Le processus électoral bien plus, le processus de sortie de crise a-t-il pris du plomb dans l'aile ? Dans l'interview qu'il a bien voulu nous accorder hier soir, M. Koffi Koffi Paul, Directeur de cabinet adjoint du Premier ministre, chargé des Programmes de sortie de crise, répond à cette préoccupation que bon nombre d'Ivoiriens semblent partager. Il décline par la suite, les actions que la primature entend mener incessamment pour que le processus atteigne sa vitesse de croisière.
M. le Directeur de cabinet adjoint, les Ivoiriens s'interrogent depuis un certain temps sur le sort réservé à leur pays. On ne semble pas les choses aller de l'avant depuis la recomposition de la Cei et du gouvernement. Le processus électoral semble être bloqué. Qu'en est-il exactement ?
Il faut comprendre que la crise née du croisement interne de la Cei, qui a entraîné le blocage et la double dissolution du gouvernement et de la Cei, a provoqué un choc. L'onde de choc s'est propagée et continue de se propager. Cela a désorienté le système, les acteurs, les institutions qui sont en train de retrouver leur marque. Un évènement de ce genre qui arrive, crée un déséquilibre. Et pour retrouver l'équilibre, il se passe un phénomène de tâtonnement, comme le disent les mathématiciens, qui permettra au processus de retrouver son équilibre, cela grâce aux efforts du Premier ministre qui a rétabli le dialogue entre les acteurs avec l'appui du facilitateur, la volonté du Chef de l'Etat et l'implication des acteurs politiques et de la société civile. Mais il faut stabiliser cet équilibre. Nous sommes donc dans cette phase. Il y a eu choc, déséquilibre, retour à l'équilibre. Nous sommes maintenant en train de stabiliser l'équilibre. Donc je pense que bientôt, nous allons arriver à un équilibre parfait. Cela prend du temps naturellement. Nous venons de perdre deux mois.
Combien de mois va-t-on encore perdre pour arriver aux élections ?
Cette perte de temps doit être capitalisée. C'est-à-dire que pendant cette perte de temps, nous avons continué de travailler. Le Premier ministre sur la base de l'expérience acquise et des difficultés rencontrées, s'est doté d'instruments de réflexion en sa possession en ouvrant les échanges aux partenaires que sont l'Onuci et à la facilitation pour réfléchir sur la manière par laquelle on va éviter les dérapages qu'il y a eus dans l'ancienne phase. C'est un premier élément. Le deuxième élément, c'est que pendant cette phase de retour à l'équilibre, la Cei avec un nouveau président et une nouvelle équipe, vient d'achever un séminaire qu'elle a qualifié de mise à niveau. Donc, je pense qu’aujourd'hui, tous les acteurs sont en place, les instruments se mettent en place pour reprendre les activités. Et je pense que les jours à venir, le Premier ministre va rencontrer les acteurs politiques. Il va leur soumettre le fruit de ses réflexions. Et vous verrez que les choses vont reprendre. Sans oublier que déjà le Premier ministre a reçu le président de la Cei accompagné de ses vice-présidents. Il a également reçu les opérateurs techniques que sont la Sagem et l'Ins pour leur demander de monter au créneau, se remettre au travail afin que tout cela reprenne dans de meilleurs délais.
Vous parlez de retour à l'équilibre. Alors que d'autres blocages et non des moindres pointent à l'horizon avec le camp présidentiel qui exige le renouvellement des Cei locales et l'audit de la liste blanche comportant les 5,3 millions de personnes. Tout ceci n'est-il pas de nature à prolonger le blocage ?
