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Politique Publié le mercredi 28 avril 2010 | Le Patriote

Raphaël Lakpé, ex-patron de La Voie - “Le FPI fête quoi ? Rien du tout !”

Ex-patron des journaux du FPI et témoin des premiers pas de Laurent Gbagbo dans la vie politique nationale, Raphaël Lakpé, lève le voile sur la Fête de la liberté, les marches du FPI, la naissance du multipartisme et les trahisons de l’idéologie par le régime actuel.

Le Patriote: A partir de ce jeudi 29 février, le FPI débute les festivités de la «Fête de la liberté». Pouvez-vous nous rappeler les origines de cet événement ?
Raphaël Lakpé: Cette fête a été instaurée le 30 avril 1991 pour célébrer le retour de la Côte d’Ivoire au multipartisme. Un an auparavant, l’histoire retient que le président Félix Houphouët Boigny a officiellement décidé que la Côte d’Ivoire revienne au multipartisme. Je dis revienne, parce que le multipartisme avait déjà existé en Côte d’Ivoire avant l’indépendance. Et c’est le président Houphouët qui, au lendemain de l’indépendance, avait estimé qu’il fallait réunir dans un même moule, tous les enfants de la Côte d’Ivoire, afin qu’ils parlent d’une seule voix et qu’ils puissent travailler ensemble. C’est ainsi que le PDCI-RDA est devenu parti unique. Houphouët avait-il eu raison de faire ainsi ? C’est un autre débat.

L.P. Comment s’est fait concrètement ce retour au multipartisme ?
R.L. : Il faut dire qu’il y a eu une véritable conjonction de faits. D’abord, il y avait le désir de changement des Ivoiriens. Parce qu’en 1990, cela faisait 30 ans que le PDCI était au pouvoir et que Houphouët était président de la République. 30 ans dans la vie d’une nation et d’un homme, c’est beaucoup. A un moment donné donc, beaucoup d’Ivoiriens désiraient un changement. Aussi, faut-il se rappeler qu’à cette période, il y a eu beaucoup de problèmes économiques. Car, c’est bien vers la fin des années 1989 que le régime d’alors avait imaginé qu’on pouvait réduire le salaire des fonctionnaires pour régler les problèmes économiques du pays. Cela a provoqué des mouvements sociaux. Et tout cela a plus ou moins fragilisé le régime d’Houphouët Boigny. Il y avait aussi l’environnement international. Je me rappelle encore qu’en France, les socialistes étaient au pouvoir, avec le président François Mitterrand. Ce dernier avait prononcé un discours qu’on a appelé le discours de la Baule, qui, d’une certaine façon, impulsait un peu plus de démocratie dans les pays africains. Des pays qui, au lendemain des indépendances, avaient opté pour le parti unique. Ce sont donc tous ces éléments qui ont amené le président Houphouët-Boigny à desserrer un peu l’étau de ce point de vue.

L.P. : Alors, avec l’obtention du multipartisme, si on vous demandait de dessiner le parcours de Laurent Gbagbo, que diriez-vous?
R.L. : Laurent Gbagbo a été un syndicaliste activiste. Il faut reconnaître qu’il a été très actif. Mais, il n’a pas été le seul dans cette lutte pour le retour au multipartisme. A l’époque, il y avait des universitaires comme Zadi Zaourou, reconnu comme un grand penseur. Il y avait aussi le Professeur Francis Wodié. Il faut également citer le professeur Bamba Moriféré. En tout cas, il y avait un certain nombre d’intellectuels qui utilisaient les syndicats, puisqu’il n’existait pas encore de partis politique en dehors du PDCI, pour secouer le régime d’Houphouët. Et toujours dans le même schéma, il y a eu, dans les années 80, la naissance du Parti Républicain de Gbaï Tagro. Cela a constitué une étape importante dans la vie politique de la Côte d’Ivoire. N’oublions pas aussi que de 82 à 88, Laurent Gbagbo était en exil. Pendant donc 6 ans, il n’était pas présent sur le terrain. Mais, malgré tout, le combat a plus ou moins continué du point de vue syndical. Cependant, il faut reconnaître que le retour d’exil de Laurent Gbagbo a joué un rôle important dans ce retour au multipartisme. Et c’est dans ce cadre là, qu’il y a eu la fête de la liberté.

