Bédié et Ouattara ne sont pas aimés des Ivoiriens. C’est le constat fait par des Instituts de sondages. Voici les raisons.
A l'approche de la présidentielle en Côte d'Ivoire, des enquêtes (nationales et internationales), menées auprès des Ivoiriens, montrent toujours que ces derniers se reconnaissent plus en Laurent Gbagbo, actuel chef d'Etat ivoirien, qu'en Henri Konan Bédié et Alassane Dramane Ouattara. Pourquoi donc les Ivoiriens boudent-ils ces deux hommes ? Pour expliquer cet état de fait, il suffit de jeter un regard rétrospectif sur ce que chacun d'eux a assumé comme charges, au sommet de l'Etat. Et la manière dont ils ont géré les affaires de l'Etat. Retour sur quelques faits qui ont marqué, à jamais, les Ivoiriens et qui constituent pour eux, des éléments catalyseurs dans l'appréciation de tel ou tel homme d'Etat ivoirien.
Origine de la xénophobie en Côte d'Ivoire
En 1989, la Côte d'Ivoire connait une crise économique. Pour faire face à cette situation, le Président Félix Houphouët-Boigny fait appel à un économiste qui a occupé des postes au Fonds monétaire international (Fmi) et à la Bceao, en l'occurrence le " Voltaïque " Alassane Dramane Ouattara. Il occupe le poste de président du comité interministériel. Avant d'être nommé Premier ministre de Côte d'Ivoire en 1991. Comme première mesure, il instaure une carte de séjour pour les étrangers. C'est le début du calvaire des étrangers. Ils subissent les tracasseries policières et autres spoliations. Tous les étrangers sont tenus de posséder ce sésame, au risque d'être malmenés par les Forces de sécurité qu'ils croisent sur leur chemin. Elèves en vacances venant de pays voisins, fonctionnaires de passage, personne n'échappe à cette nouvelle mesure de Ouattara, supposée renflouer les caisses de l'Etat. Les Burkinabè qui sont les plus nombreux parmi tous les étrangers vivant en terre d'Eburnie sont les premières victimes de cette mesure de Ouattara. Ainsi, la stigmatisation et la xénophobie s'exacerbèrent au fil des ans, au pays d'Houphouët-Boigny. Et c'est dans cette atmosphère tendue entre Ivoiriens et non Ivoiriens qu'est survenue la crise du 19 septembre 2002. Une crise au goût amer pour les Ivoiriens. Qui pensent que cela ne leur serait jamais arrivé si, à un moment donné de la vie du pays, l'on n'avait pas pensé qu'avec la carte de séjour, le pays pouvait se relever. Ainsi donc, les Ivoiriens ont changé de regard sur le premier ministre d'Houphouët-Boigny. En qui, ils avaient pourtant placé un grand espoir.
Ouattara et la gestion des affaires
Que dire de la situation des enseignants " raccrochés " ? Pour renflouer les caisses de l'Etat, Alassane Ouattara instaure le salaire à double vitesse. Ce qui a causé la démotivation des enseignants et l'effondrement du système éducatif. N'oublions pas les licenciements abusifs dont étaient victimes les travailleurs. Le bradage de certaines entreprises vitales pour la Côte d'Ivoire faisait partie de son plan. L'Eeci, la Sodeci ont été liquidées à un franc symbolique à Bouygues qui se trouve être une entreprise française.
Ouattara et la Fesci
La situation des étudiants et des élèves a empiré avec l'arrivée de Alassane Dramane Ouattara. Ils ont été dépouillés de tous leurs avantages sociaux. A savoir : la carte de bus, les cars, les chambres. Comme un malheur n'arrive jamais seul, il organise dans la nuit du 17 mai 1991, une descente musclée des éléments de la Firpac dans les cités de Yopougon. La suite, on la connaît. Des étudiants sont bastonnés à mort dans leur sommeil. En plus, les premiers responsables de la Fédération estudiantine et scolaire sont mis aux arrêts. Notamment, Martial Ahipeaud.
