Toute la vérité sur les 429.000 cas litigieux qu’on cache aux Ivoiriens
L'actualité politique est marquée par une accusation de fraude formulée samedi, par le chef de l'Etat Laurent Gbagbo, à travers son porte-parole, contre la Commission électorale indépendante (CEI). "Mauvaise information", selon la CEI, qui répondait déjà la veille à des accusations similaires parues dans la presse. Où se situe la vérité ? Notre enquête.
Dans un communiqué lu, le samedi 9 janvier, à la télé nationale, par Gervais Coulibaly, le porte-parole du président Laurent Gbagbo, celui-ci accuse la CEI de "fraude" et de "manipulation" dans le traitement des contentieux sur la liste électorale provisoire. Il s'appuie sur une réunion tenue deux jours auparavant à la Primature au cours de laquelle Robert Beugré Mambé, le président de la CEI, aurait "révélé qu'il a autorisé de manière unilatérale et discrétionnaire" des recherches complémentaires sur les cas litigieux. Le communiqué soutient que le soupçon de fraude pèse sur une liste de "429.000 personnes à intégrer d'office à la liste électorale provisoire". Faux !, soutient la CEI. Dans un communiqué publié avant le communiqué du chef de l'Etat mais qui a le mérite de répondre à celui-ci puisqu'il s'agit d'un démenti lié à des rumeurs de fraude, le porte-parole adjoint de la CEI "condamne fermement cette attitude des colporteurs de ces mauvaises informations qui sont de nature à saper le processus électoral, pourtant bien engagé". "Pour ce qui concerne les supposées 400.000 personnes qui auraient été introduites dans le fichier, il n'en est rien. Les seules personnes qui figurent sur la liste sont celles qui sont physiquement passées devant les Commissions électorales locales qui, à leur tour, en toute indépendance, se sont prononcées favorablement à leurs requêtes", explique la CEI.
Nouveau croisement interne
En dehors des communiqués officiels, notre enquête établit que la CEI a opté, du fait de la faible affluence dans les centres de gestion du contentieux électoral, pour un nouveau croisement interne, des fichiers dits historiques en sa possession. Ce travail, selon nos sources très renseignées, a permis à la CEI d'identifier 429.000 personnes sur les 1.033.000 qui n'ont pu être identifiées, contrairement aux 5.300.000 croisées positivement. " Contrairement à ce que le camp présidentiel veut faire croire, ces 429.000 personnes n'ont jamais été intégrées à la liste électorale provisoire ", soutient l'une de nos sources. En effet, la commission centrale de la CEI s'était prononcée contre une intégration des 429.000 personnes sur la liste électorale provisoire en dehors du croisement populaire. Le jeudi dernier, alors que bruissent les rumeurs de fraude par la CEI, le Premier ministre Guillaume Soro, instruit par le chef de l'Etat Laurent Gbagbo, en marge des cérémonies de présentation des vœux au Palais présidentiel, convoque les structures impliquées dans le processus électoral. La CEI est au banc des accusés. La Sagem, l'Institut national de statistiques (INS), l'Office national de l'identification (ONI), la Commission nationale de supervision de l'identification (CNSI) assistent au "procès". Young Jin Choi, le représentant spécial de Ban Ki-moon, le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies (Onu) et Bouréima Badini, le représentant spécial du Facilitateur Blaise Compaoré, sont présents. Laurent Gbagbo dépêche deux représentants : Alcide Djédjé, son conseiller diplomatique et Géraldine Odehouri, sa conseillère juridique. Robert Beugré Mambé explique ses décisions. Ses interlocuteurs l'écoutent et lui posent des questions auxquelles il répond.
CD à détruire
A l'issue du "procès", plusieurs décisions sont arrêtées et validées par le Premier ministre, notamment le retrait du circuit et la destruction pure et simple des CD contenant la liste des 429.000 personnes. Au lendemain de cette rencontre, le Premier ministre s'envole en début d'après-midi pour Ouagadougou, en compagnie de Bouréïma Badini.
Une autre décision non moins importante sort de ce conclave : la vérification du travail effectué par la CEI dans le cadre du contentieux électoral. Cette précaution supplémentaire doit permettre à la Primature et au chef de l'Etat de savoir si oui ou non, la CEI a introduit des noms non autorisés par le croisement dit populaire. D'ores et déjà, celle-ci soutient le contraire : "En l'état actuel des statistiques, sur environ 550.000 requêtes enregistrées, près de 450.000 ont été agréées sur le terrain par les croisements dits populaires". Elle lance à l'endroit des sceptiques que "les Procès Verbaux des délibérations existent dans toutes les 415 CEI locales pour l'attester".
