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Politique Publié le lundi 29 mars 2010 | Demain

Mamadou Koulibaly, Bohoun Bouabré, Charles Konan Banny, Félix Akoto Yao, Jean-Louis Billon, Jacqueline Oble : Ces nouveaux espoirs de la Côte d’Ivoire

La crise que traverse la Côte d’Ivoire aura permis aux Ivoiriens de constater l’échec de l’actuelle classe politique incarnée par Henri Konan Bédié, Laurent Gbagbo, Alassane Dramane Ouattara, Augustin Laurent Dona-Fologo ; mais aussi, d’assister à la naissance et à la montée en puissance d’une nouvelle classe, caractérisée, celle-là, par la rigueur, la constance, le sens élevé de l’Etat et un franc-parler.

Pragmatisme, esprit d’ouverture, langage de vérité, culte du travail et de l’effort, sens élevé de l’Etat, volonté de redresser le pays : voici les caractéristiques d’une nouvelle classe politique en gestation en Côte d’Ivoire. Qui sont ces nouveaux dirigeants aux discours de rupture, et qui semblent redonner espoir aux Ivoiriens ?

Mamadou Koulibaly : la grande curiosité

53 ans. Professeur agrégé d’économie, 3ème vice-président du Fpi, président de l’Assemblée nationale

Parmi les animateurs de la nouvelle classe politique, Mamadou Koulibaly est la plus grande curiosité. Le Président de l’Assemblée nationale est un politicien atypique. Son franc-parler dérange aussi bien les militants de l’opposition que ceux du Front populaire ivoirien dont il est issu. Il dit tout haut ce que d’autres pensent tout bas, au risque de mettre le feu à la ‘‘Maison Gbagbo’’. Dans un article au ton pamphlétaire publié le 4 août 2007 par le journal gouvernemental « Fraternité Matin », Koulibaly n’a pas hésité à brocarder ses camarades socialistes qu’il a ouvertement accusés de corruption : ‘‘La logique du partage du pouvoir a conduit à une logique du partage des fonds. Seul le président de la République travaille effectivement à la sortie de crise (…) Les refondateurs (…), perdent leurs repères et se laissent aller, avec négligence, dans le piège de la mauvaise gouvernance. (…) Le racket, la tricherie aux examens et concours, les pots-de-vin, les trafics d’influence, l’enrichissement rapide injustifié se déchaînent et se réinstallent comme au temps du parti unique.’’

Cette attaque contre ses camarades du Fpi est sévère. Mais pour Mamadou Koulibaly, c’est une question de principe : ne jamais transiger avec les fondamentaux de la refondation ; ceux-ci qui consistent à rompre avec les réflexes et attitudes du parti unique. Ses contempteurs le présentent comme le chef de file des extrémistes. Mamadou Koulibaly, lui, parle de constance.

Cette constance, rapportent certains de ses proches, est fondamentale à son mode de vie. C’est au nom de celle-ci qu’il a ouvertement montré son aversion pour l’Accord politique de Ouagadougou. Depuis le déclenchement de l’insurrection militaro civile, sa position vis-à-vis de Soro et de ses hommes n’a pas changé. Il ne porte pas à cœur les Forces nouvelles, et il ne s’en cache pas. Même s’il a reçu à sa résidence, en avril 2007, Konaté Sidiki, le plus ‘‘Gbagbo-Compatible’’ des chefs des Forces nouvelles, et qu’il s’est laissé “entraîner” par Charles Blé Goudé au « Meeting de la paix » à Yopougon, Mamadou Koulibaly, homme de principe, ne veut pas s’acoquiner avec les ‘‘rebelles’’. Il l’a clairement signifié à Laurent Gbagbo au lendemain de la signature de l’Accord politique de Ouagadougou. Pour lui, avant tout autre chose, il faut ‘‘le désarmement des rebelles’’.

Homme de conviction, il reste fidèle à ses théories et engagements. Il a également le courage de ses idées. Il n’aime pas la France, et il le crie haut et fort. Il explique, à qui veut l’entendre, que le franc CFA est coercitif, injuste et moralement indéfendable. Il favorise, selon lui, la corruption de l’Etat. ‘‘Au moment des élections françaises, les pays de la zone franc sont sans cesse sollicités pour faire des dons aux hommes politiques français. Ce sont ces relations qui perpétuent le monopole français dans les pays de la zone franc’’, déclare-t-il ; d’où son concept du ‘‘franc flottant’’.