Ouattara, l'ethnie et la religion
Un autre fait qui choque les populations reste l'usage de l'ethnie et de la religion par Alassane Dramane Ouattara, à des fins politiques. Cette donnée est d'emblée apparue en 1990 à travers la charte du Nord. Alors qu'Alassane Ouattara était Premier ministre d'Houphouët-Boigny. Elle s'est accentuée au plus fort de la guéguerre entre Ouattara et Bédié. Lorsque l'ancien directeur général adjoint du Fmi a déclaré que Bédié empêchait sa candidature à la présidence de la République, parce qu'il est musulman et du Nord. Elle s'est affinée au fil des années pour devenir, aujourd'hui, une véritable gangrène. La propension du Rdr et son leader à demeurer dans le giron ethnique est loin de rencontrer l'assentiment des Ivoiriens en faveur de Ouattara. Le parti fondé par Djéni Kobina a aussi été pris en flagrant délit de collusion avec les auteurs du coup d'Etat de décembre 1999 et de la rébellion armée de septembre 2002. Ce qui continue de heurter les Ivoiriens qui n'ont jamais pensé à un tel mariage. D'autant que cette crise a causé la mort d'innocentes personnes et mis le pays en retard sur la route du développement. Ce qui fait dire que " contrairement à ce que Ouattara pourrait faire croire aux Ivoiriens, à des fins purement politiciennes, le bilan de son mentor comme Premier ministre, ne fut pas reluisant ". Plus grave, supposé riche, par ses partisans, Alassane Dramane Ouattara n'a curieusement jamais posé un acte de solidarité de grande envergure, au profit des populations du Nord ivoirien dont il se dit originaire. Du coup, les actes de l'homme Alassane Ouattara l'ont inscrit dans la conscience collective ivoirienne, comme "un déstabilisateur et faiseur de coups d'Etat".
Bédié et l'héritage d'Houphouët
Que dire de l'actuel président du Pdci-Rda, Henri Konan Bédié, qui a reçu le pouvoir en héritage constitutionnel, après le décès d'Houphouët-Boigny ? Tout a été dit ou presque sur l'homme. En 1993, avec son avènement au pouvoir, les difficultés se sont vite signalées. Et le mal s'est avéré si profond qu'il a suscité la naissance, en 1994, du Rassemblement des républicains, parti né des entrailles du Pdci, à l'initiative de feu Djéni Kobina et d'autres cadres du vieux parti. A cela, s'ajoute la volonté de N'Zuéba à vouloir transformer Daoukro, sa ville natale, en une nouvelle capitale. Négligeant royalement la veuve Marie-Thérèse Houphouët-Boigny -bien- aimée des Ivoiriens-, et la famille d'Houphouët-Boigny. Alors que le projet du transfert de la capitale politique à Yamoussoukro, était un acquis sur papier. Il lui suffisait d'une petite dose de volonté politique, pour réaliser le rêve de son père adoptif. Pour de nombreux Ivoiriens, cela relève de l'ingratitude, difficile à digérer. Mais Bédié n'en a cure et entreprend des investissements colossaux dans des localités de sa région et de celles de ses proches dont Koukourandoumi, village de son épouse. Alors qu'à la faveur de la dévaluation du Franc Cfa en 1994, l'Etat avait bénéficié "d'une pluie de milliards de Fcfa" qui pouvait profiter à tous les Ivoiriens. Son programme de gouvernement dit "l'Eléphant d'Afrique" n'a pas changé les choses. Le scandale du détournement des 18 milliards de Fcfa de l'Union européenne (Ue) prêtés à la Côte d'Ivoire, est encore frais dans les esprits. Si bien que l'opinion nationale garde une mauvaise image du pouvoir Pdci sous Bédié. Un chef d'Etat qui, avec sa famille et ses proches, était exagérément porté sur l'argent et les affaires. Conséquence, plus de prêts pour le pays à compter de 1998.