Je crois qu'il faut être serein. Vous savez, plus on va approcher des élections, plus on aura ces secousses. Il y a ce qu'on appelle l'inconnu, la crainte du résultat de la compétition électorale. Que devient-on au lendemain des élections ? Va-t-on perdre les élections ? Tout cela habite les hommes politiques. Donc il y a une sorte de fébrilité qui gagne les uns et les autres à l'approche des élections. C'est comme un examen. A la veille du Bac, on est fébrile, inquiet. On se demande si on a bien étudié ses leçons. On ne dort plus. On est à ce stade. Le stress et les questionnements prennent le pas sur l'assurance affichée du début et c'est normal. Les élections sont bien une compétition. Vous verrez que plus on va approcher des élections, plus la fébrilité va gagner les uns et les autres. Ce qu'il faut faire, c'est d'être serein. Et c'est notre rôle à la primature. Le Premier ministre qui est maître d'ouvrage du processus, a toujours démontré sa sérénité face aux évènements. C'est pour cela qu'il faut l'écouter, il faut apprécier ce qu'il dit. Son souhait, c'est d'inviter les uns et les autres au calme, à la sérénité, à la retenue. Pour donner un exemple concret, nous assistons au débat auquel vous faites allusion par presse ou déclarations interposées. Le Premier ministre n'a jamais été saisi de toutes les questions que vous posez. Officiellement, personne ne l'a saisi. On en parle certes, on entend qu'il faut faire un audit, qu'il faut reprendre ceci ou cela. Des personnes très loin depuis le début de ces opérations apparaissent maintenant au grand jour et donnent des leçons de toutes natures : spécialistes des élections, analyse statistique, traitement informatique, audit, etc. C'est comme si vous allez à l'hôpital voir un malade, bien que n'étant pas médecin vous posez le diagnostic avec la proposition d'un traitement, conséquence on tue le malade. Ce sont des questions certes pertinentes mais qui ne se posent pas dans la sérénité et là où elles doivent se poser. Pourquoi ne pas saisir le Premier ministre et lui faire part de leurs préoccupations. Mais le Premier ministre va prendre le devant des choses. Il va approcher les partis politiques, discuter avec eux pour prendre le pouls de la situation et voir quelles solutions apporter à toutes les questions qui sont posées. Déjà, ce que je peux dire sur le débat qui a cours sur la liste électorale, en tant que statisticien de formation, je peux vous dire que ce travail qui a été fait par les opérateurs techniques, l'INS et la Sagem, est un travail de qualité, de haute portée technique et scientifique. Nous avons tous travaillé à cela. Les critères et les paramètres qui ont permis de faire les croisements, sont acceptés par tous et validés par les autorités. Les fichiers qui ont été utilisés pour faire les croisements, sont ceux qui sont actuellement utilisés dans l'administration ivoirienne. Ce sont des fichiers pertinents. Et ensuite, la liste électorale de 2000 a été authentifiée par les partis politiques. Encore nous venons de le constater, non seulement l'Ins et la Sagem ont apprécié et défendu le travail qui est fait, mais les Nations Unies viennent de confirmer la qualité de la liste électorale provisoire sur laquelle figurent les 5,3 millions de personnes. Alors, il n'y a pas meilleur audit que cela.
S'agissant des CEI locales, c'est une question qui relève de la CEI.
Il y a des milliers d'Ivoiriens sur la liste électorale provisoire dont des magistrats ont demandé leur radiation. Qu'est-ce qu'on va faire de ces cas ?
Vous vous rappelez bien que lorsque cette situation s'est posée et qu'il y a eu des incidents, le chef de l'Etat et le Premier ministre ont décidé de suspendre l'opération. C'est dire qu'ils ont apprécié à sa juste valeur, les risques que cela comportait. Lorsque le facilitateur est arrivé, le 22 février 2010, après avoir consulté le chef de l'Etat, le Premier ministre et les leaders politiques, ils ont tous accepté le principe de ne pas valider les radiations qui ont été effectuées hors délai et hors mode opératoire.
Par ailleurs, l'accord politique de Ouagadougou dit que ceux qui émanent de la liste électorale 2000, sont exempts de radiation pour des causes de nationalité. Ce sont des choses qui vont être rappelées aux uns et aux autres. Les uns et les autres devront en tenir compte pour la période de prolongation qui sera ouverte. Les membres du CPC ont été clairs là-dessus. Le Premier ministre a insisté là-dessus pour dire que ces actes ne seront pas reconnus. Evidemment, il nous appartient d'encadrer le processus électoral en cours, notamment le contentieux qui va être réouvert. C'est l'objet du travail qui a été fait pendant cette période de latence. Le Premier ministre va consulter les uns et les autres pour leur faire des propositions qui ne sont pas un nouveau mode opératoire. C'est un encadrement du travail qui a été fait pour éviter les dérapages.
