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Politique Publié le samedi 17 octobre 2009 | Le Temps

Discours intégral du Candidat Laurent Gbagbo - “Les Ivoiriens écriront leur histoire par la voie démocratique”

Arrivé au quartier général de sa campagne (Qg), le Président candidat a livré un discours. Le Temps vous le propose en intégralité.

Chers Amis.

Je vous remercie tous d'être venus à cette rencontre. Je vous remercie surtout, parce que, depuis l'annonce du dépôt de ma candidature, il y a eu un foisonnement, un bouillonnement impressionnant. Je voudrais remercier le peuple d'Abidjan qui a tenu à m'accompagner si massivement au siège de la Cei, et ici-même.
Au dehors, aux alentours de ce bâtiment, il y a beaucoup de monde. Ce qui témoigne de l'intérêt que les Ivoiriens ont pour cette candidature. Ce qui témoigne aussi de l'inquiétude que certains avaient, que je ne dépose pas ma candidature. Cette inquiétude est aujourd'hui levée, et nous allons travailler. D'abord, pourquoi cette candidature, et dans quel contexte elle se fait ? Elle se fait dans un contexte où nous avons gagné la paix. Nous avons gagné la paix sur la guerre. Retenons-bien que cette élection qui va avoir lieu, n'est pas seulement une élection pour choisir un Président de la République. C'est une élection qui va mettre fin à une période et qui va ouvrir une autre. La période qui s'achève est la période que je pourrais appeler ''la période Houphouëtienne''.
C'est la période marquée par la stature du Président Houphouët-Boigny. Depuis 1945, la stature d'Houphouët-Boigny a imprégné, façonné, cette période-là. Malheureusement, à son décès en 1993, sa succession a été très mal règlée ; et le fait de la régler de cette façon, nous a améné les conflits que nous connaissons depuis 1993, jusqu'à aujourd'hui.
Mon espérance, ma foi et ma conviction, c'est qu'après avoir connu la partie la plus aigüe de cette crise née de la mort d'Houphouët, qui est la guerre, l'élection que nous allons connaître, va mettre une fin définitive, et à cette crise, et à cette guerre. C'est pour cette raison que je suis candidat. C'est pourquoi, tous les Ivoiriens et tous ceux qui vivent en Côte d'Ivoire, doivent mesurer la portée historique de cette élection pour, pas seulement le fait de changer les Institutions et de choisir de nouveaux hommes, mais véritablement, le fait que nous changeons d'époque. Et, il nous faut changer d'époque.
Il nous faut sortir de l'ère où on s'est amusé et pensé qu'avec les coups d'Etat, on pouvait changer des régimes. Non ! Les gens ont cru qu'avec la mort d'Houphouët, le pouvoir était suffisamment fragile et faible pour armer quelques jeunes gens et venir s'emparer du pouvoir et de la Côte d'Ivoire.
Je veux dire aujourd'hui qu'il n'est pas possible que je ne me batte pas contre de telles pratiques. Et contre ceux qui croient que quelques fusils peuvent changer le cours de l'histoire de la Côte d'Ivoire. Les Ivoiriens écriront leur histoire comme ils le voudront, mais, par la voie démocratique. Telle est la première idée forte que je voudrais indiquer.
La deuxième idée forte, c'est que j'ai été candidat en 1990. Pour des raisons que tout le monde sait, je n'ai pas été candidat en 1995 ; mais, j'ai été Candidat en 2000. C'est donc pour la troisième fois que je suis candidat. Depuis 1990, Je vous propose inlassablement des réformes sociales en profondeur pour la Côte d'Ivoire.
En 1960, au moment où Félix Houphouët-Boigny proclamait l'indépendance, cela fait bientôt 50 ans, nous étions 3 millions d'habitants. Les problèmes se posaient donc différemment. Nous sommes aujourd'hui 20 millions d'habitants et plus. On pouvait se contenter d'être généreux et régler les problèmes en 1960.
