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Politique Publié le mardi 27 octobre 2009 | Nord-Sud

Election présidentielle : Le faux complot de Gbagbo contre le Fpi

En apparence, Laurent Gbagbo aurait pris ses distances d'avec le Front populaire ivoirien au profit d'une coalition politique plus large. Décryptage d'une tactique qui a l'air de produire ses effets au sein de la classe politique.
C'est l'histoire d'une opération politique menée à la manière d'une pièce de théâtre : beaucoup de figurants, un décor impressionnant, des personnages secondaires et un acteur central autour de qui se tresse la trame de l'action. La présentation de l'équipe de campagne du candidat Laurent Gbagbo le 16 octobre dernier, a suscité de nombreuses réactions et engendré beaucoup de commentaires. A la vue des personnalités qui la composent - et de celui qui la dirige -l'on a crié à la mise à mort du Front populaire ivoirien et à la mise au placard de Pascal Affi N'Guessan, son président. La montée en première ligne de Issa-Malick Coulibaly (Pdci) et la présence en grand nombre de partis membres du Cnrd au sein de cette équipe ont alimenté cette théorie. C'est une lecture au premier degré. A la vérité, et contrairement aux apparences, Laurent Gbagbo n'a jamais mis à l'écart le Fpi. Mieux, le cœur de son dispositif se trouve entre les mains de «son» parti et ce sont «ses» fidèles qui sont placés aux postes-clés de «sa» machine électorale. Le Directeur national de campagne (Dnc) dans l'architecture gbagboïenne, ce n'est pas l'homme-orchestre, ce n'est pas non plus le chef d'orchestre. C'est juste le porte-étendard. L'homme le plus visible de loin au cours de la bataille. Affi N'Guessan, avant même la nomination du Dr Coulibaly a tenu à mettre les points sur les «i». « Finalement, le plus important, est-ce vraiment qui va conduire la campagne? La question c'est plutôt la stratégie, la mobilisation, l'organisation. Et, ça, au FPI, nous le faisons au quotidien », explique le président du parti. « Le directeur de campagne, il prendra le train en marche et assurera la mise en œuvre », poursuit-il dans les colonnes de notre confrère «Jeune Afrique» du 09 octobre 2009. Pour bien faire comprendre que le Fpi ne jouera pas les seconds rôles, Simone Ehivet-Gbagbo court-circuite toutes les stratégies mises en place par Gbagbo autour de la promotion de son Dnc. Ainsi, selon les confidences faites par Affi N'Guessan au confrère panafricain, « le grand raout, qui marquera l'entrée en campagne, aura lieu début octobre. Pas moins de 200.000 personnes sont attendues pour un grand meeting de soutien au candidat Gbagbo, qui réunira pour la première fois son parti, le FPI, une vingtaine d'autres formations politiques ralliées à sa cause, une trentaine d'associations diverses, ainsi qu'une centaine de mouvements de soutien venus de tout le pays. La grand-messe se tiendra à Abidjan, dans un lieu qui reste à choisir. Selon Affi N'Guessan, c'est à ce moment-là, et pas avant, que sera rendu public le nom du directeur de campagne».
Mais Simone l'a pris de court en annonçant le mercredi 7 octobre 2009, au stade municipal d'Anyama, la candidature de son époux. Elle s'apprêtait, selon nos sources à annoncer dans la foulée que Issa-Malick Coulibaly serait le directeur de campagne et qu'il travaillerait avec les structures du Fpi, quand Gbagbo lui a coupé l'herbe sous les pieds. La stratégie de Gbagbo repose à 80% sur son parti, à 10% sur les partis tiers qui se sont ralliés à sa candidature et à 10% sur les personnalités de l'opposition qu'il a débauchées. En effet, quand on observe l'organigramme de l'équipe de campagne du candidat Laurent Gbagbo on se rend compte de trois choses.