En clair, les personnes qui ont été irrégulièrement radiées seront reversées dans le fichier électoral.
Ces personnes radiées, selon le communiqué du facilitateur, ne le seront plus. Ces radiations sont nulles et de nul effet. C'est ce que dit le communiqué du facilitateur du 22 février 2010 que je rappelle
.
Il y a aussi la situation des 1033.000 croisées négativement. Où en est-on dans le traitement de ces cas ?
La liste grise a été traitée lors de la période du contentieux. Il s'agit de réclamation en inscription, les gens viennent justifier leur statut, apportent les pièces justificatives, se présentent à la Cei pour demander leur inscription sur la liste électorale. Il se trouve qu'à la fin du contentieux, la Cei avait à peu près, enregistré plus de 550000 réclamations pour lesquelles il y a eu des traitements. Lorsqu'est survenue la crise, le Premier ministre a mis en place des comités de suivi. Jusqu'à la dissolution de la Cei, il y avait 278000 personnes dont les dossiers avaient été examinés et validés par les comités de suivi. Lorsque les activités vont reprendre, une appréciation va être faite sur ces personnes pour qu'elles intègrent la liste blanche. Tout cela est décrit dans le cadre règlementaire en préparation qui sera présenté aux uns et aux autres. Les comités de suivi avaient pour rôle de reprendre les réclamations examinées par la Cei et de constater la qualité de ces réclamations. Après l'achèvement du contentieux qui va s'ouvrir, la procédure consistera à ce que les personnes qui seront reversées sur la liste des 5,3 millions et les radiées pour des raisons justifiées suivant le mode opératoire, vont constituer la liste définitive. Donc nous avons un travail à faire avec les structures (CEI, CNSI, ONI, INS et Sagem) qui au cours de cette période de reprise, vont permettre de finaliser la liste électorale définitive. C'est un objectif majeur dans le cadre de la suite des activités. Le prochain objectif, c'est non seulement d'achever le contentieux, mais produire la liste électorale définitive. C'est l'objectif à très court terme.
Quand vous parlez de très court terme, avez-vous un délai en tête ?
Je ne saurai le dire. Je pense que dans les semaines à venir. C'est une affaire de jour et de semaines.
Le contentieux devrait se poursuivre en 21 jours selon le communiqué qui a sanctionné la médiation du président Compaoré. La presse, ces derniers jours, a parlé d'un délai de 45 jours que vous êtes en train de négocier avec les partis politiques. Qu'en est-il ?
Je n'ai pas de commentaires à faire, parce que je n'ai jamais parlé avec la presse à mes sorties de visite des partis politiques.
Je dis que le moment venu, le Premier ministre rencontrera les partis politiques. Notre objectif était de recueillir leurs préoccupations sur leur vision pour la reprise réussie des activités.
Aujourd'hui, qu'est-ce qui bloque le redémarrage du contentieux qui devrait débuter le 1er mars et s'achever le 21 mars ?
Il n'y a pas de blocage. C'est simplement qu'il y a une nouvelle équipe à la Cei. Cette équipe s'installe. Elle a besoin de comprendre ce qui se passe et reprendre le travail. C'est comme la rentrée scolaire, on la fixe au 20 octobre mais les cours ne commencent pas à cette date. Donc la Cei s'installe. Et elle vient d'organiser en interne un séminaire de mise à niveau. C'est absolument nécessaire. Cette démarche est valable partout.
Est-ce que vous sentez l'impatience grandissante des Ivoiriens. l'Onu dans son dernier rapport, a fait cas de déception. Le Japon à travers son ambassadeur a exprimé son ras-le-bol par rapport aux reports successifs. Sentez-vous cette impatience des Ivoiriens ?
Je ne réagis pas aux réactions diplomatiques. Ce n'est pas mon rôle. Ce que je peux vous dire par rapport à l'impatience des Ivoiriens, c'est une réalité. Les Ivoiriens sont impatients d'aller aux élections. C'est pourquoi d'ailleurs nous rassurons les Ivoiriens que nous irons aux élections. Il est important que leur impatience soit éclairée. Et c'est notre rôle de les éclairer. Nous sommes tout à fait conscient et nous comprenons parfaitement leur impatience. Nous aussi, nous sommes des Ivoiriens, nous sommes dans un processus que nous aimerions qu'il s'achève par la grande porte, pour que nous puissions passer à d'autres étapes. Le développement de la Côte d'Ivoire nous attend. Nous avons aussi encore envie d'apporter notre savoir-faire après la sortie de crise.
