De la deuxième ville du Burkina Faso, les Ivoiriens ont appris que le contentieux de la liste électorale sera à nouveau ouvert. De Bobo Dioulasso, en effet, où ils se sont rencontrés le premier avril 2010, le président Compaoré et le chef de l’Etat ivoirien, Laurent Gbagbo, ont convenu de la relance de cette opération. Elle sera intégrale, et touchera aussi bien la liste grise, celle à problème comprenant un peu plus d’un million de personnes dont la nationalité ivoirienne n’a pas pu être confirmée par les croisements informatiques des fichiers historiques, que la liste blanche. Celle-ci comporte les Ivoiriens présents sur la liste électorale de 2000, et ceux dont la citoyenneté a été vérifiée à travers les différents croisements effectués par les opérateurs techniques, Sagem sécurité et l’Institut national de la statistique, Ins à partir des critères arrêtés par l’Etat, et acceptés par les protagonistes politiques. Beaucoup de personnes sont soulagées par l’annonce de la relance de ce contentieux faite par les facilitateurs dans la crise ivoirienne.
Elles ont du mal par ailleurs à comprendre les voix qui s’élèvent pour exprimer des craintes et s’interroger sur les conséquences qui en découleront. Sans minimiser la joie de ceux qui applaudissent les dernières décisions sur la crise ivoirienne prises au Pays des Hommes Intègres, il faut passer en revue les différents messages sortis de Bobo Dioulasso, en ce premier avril, et qui sont loin d’être des poissons d’avril. En tout premier lieu, en indiquant que le contentieux électoral va porter sur toutes les listes provisoires déjà publiée, Gbagbo et Compaoré montrent à tous qu’ils ont le pouvoir de revenir sur ce que les Ivoiriens ont auparavant approuvé.
Il n’est un secret pour personne que la liste des cinq millions trois cent mille personnes a été présentée au dernier cadre permanent de concertation, le Cpc dans lequel siègent, outre les deux chefs d’Etat, le Premier ministre ivoirien Soro Guillaume, chef de l’ancienne rébellion des Forces nouvelles, l’ancien président Henri Konan Bédié et l’ancien Premier ministre Alassane Dramane Ouattara. Le Cpc l’a approuvé. Au-delà de ce cadre, la liste a été soumisse à l’Onu. Et l’organisation internationale, présente dans le pays avec des composantes civile et militaire à travers l’Onuci a certifié cette liste blanche. En termes très clairs, le débat sur la citoyenneté des personnes se trouvant sur la liste blanche est clos. C’est au mépris de tout cela que les partisans de Laurent Gbagbo avaient en son temps entrepris de radier, à échelle industrielle, les Ivoiriens qui ne sont pas de leur bord politique des listes. Ils s’étaient appuyés sur des juges politiquement engagés et acquis à leur action. L’entreprise avait donné lieu à des manifestations violentes des victimes de l’apartheid à l’ivoirienne. La généralisation du contentieux ramène dans le domaine du possible les dérives auxquelles les Ivoiriens ont assisté il y a peu. Le plus inquiétant, c’est que, en remettant sur la table du contentieux une liste déjà validée par l’Onu, les deux chefs d’Etat rejettent l’autorité de cette instance internationale. Et son rôle dans la certification des élections ivoiriennes. Si ce qui est validé par l’Onu peut être remis à la poubelle, de quel crédit disposera l’organisation gendarme de la paix et de la stabilité internationale dont justement une des tâches clé dans la sortie de crise en Côte d’Ivoire est de certifier toutes les étapes du processus électorale ? Gbagbo en amenant Compaoré à le soutenir dans le contentieux intégral se donne les moyens de passer outre les décisions à venir de l’Onu dans la conduite des élections dans le pays. Une situation lourde de conséquence puisqu’elle remet désormais, aux mains et à la seule volonté du chef de l’Etat sortant et candidat à sa succession, l’appréciation de l’évolution du processus électoral. Y compris les résultats du scrutin présidentiel.