Les trois axes de la stratégie
D'abord le directeur national de campagne n'a pas prise sur la Haute direction politique de campagne (Hdpc). Cette instance de stratégie et de réflexions tactiques est commandée par Laurent Gbagbo lui-même. Il est secondé par son épouse qui tient les rênes du Haut conseil politique de la campagne (Hcpc). C'est un calque du Cnrd que maîtrise déjà Simone Gbagbo. On y a rajouté des personnalités crypto-Fpi tels Edmond Zegbehi Bouazo, Maurice Séry Gnoléba, Oulaï Tiabas et Gouda Gnaoré de l'Usd. C'est une structure que Malick Coulibaly ne connaît pas ou très peu et que Simone gère depuis plusieurs années, avec une certaine autorité.
Ensuite le porte-parole du candidat : Pascal Affi N'Guessan. «Il a sous son autorité un Comité des Experts » précise le Dnc. Tous ces experts sont du Fpi. Ils sont choisis par Affi lui-même. Ils travaillent pour lui et sous ses ordres. Quel besoin était-il de créer un comité d'experts, échappant à l'autorité du Directeur de campagne, si tant est que c'est lui le boss ? C'est assurément une manière de partager l'autorité du Dnc avec le président du Fpi.
Enfin, le Directeur national de campagne lui-même. C'est le chef d'état-major des troupes qui seront sur le terrain pour la bataille. Il doit les guider, les orienter, les encourager. Il a sous son autorité directe, onze (11) directeurs nationaux de campagne adjoint (Dnca) et un directeur de cabinet, soit douze personnes. Parmi ces personnalités, seules cinq ne sont pas issues formellement du Fpi (Gervais Coulibaly, Charles Blé Goudé, Soro Seydou, Géneviève Bro-Grébé et Niamien Yao). Ceux qui ne sont pas du Fpi et qui sont à des postes-clés ont automatiquement des doublures Fpi. Blé Goudé est secondé par Konaté Navigué et Marie-Odette Lorougnon est la doublure de Bro-Grébé. Au bas de l'organigramme, se trouvent les structures territoriales qui animeront la campagne. Ces structures, ce sont les directions départementales de campagne (Ddc), les directions locales de campagne (Dlc), les Directions électorales de secteurs (Des), les Groupes d'animation et de supervision électorale (Gase), les responsables d'îlots (Ri), les représentants du candidat dans les bureaux de vote (Rcbv). Les Ddc, Dlc, Des, Gase, Ri et Rcbv qui constituent la colonne vertébrale de n'importe équipe de campagne, sont tous, sans exception, des cadres et des militants du Fpi. En termes militaires, ce sont les officiers qui vont conduire la bataille sur le terrain. Peut-on raisonnablement dire qu'on est un général quand tous les officiers que vous devez conduire à la bataille n'ont pas été choisis par vous, l'ont été sans vous et que vous ne les connaissez même pas ?
En vérité, il n'y a pas eu de complot de Gbagbo contre le Fpi, son parti. Au contraire, au nom d'une stratégie politique basée sur l'ouverture politique, sur la doctrine de la main tendue, il a opéré un astucieux saupoudrage de son appareil politique en le recouvrant avec des personnalités issues de l'opposition. Mais derrière le vernis, se tient l'impitoyable machine du Fpi tenue par le trio Laurent Gbagbo - Simone Gbagbo - Affi N'Guessan. Donc quand le Dnc annonce que «le choix des hommes et des femmes pour animer la campagne du président Laurent Gbagbo est fait de manière à rendre clairement visible l'ouverture préconisée et pratiquée par le président lui-même», c'est peut-être vrai. Mais ouverture ne signifie pas rejet. Et Gbagbo sait que le seul appareil véritable qu'il a en mains, en définitive, c'est le Fpi. Donc, il est illusoire de croire que Gbagbo s'est séparé du Fpi. Si l'opposition se met à croire cela, c'est que le camouflage s'avère parfait.

Touré Moussa
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