Les ivoiriens ne croient plus pratiquement à la tenue des élections. Comprenez-vous leur ressentiment ?
Tant qu'on vit, il faut espérer. Ce serait dommage qu'on arrive à cette situation. Si on ne croit plus à la vie, c'est que c'est grave. Il faut croire parce que les autorités qui doivent faire ce travail sont installées. Des paroles et une période ont été recommandées par le facilitateur. La Cei va examiner ces recommandations à la faveur des réalités de terrain. Le moment venu, la Cei indiquera le chemin à prendre. Il faut faire confiance à la Cei.
Ceux qui ont signé les accords font prévaloir des revendications. Ils parlent d'auditer la liste, de renouveler les Cei locales, de désarmer avant les élections. Tout cela ne fait pas un peu trop ?
Non, je ne crois pas. Il y a trois signataires de l'accord pour être précis. Il y a le chef de l'Etat, le premier ministre et le président du Faso. Je n'ai jamais entendu d'eux une remise en cause des dispositifs de l'Apo. Le débat se fait plutôt dans les journaux à d'autres niveaux. Je ne sais si ceux qui mènent ce débat ont toutes les informations.
M Alcide Djédjé était à l'Onu, il a demandé que le désarmement se fasse avant les élections. M Affi N'guessan, président du Fpi demande le renouvellement des Cei locales. Ce ne sont pas n'importe qui ces deux personnalités.
Je n'ai pas de commentaires à faire.
Que dites-vous aux Ivoiriens qui sont pris de désespoir aujourd'hui par rapport aux reports incessants des élections ?
Sérénité, patience, croyance et confiance dans le processus. Nous regardons notre pays, nous ne pouvons pas un seul instant croire qu'il n'y a pas d'espoir pour demain. Je ne peux donc pas m'inscrire dans le désespoir auquel vous faites allusion. C'est vrai qu'il y a une impatience mais les Ivoiriens ne sont pas encore arrivés au désespoir.
Interview réalisée par Akwaba Saint Clair et Paul Koffi
M. le Directeur de cabinet adjoint, les Ivoiriens s'interrogent depuis un certain temps sur le sort réservé à leur pays. On ne semble pas les choses aller de l'avant depuis la recomposition de la Cei et du gouvernement. Le processus électoral semble être bloqué. Qu'en est-il exactement ?
Il faut comprendre que la crise née du croisement interne de la Cei, qui a entraîné le blocage et la double dissolution du gouvernement et de la Cei, a provoqué un choc. L'onde de choc s'est propagée et continue de se propager. Cela a désorienté le système, les acteurs, les institutions qui sont en train de retrouver leur marque. Un évènement de ce genre qui arrive, crée un déséquilibre. Et pour retrouver l'équilibre, il se passe un phénomène de tâtonnement, comme le disent les mathématiciens, qui permettra au processus de retrouver son équilibre, cela grâce aux efforts du Premier ministre qui a rétabli le dialogue entre les acteurs avec l'appui du facilitateur, la volonté du Chef de l'Etat et l'implication des acteurs politiques et de la société civile. Mais il faut stabiliser cet équilibre. Nous sommes donc dans cette phase. Il y a eu choc, déséquilibre, retour à l'équilibre. Nous sommes maintenant en train de stabiliser l'équilibre. Donc je pense que bientôt, nous allons arriver à un équilibre parfait. Cela prend du temps naturellement. Nous venons de perdre deux mois.
Combien de mois va-t-on encore perdre pour arriver aux élections ?
