Dans notre édition du jeudi 11 février, nous montrions le caractère dangereux de la démarche de certains membres du parti au pouvoir qui, du jour au lendemain, et avec la complicité de certains juges dont le zèle et le militantisme politique forcent le respect, plongent de nombreux Ivoiriens dans la tourmente en effaçant leur existence juridique de la terre des hommes, rien que sur la base de leur patronyme. Et à leur insu. Sur le même sujet, dans son édition d'hier 12 février, le quotidien " Le Patriote " nous a livré une information à la fois surprenante et extrêmement inquiétante. Sous le titre " dérive tribale dans le contentieux électoral : voici la bombe que prépare le Fpi à Yopougon ", le quotidien rapporte, photos à l'appui, le cas de deux Ivoiriens qui ont retrouvé, ahuris, leur nom sur la liste noire du Fpi déposée pour radiation, auprès du tribunal de première instance de Yopougon. Et cette première liste qui sera suivie d'autres, comporte, selon le confrère, 3 mille noms. Les deux Ivoiriens qui ont eu la chance de découvrir leur nom sur cette liste et qui ne décolèrent pas depuis, s'appellent respectivement Silla Arounan et Traoré Vatogoma. Mais laissons-les nous expliquer leur mésaventure : Silla Arounan : " Je suis Silla Arounan, éducateur au Lycée moderne d'Andokoi Yopougon depuis trois ans. Précédemment, j'étais au lycée moderne de Treichville où j'ai passé onze ans. Avant d'être éducateur, j'étais instituteur depuis 1983. Je suis originaire de Madinani, précisément du village de N'Golobilasso dont je suis le président de la mutuelle de développement(…) Je suis outré par cette manigance. Je dirais même que c'est une cabale contre ma personne et contre tous nos compatriotes qui subissent actuellement cette injustice planifiée. Paradoxalement, ceux qui prétendent que nous ne sommes pas Ivoiriens, ne nous connaissent même pas. J'en ai eu la preuve, lorsque j'ai rencontré l'un d'entre eux, répondant au nom de Tra Bi Zohouli, instituteur de son état. Je suis allé vers lui et lui ai demandé s'il me connaissait. Naturellement, il m'a répondu qu'il ne me connaissait pas. Et j'ai répliqué en lui disant qu'il m'a pourtant dénoncé comme étant un étranger. Alors, il semblait surpris. Avant de nous séparer, je lui ai dit que désormais, moi je le connais. Donc nous donnerons une suite à cette affaire ". Sans commentaire. Mais laissons parler le deuxième : " Je suis Traoré Vatogoma. Je suis né le 12 janvier 1962 à Blésségué dans la sous-préfecture de Kouto (Boundiali). J'ai commencé à travailler en qualité de professeur de sciences physiques depuis le 3 octobre 1986 au Ceg Harris devenu Lycée moderne Harris d'Adjamé. Depuis 1985, j'ai toujours voté. Jusqu'en 2000, j'ai toujours figuré sur la liste électorale de mon pays(…) Un collègue m'a appelé, me disant que je suis sur cette fameuse liste d'étrangers dont il faudra rayer les noms de la liste électorale. Des gens qui ne me connaissent pas et que je ne connais pas non plus, se permettent d'inscrire mon nom sur une telle liste. Sur quels critères ces personnes basent-elles leurs argumentations ? Je ne sais pas si c'est parce que je m'appelle Traoré et que je suis originaire de Kouto qu'automatiquement, je suis un étranger. Quand je regarde cette liste, c'est seulement les gens du nord. Est-ce parce que nous sommes du Nord, que nous ne sommes pas Ivoiriens ? … J'étais Ivoirien jusqu'à l'enrôlement et brusquement je ne le suis plus. Où va-t-on dans ce pays ?". Très belle question, que l'on peut reformuler ainsi : Dans quel trou les "radiateurs" (osons ce sens) sans discernement du Fpi conduisent le pays ? Car radiations sans discernement n'est qu'affrontements, ruines et larmes…
ASSALE TIEMOKO
ASSALE TIEMOKO