Agrégé d’économie, ex-ministre de l’Economie et des Finances sous la Transition militaire, président de l’Assemblée nationale depuis près d’une décennie, Mamadou Koulibaly, au contraire de nombre de hauts cadres ivoiriens, ne donne pas dans l’ostentatoire côté vie matérielle et publique. L’homme est aussi d’une simplicité étonnante, et son commerce révèle tout de suite qu’il s’est vraiment affranchi des vanités et pesanteurs des protocoles ainsi que des contingences matérielles. Il n’est pas aussi rare de le voir sans garde du corps, ni chauffeur. Il éprouve un respect sacré de l’heure : jamais en retard à une manifestation. Il semble également soucieux de l’éthique. C’est l’un des rares refondateurs à pouvoir se vanter d’avoir les mains propres. Un autre atout non négligeable, son âge. Mamadou Koulibaly est relativement jeune : 52 ans. Pour sûr, on ne pourra pas rebâtir la Côte d’Ivoire sans lui, Mamadou Koulibaly le frontiste à la périphérie de la refondation, Koulibaly le frondeur aux antipodes de la ‘‘rebfondation’’ (un néologisme qu’il a créé et qui indique une corruption de la refondation dans la ‘‘cohabitation’’ avec la rébellion).

Gnamien Konan : Dieu, le travail, la Côte d’Ivoire

56 ans Ingénieur en informatique ex-Dg des Douanes ivoiriennes

L’ancien Directeur général des douanes ivoirienne est désormais passé à une autre étape de son parcours social et administratif : il brigue la présidentielle. Et Emmanuel Gnamien Konan a les atouts et la stature pour diriger la Côte d’Ivoire. Son passage à la tête des Douanes a bien démontré qu’il a de la suite dans les idées. Titulaire d’une maîtrise en Sciences économiques, et d’un diplôme d’Ingénieur informaticien, il a réussi le pari d’informatiser tous les services des douanes, évitant ainsi de nombreuses déperditions. C’est à juste titre qu’il a été décoré en 2005, et présenté, avec Charles Diby Koffi et Feh Kessé, comme l’un des artisans de la ‘‘résistance économique’’. Grâce à une gestion rigoureuse et méthodique, il a pu accroître les recettes douanières dans le budget de la Côte d’Ivoire. Paul-Antoine Bohoun Bouabré et Charles Diby Koffi (respectivement ex-ministre et actuel ministre de l’Economie et des Finances) lui doivent en partie d’avoir pu honorer le paiement du salaire des fonctionnaires durant les périodes chaudes de la crise ivoirienne.

C’est cette expérience que le président de l’Union Pour la Côte d’Ivoire (Upci) veut mettre à la disposition du pays. Son projet de société, ambitieux et audacieux, revêt tout le caractère de l’homme : Gnamien Konan reste profondément attaché aux valeurs du travail bien fait. Il a fait de la bonne gouvernance, son cheval de bataille, servi en cela par un discours novateur : l’obligation de rendre compte, la transparence, l’efficacité, la célérité, la modernisation, la gestion rigoureuse des ressources publiques, la prospective, l’équité ; autant de ces exigences que tout citoyen attend d’un gouvernement et d’une administration. « Il nous faut prendre des mesures et instaurer des réformes modernes pour prévenir et faire obstacle à toute forme de manipulations coupables et de détournements. Nous mettrons les NTIC à contribution afin d’informatiser toute l’administration pour la mise en place d’un véritable gouvernement électronique (e-gouvernement).

Les ministres et les Directeurs généraux seront nommés sur la base de critères objectifs de compétences et seront liés par un contrat de deux ans, renouvelables si les objectifs sont atteints », peut-on lire dans son projet de société.

Une autre innovation dans le discours de Gnamien Konan : sa stratégie pour résoudre le problème fiscal en Côte d’Ivoire. Ici, le président de l’Upci entend mettre en place un système qui permettra à l’économie de la Côte d’Ivoire de sortir de l’informel. « Il est urgent, dit-il, de permettre à nos ressources fiscales d’atteindre un niveau conforme à notre ambition de développement (la pression fiscale est à moins de 20% alors qu’elle est à plus de 40% dans l’Union européenne). Il nous faut continuer et amplifier les actions entreprises pour l’émergence d’un civisme fiscal absolu. Tous les points de commerce et de vente seront connectés à un réseau informatique national. Tous les habitants seront identifiés par un compte contribuable. Il nous faut garantir l’équité devant l’impôt. Chaque année, les meilleurs contribuables seront célébrés et récompensés.’’