Bédié et l'Ivoirité
Plutôt que de s'attaquer au problème de la carte de séjour, Bédié s'est dressé contre Ouattara, avec son concept d'"Ivoirité ", avec un mandat d'arrêt international contre le président du Rdr. Toutes choses qui ont permis à Ouattara, aidé de ses soutiens externes, de déverser sa bile sur la Côte d'Ivoire, dans un combat contre la crise identitaire. En présentant " son " pays comme un pays de xénophobes, à travers des documentaires comme " Côte d'Ivoire, poudrière identitaire ", réalisé par le Belge Bernard Shauër. Les auteurs du coup d'Etat de 1999 et ceux de l'ex-rébellion armée en 2002, s'en sont servis comme prétexte majeur. Dans l'opinion ivoirienne, le président Bédié et le Pdci charrient l'Ivoirité comme un boulet, avec son pendant, le tribalisme, dont N'zuéba se pose comme un chantre.
Bédié et l'extérieur
Un autre fait que le Ivoiriens sont loin d'oublier, est lié à l'alliance du Pdci, conduite par Bédié, avec l'ex-rébellion et ses animateurs soutenue alors, par leur commanditaire Alassane Dramane Ouattara -qui le leur a signifié en juin dernier à Bouaké : " votre combat était indispensable "-, et leur parrain, Jacques René Chirac. Ils l'acceptent très mal. En somme, Bédié est taxé de ne pas être proche du peuple ivoirien en souffrance, dans son entièreté. Les Ivoiriens le trouvent distant.
Bédié et la Fesci
A son arrivée au pouvoir, les étudiants de Côte d'Ivoire qui ont mis un réel espoir en Bédié, pour régler leurs problèmes, ont vite déchanté. Il suspend les activités de la Fesci. Qui rentre en clandestinité, pour refaire surface. Mais pas pour longtemps. Son leader d'antan, Charles Blé Goudé est arrêté et emprisonné enchaîné sur son lit d'hôpital. Un autre choc dans l'opinion nationale et internationale.
Bédié et le Pdci-Rda
Au sein de ce parti, Konan Bédié est confronté à un handicap lié à sa personnalité. C'est que Bédié s'y est comporté comme un vrai dictateur, peu ouvert aux idées nouvelles. Choquant pour les Ivoiriens dont une partie se reconnait en un courant dit des Rénovateurs tapis dans l'ombre et dont les membres attendent leur heure pour rebondir au Pdci. Une faiblesse personnelle décriée, et qui débouche sur sa gestion opaque du pouvoir. L'organisation parfaite du Pdci-Rda sous Houphouët a connu des chamboulements à l'arrivée de M. Konan Bédié à sa tête, en 1994. Il a foutu l'héritage laissé par Houphouët-Boigny en l'air. Aujourd'hui, le Pdci vogue comme un parti quelconque qui cherche ses repères. Les antagonismes sont nombreux : divisions et haines créant des frustrations, causées par le camp Bédié à de hauts responsables du parti. Divisions qui, somme toute, ont favorisé d'une manière ou d'une autre, le coup d'Etat de décembre 1999 et poussé certains de ses dignitaires à claquer la porte ou à prendre leur distance vis-à-vis de la direction du Pdci. Parmi eux, Laurent Dona Fologo (ancien puissant Secrétaire général et président par intérim du parti), Bernard Binlin Dadié (éminent homme de lettres, écrivain émérite, ancien ministre de la Culture sous Houphouët-Boigny), Timothée Ahoua N'Guetta (ancien ambassadeur et l'un des plus fidèles compagnons de Bédié), Séry Gnoléba, Denis Bra Kanon etc. Plus grave, à l'heure où les candidats proposent leur programme de gouvernement, les Ivoiriens ne pensent pas que Konan Bédié, vu son âge avancé, puisse faire des projets sur un avenir de 20 à 30 ans, pour les futures générations en Côte d'Ivoire. Dans un camp comme dans l'autre, les Ivoiriens en sont arrivés à la conclusion que ces deux personnalités politiques, Bédié et Ouattara ne sont pas en mesure de faire l'affaire de la Côte d'Ivoire. Ceci explique donc le peu d'intérêt que les Ivoiriens accordent aux propos politiciens de ces deux hommes, en cette période de campagne pré-électorale.
