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Politique Publié le mercredi 3 février 2010 | Le Nouveau Réveil

Affaire “Jacqueline Oble rejetée par les siens”: Les femmes du Léboutou apportent leur soutien à leur sœur

Le 14 janvier 2010, les femmes du Leboutou, région d'origine de Mme Jacqueline Lohoues Oble, candidate à l'élection présidentielle de Côte d'Ivoire, ont découvert avec indignation et révolte, dans le journal Fraternité Matin en page 12, un article intitulé "Jacqueline Oble rejetée par les siens”, et signé du journaliste Monsieur Gueu Edison, correspondant régional de ce journal à Dabou.

Les propos injurieux, scandaleux et rétrogrades rapportés dans cet article, qui auraient été tenus par trois cadres de l'imposante armée d'intellectuels du Leboutou, à l'encontre de Madame Jacqueline Lohoues Oble, interpellent les femmes de cette région et, au-delà, toutes les femmes de Côte d'Ivoire.

De quoi s'agit-il? Monsieur Diby René, Docteur en Pharmacie, ex-député de Dabou, ancien ministre de la République et aujourd'hui Président du collectif des chefs traditionnels du Leboutou qui parlerait au nom de sa région dira ce qui suit: " Cette candidature est nulle et non avenue pour le Leboutou car ici, la femme n'a pas droit à la parole et ne peut donc commander. Pour nous, c'est un blasphème ". Et pourtant Madame Jacqueline Lohoues Oble fut aussi Ministre de la République. Dans la même veine, l'Honorable De Niangne Claude, actuel Député de Dabou Commune, fulminant de colère, déclarera: " C'est non et non! Cette candidature est ridicule et n'a aucun effet. Elle ferait mieux de se raviser ". Et pourtant, Jacqueline Lohoues Oble fut, elle aussi, Député de la Nation. Quant à Paul Wood Agnero, PCA de la SOPIE, c'est avec ironie qu'à l'évocation de la candidature de Madame Jacqueline Lohoues Oble, il déclarera: " Pourquoi ne se rallierait-elle pas plutôt derrière nous? Ça serait mieux pour elle! ". Le mot est lâché: derrière! Et pourtant, Madame Jacqueline Lohoues Oble fait partie de l'élite ivoirienne, et comme lui, cadre du Leboutou. Dans cette dernière déclaration transparait l'expression d'un atavisme forcené et suranné: la place de la femme est derrière l'homme. Les vaillantes femmes du Leboutou porteuses de progrès et d'avenir, ulcérées et choquées par la manifestation de tant de méchanceté gratuite et de légèreté, n'entendent pas se taire. Elles tiennent à user de leur liberté d'expression dans cette Côte d'Ivoire moderne pour livrer à l'opinion publique leur désapprobation à travers cette mise au point.

Face aux propos de ces trois frères, la question que nous sommes en droit de nous poser est celle-ci: Madame Jacqueline Lohoues Oble a-t-elle enfreint la loi de la République en déposant sa candidature à la magistrature suprême de notre Pays? Non! Nous semble-t-il !

Les déclarations de ces messieurs, que ne partagent d'ailleurs pas les notables du Leboutou, n'incriminent ni le niveau intellectuel, ni les compétences professionnelles, ni aucune autre exigence de la loi électorale ivoirienne pour se porter candidat à la magistrature suprême de la Côte d'Ivoire. Mme Jacqueline Lohoues Oble remplit toutes les conditions exigées. C'est pourquoi, le Conseil Constitutionnel a retenu sa candidature. En fait, le crime commis par Mme Jacqueline Lohoues Oble, c'est d'avoir eu le "malheur de naître femme". Elle est accusée, par ces trois messieurs qui s'érigent en maîtres penseurs de tout Leboutou, de "crime de lèse majesté" pour avoir eu l'audace, voire l'outrecuidance de présenter sa candidature en tant que femme à l'élection Présidentielle de Côte d'Ivoire; élection qui, pour eux, est une affaire d'hommes. Et pourtant, la Loi Fondamentale de la Côte d'Ivoire dispose en son article 2 : "que tous les êtres humains naissent libres et égaux devant la loi..." Ces trois personnalités ignorent manifestement que la Côte d'Ivoire a ratifié depuis quinze ans la Convention de l'ONU sur l'élimination de toutes formes de discrimination à l'égard des femmes.