L.P. : Peut-on donc dire que Laurent Gbagbo a obtenu la liberté à partir de la lutte contre le régime du président Houphouët ?
R.L. : De ce point de vue, je pense qu’il n’est pas très honnête de dire que Laurent Gbagbo a obtenu la liberté. Parce que, comme je l’ai dit tantôt, il y a eu plusieurs combattants. Et beaucoup sont encore en vie. Gbagbo a peut-être été, vers la fin, le plus actif. Mais il n’a pas été le seul. Il y avait aussi ceux que j’ai cités plus haut.

L.P. : Dix (10) ans maintenant que Laurent Gbagbo est au pouvoir. Quel sens donnez-vous à cette fête de la liberté ?
R.L. : C’est la grande question que l’on devrait se poser. Gbagbo gouverne depuis dix ans. Et en réalité, qu’est-ce qu’on fête aujourd’hui ? Quelle liberté fête-t-on ? S’il s’agit de fêter le retour du pays au multipartisme, la fête n’a plus de sens. Puisque depuis 1990, cela fait 20 ans que le pays est retourné au multipartisme. Mais en dehors du multipartisme, avons-nous obtenu d’autres libertés ? Du point de vue politique, les libertés, n’ont-elles pas reculé ? Ce sont ce genre de questions qu’il faut désormais se poser. Or là, la première réponse qui vient à l’esprit est que sous le règne de Laurent Gbagbo, les libertés ont dangereusement reculé. Que ce soit la liberté d’expression, la liberté pour chaque individu de manger à sa faim, la liberté de manifester, etc.

L.P. : Pouvez-vous donner des exemples précis de frein à la liberté sous le régime de Laurent Gbagbo ?
R.L. : D’abord l’un des premiers éléments qui permettent de mesurer la liberté dans un pays, c’est la télévision nationale. A ce niveau, le constat est que nous avons reculé de plusieurs années. Parce qu’à l’époque, on avait les débats télévisés qui mettaient en évidence les contradictions et animaient la vie politique. Mais aujourd’hui, à la télévision nationale, on parle de tout sauf de ce peut intéresser la majorité des Ivoiriens. Et tous les soirs, Laurent Gbagbo est à la télévision. Chose que le président Houphouët même ne faisait pas. Tout récemment, j’ai lu que quelqu’un a été condamné pour avoir critiqué Laurent Gbagbo dans un maquis. Si on en arrive-là, c’est que les libertés sont vraiment menacées. Et cela veut dire que nous n’avons pas du tout avancé.

L.P. : En tant qu’Ivoirien et surtout de cette génération de 1990, vous sentez-vous avoir été trahis par Laurent Gbagbo ?
R.L. : Trahi ? C’est peu dire. La question que je voudrais poser à Gbagbo, c’est de savoir ce qu’il a fait de notre victoire. La victoire de tout ceux qui ont voulu, et qui ont fait à leur niveau ce qui devait être fait pour que le multipartisme revienne. Alors, cette victoire, qu’est-ce qu’il en fait ? Parce qu’aujourd’hui, on ne peut pas dire que les Ivoiriens sont heureux. Partout aujourd’hui, c’est la misère, c’est l’insécurité, c’est la souffrance des populations. Je ne crois pas donc qu’il ait bien géré notre victoire, celle de ceux qui ont lutté pour le changement. Or, à l’époque, nous pensions qu’une fois Laurent Gbagbo au pouvoir, les Ivoiriens, malgré leurs problèmes, seraient dans la joie, dans la sécurité et vivraient dans une démocratie réelle. Et qu’à la télévision, on assisterait à des débats contradictoires. Mais, il n’y a rien de tout cela. C’est un seul son de cloche qu’on entend à tout moment. Les médias d’Etat sont caporalisés. En tout cas, à ce niveau, c’est une grosse déception. C’est vrai que nous avons eu le multipartisme. Mais, avec Laurent Gbagbo, nous n’avons toujours pas la démocratie. La preuve est que depuis 10 ans qu’il est là, il n’y a pas d’élection. Le peuple ne peut pas s’exprimer. On prend pour prétexte la guerre. C’est grave, parce que cela démontre que Gbagbo, malgré les 10 ans passés à la tête du pays n’arrive toujours pas à réconcilier les Ivoiriens. Et c’est lui qui, depuis son arrivée au pouvoir dans des conditions qu’il a traitées lui-même de « calamiteuses », n’a cessé d’entretenir l’esprit de division. Quand il prend la parole, c’est toujours lui en face des autres. Jamais, il n’a parlé au nom et pour tous les Ivoiriens. C’est donc tout cela qui a concouru à l’éclatement de la crise en Côte d’Ivoire et qui fait du tort au pays.