Frimo K. Djipro
koukoudf@yahoo.fr
A l'approche de la présidentielle en Côte d'Ivoire, des enquêtes (nationales et internationales), menées auprès des Ivoiriens, montrent toujours que ces derniers se reconnaissent plus en Laurent Gbagbo, actuel chef d'Etat ivoirien, qu'en Henri Konan Bédié et Alassane Dramane Ouattara. Pourquoi donc les Ivoiriens boudent-ils ces deux hommes ? Pour expliquer cet état de fait, il suffit de jeter un regard rétrospectif sur ce que chacun d'eux a assumé comme charges, au sommet de l'Etat. Et la manière dont ils ont géré les affaires de l'Etat. Retour sur quelques faits qui ont marqué, à jamais, les Ivoiriens et qui constituent pour eux, des éléments catalyseurs dans l'appréciation de tel ou tel homme d'Etat ivoirien.
Origine de la xénophobie en Côte d'Ivoire
En 1989, la Côte d'Ivoire connait une crise économique. Pour faire face à cette situation, le Président Félix Houphouët-Boigny fait appel à un économiste qui a occupé des postes au Fonds monétaire international (Fmi) et à la Bceao, en l'occurrence le " Voltaïque " Alassane Dramane Ouattara. Il occupe le poste de président du comité interministériel. Avant d'être nommé Premier ministre de Côte d'Ivoire en 1991. Comme première mesure, il instaure une carte de séjour pour les étrangers. C'est le début du calvaire des étrangers. Ils subissent les tracasseries policières et autres spoliations. Tous les étrangers sont tenus de posséder ce sésame, au risque d'être malmenés par les Forces de sécurité qu'ils croisent sur leur chemin. Elèves en vacances venant de pays voisins, fonctionnaires de passage, personne n'échappe à cette nouvelle mesure de Ouattara, supposée renflouer les caisses de l'Etat. Les Burkinabè qui sont les plus nombreux parmi tous les étrangers vivant en terre d'Eburnie sont les premières victimes de cette mesure de Ouattara. Ainsi, la stigmatisation et la xénophobie s'exacerbèrent au fil des ans, au pays d'Houphouët-Boigny. Et c'est dans cette atmosphère tendue entre Ivoiriens et non Ivoiriens qu'est survenue la crise du 19 septembre 2002. Une crise au goût amer pour les Ivoiriens. Qui pensent que cela ne leur serait jamais arrivé si, à un moment donné de la vie du pays, l'on n'avait pas pensé qu'avec la carte de séjour, le pays pouvait se relever. Ainsi donc, les Ivoiriens ont changé de regard sur le premier ministre d'Houphouët-Boigny. En qui, ils avaient pourtant placé un grand espoir.
Ouattara et la gestion des affaires
Que dire de la situation des enseignants " raccrochés " ? Pour renflouer les caisses de l'Etat, Alassane Ouattara instaure le salaire à double vitesse. Ce qui a causé la démotivation des enseignants et l'effondrement du système éducatif. N'oublions pas les licenciements abusifs dont étaient victimes les travailleurs. Le bradage de certaines entreprises vitales pour la Côte d'Ivoire faisait partie de son plan. L'Eeci, la Sodeci ont été liquidées à un franc symbolique à Bouygues qui se trouve être une entreprise française.
Ouattara et la Fesci
La situation des étudiants et des élèves a empiré avec l'arrivée de Alassane Dramane Ouattara. Ils ont été dépouillés de tous leurs avantages sociaux. A savoir : la carte de bus, les cars, les chambres. Comme un malheur n'arrive jamais seul, il organise dans la nuit du 17 mai 1991, une descente musclée des éléments de la Firpac dans les cités de Yopougon. La suite, on la connaît. Des étudiants sont bastonnés à mort dans leur sommeil. En plus, les premiers responsables de la Fédération estudiantine et scolaire sont mis aux arrêts. Notamment, Martial Ahipeaud.