Gnamien Konan dispose, dans son répertoire, de plusieurs idées futuristes qui pourraient permettre à la Côte d’Ivoire de rebondir. Agé de 58 ans, célibataire, sportif (il fut un excellent basketteur et il pratique le tennis), apôtre de l’effort, et doté d’un louable de l’éthique, Gnamien Konan mérite de figurer au nombre des espoirs pour la renaissance politique de la Côte d’Ivoire ; et cela, même si le scandale des déchets toxiques a failli entacher son image. Heureusement que la justice a déclaré sa non culpabilité dans cette affaire.

Jacqueline Oble. Audace et responsabilité.

59 ans. Professeur de droit, ex-ministre de la Justice et garde des sceaux, ex-conseillère principale de Charles Konan Banny.

‘‘Je ne propose pas une alternance politique, mais une alternative, une nouvelle vision’’. Pour Jacqueline Ghislaine Lohouès Oble, il faut en finir avec la politique du ‘‘ôte-toi de là, que je m’y mette’’, dans laquelle le plus important reste la course à l’enrichissement illicite. Ce qu’il faudrait, dit-elle, c’est proposer des solutions pérennes à une société démobilisée, sans repère, et dont les fondements sont profondément gangrenés. L’ancienne ministre de la Justice et garde des sceaux a tous les atouts pour permettre à la Côte d’Ivoire de renaître, après le passage du Bog (Bédié-Ouattara-Gbagbo).

Ses qualités intellectuelles, son expérience politique, sa rigueur et sa franchise font d’elle une valeur politique sûre qui saura redonner l’espoir aux Ivoiriens. Femme de principe, Oble a quitté le Rassemblement des Républicains à la suite des tergiversations et de l’inconstance d’Alassane Dramane Ouattara. Elle n’a pas compris que, sous prétexte que la loi électorale qui ne lui permettait pas de briguer la magistrature suprême, le mentor des républicains se déclare non partant à l’élection présidentielle de 1995, puis, qu’il se décide à être candidat, en 2000 où cette loi avait été corsée par le camp Bédié.

Plus qu’un effet de mode, son entrée sur la scène politique est un appel à l’émergence d’une conscience nationale, et surtout, d’une recomposition de la classe politique ivoirienne, responsable du désastre dans lequel est plongée la Côte d’Ivoire. Pour des observateurs avertis, Jacqueline Lohouès Oble fait partie de cette poignée de cadres ivoiriens capables de redonner à la Côte d’Ivoire ses repères et sa grandeur perdus. N’a-t-elle pas placé sa campagne électorale sous le signe du ‘‘noble espoir’’ ?

Jacqueline Oble n’est pas que la seule dame engagée dans la prochaine présidentielle ; elle est la première en Côte d’Ivoire à avoir franchi le rubicon. C’est un acte de haute portée historique comme, il y a de cela près de deux décennies, celui que Laurent Gbagbo a posé en affrontant l’illustre Houphouët-Boigny à la présidentielle de 1990. On dit qu’en politique comme dans bien d’autres domaines de la vie, la chance ne sourit qu’aux audacieux. Qu’elle puisse sourire à Jacqueline Oble dans cette présidentielle, serait loin d’être un malheur pour la Côte d’Ivoire. La virilité des mâles nous a apporté la guerre. La grâce féminine pourrait la conjurer et nous ramener aux valeurs qui ont fait notre légende et notre grandeur : la paix. La vraie paix.

Félix Akoto-Yao : l’iconoclaste

54 ans ; député et président du Conseil général de Sakassou. Membre du Bureau politique du Pdci-Rda, ancien Directeur général de l’Institut industriel de l’Afrique de l’Ouest.

Homme politique, iconoclaste, Félix Akoto Yao veut rompre avec l’ordre ancien. Il l’a dit haut et fort lors d’une conférence qu’il a donnée le mardi 3 juin 2008 : ‘‘Le moment est venu de rompre avec les vieilles habitudes en proposant aux Ivoiriens de nouvelles perspectives d’avenir’’.