L.P. : Dans la lutte pour la liberté et le multipartisme, il y a certainement eu des répressions de la part du régime du président Houphouët. Comparativement à celle d’aujourd’hui, quelle remarque faites-vous?
R.L. : De 90 jusqu’à ce qu’il prenne le pouvoir en 2000, le FPI et Laurent Gbagbo sont restés constamment dans la rue, sans qu’il y ait une répression comme ce à quoi nous assistons maintenant. Le FPI a toujours marché, même les jours ouvrables, sur de longues distances. Je me rappelle d’une marche que nous avons organisée un samedi. Nous sommes partis du stade Félix Houphouët Boigny, jusqu’au grand carrefour de Koumassi. Avec des slogans durs contre le régime PDCI. C’est d’ailleurs à cette occasion que Laurent Gbagbo, parlant du Premier ministre Alassane Ouattara, a dit qu’il est « un animal de ville » alors que lui, Laurent Gbagbo, connaissant le terrain, était un « animal de brousse». Après sa prise de pouvoir, on se demande bien si l’animal de brousse connaissait bien la brousse. Un autre exemple, A Agboville, au cours d’un meeting, Laurent Gbagbo a eu des propos plus durs à l’encontre du pouvoir. Il les a traités de « tocards et d’ignares ». Et le ciel n’est pas tombé sur lui. Juste, le maire de la ville de l’époque, Nicolas Kouandi Angba , paix à son âme, avait requis les services de quelques loubards pour perturber la manifestation, pas plus. Or, aujourd’hui, nous constatons qu’on ne peut pas organiser une marche sans que la police, la gendarmerie et l’armée n’interviennent et qu’elles ne tirent à balles réelles sur les manifestants. Depuis que Gbagbo est au pouvoir, la seule marche où il n’y a pas eu de répression, c’est celle de la dernière fois avec des jeunes du RHDP. Cela est maigre comme bilan. En tout cas, pour quelqu’un qui dit avoir lutté pour la liberté et la démocratie, c’est maigre comme bilan. C’est donc tout cela que nous déplorons.

L.P. : Faisons toujours des comparaisons en février 92, la marche du FPI a fait selon des informations, au total deux blessés. Cependant, en mars 2004, celle du RHDP contre le régime FPI, a fait plus d’une centaine de morts. Alors quelle interprétation?
R.L. : Si on ne s’en tient qu’aux faits, cela veut dire que les premiers dirigeants étaient plus démocrates et plus tolérants que ceux de maintenant. En 92, il y a eu effectivement deux blessés dans le camp du FPI. En son temps, la police avait parlé aussi d’un blessé dans ses rangs. Au FPI, les seuls blessés étaient Georges Coffi et Simone Gbagbo. Logiquement, c’est à cette période-là que le pouvoir devait être plus dur. Tout étant nouveau. Et 20 ans après, on devrait pouvoir arriver à faire des manifestations sans que la répression ne s’abatte sur les participants. Or, c’est bien le contraire que nous constatons. Cela veut dire que Laurent Gbagbo n’est pas un démocrate.

L.P. : Après tout ce que vous venez de dire, si on vous demandait de donner un sens aux festivités que prépare le FPI dans le cadre de cette commémoration de la fête de la liberté, que diriez-vous ?
R.L. : Pour moi, cette fête n’a plus de sens, car elle est faite de contradictions. On dit qu’on fête la liberté. On s’apprête à fêter l’indépendance, avec le cinquantenaire. Mais concrètement, le FPI fête quoi ? Rien du tout ! Fêter donc la liberté maintenant, c’est encore une façon pour le FPI de tromper le peuple. C’est encore pour dire qu’en 1990, c’est grâce à Laurent Gbagbo qu’on a fait ceci ou cela. Ça, c’est du passé. Concrètement, la rencontre devait être une fête bilan des 10 années de gestion du FPI et de Laurent Gbagbo. On devrait fêter ses réalisations, on devrait saluer les espaces de liberté qu’il a accordés au peuple. Or, de ce point de vue, on ne voit rien.

L.P. : A vous écouter, ce bilan est un échec.
R.L. : Oui, puisqu’on n’a pas de libertés depuis que Laurent Gbagbo est au pouvoir. Depuis qu’il est au pouvoir, jamais une marche de l’opposition ne s’est terminée sans qu’il y ait du sang, sans qu’il n’y ait eu de morts. Même du côté des journalistes, la liberté n’a pas été ce que l’on espérait. Un journaliste qui écrit un article un peu corsé sur le régime rentre toujours à la maison avec la peur au ventre. Parce qu’il ne sait pas ce qui pourrait lui arriver en cours de route..