Ouattara, l'ethnie et la religion
Un autre fait qui choque les populations reste l'usage de l'ethnie et de la religion par Alassane Dramane Ouattara, à des fins politiques. Cette donnée est d'emblée apparue en 1990 à travers la charte du Nord. Alors qu'Alassane Ouattara était Premier ministre d'Houphouët-Boigny. Elle s'est accentuée au plus fort de la guéguerre entre Ouattara et Bédié. Lorsque l'ancien directeur général adjoint du Fmi a déclaré que Bédié empêchait sa candidature à la présidence de la République, parce qu'il est musulman et du Nord. Elle s'est affinée au fil des années pour devenir, aujourd'hui, une véritable gangrène. La propension du Rdr et son leader à demeurer dans le giron ethnique est loin de rencontrer l'assentiment des Ivoiriens en faveur de Ouattara. Le parti fondé par Djéni Kobina a aussi été pris en flagrant délit de collusion avec les auteurs du coup d'Etat de décembre 1999 et de la rébellion armée de septembre 2002. Ce qui continue de heurter les Ivoiriens qui n'ont jamais pensé à un tel mariage. D'autant que cette crise a causé la mort d'innocentes personnes et mis le pays en retard sur la route du développement. Ce qui fait dire que " contrairement à ce que Ouattara pourrait faire croire aux Ivoiriens, à des fins purement politiciennes, le bilan de son mentor comme Premier ministre, ne fut pas reluisant ". Plus grave, supposé riche, par ses partisans, Alassane Dramane Ouattara n'a curieusement jamais posé un acte de solidarité de grande envergure, au profit des populations du Nord ivoirien dont il se dit originaire. Du coup, les actes de l'homme Alassane Ouattara l'ont inscrit dans la conscience collective ivoirienne, comme "un déstabilisateur et faiseur de coups d'Etat".
Bédié et l'héritage d'Houphouët
Que dire de l'actuel président du Pdci-Rda, Henri Konan Bédié, qui a reçu le pouvoir en héritage constitutionnel, après le décès d'Houphouët-Boigny ? Tout a été dit ou presque sur l'homme. En 1993, avec son avènement au pouvoir, les difficultés se sont vite signalées. Et le mal s'est avéré si profond qu'il a suscité la naissance, en 1994, du Rassemblement des républicains, parti né des entrailles du Pdci, à l'initiative de feu Djéni Kobina et d'autres cadres du vieux parti. A cela, s'ajoute la volonté de N'Zuéba à vouloir transformer Daoukro, sa ville natale, en une nouvelle capitale. Négligeant royalement la veuve Marie-Thérèse Houphouët-Boigny -bien- aimée des Ivoiriens-, et la famille d'Houphouët-Boigny. Alors que le projet du transfert de la capitale politique à Yamoussoukro, était un acquis sur papier. Il lui suffisait d'une petite dose de volonté politique, pour réaliser le rêve de son père adoptif. Pour de nombreux Ivoiriens, cela relève de l'ingratitude, difficile à digérer. Mais Bédié n'en a cure et entreprend des investissements colossaux dans des localités de sa région et de celles de ses proches dont Koukourandoumi, village de son épouse. Alors qu'à la faveur de la dévaluation du Franc Cfa en 1994, l'Etat avait bénéficié "d'une pluie de milliards de Fcfa" qui pouvait profiter à tous les Ivoiriens. Son programme de gouvernement dit "l'Eléphant d'Afrique" n'a pas changé les choses. Le scandale du détournement des 18 milliards de Fcfa de l'Union européenne (Ue) prêtés à la Côte d'Ivoire, est encore frais dans les esprits. Si bien que l'opinion nationale garde une mauvaise image du pouvoir Pdci sous Bédié. Un chef d'Etat qui, avec sa famille et ses proches, était exagérément porté sur l'argent et les affaires. Conséquence, plus de prêts pour le pays à compter de 1998.