André Silver Konan
kandresilver@yahoo.fr
L'actualité politique est marquée par une accusation de fraude formulée samedi, par le chef de l'Etat Laurent Gbagbo, à travers son porte-parole, contre la Commission électorale indépendante (CEI). "Mauvaise information", selon la CEI, qui répondait déjà la veille à des accusations similaires parues dans la presse. Où se situe la vérité ? Notre enquête.
Dans un communiqué lu, le samedi 9 janvier, à la télé nationale, par Gervais Coulibaly, le porte-parole du président Laurent Gbagbo, celui-ci accuse la CEI de "fraude" et de "manipulation" dans le traitement des contentieux sur la liste électorale provisoire. Il s'appuie sur une réunion tenue deux jours auparavant à la Primature au cours de laquelle Robert Beugré Mambé, le président de la CEI, aurait "révélé qu'il a autorisé de manière unilatérale et discrétionnaire" des recherches complémentaires sur les cas litigieux. Le communiqué soutient que le soupçon de fraude pèse sur une liste de "429.000 personnes à intégrer d'office à la liste électorale provisoire". Faux !, soutient la CEI. Dans un communiqué publié avant le communiqué du chef de l'Etat mais qui a le mérite de répondre à celui-ci puisqu'il s'agit d'un démenti lié à des rumeurs de fraude, le porte-parole adjoint de la CEI "condamne fermement cette attitude des colporteurs de ces mauvaises informations qui sont de nature à saper le processus électoral, pourtant bien engagé". "Pour ce qui concerne les supposées 400.000 personnes qui auraient été introduites dans le fichier, il n'en est rien. Les seules personnes qui figurent sur la liste sont celles qui sont physiquement passées devant les Commissions électorales locales qui, à leur tour, en toute indépendance, se sont prononcées favorablement à leurs requêtes", explique la CEI.
Nouveau croisement interne
En dehors des communiqués officiels, notre enquête établit que la CEI a opté, du fait de la faible affluence dans les centres de gestion du contentieux électoral, pour un nouveau croisement interne, des fichiers dits historiques en sa possession. Ce travail, selon nos sources très renseignées, a permis à la CEI d'identifier 429.000 personnes sur les 1.033.000 qui n'ont pu être identifiées, contrairement aux 5.300.000 croisées positivement. " Contrairement à ce que le camp présidentiel veut faire croire, ces 429.000 personnes n'ont jamais été intégrées à la liste électorale provisoire ", soutient l'une de nos sources. En effet, la commission centrale de la CEI s'était prononcée contre une intégration des 429.000 personnes sur la liste électorale provisoire en dehors du croisement populaire. Le jeudi dernier, alors que bruissent les rumeurs de fraude par la CEI, le Premier ministre Guillaume Soro, instruit par le chef de l'Etat Laurent Gbagbo, en marge des cérémonies de présentation des vœux au Palais présidentiel, convoque les structures impliquées dans le processus électoral. La CEI est au banc des accusés. La Sagem, l'Institut national de statistiques (INS), l'Office national de l'identification (ONI), la Commission nationale de supervision de l'identification (CNSI) assistent au "procès". Young Jin Choi, le représentant spécial de Ban Ki-moon, le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies (Onu) et Bouréima Badini, le représentant spécial du Facilitateur Blaise Compaoré, sont présents. Laurent Gbagbo dépêche deux représentants : Alcide Djédjé, son conseiller diplomatique et Géraldine Odehouri, sa conseillère juridique. Robert Beugré Mambé explique ses décisions. Ses interlocuteurs l'écoutent et lui posent des questions auxquelles il répond.
CD à détruire
A l'issue du "procès", plusieurs décisions sont arrêtées et validées par le Premier ministre, notamment le retrait du circuit et la destruction pure et simple des CD contenant la liste des 429.000 personnes. Au lendemain de cette rencontre, le Premier ministre s'envole en début d'après-midi pour Ouagadougou, en compagnie de Bouréïma Badini.
Une autre décision non moins importante sort de ce conclave : la vérification du travail effectué par la CEI dans le cadre du contentieux électoral. Cette précaution supplémentaire doit permettre à la Primature et au chef de l'Etat de savoir si oui ou non, la CEI a introduit des noms non autorisés par le croisement dit populaire. D'ores et déjà, celle-ci soutient le contraire : "En l'état actuel des statistiques, sur environ 550.000 requêtes enregistrées, près de 450.000 ont été agréées sur le terrain par les croisements dits populaires". Elle lance à l'endroit des sceptiques que "les Procès Verbaux des délibérations existent dans toutes les 415 CEI locales pour l'attester".
André Silver Konan
kandresilver@yahoo.fr