Cette perte de temps doit être capitalisée. C'est-à-dire que pendant cette perte de temps, nous avons continué de travailler. Le Premier ministre sur la base de l'expérience acquise et des difficultés rencontrées, s'est doté d'instruments de réflexion en sa possession en ouvrant les échanges aux partenaires que sont l'Onuci et à la facilitation pour réfléchir sur la manière par laquelle on va éviter les dérapages qu'il y a eus dans l'ancienne phase. C'est un premier élément. Le deuxième élément, c'est que pendant cette phase de retour à l'équilibre, la Cei avec un nouveau président et une nouvelle équipe, vient d'achever un séminaire qu'elle a qualifié de mise à niveau. Donc, je pense qu’aujourd'hui, tous les acteurs sont en place, les instruments se mettent en place pour reprendre les activités. Et je pense que les jours à venir, le Premier ministre va rencontrer les acteurs politiques. Il va leur soumettre le fruit de ses réflexions. Et vous verrez que les choses vont reprendre. Sans oublier que déjà le Premier ministre a reçu le président de la Cei accompagné de ses vice-présidents. Il a également reçu les opérateurs techniques que sont la Sagem et l'Ins pour leur demander de monter au créneau, se remettre au travail afin que tout cela reprenne dans de meilleurs délais.
Vous parlez de retour à l'équilibre. Alors que d'autres blocages et non des moindres pointent à l'horizon avec le camp présidentiel qui exige le renouvellement des Cei locales et l'audit de la liste blanche comportant les 5,3 millions de personnes. Tout ceci n'est-il pas de nature à prolonger le blocage ?
Je crois qu'il faut être serein. Vous savez, plus on va approcher des élections, plus on aura ces secousses. Il y a ce qu'on appelle l'inconnu, la crainte du résultat de la compétition électorale. Que devient-on au lendemain des élections ? Va-t-on perdre les élections ? Tout cela habite les hommes politiques. Donc il y a une sorte de fébrilité qui gagne les uns et les autres à l'approche des élections. C'est comme un examen. A la veille du Bac, on est fébrile, inquiet. On se demande si on a bien étudié ses leçons. On ne dort plus. On est à ce stade. Le stress et les questionnements prennent le pas sur l'assurance affichée du début et c'est normal. Les élections sont bien une compétition. Vous verrez que plus on va approcher des élections, plus la fébrilité va gagner les uns et les autres. Ce qu'il faut faire, c'est d'être serein. Et c'est notre rôle à la primature. Le Premier ministre qui est maître d'ouvrage du processus, a toujours démontré sa sérénité face aux évènements. C'est pour cela qu'il faut l'écouter, il faut apprécier ce qu'il dit. Son souhait, c'est d'inviter les uns et les autres au calme, à la sérénité, à la retenue. Pour donner un exemple concret, nous assistons au débat auquel vous faites allusion par presse ou déclarations interposées. Le Premier ministre n'a jamais été saisi de toutes les questions que vous posez. Officiellement, personne ne l'a saisi. On en parle certes, on entend qu'il faut faire un audit, qu'il faut reprendre ceci ou cela. Des personnes très loin depuis le début de ces opérations apparaissent maintenant au grand jour et donnent des leçons de toutes natures : spécialistes des élections, analyse statistique, traitement informatique, audit, etc. C'est comme si vous allez à l'hôpital voir un malade, bien que n'étant pas médecin vous posez le diagnostic avec la proposition d'un traitement, conséquence on tue le malade. Ce sont des questions certes pertinentes mais qui ne se posent pas dans la sérénité et là où elles doivent se poser. Pourquoi ne pas saisir le Premier ministre et lui faire part de leurs préoccupations. Mais le Premier ministre va prendre le devant des choses. Il va approcher les partis politiques, discuter avec eux pour prendre le pouls de la situation et voir quelles solutions apporter à toutes les questions qui sont posées. Déjà, ce que je peux dire sur le débat qui a cours sur la liste électorale, en tant que statisticien de formation, je peux vous dire que ce travail qui a été fait par les opérateurs techniques, l'INS et la Sagem, est un travail de qualité, de haute portée technique et scientifique. Nous avons tous travaillé à cela. Les critères et les paramètres qui ont permis de faire les croisements, sont acceptés par tous et validés par les autorités. Les fichiers qui ont été utilisés pour faire les croisements, sont ceux qui sont actuellement utilisés dans l'administration ivoirienne. Ce sont des fichiers pertinents. Et ensuite, la liste électorale de 2000 a été authentifiée par les partis politiques. Encore nous venons de le constater, non seulement l'Ins et la Sagem ont apprécié et défendu le travail qui est fait, mais les Nations Unies viennent de confirmer la qualité de la liste électorale provisoire sur laquelle figurent les 5,3 millions de personnes. Alors, il n'y a pas meilleur audit que cela.