Aujourd'hui, il faut mettre une politique sociale hardie. C'est pourquoi, entre autres choses, je vous avais proposé la décentralisation, l'Ecole gratuite et l'Assurance maladie universelle (Amu). A cause de la guerre survenue en septembre 2002, nous n'avons pas pu appliquer tout ce programme.
Mais, nous avons commencé les réformes. En 2001 et 2002, nous avons fait l'Ecole gratuite, pour les enfants qui étaient à l'école. J'ai demandé au Premier ministre, Affi N’Guessan, de ne pas voter de lois, parce qu'il fallait d'abord qu'on essaie avec ceux qui sont à l'école. Nous avons été soutenus par la Banque mondiale ; et nous avons donné des livres gratuitement. Nous avons construit beaucoup d'écoles. Nous avons multiplié les cantines scolaires. Les résultats ont été impressionnants. Nous nous apprêtions maintenant à faire des structures scolaires pour tous les enfants qui ne sont pas à l'école ; parce que ce ne sont pas tous les enfants de Côte d'ivoire qui sont à l'école. Il faut maintenant les mettre tous à l'école et cela allait nous coûter cher. Nous étions en train d'étudier cela quand la guerre est survenue. Cette réforme, nous allons la reprendre là où nous l'avons laissée. L'Assurance maladie universelle : il faut soigner les Ivoiriens. Il ne faut pas leur dire qu'on est généreux et qu'ils auront des médicaments à la volée. Il faut leur expliquer que la santé coûte cher ; mais que c'est le rôle de l'Etat d'organiser les Ivoiriens pour qu'ils ne sentent pas la chèreté de la santé. C'est ce que nous avons proposé de faire. C'est ce que beaucoup de pays africains comprennent aujourd'hui, et nous envoient des délégations pour apprendre ce que nous avons fait dans ce domaine.
C'est ce que la grande Amérique de Barack Obama veut faire aujourd'hui. L'Amu veut dire que nous allons préléver sur les revenus de chacun et lui donner, en lieu et place, une carte de santé ; pour qu'au moment où sa santé l'exige, il puisse se présenter devant n'importe quel médecin afin d'être traité, et soigné.
Les autres l'ont fait et ont réussi. Nous pouvons le faire. Nous devons le faire et nous allons le faire.
Quant à la décentralisation, vous avez commencé à en voir les premiers fruits, les tout premiers fruits ; parce que la décentralisation, pour nous, ce n'est pas que les Conseils généraux, c'est que chacun vient nous voir pour que sa sous-préfecture devienne une Préfecture. On ne réclame pas ce qui n'est pas bon. On ne demande que les choses bonnes. Quand les gens viennent de partout, se battent pour que leur village, leur sous-préfecture devienne un chef-lieu de Département, cela veut dire que nous sommes dans la bonne direction. Mais, nous n'avons pas fini. D'abord, parce que nous n'avons pas créé les régions. Il nous faudra créer les régions et donner des compétences pour que dans chacune d'elles, il y ait une Université et un Chu. La Côte d'Ivoire de 2009, n'est plus la Côte d'Ivoire de 1960. Quand j'étais en licence, ici, à l'Université de Cocody qui était alors l'Université nationale, nous étions en tout et pour tout, 900 étudiants ivoiriens en 1969. Aujourd'hui, chaque fois que les résultats du baccalauréat sont proclamés, ce qui fait au moins 25 000 bacheliers nouveaux, une Université entière, nous tremblons. Il nous faut donc créer des infrastructures. Nous avons commencé les discussions et les négociations ; nous attendons que cette élection passe pour que nous passions à l'œuvre.

