En essayant de faire inscrire dans le fichier électoral définitif 429.000 électeurs supplémentaires en-dehors des procédures normales, Beugré Mambé vient d'ouvrir un boulevard politique au camp présidentiel.
L'affaire des 429.000 électeurs croisés positivement à l'initiative unilatérale de Robert Beugré Mambé constituera sans doute le point de cristallisation des antagonismes politiques des semaines à venir. En faisant ce qu'il a fait, le président de la Cei a fait une passe royale à Laurent Gbagbo et à ouvert un boulevard à La majorité présidentielle pour prendre solidement pied dans le processus électoral. Qu'est-ce que Beugré Mambé a fait ? En résumé, et selon toutes les explications qu'il a données, il a ordonné à une petite équipe d'informaticiens de procéder à un - quatrième - croisement complémentaire sur la liste des 1,033 millions de personnes rejetés après les trois croisements consensuels, qui avaient permis d'avoir une liste électorale provisoire de 4,6 millions personnes. Ce croisement parallèle a été mené sans que toutes les structures ordinairement impliquées dans cette opération, n'en soient informées. Le résultat de ce croisement a permis de repêcher 429.000 personnes sur les 1,3 millions qui devaient fournir des preuves supplémentaires en vue d'être intégrées sur la liste électorale définitive. Une fois en possession de cette liste de noms, Beugré Mambé a essayé de les faire inscrire d'office sur la liste électorale définitive. Pour ce faire, des Cd Rom contenant ces listes de noms ont été convoyés à divers endroits du pays auprès d'informaticiens triés sur le volet. Mais l'insertion de ces personnes n'a pas été faite. Il n'y a donc pas eu d'inscription frauduleuse sur les listes électorales.
Mais Beugré Mambé a énormément péché. D'abord envers ses pairs de la Commission centrale de la Cei. Ces derniers s'étaient opposés vigoureusement à son intention de faire procéder à un autre croisement, en utilisant des critères qui avaient été rejetés et en dehors de la période légale prévue pour cela. Il est passé outre.
Il a également péché envers les structures techniques chargées de faire l'identification électorale. Ni la Sagem (entièrement neutre politiquement), ni l'Ins, ni l'Oni, ni la Cnsi (tous, partiellement neutres politiquement) n'ont été associés voire informés de cette opération. Elle a donc un caractère clandestin.
Désormais, la Cei étroitement surveillée
A ce propos, le directeur général de l'Ins, Meleu Mathieu, insiste pour dégager sa responsabilité dans cette affaire. «Je voudrais apporter un démenti formel pour dire que ni l'Institut national de la statistique, ni la Sagem sécurité n'ont participé à ce croisement appelé croisement complémentaire » déclare-t-il dans une conférence de presse, le dimanche 10 janvier. Et de tirer sur l'ambulance : «Il y a des choses dont on ne peut pas encore parler. Mais si elles faisaient l'objet de débat, on pourrait être en mesure d'entrer dans les détails de ce croisement pour dire ce qui y va et ce qui n'y va pas. Mais pour le moment, je peux vous dire qu'il y a eu des choses pas très, très correctes» assène-t-il dans les colonnes de Fraternité Matin. Beugré Mambé a en outre péché contre les structures institutionnelles chargées de superviser le processus d'identification. Et en premier lieu, contre la Primature. D'abord, il a violé le mode opératoire traditionnel qui consiste à faire valider par l'autorité les critères de sélection arrêtés de commun accord entre toutes les structures, avant qu'ils ne soient mis en œuvre par les informaticiens. Ensuite, il a utilisé pour ce projet une partie des ressources financières mises laborieusement à la disposition de la Cei pour accomplir ses missions. C'est pourquoi, la Primature a décidé de reprendre les choses en main. Le Cd-Rom contenant les 429.000 noms « fera l'objet de destruction parce qu'il ne peut intégrer le processus. Simplement en raison du fait que la procédure n'a pas été admise, selon l'usage, par l'ensemble des protagonistes » a affirmé Méité Sindou, le porte-parole du Premier ministre. Et d'annoncer que la Primature a décidé de surveiller désormais plus étroitement les activités de la Cei. «Le Premier ministre a demandé que les structures techniques d'identification, l'Office national d'identification, et les opérateurs techniques, Ins et Sagem soient impliqués dans la gestion des réclamations sur le contentieux » a-t-il précisé dans les colonnes de Nord-Sud Quotidien du lundi 11 janvier. L'objectif n'est pas une caporalisation, mais puisque le président de la Cei peut ordonner des opérations délicates, à l'insu des autres membres de la commission, le Premier ministre déclare que «certes, la Cei gouverne le processus, mais il y aura un droit de regard de l'Institut national de la Statistique (Ins), de la Sagem, pour que ce soit un processus ouvert et consensuel. » (ibid.)
