondy parce qu’il a ouvertement annoncé que son choix, c’est Laurent Gbagbo ? J’invite tous ceux qui m’aiment à voter pour mon candidat. Mais ils peuvent aussi choisir leurs candidats. Je respecte leur choix. Je souhaite qu’ils en fassent de même pour moi. Entretien réalisé par Didier Depry et Boga Sivori
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