Chers amis,

Entendons-nous bien. Quand je dis Université, je n'entends plus une Université classique et théorique. J'entends aussi des Centres de formation, des centres de formation professionnelle, des Centres d'enseignement techniques, des Centres de langues et des Centres informatiques à l'intérieur des Universités. Aujourd'hui, un jeune homme qui ne comprend pas l'anglais et qui ne sait pas manipuler les instruments informatiques, c'est un ignorant ; et il n'aura pas de travail. Il nous faut être clair et trouver un nouveau sens au mot Université. C'est ce que nous allons faire par la loi ; c'est ce que nous allons définir et c'est ce que nous allons mettre en application. J'ai parlé des Conseils régionaux. Mais, on n'a pas non plus encore fait réellement le transfert de toutes les compétences ; surtout les compétences fiscales aux Régions et aux Départements ; parce que c'est aussi cela la décentralisation.
Pour le moment, l'Etat central collecte tous les impôts et en redistribue. Mais, quand, lui-même est fauché, il en redistribue très peu ; et les représentants des Conseils généraux dans cette salle en savent quelque chose. Les maires en savent quelque chose.
Il faut donner aux entités décentralisées, Conseils généraux, Conseils régionaux, Conseils départementaux et communes, les moyens de collecter elles-mêmes leurs impôts. Collecter les taxes sur les marchés, ce n'est pas cela la décentralisation. Il faudra bien que nous intégrions dans notre culture, comme une part importante de notre vie commune, les moyens de collecter les impôts sur toutes les transactions de même que sur le foncier. Il faudra que nous transférions ce pouvoir-là aux entités décentralisées. Nous allons le faire et ce grand chantier nous attend.
Nous allons aussi, au niveau de l'Economie, développer les mines, l'énergie, etc. Nous avons beaucoup de richesses minières en Côte d'Ivoire ; mais évidemment, nous ne pouvons pas aller plus loin dans un pays en guerre. Nous ne pouvons pas avoir des discussions approfondies tant que ce pays est en guerre. Nous allons exploiter le pétrole, le gaz, etc. Avec le gaz, nous faisons aujourd'hui, de l'électricité. Il nous faut de l'électricité en abondance si nous voulons demain faire l'industrialisation.
Sur le café et sur le cacao, j'en discutais, il n y a pas longtemps avec les Ingénieurs, il nous faut aller plus loin. Nous sommes premiers vendeurs de cacao dans le monde, mais cela n'est pas suffisant pour moi. Nous sommes à une autre étape de l'histoire de la Côte d'Ivoire ; il faut aller à une seconde. Nos parents, leur culture économique, était de produire le café et le cacao pour les vendre ; nous, notre culture doit être de produire le café et le cacao et de les transformer, avant de les vendre.
C'est une affaire de génération ; et sur ce point-là, ceux qui nous achètent le cacao sont d'accord avec nous. Donc, dès que nous aurons fini ces élections, il nous faudra reprendre les négociations pour implanter, au moins, une usine de transformation dans chaque département producteur de cacao. C'est cela le sens de l'emploi. Une usine dans le Département d'Aboisso ; une usine à Adiaké ; une usine à Abengourou; une usine à Gagnoa ; à Dimbokro; une ou deux à Soubré, etc.
Il nous faut transformer le cacao, et selon les accords, première, deuxième ou troisième transformation, j'ai aujourd'hui, sur mon bureau, tous les accords de transformation de cacao. Avec le café, on fait de l'alcool et de la boisson. Il y a beaucoup de gens qui commencent l'apéritif avec l'alcool de café. Pourquoi ne le fait-on plus ?
J'ai dit récemment qu'il nous faut développer l'agriculture vivrière. Pourquoi a-t-on cessé de faire le ''Bon Foutou'' ? Pourquoi le fait-on uniquement pour l'exportation ?
Cela revient cher à la vente, dit-on; mais, l'Etat peut en subventionner la vente. Je le dis tout net; parce que c'est un instrument de libération de la femme. Parce qu'entre une femme qui doit aller au travail et revenir se mettre à piler le foutou de banane, d'igname ou de manioc et une autre qui revient du travail et qui prend 15 minutes pour chauffer l'eau, le tourner et avoir son foutou prêt, je préfère la deuxième solution ; et je le ferai. Le ''Trofê'', la sauce graine en boîte, la sauce arachide, note fameux ''Tigadêguê'', en boîte, tout cela, nous l'avons déjà étudié, découvert et bréveté. Toutes ces recettes, il nous faut continuer à les industrialiser de telle façon que les coûts soient suffisamment bas pour le marché intérieur. C'est ce que nous allons faire. C'est à cela que nous allons donner la priorité et en faisant cela, nous allons aider les jeunes à trouver du travail. C'est une deuxième ligne d'emploi que nous créons ainsi. Nous allons aider les foyers et nous allons libérer les femmes.