Enfin, le président de la Cei a péché contre l'opinion publique nationale. Qui voyait en cette structure, la seule institution qui offrait un rempart solide contre les turpitudes des politiciens. S'il est prouvé aujourd'hui que le président de la Cei a fait procéder à des croisements parallèles, sur la base d'un logiciel qu'il a fait rédiger par des informaticiens tamisés, en utilisant des critères qui avaient été rejetés par la majorité, il créé un doute dans l'opinion sur l'impartialité de cette commission. Et c'est de ce doute dont avait besoin le Fpi, pour saper la crédibilité de cette institution. Avec cette faille du président Beugré, même si elle a été sans conséquence sur la liste électorale provisoire, la majorité présidentielle entend lui faire boire le calice jusqu'à la lie. Pour sauvegarder le processus de sortie de crise, l'on sera obligé de faire des concessions au camp de Gbagbo. Déjà, ils ont obtenu sans effort une rallonge de la période du contentieux. Maintenant, ils réclament la tête de Mambé et la dissolution de la Commission centrale de la Cei. Cela est difficile à obtenir, mais en contrepartie, pour éviter les blocages et les crispations, le Fpi pourrait obtenir des concessions importantes. Et renforcer sa position au sein de la Cei. En plus de cela, cette affaire donne des arguments au camp présidentiel pour accuser de tentative de fraude électorale le Rhdp, dont les deux ténors sont impliqués dans cette affaire via leurs représentants, Beugré Mambé (Pdci) et Charles Gomis (Rdr). Pis, le Fpi pourrait invoquer cette affaire de tripatouillage des listes électorales pour donner l'avantage au Rhdp, au cas où le verdict des urnes ne lui était pas favorable. C'est un vrai cadeau politique que Beugré Mambé vient d'offrir à La majorité présidentielle en ce début d'année 2010.
Touré Moussa
L'affaire des 429.000 électeurs croisés positivement à l'initiative unilatérale de Robert Beugré Mambé constituera sans doute le point de cristallisation des antagonismes politiques des semaines à venir. En faisant ce qu'il a fait, le président de la Cei a fait une passe royale à Laurent Gbagbo et à ouvert un boulevard à La majorité présidentielle pour prendre solidement pied dans le processus électoral. Qu'est-ce que Beugré Mambé a fait ? En résumé, et selon toutes les explications qu'il a données, il a ordonné à une petite équipe d'informaticiens de procéder à un - quatrième - croisement complémentaire sur la liste des 1,033 millions de personnes rejetés après les trois croisements consensuels, qui avaient permis d'avoir une liste électorale provisoire de 4,6 millions personnes. Ce croisement parallèle a été mené sans que toutes les structures ordinairement impliquées dans cette opération, n'en soient informées. Le résultat de ce croisement a permis de repêcher 429.000 personnes sur les 1,3 millions qui devaient fournir des preuves supplémentaires en vue d'être intégrées sur la liste électorale définitive. Une fois en possession de cette liste de noms, Beugré Mambé a essayé de les faire inscrire d'office sur la liste électorale définitive. Pour ce faire, des Cd Rom contenant ces listes de noms ont été convoyés à divers endroits du pays auprès d'informaticiens triés sur le volet. Mais l'insertion de ces personnes n'a pas été faite. Il n'y a donc pas eu d'inscription frauduleuse sur les listes électorales.
Mais Beugré Mambé a énormément péché. D'abord envers ses pairs de la Commission centrale de la Cei. Ces derniers s'étaient opposés vigoureusement à son intention de faire procéder à un autre croisement, en utilisant des critères qui avaient été rejetés et en dehors de la période légale prévue pour cela. Il est passé outre.
Il a également péché envers les structures techniques chargées de faire l'identification électorale. Ni la Sagem (entièrement neutre politiquement), ni l'Ins, ni l'Oni, ni la Cnsi (tous, partiellement neutres politiquement) n'ont été associés voire informés de cette opération. Elle a donc un caractère clandestin.