Deuxième chose, à peine revenu de Bobo Dioulasso, Laurent Gbagbo annonce qu’il va relancer la machine. Une confirmation de ce que tout le monde savait. Tout est resté bloqué, malgré la mise sur pied de la nouvelle direction de la Commission électorale indépendante, parce que le chef de l’Etat le voulait ainsi. Les Blé Goudé, Sokoury Bohui et autres satellites ne faisaient tout le grand bruit autour de la recomposition des commissions électorales locales, de l’audit de la liste, que pour relayer la volonté du prince. Du coup, et c’est le troisième message transparent en provenance de Bobo Dioulasso, la Cei n’a d’indépendance que le nom. Même pour se mettre en mouvement sur les dossiers importants dont elle a la charge, elle doit attendre les désirs et les orientations voulues par le prince. Gbagbo a décidé « de relancer la machine ». Sûr de son emprise sur l’ensemble du processus. La Cei s’exécutera. Seuls ceux qui refusent de voir et d’entendre parleront de surprise pour la suite des événements.
D. Al Seni
Elles ont du mal par ailleurs à comprendre les voix qui s’élèvent pour exprimer des craintes et s’interroger sur les conséquences qui en découleront. Sans minimiser la joie de ceux qui applaudissent les dernières décisions sur la crise ivoirienne prises au Pays des Hommes Intègres, il faut passer en revue les différents messages sortis de Bobo Dioulasso, en ce premier avril, et qui sont loin d’être des poissons d’avril. En tout premier lieu, en indiquant que le contentieux électoral va porter sur toutes les listes provisoires déjà publiée, Gbagbo et Compaoré montrent à tous qu’ils ont le pouvoir de revenir sur ce que les Ivoiriens ont auparavant approuvé.
Il n’est un secret pour personne que la liste des cinq millions trois cent mille personnes a été présentée au dernier cadre permanent de concertation, le Cpc dans lequel siègent, outre les deux chefs d’Etat, le Premier ministre ivoirien Soro Guillaume, chef de l’ancienne rébellion des Forces nouvelles, l’ancien président Henri Konan Bédié et l’ancien Premier ministre Alassane Dramane Ouattara. Le Cpc l’a approuvé. Au-delà de ce cadre, la liste a été soumisse à l’Onu. Et l’organisation internationale, présente dans le pays avec des composantes civile et militaire à travers l’Onuci a certifié cette liste blanche. En termes très clairs, le débat sur la citoyenneté des personnes se trouvant sur la liste blanche est clos. C’est au mépris de tout cela que les partisans de Laurent Gbagbo avaient en son temps entrepris de radier, à échelle industrielle, les Ivoiriens qui ne sont pas de leur bord politique des listes. Ils s’étaient appuyés sur des juges politiquement engagés et acquis à leur action. L’entreprise avait donné lieu à des manifestations violentes des victimes de l’apartheid à l’ivoirienne. La généralisation du contentieux ramène dans le domaine du possible les dérives auxquelles les Ivoiriens ont assisté il y a peu. Le plus inquiétant, c’est que, en remettant sur la table du contentieux une liste déjà validée par l’Onu, les deux chefs d’Etat rejettent l’autorité de cette instance internationale. Et son rôle dans la certification des élections ivoiriennes. Si ce qui est validé par l’Onu peut être remis à la poubelle, de quel crédit disposera l’organisation gendarme de la paix et de la stabilité internationale dont justement une des tâches clé dans la sortie de crise en Côte d’Ivoire est de certifier toutes les étapes du processus électorale ? Gbagbo en amenant Compaoré à le soutenir dans le contentieux intégral se donne les moyens de passer outre les décisions à venir de l’Onu dans la conduite des élections dans le pays. Une situation lourde de conséquence puisqu’elle remet désormais, aux mains et à la seule volonté du chef de l’Etat sortant et candidat à sa succession, l’appréciation de l’évolution du processus électoral. Y compris les résultats du scrutin présidentiel.
Deuxième chose, à peine revenu de Bobo Dioulasso, Laurent Gbagbo annonce qu’il va relancer la machine. Une confirmation de ce que tout le monde savait. Tout est resté bloqué, malgré la mise sur pied de la nouvelle direction de la Commission électorale indépendante, parce que le chef de l’Etat le voulait ainsi. Les Blé Goudé, Sokoury Bohui et autres satellites ne faisaient tout le grand bruit autour de la recomposition des commissions électorales locales, de l’audit de la liste, que pour relayer la volonté du prince. Du coup, et c’est le troisième message transparent en provenance de Bobo Dioulasso, la Cei n’a d’indépendance que le nom. Même pour se mettre en mouvement sur les dossiers importants dont elle a la charge, elle doit attendre les désirs et les orientations voulues par le prince. Gbagbo a décidé « de relancer la machine ». Sûr de son emprise sur l’ensemble du processus. La Cei s’exécutera. Seuls ceux qui refusent de voir et d’entendre parleront de surprise pour la suite des événements.
D. Al Seni