Cette convention à laquelle notre Pays adhère lui fait obligation de modifier ou abroger toutes les lois, dispositions réglementaires, coutumes ou pratiques qui constituent une discrimination à l'égard des femmes. Ainsi l'article 5 stipule-t-il "que les Etats disent non aux idées préconçues qui attribuent un statut et un rôle inférieur aux femmes dans la société et dans la famille. Les Etats reconnaissent aux hommes et aux femmes les mêmes droits de participer à la vie publique et politique tant au plan national qu'international". (Article 7 et 8). Nous sommes devant un cas flagrant de violation systématique des droits protégés par la convention sus-citée. Le Leboutou ne serait-il pas partie intégrante de la Côte d'Ivoire? L'Etat est interpellé dans cette affaire.
Quant à la tradition dont parle Monsieur Diby, elle est protectrice de la femme, matrice et ciment de l'unité de la société Adioukrou en tant qu'elle fonde le " Bossu ", matriclan qui transcende 1"'Eb", patriclan restreint à une communauté villageoise. Nos trois frères n'ignorent pas cette réalité anthropologique qui les caractérise à l'instar de tout Adioukrou. Il est aussi une réalité que la femme, par sa fonction stabilisatrice de notre société, constitue la garante de l'équilibre social. De fait, quand les hommes sont bloqués dans leur tentative de régler des contradictions sociales, le dernier recours demeure la femme, d'où l'expression: "Sim yow gbel ogun" (Allons consulter la vieille femme). Elle est donc le dernier recours vers lequel les hommes se tournent pour trouver les solutions à des problèmes apparemment insolubles.

Pour nous femmes du Leboutou, ces propos procèdent d'une crainte inavouée de nos frères. Car, accepter l'irruption des femmes dans la sphère de décision, c'est reconnaître leurs mérites et leurs capacités à gérer les affaires de la communauté. En effet, en dépit du riche héritage que nous ont légué nos aïeuls, et malgré toutes les ressources humaines et naturelles dont regorge le Leboutou, à savoir: un nombre impressionnant de diplômés de toutes les disciplines, la présence de la savane couverte de cultures de rente, la forêt dense et fertile, la lagune généreuse, notre région ne connait pas le développement qu'elle mérite.

"Dans le Leboutou, les femmes n'ont pas droit à la parole et ne peuvent donc commander". Pour Monsieur Diby et ses amis, c'est un blasphème que de voir une femme aux commandes. Or Ironie du sort: les trois Sous-préfets des circonscriptions de Dabou, Toupah et Lopou responsables administratifs des chefs de villages dont Monsieur Diby est le président du collectif, sont des femmes. Ah oui, elles ne sont pas Adioukrou ! Ce sont donc les filles du Leboutou qui ne doivent pas commander chez elles encore moins la Côte d'Ivoire. C'est sur cette cohorte de femmes intelligentes, diplômées, battantes dont certaines ont occupé et occupent encore des postes de responsabilité et exercent des hautes fonctions dans le secteur public comme privé que pèse cet interdit. Ces filles du Leboutou appréciées pour leur compétence et leur savoir-faire tant en milieu rural qu'en milieu urbain; ce sont ces filles qui font la fierté de leurs familles, de leurs villages et de la nation qui doivent se taire et se mettre derrière leurs frères tout simplement parce qu'elles sont femmes! Quelle tristesse! Quelle injustice! Les femmes du Leboutou, toutes couches sociales et obédiences politiques confondues, dénoncent avec vigueur et fermeté ce regard dévalorisant et négatif porté sur la femme Adioukrou en particulier et la femme ivoirienne en général.

Merci Messieurs, par ces déclarations, vous nous placez devant nos responsabilités. Vous nous lancez le défi de notre émancipation. Nous prenions déjà la parole, désormais nous la prendrons de plus en plus, non plus derrière vous mais à côté de vous, voire devant vous pour libérer notre région de la léthargie dans laquelle votre "commandement" la maintient depuis trop longtemps.

Arrêtez de ridiculiser le Leboutou en vous donnant en spectacle, en donnant de ce vaillant peuple du Leboutou une image rétrograde qui ne sied ni à sa culture ni à son histoire.

Courage Jacqueline! Face à ce préjudice moral que tu subis, tes sœurs du Leboutou rassurent de leur soutien et de leur solidarité. Il en sera ainsi toutes les fois que l'une des filles de ce Pays se verra bafouée dans ses droits et dans sa dignité. Nous serons-là à ses côtés, car c'est ensemble que nous mènerons et gagnerons le combat de notre promotion et de notre libération de ce joug patriarcal d'un autre âge.

Que Dieu veille sur toi.
Pour les femmes du Leboutou
Mesdames:
Gnagne Nomel Elise
Mèlèdje Adrienne
Yédagne Angnime Anne-Marie
Professeur Essis Tomé Hortense
Essis Esso Henriette
Adoux Yobouet Marthe
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