« On n’est pas obligé de s’aimé ». Quand Laurent Gbagbo lance cette phrase lors d’une intervention radio télévisée, l’opinion dans son ensemble est stupéfaite. Il y a de quoi. De la part du chef de l’Etat, cette sortie est difficilement acceptable. Surtout que le pays connaissait une déchirure profonde de son tissu social. Mais, dans l’absolu, Gbagbo n’a pas tort. Les hommes, les millions qui habitent un pays, même si cela n’est pas l’idéal humain et religieux, peuvent ne pas s’aimer. Cependant, ils sont condamnés à s’accepter. En politique, cette réalité est plus valable que partout ailleurs. La compétition ici tourne à l’adversité. Et les empoignades prennent des tournures parfois incontrôlables. Quand il y a une situation constitutionnelle normale, l’élu est en droit de n’accepter dans son appareil à tous les niveaux que ceux de son camp ou ceux dont la mine et les allégeances lui conviennent. Mais, lorsqu’un pays est dans une crise aussi poussée que celle qui mine la Côte d’Ivoire, alors, il faut savoir mettre l’orgueil personnel et les humeurs dans un sac. Depuis octobre 2000, le pays n’a pas de président élu. Une situation que de nombreux Ivoiriens n’acceptent pas. Et pourtant, malgré eux, ils voient toujours Laurent Gbagbo aux commandes. Celui-ci et ses camarades n’ont pas non plus un amour de Chimène pour l’ex-rébellion et son chef. Et pourtant, la realpolitik impose une cohabitation au sommet de l’Etat entre Gbagbo et Soro Guillaume. L’opposition ivoirienne conduite par Alassane Ouattara et Konan Bédié a récemment décidé de ne plus reconnaître Gbagbo comme chef de l’Etat, et portant, les négociations pour être au gouvernement sont en cours. Elles butent sur les humeurs du chef de l’Etat qui ne veut pas voir certains cadres de cette opposition au gouvernement. Où est donc passé ce « sage » qui disait « qu’on n’est pas obligé de s’aimer » ?
D. Al Seni
D. Al Seni