S'agissant des CEI locales, c'est une question qui relève de la CEI.
Il y a des milliers d'Ivoiriens sur la liste électorale provisoire dont des magistrats ont demandé leur radiation. Qu'est-ce qu'on va faire de ces cas ?
Vous vous rappelez bien que lorsque cette situation s'est posée et qu'il y a eu des incidents, le chef de l'Etat et le Premier ministre ont décidé de suspendre l'opération. C'est dire qu'ils ont apprécié à sa juste valeur, les risques que cela comportait. Lorsque le facilitateur est arrivé, le 22 février 2010, après avoir consulté le chef de l'Etat, le Premier ministre et les leaders politiques, ils ont tous accepté le principe de ne pas valider les radiations qui ont été effectuées hors délai et hors mode opératoire.
Par ailleurs, l'accord politique de Ouagadougou dit que ceux qui émanent de la liste électorale 2000, sont exempts de radiation pour des causes de nationalité. Ce sont des choses qui vont être rappelées aux uns et aux autres. Les uns et les autres devront en tenir compte pour la période de prolongation qui sera ouverte. Les membres du CPC ont été clairs là-dessus. Le Premier ministre a insisté là-dessus pour dire que ces actes ne seront pas reconnus. Evidemment, il nous appartient d'encadrer le processus électoral en cours, notamment le contentieux qui va être réouvert. C'est l'objet du travail qui a été fait pendant cette période de latence. Le Premier ministre va consulter les uns et les autres pour leur faire des propositions qui ne sont pas un nouveau mode opératoire. C'est un encadrement du travail qui a été fait pour éviter les dérapages.
En clair, les personnes qui ont été irrégulièrement radiées seront reversées dans le fichier électoral.
Ces personnes radiées, selon le communiqué du facilitateur, ne le seront plus. Ces radiations sont nulles et de nul effet. C'est ce que dit le communiqué du facilitateur du 22 février 2010 que je rappelle
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Il y a aussi la situation des 1033.000 croisées négativement. Où en est-on dans le traitement de ces cas ?
La liste grise a été traitée lors de la période du contentieux. Il s'agit de réclamation en inscription, les gens viennent justifier leur statut, apportent les pièces justificatives, se présentent à la Cei pour demander leur inscription sur la liste électorale. Il se trouve qu'à la fin du contentieux, la Cei avait à peu près, enregistré plus de 550000 réclamations pour lesquelles il y a eu des traitements. Lorsqu'est survenue la crise, le Premier ministre a mis en place des comités de suivi. Jusqu'à la dissolution de la Cei, il y avait 278000 personnes dont les dossiers avaient été examinés et validés par les comités de suivi. Lorsque les activités vont reprendre, une appréciation va être faite sur ces personnes pour qu'elles intègrent la liste blanche. Tout cela est décrit dans le cadre règlementaire en préparation qui sera présenté aux uns et aux autres. Les comités de suivi avaient pour rôle de reprendre les réclamations examinées par la Cei et de constater la qualité de ces réclamations. Après l'achèvement du contentieux qui va s'ouvrir, la procédure consistera à ce que les personnes qui seront reversées sur la liste des 5,3 millions et les radiées pour des raisons justifiées suivant le mode opératoire, vont constituer la liste définitive. Donc nous avons un travail à faire avec les structures (CEI, CNSI, ONI, INS et Sagem) qui au cours de cette période de reprise, vont permettre de finaliser la liste électorale définitive. C'est un objectif majeur dans le cadre de la suite des activités. Le prochain objectif, c'est non seulement d'achever le contentieux, mais produire la liste électorale définitive. C'est l'objectif à très court terme.
Quand vous parlez de très court terme, avez-vous un délai en tête ?
Je ne saurai le dire. Je pense que dans les semaines à venir. C'est une affaire de jour et de semaines.