L.P. : Mais, dès son arrivée au pouvoir, Gbagbo a promis qu’il ne mettrait jamais un journaliste en prison. Cette promesse n’est-elle pas tenue ?
R.L. : C’est vrai qu’il na pas mis de journaliste en prison. Mais, n’oublions pas que c’est sous son régime que des journalistes ont été tués par la police du régime. Ce qui veut dire quelque part qu’il vaut mieux mettre un journaliste en prison que de le tuer. Jean Hélène a été tué, Kieffer a disparu. Des rédactions importantes du pays dont la votre ont vu leurs sièges incendiés en 2004Franchement, nous nous attendions à mieux. Derrière le multipartisme, il devait y avoir la démocratie. Avec Gbagbo, l’Ivoirien devait se sentir libéré. Or, ce n’est pas le cas. Il y a un seul camp qui parle, une minorité qui règne. Ce n’est pas cela la liberté. Combien de chaînes de télévision avons-nous sous Gbagbo, le libérateur ? Toujours les mêmes que sous Houphouët. Le progrès est où ? Alassane Ouattara nous a laissé le CNCA et le CNP dont les missions sont aujourd’hui dévoyées. C’est lui a lioberé les ondes permettant à des radios comme RFI, BBC, VOA, Nostalgie et Jam FM, d’émettre en modulation de fréquence. Et Gbagbo que nous laissera-t-il dans le cadre de l’expression plurielle et de sa garantie ? Rien du tout !

L.P. : En son temps, dans le cadre de cette fête de la liberté, vous-vous êtes rendus à Korhogo, Man, et dans bien d’autres villes. Il y a avait en ce moment une ferveur pour Laurent Gbagbo et pour le projet qu’il défendait. Aujourd’hui, pensez-vous que cette ferveur existe toujours ?
R.L. : Je ne le pense pas. A l’époque, il représentait l’espoir. On se disait que quand Gbagbo arrivera au pouvoir, en tout cas, les choses n’allaient pas se passer comme elles se passaient. On se disait qu’on sera moins malheureux et qu’on aura plus de libertés. Mais, Gbagbo est au pouvoir depuis 10 ans. Aujourd’hui, c’est l’heure du bilan. De ce point de vue, Gbagbo a déçu. Nous n’avons pas de liberté. L’insécurité règne partout. Au plan international, l’image du pays est ternie. Le bilan de Gbagbo, à mon sens, est négatif à tous les niveaux. Même ses propres sondages indiquent qu’il est minoritaire dans le pays.

L.P. : De 90 à maintenant, comment expliquez-vous un tel changement de l’homme, Laurent Gbagbo ?
R.L. : Il y a certainement plusieurs éléments de réponse. D’abord, je me dis que l’homme avait peut-être caché en lui sa vraie personnalité. Il est facile de critiquer et il le faisait avec beaucoup d’aisance. A l’époque, les Ivoiriens voulaient le changement, ce qui adviendrait après n’était pas vraiment leur préoccupation. Maintenant qu’ils ont obtenu le changement, ils découvrent aujourd’hui que celui en qui ils avaient placé leur espoir n’a rien à leur proposer. De ce point de vue, il y a une grosse déception. Ensuite, peut-être aussi que Laurent Gbagbo est devenu ainsi parce qu’il est arrivé au pouvoir dans des conditions calamiteuses, avec l’aide d’une partie de l’armée et d’un certain nombre de personnes qui ne voulaient que le pouvoir. Il dirige plus pour le compte de ces groupuscules d’intérêts que pour celui du pays. Il sert ceux qui l’ont aidé à arracher le pouvoir des mains de Robert Guéi. Cela joue certainement sur son comportement. Ce sont donc quelques éléments de réponse qu’on pourrait donner. Cependant, on pourrait aussi se poser des questions sur les capacités réelles de Laurent Gbagbo à gérer le pays. Peut-être qu’il lui a manqué l’expérience des choses quand il a pris le pouvoir

L.P. : Mais, il explique son bilan par le fait que ses opposants ne lui ont pas laissé le temps de dérouler son programme et qu’ils lui ont fait la guerre.
R.L. : Dans quel pays a-t-il vu un opposant laisser celui qui est au pouvoir gouverner ? Dans aucun pays ! Lui-même, a-t-il laissé Houphouët gouverner ? Il était dans la rue. Il n’a pas laissé les autres gouverner. Je pense qu’il s’agit là d’un argument qui ne tient pas la route.