Désormais, la Cei étroitement surveillée
A ce propos, le directeur général de l'Ins, Meleu Mathieu, insiste pour dégager sa responsabilité dans cette affaire. «Je voudrais apporter un démenti formel pour dire que ni l'Institut national de la statistique, ni la Sagem sécurité n'ont participé à ce croisement appelé croisement complémentaire » déclare-t-il dans une conférence de presse, le dimanche 10 janvier. Et de tirer sur l'ambulance : «Il y a des choses dont on ne peut pas encore parler. Mais si elles faisaient l'objet de débat, on pourrait être en mesure d'entrer dans les détails de ce croisement pour dire ce qui y va et ce qui n'y va pas. Mais pour le moment, je peux vous dire qu'il y a eu des choses pas très, très correctes» assène-t-il dans les colonnes de Fraternité Matin. Beugré Mambé a en outre péché contre les structures institutionnelles chargées de superviser le processus d'identification. Et en premier lieu, contre la Primature. D'abord, il a violé le mode opératoire traditionnel qui consiste à faire valider par l'autorité les critères de sélection arrêtés de commun accord entre toutes les structures, avant qu'ils ne soient mis en œuvre par les informaticiens. Ensuite, il a utilisé pour ce projet une partie des ressources financières mises laborieusement à la disposition de la Cei pour accomplir ses missions. C'est pourquoi, la Primature a décidé de reprendre les choses en main. Le Cd-Rom contenant les 429.000 noms « fera l'objet de destruction parce qu'il ne peut intégrer le processus. Simplement en raison du fait que la procédure n'a pas été admise, selon l'usage, par l'ensemble des protagonistes » a affirmé Méité Sindou, le porte-parole du Premier ministre. Et d'annoncer que la Primature a décidé de surveiller désormais plus étroitement les activités de la Cei. «Le Premier ministre a demandé que les structures techniques d'identification, l'Office national d'identification, et les opérateurs techniques, Ins et Sagem soient impliqués dans la gestion des réclamations sur le contentieux » a-t-il précisé dans les colonnes de Nord-Sud Quotidien du lundi 11 janvier. L'objectif n'est pas une caporalisation, mais puisque le président de la Cei peut ordonner des opérations délicates, à l'insu des autres membres de la commission, le Premier ministre déclare que «certes, la Cei gouverne le processus, mais il y aura un droit de regard de l'Institut national de la Statistique (Ins), de la Sagem, pour que ce soit un processus ouvert et consensuel. » (ibid.)
Enfin, le président de la Cei a péché contre l'opinion publique nationale. Qui voyait en cette structure, la seule institution qui offrait un rempart solide contre les turpitudes des politiciens. S'il est prouvé aujourd'hui que le président de la Cei a fait procéder à des croisements parallèles, sur la base d'un logiciel qu'il a fait rédiger par des informaticiens tamisés, en utilisant des critères qui avaient été rejetés par la majorité, il créé un doute dans l'opinion sur l'impartialité de cette commission. Et c'est de ce doute dont avait besoin le Fpi, pour saper la crédibilité de cette institution. Avec cette faille du président Beugré, même si elle a été sans conséquence sur la liste électorale provisoire, la majorité présidentielle entend lui faire boire le calice jusqu'à la lie. Pour sauvegarder le processus de sortie de crise, l'on sera obligé de faire des concessions au camp de Gbagbo. Déjà, ils ont obtenu sans effort une rallonge de la période du contentieux. Maintenant, ils réclament la tête de Mambé et la dissolution de la Commission centrale de la Cei. Cela est difficile à obtenir, mais en contrepartie, pour éviter les blocages et les crispations, le Fpi pourrait obtenir des concessions importantes. Et renforcer sa position au sein de la Cei. En plus de cela, cette affaire donne des arguments au camp présidentiel pour accuser de tentative de fraude électorale le Rhdp, dont les deux ténors sont impliqués dans cette affaire via leurs représentants, Beugré Mambé (Pdci) et Charles Gomis (Rdr). Pis, le Fpi pourrait invoquer cette affaire de tripatouillage des listes électorales pour donner l'avantage au Rhdp, au cas où le verdict des urnes ne lui était pas favorable. C'est un vrai cadeau politique que Beugré Mambé vient d'offrir à La majorité présidentielle en ce début d'année 2010.
Touré Moussa