Le contentieux devrait se poursuivre en 21 jours selon le communiqué qui a sanctionné la médiation du président Compaoré. La presse, ces derniers jours, a parlé d'un délai de 45 jours que vous êtes en train de négocier avec les partis politiques. Qu'en est-il ?
Je n'ai pas de commentaires à faire, parce que je n'ai jamais parlé avec la presse à mes sorties de visite des partis politiques.
Je dis que le moment venu, le Premier ministre rencontrera les partis politiques. Notre objectif était de recueillir leurs préoccupations sur leur vision pour la reprise réussie des activités.
Aujourd'hui, qu'est-ce qui bloque le redémarrage du contentieux qui devrait débuter le 1er mars et s'achever le 21 mars ?
Il n'y a pas de blocage. C'est simplement qu'il y a une nouvelle équipe à la Cei. Cette équipe s'installe. Elle a besoin de comprendre ce qui se passe et reprendre le travail. C'est comme la rentrée scolaire, on la fixe au 20 octobre mais les cours ne commencent pas à cette date. Donc la Cei s'installe. Et elle vient d'organiser en interne un séminaire de mise à niveau. C'est absolument nécessaire. Cette démarche est valable partout.
Est-ce que vous sentez l'impatience grandissante des Ivoiriens. l'Onu dans son dernier rapport, a fait cas de déception. Le Japon à travers son ambassadeur a exprimé son ras-le-bol par rapport aux reports successifs. Sentez-vous cette impatience des Ivoiriens ?
Je ne réagis pas aux réactions diplomatiques. Ce n'est pas mon rôle. Ce que je peux vous dire par rapport à l'impatience des Ivoiriens, c'est une réalité. Les Ivoiriens sont impatients d'aller aux élections. C'est pourquoi d'ailleurs nous rassurons les Ivoiriens que nous irons aux élections. Il est important que leur impatience soit éclairée. Et c'est notre rôle de les éclairer. Nous sommes tout à fait conscient et nous comprenons parfaitement leur impatience. Nous aussi, nous sommes des Ivoiriens, nous sommes dans un processus que nous aimerions qu'il s'achève par la grande porte, pour que nous puissions passer à d'autres étapes. Le développement de la Côte d'Ivoire nous attend. Nous avons aussi encore envie d'apporter notre savoir-faire après la sortie de crise.
Les ivoiriens ne croient plus pratiquement à la tenue des élections. Comprenez-vous leur ressentiment ?
Tant qu'on vit, il faut espérer. Ce serait dommage qu'on arrive à cette situation. Si on ne croit plus à la vie, c'est que c'est grave. Il faut croire parce que les autorités qui doivent faire ce travail sont installées. Des paroles et une période ont été recommandées par le facilitateur. La Cei va examiner ces recommandations à la faveur des réalités de terrain. Le moment venu, la Cei indiquera le chemin à prendre. Il faut faire confiance à la Cei.
Ceux qui ont signé les accords font prévaloir des revendications. Ils parlent d'auditer la liste, de renouveler les Cei locales, de désarmer avant les élections. Tout cela ne fait pas un peu trop ?
Non, je ne crois pas. Il y a trois signataires de l'accord pour être précis. Il y a le chef de l'Etat, le premier ministre et le président du Faso. Je n'ai jamais entendu d'eux une remise en cause des dispositifs de l'Apo. Le débat se fait plutôt dans les journaux à d'autres niveaux. Je ne sais si ceux qui mènent ce débat ont toutes les informations.
M Alcide Djédjé était à l'Onu, il a demandé que le désarmement se fasse avant les élections. M Affi N'guessan, président du Fpi demande le renouvellement des Cei locales. Ce ne sont pas n'importe qui ces deux personnalités.
Je n'ai pas de commentaires à faire.
Que dites-vous aux Ivoiriens qui sont pris de désespoir aujourd'hui par rapport aux reports incessants des élections ?
Sérénité, patience, croyance et confiance dans le processus. Nous regardons notre pays, nous ne pouvons pas un seul instant croire qu'il n'y a pas d'espoir pour demain. Je ne peux donc pas m'inscrire dans le désespoir auquel vous faites allusion. C'est vrai qu'il y a une impatience mais les Ivoiriens ne sont pas encore arrivés au désespoir.
Interview réalisée par Akwaba Saint Clair et Paul Koffi