L.P. : Il dit que lui n’a jamais pris les armes contre le pouvoir.
R.L. : N’oublions pas que c’est lui qui a habitué les Ivoiriens aux tueries. C’est lui qui les a habitués au maniement des armes. Les régimes dont il parle n’ont jamais utilisé les armes contre lui. Pourquoi devrait-il prendre les armes ? On l’a laissé s’opposer. Or lui, il a pris les armes contre son opposition. Chaque sortie de l’opposition bien avant septembre 2002 se soldait par des morts. Le charnier de Yopougon, les différents complots, les assassinats du 19 septembre 2002, ce sont des faits que nous avons tous vécus en Côte d’Ivoire. Et c’est triste. D’autres Ivoiriens, malheureusement, l’ont vu faire et ont donc pris les armes. La rébellion qui a bien un visage a expliqué les raisons de sa survenue. Gbagbo doit s’accuser d’avoir habitué les Ivoiriens aux tueries en toute impunité.

L.P. : Au niveau du FPI, selon vous, où sont passés les idéologues, ceux qui ont porté le combat aux premières heures de la lutte pour la liberté ?
R.L. : Je pense que ces idéologues ont disparu, parce qu’ils ont senti qu’ils ne sont plus écoutés. Ils se sont rendus compte qu’ils ne servent plus à rien. Alors, ils sont partis ou se sont tus C’est la seule explication qu’on peut donner

L.P. : Selon vous, quel est le lien aujourd’hui entre Laurent Gbagbo et le peuple ivoirien, quand on sait qu’au début de la crise, il a bénéficié du soutien des populations pour résister à la guerre ?
R.L. : Pensez-vous qu’il a résisté avec le soutien du peuple ? Il est vrai qu’il y avait des contradictions à un certain moment au niveau des partis de l’opposition. A un moment donné, le PDCI n’était pas tellement d’accord avec le RDR. Gbagbo a donc surfé sur tout cela. Maintenant que l’opposition a pris conscience du danger qui la menace, vous voyez que Laurent Gbagbo est à nu. Il estime que c’est lui que le peuple va désigner pour diriger à nouveau la Côte d’Ivoire. Or, il ne se rend pas compte que le peuple qu’il avait en 90 ne le suit plus. C’est vrai, comme je l’ai dit, en 90, beaucoup d’Ivoiriens voulaient le changement. Et le seul qui avait un discours de rupture, c’était Laurent Gbagbo. C’est pour cela qu’il y a eu une adhésion populaire. Maintenant qu’il a le pouvoir, par sa façon de gérer, le peuple a décidé de ne plus le suivre. Le pays n’avance pas. Il y a des problèmes partout. Les familles ne mangent plus à leur faim. Les populations manquent d’eau et d’électricité, avec le délestage. La situation est grave. De l’espoir, on est passé à la désillusion. Penser que ce qui était au début, l’est encore, c’est insulter l’intelligence du peuple.

L.P. : Mais pensez-vous qu’à l’occasion de cette Fête de la liberté, le FPI peut encore rectifier le tir ?
R.L. : Il y a un fait qu’il faut d’abord analyser. C’est que dans les années 90, on a vu Houphouët discuter avec Laurent Gbagbo, disons avec son opposition, sur certains points de la vie sociopolitique du pays. Même si cela ne débouchait sur rien de concret, mais au moins, la population avait le sentiment que la classe politique se parlait et cela avait l’avantage de faire baisser les tensions. Mais depuis que Gbagbo est arrivé, en tout cas si ma mémoire est bonne, il n’a jamais pris l’initiative de rencontrer son opposition pour discuter avec elle. Non seulement, il la combat, ce qui est normal, mais il la méprise, ce qui n’est pas une bonne chose.

L.P. : Il y a eu le Forum de la réconciliation nationale…
R.L : Au Forum, il ne s’agissait pas d’une rencontre entre Gbagbo et ses opposants. Chacun est venu dire ce qu’il pensait avant de partir. Et même là, qu’a-t-il fait des recommandations issues de ce Forum ? Rien du tout. Il avait même prévenu, en disant que le Forum n’était pas un gouvernement-bis et donc qu’il ne s’agissait qu’un groupe de réflexion. Ce qui voulait dire que les recommandations du Forum ne représentait pas grande chose à ses yeux. Il a eu tort.
Réalisée par Charles Sanga et Diawara Samou

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