Bédié et l'Ivoirité
Plutôt que de s'attaquer au problème de la carte de séjour, Bédié s'est dressé contre Ouattara, avec son concept d'"Ivoirité ", avec un mandat d'arrêt international contre le président du Rdr. Toutes choses qui ont permis à Ouattara, aidé de ses soutiens externes, de déverser sa bile sur la Côte d'Ivoire, dans un combat contre la crise identitaire. En présentant " son " pays comme un pays de xénophobes, à travers des documentaires comme " Côte d'Ivoire, poudrière identitaire ", réalisé par le Belge Bernard Shauër. Les auteurs du coup d'Etat de 1999 et ceux de l'ex-rébellion armée en 2002, s'en sont servis comme prétexte majeur. Dans l'opinion ivoirienne, le président Bédié et le Pdci charrient l'Ivoirité comme un boulet, avec son pendant, le tribalisme, dont N'zuéba se pose comme un chantre.
Bédié et l'extérieur
Un autre fait que le Ivoiriens sont loin d'oublier, est lié à l'alliance du Pdci, conduite par Bédié, avec l'ex-rébellion et ses animateurs soutenue alors, par leur commanditaire Alassane Dramane Ouattara -qui le leur a signifié en juin dernier à Bouaké : " votre combat était indispensable "-, et leur parrain, Jacques René Chirac. Ils l'acceptent très mal. En somme, Bédié est taxé de ne pas être proche du peuple ivoirien en souffrance, dans son entièreté. Les Ivoiriens le trouvent distant.
Bédié et la Fesci
A son arrivée au pouvoir, les étudiants de Côte d'Ivoire qui ont mis un réel espoir en Bédié, pour régler leurs problèmes, ont vite déchanté. Il suspend les activités de la Fesci. Qui rentre en clandestinité, pour refaire surface. Mais pas pour longtemps. Son leader d'antan, Charles Blé Goudé est arrêté et emprisonné enchaîné sur son lit d'hôpital. Un autre choc dans l'opinion nationale et internationale.
Bédié et le Pdci-Rda
Au sein de ce parti, Konan Bédié est confronté à un handicap lié à sa personnalité. C'est que Bédié s'y est comporté comme un vrai dictateur, peu ouvert aux idées nouvelles. Choquant pour les Ivoiriens dont une partie se reconnait en un courant dit des Rénovateurs tapis dans l'ombre et dont les membres attendent leur heure pour rebondir au Pdci. Une faiblesse personnelle décriée, et qui débouche sur sa gestion opaque du pouvoir. L'organisation parfaite du Pdci-Rda sous Houphouët a connu des chamboulements à l'arrivée de M. Konan Bédié à sa tête, en 1994. Il a foutu l'héritage laissé par Houphouët-Boigny en l'air. Aujourd'hui, le Pdci vogue comme un parti quelconque qui cherche ses repères. Les antagonismes sont nombreux : divisions et haines créant des frustrations, causées par le camp Bédié à de hauts responsables du parti. Divisions qui, somme toute, ont favorisé d'une manière ou d'une autre, le coup d'Etat de décembre 1999 et poussé certains de ses dignitaires à claquer la porte ou à prendre leur distance vis-à-vis de la direction du Pdci. Parmi eux, Laurent Dona Fologo (ancien puissant Secrétaire général et président par intérim du parti), Bernard Binlin Dadié (éminent homme de lettres, écrivain émérite, ancien ministre de la Culture sous Houphouët-Boigny), Timothée Ahoua N'Guetta (ancien ambassadeur et l'un des plus fidèles compagnons de Bédié), Séry Gnoléba, Denis Bra Kanon etc. Plus grave, à l'heure où les candidats proposent leur programme de gouvernement, les Ivoiriens ne pensent pas que Konan Bédié, vu son âge avancé, puisse faire des projets sur un avenir de 20 à 30 ans, pour les futures générations en Côte d'Ivoire. Dans un camp comme dans l'autre, les Ivoiriens en sont arrivés à la conclusion que ces deux personnalités politiques, Bédié et Ouattara ne sont pas en mesure de faire l'affaire de la Côte d'Ivoire. Ceci explique donc le peu d'intérêt que les Ivoiriens accordent aux propos politiciens de ces deux hommes, en cette période de campagne pré-électorale.
Frimo K. Djipro
koukoudf@yahoo.fr