J'ai déjà dit à ceux qui s'occupent du Gaz d'accentuer les recherches et la transformation pour que d'ici 10-15 ans, la cuisine se fasse prioritairement sur le Gaz Butane et non plus sur le charbon de bois dont il nous faudra interdire l'utilisation. Voici, sur ce plan-là, nos propositions. C'est pourquoi, j'ai dit qu'il nous faut sortir de la commercialisation des fèves de cacao pour vendre les pâtes de cacao. Tel est le deuxième point de mon intervention. Dans mon troisième point, et à cause de la période exceptionnelle que nous vivons et que j'ai décrite comme étant le sens de cette élection, les Ivoiriens et les Ivoiriennes ont réfléchi. Et au lieu d'être le Candidat d'un parti, je suis, aujourd'hui, le Candidat d'au-moins 10 partis politiques et de plusieurs organisations.
Je voudrais d'abord saluer tous ceux qui ont lutté et tous ceux qui ont perdu la vie dans le combat. Parce qu'une période comme celle-là, historique, importante, où l'on passe d'une phase de l'histoire à une autre, il y a toujours des morts; hélas ! Je voudrais m'incliner devant tous ceux qui sont morts pour nous ; pour que nous vivions libres. Tous ceux qui sont morts partout, à Korhogo, à Ferké, à Bouaké, à Gagnoa, à Man, à Duékoué, à Guiglo, partout. Je voudrais les saluer et dire que c'est leur mort qui nous permet, aujourd'hui, d'être libres. Nous devons, nous qui vivons, nous montrer à leur hauteur. Nous devons nous montrer dignes du sacrifice qu'ils ont fait de leurs vies. Tous ceux qui sont morts devant l'Hôtel Ivoire, je ne les oublie pas. Je voudrais aussi saluer tous ceux qui ont eu des blessures graves qui les handicapent pour la vie. Il y en a dans cette salle. Je voudrais les saluer et leur dire que c'est aussi leurs blessures qui nous permettent de parler, de tenir et de vivre. Hélas, l'histoire est ainsi faite ; il nous faut l'assumer ; il nous faut penser à eux, à chaque instant.
Mais, la meilleure manière de penser à eux, c'est de continuer le combat pour lequel ils sont morts ou le combat pour lequel ils sont blessés. Ce sont les premiers auxquels je voudrais penser. Maintenant, il y a les autres qui vivent, parmi lesquels je vais être injuste. Vous me permettrez de choisir d'abord Bernard Dadié. Voici un Monsieur, prisonnier en 1949, délaissé, qui, aujourd'hui, s'est mis dans le combat pour la libération ; parce qu'il a compris que ce combat que nous ménons, ce combat que mènent ses fils et petits-fils, est un combat de libération.
Je voudrais le saluer avec tout le respect qu'on doit aux militants ; mais, avec tout le respect qu'on doit aux hommes qui ne regardent pas leur âge pour exprimer leurs convictions. Il aurait dû se dire : ''J'ai fait mon combat, je reste à la maison''. Que non ! J'ai été ému le jour où je l'ai vu marcher à Cocody vers la Résidence, à la tête des Artistes, pour venir apporter son soutien à la présidence bombardée. Je voudrais saluer les Responsables de tous les autres partis. Je ne vais pas les citer, parce que vous les connaissez ; mais, cela ne fera rien de les citer nommément, puisque nous sommes tous amis et frères.
Je voudrais les remercier pour leur choix. Leur choix se porte sur moi, parce que je suis, aujourd'hui, le porteur de ce combat dans lequel ils se reconnaissent. Je voudrais saluer tous les jeunes, toutes les femmes. Pour les jeunes, avant même l'investiture, je les rencontrerai et je leur parlerai. Parce que nous avons une politique de jeunesse. Je leur dirai que ce qu'ils ont, n'est pas vendable ; et ce qu'ils sont n'est pas à vendre. Et je montrerai pourquoi depuis, il y a un lien indissoluble entre eux et moi-même. Voici les remerciements que je voulais vous adresser.
Pour finir, je voudrais mettre un terme à des débats amusants qui ont eu lieu dans la Presse. Les gens se sont posé des questions au sujet de mon Directeur de campagne. Pourquoi veulent-ils que quelqu'un qui n'est pas candidat, ait un Directeur de campagne ?
Je vous ai dit que le jour où je serai candidat, j'aurai un Directeur de campagne. Aujourd'hui, je suis candidat et je voudrais vous annoncer que le Directeur de Campagne que je me suis choisi, c'est Issa Malick Coulibaly, ici, présent. Il formera son bureau qu'il présentera, la semaine prochaine.
Le candidat a choisi son porte-Parole, qui est Pascal Affi N'guessan. Sur ce point-là, le débat est clos ; allons au fond des questions.
Chers amis, je termine en disant donc que je suis candidat. Je suis candidat pour la Côte d'Ivoire. Je suis candidat pour les Ivoiriens et les Ivoiriennes. Je suis candidat pour continuer le combat que nous avons commencé. Je suis candidat pour continuer le combat que nos parents ont commencé depuis les années 1940 et que certains ont abandonné. Je suis candidat pour la Côte d'Ivoire.
Le combat a commencé, en avant!

Je vous remercie.

Propos recueillis par Frimo Koukou
retranscristion Roger Kassi
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