Le manque de démocratie au sein de son parti, le Pdci-rda, l’a amené, dit-il, à se frayer un autre chemin et à se porter candidat à la prochaine présidentielle afin de combattre toute forme de tribalisme, de régionalisme et de népotisme, choses qui ont très souvent cours dans notre pays.

Noble ambition donc. Pour y parvenir, Félix Akoto Yao affirme vouloir fonder son mandat sur la vérité, le courage et la justice. Il se définit par sa forte personnalité et son esprit profondément indépendant. Félix Akoto Yao est en effet un ‘‘fonceur’’ et un homme de défis. Et il l’a démontré :

aux dernières élections locales à Sakassou, alors que tout le monde le donnait perdant, il a réussi à vaincre le candidat Pdci-rda qui avait avec lui et pour lui toute la machine électorale de ce parti.

Félix Akoto Yao veut remettre le couvert en récidivant, au plan national, l’exploit de Sakassou qu’il présente comme son laboratoire.

Présenté comme un des ‘‘tocards’’ de la prochaine présidentielle, le président du Conseil général de Sakassou entend créer la surprise. C’est que l’homme a de la valeur : intègre, rigoureux, il se pose comme une alternative pour la Côte d’Ivoire. ‘‘Faire autrement’’ : voici son leitmotiv. Comme Gnamien Konan, il procède par une campagne de proximité. Ainsi, sans tambour ni trompette, il a déjà visité 1031 villages de la Côte d’Ivoire.

Félix Akoto Yao, c’est aussi un discours original, loin de la langue de bois : ‘‘Je ne renie pas mon appartenance au Pdci-rda ; seulement, je dénonce certaines pratiques qui y ont cours, notamment le manque d’ouverture, de démocratie et le culte de la personnalité’’. Frère cadet de Paul Akoto Yao qui fut ministre de l’Education nationale sous Houphouët-Boigny, fils d’un militant de première heure du Pdci-Rda, Félix Akoto Yao est, comme on le voit, issu d’une longue tradition de militantisme politique. Ses prétentions présidentialistes sont donc loin d’être le fait du hasard et de la fanfaronnade.

Jean-Louis Billon : le don de soi

46 ans, maire de Dabakala, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie, président du Conseil d’Administration d’Entreprise.

Homme affable, Jean-Louis Billon est, sans conteste, l’une des valeurs les plus sûres de la Côte d’Ivoire. Son engagement sur les différents fronts (économique, social, politique, et en sport,) démontre un patriotisme à nul autre pareil et lui confère une véritable stature de leader.

En 2004, il a participé, avec quelques membres de la société civile ivoirienne, à l’élaboration de scénarii qui devraient permettre à la Côte d’ Ivoire de sortir de la crise dans laquelle elle est plongée depuis décembre 1999. Au plan économique, il a lancé une campagne tous azimuts à travers l’Europe et les pays émergents. Le 26 mai 2008, il a plaidé dans les locaux du Medef à Paris pour le retour des investisseurs français en Côte d’Ivoire. ‘‘Demain, l’Asie s’épuisera. Et c’est en Afrique que se jouera la croissance de la planète. La seule crise que connaisse la Côte d’Ivoire est celle du sous-développement. Pour cela, nous avons besoin d’investissements.

Revenez vers l’Afrique et vous aurez raison avant tout le monde’’. Voici en substance, le plaidoyer de Jean Louis Billon devant le patronat français.

Même s’il vante les mérites de la Côte d’Ivoire dans tous les coins du monde, le président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Côte d’Ivoire et patron du premier groupe privé ivoirien sait que la Côte d’Ivoire, son pays, n’est pas encore sortie de l’ornière.

Devant une économie sinistrée avec près de la moitié des emplois détruits après les événements de novembre 2004, 50% d’entreprises disparues, 50% de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté, des infrastructures dégradées, et une économie de troc dans certaines régions des zones CNO (Centre nord ouest) sous occupation des Forces nouvelles, Jean Louis Billon est conscient qu’il va falloir tout reconstruire. Et à son humble niveau, il n’hésite pas à mettre la main à la pâte pour une nouvelle Côte d’Ivoire. Le don de soi est, chez lui, une marque déposée. S’il n’a pas encore franchi le pas, Jean-Louis Billon ferait assurément, selon beaucoup d’observateurs, un bon leader pour la nation ivoirienne à la recherche d’une nouvelle classe politique.

étienne aboua
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