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Économie Publié le mercredi 5 mai 2010 | Le Patriote

Interview - Fareed Jaunbocus, Consultant international, révèle:Consultant international, révèle: "Le futur dirigeant de la Côte d`Ivoire doit être un expert financier"

Après l’affaire du franc CFA « flottant », les Refondateurs évoquent maintenant la question d’une monnaie unique pour les Africains. Pour des économistes avertis, ces idées traduisent leur méconnaissance totale des arcanes des finances et de la gestion. Toute chose qui constitue un handicap pour un dirigeant digne de ce nom. Ce que confirme l’expert et consultant international mauricien Fareed Jaunbocus, qui a participé récemment, à Yamoussoukro, à l`Atelier dénommé « Côte d`Ivoire 2040 » à l’initiative du patronat ivoirien à Yamoussoukro. Dans cet entretien, il explique les clés du succès de son pays et dresse le portrait-robot du futur dirigeant que doit avoir la Côte d`Ivoire si elle veut se positionner comme l`Ile Maurice.

Le Patriote: Comment la Côte d`Ivoire peut-elle s`inspirer du modèle mauricien?
Fareed Jaunbocus: Il y a beaucoup de choses à partir desquelles la Côte d’Ivoire peut s’inspirer parce que c’est un pays qui a d’énormes ressources contrairement à l’Ile Maurice où nous n’avons rien comme ressources. Nous n’avons pas de ressources naturelles, encore moins de pétrole ou de gisement. Nous avons tout ce qu’il faut pour ne pas réussir. Nous sommes loin des grandes métropoles, nous sommes un petit pays. Malgré ces faiblesses, l’Ile Maurice est un pays qui réussit parce que la seule ressource que nous détenons, ce sont les hommes. La stratégie de l’Ile de Maurice est basée sur un investissement extraordinaire dans les ressources humaines. Cet investissement se fait d’abord par une école gratuite. Donc tout le monde a la possibilité d’aller à l’école, d’avoir une éducation parce que c’est la clé du développement. La deuxième chose que nous avons et qui est intéressante, c’est un service médical gratuit à tous les niveaux. Vous pouvez passer deux mois dans un hôpital avec 50.000 examens, c’est gratuit. C’est surtout pour s’assurer que nous avons une ressource humaine en bonne santé et qui soit performante en termes de compétences. C’est la seule chose qui nous permet d’atteindre le niveau que nous avons et de réussir notre développement. Au niveau des ressources humaines de qualité, nous avons une vision du développement qui est très puissante et nous sommes cités comme exemple en Afrique. Nous sommes parmi les mieux classés en matière de Doing Business. Nous étions 34ème, nous sommes ensuite passés au 27ème rang et aujourd’hui nous sommes 17ème sur 183 pays. Notre ambition, c’est d`être dans les 10 premiers pays les mieux classés avant deux ans. Par conséquent, nous facilitons tout ce qu’il faut pour attirer les investissements. Nous avons une stratégie qui a commencé dans le secteur agricole. Il n’y avait rien d’autre que la canne à sucre et nous avons grandi avec cette culture qui représentait 95% de notre secteur agricole. Et nous avons commencé à diversifier, à investir dans nos ressources humaines. Nous sommes partis dans le textile, dans le tourisme, dans le service et nous avons mis en place un centre financier régional. On diversifie davantage pour être un pays fort, un pays modèle.

L.P. Selon vous, les dirigeants ivoiriens doivent avoir une vision. Laquelle?
F.J.: La vision, c’est ce qu’on veut être dans le futur. C’est-à-dire qu’il faut être capable de voir et de se positionner par rapport à cela. Aujourd’hui, nous sommes dans un monde de plus en plus global et de plus en plus intégré. Mais est-ce que la Côte d’Ivoire voudra s’ouvrir davantage à ce monde et se dire que cette Côte d’Ivoire de demain doit être le moteur du développement ? C’est tout cela qui doit constituer un peu votre vision. Mais pour cela, les dirigeants et le secteur privé doivent se mettre ensemble pour décliner cette vision du futur et trouver le plan d’action approprié par rapport à vos réalités et réaliser cela.

L.P.: Justement, quelles qualités doivent avoir les nouveaux dirigeants de la Côte d’Ivoire ?
F.J.: Les qualités sont multiples. Vous ne pouvez pas rester que francophones, il faut que vous soyez multilingues. Il faut un dirigeant qui a une vision globale. Il doit être un expert financier. Chez nous, un dirigeant est élu sur la base de son programme économique. Il faut être beaucoup plus économique que politique. Le choix d`un dirigeant doit se faire sur la base d`un programme économique fiable qui aidera le pays à créer de la richesse. Il faut être futuriste, être un stratège et maîtriser la technologie informatique et les autres technologies et surtout la nanotechnologie qui va venir. Il faut un dirigeant qui a beaucoup plus de compétences. Mieux, avoir beaucoup plus de compétences que vous en avez maintenant. Chacun peut se construire sa compétence de demain. Les dirigeants doivent être des penseurs, des gens qui peuvent positionner la Côte d’Ivoire par rapport à la région et par rapport à la mondialisation. Des gens qui puissent prendre l’avantage des opportunités qui se présentent.

L.P.:Avec les différents exposés que vous faites à travers le monde et surtout en Afrique, les choses ont-elles vraiment changé ?
F.J.: En Afrique, ça change. Je sais qu’en Tanzanie, on a mis beaucoup de stratégies en place. C’est la même chose au Kenya. Les choses vont changer même si ce n’est pas à 100%.

L.P.: Mais en Côte d’Ivoire que faut-il pour que les choses changent véritablement ?
F.J.: Il faut mettre en place des structures, des partenariats, des collaborations entre secteur public et secteur privé. Il faut être réaliste. Le public ne peut pas réussir sans le privé et il en est de même pour le privé. Je suis très heureux d’avoir entendu le ministre de l’Industrie dire que le secteur privé reste le moteur du développement. Donc il y a une conscientisation de la part des autorités. Si vous êtes capable de mettre en place les structures et l’intensité de cette plate-forme, je crois que vous avez les chances de réussir. L’avenir de la Côte d’Ivoire sera ce que les Ivoiriens feront de leur pays. L’avenir de n’importe quel pays, c’est ce que ses dirigeants et ses cadres veulent faire de ce pays. L’île Maurice n’était rien, on a voulu en faire quelque chose, on l’a fait. Idem pour Singapour.

L.P. Mais la Côte d’Ivoire est minée par des maux comme la corruption à grande échelle. Comment peut-on y remédier?
F.J.: Il faut mettre en place des structures pour nettoyer tout cela. C’est un domaine dans lequel je ne voudrais pas trop m’aventurer parce que ne sachant pas trop la dimension du cas ivoirien. Mais chez nous en Île Maurice, on a mis en place un Tribunal anticorruption qui a plein pouvoir. N’importe qui peut écrire pour déposer. Je pense qu’avant tout, il faut une volonté politique.

Recueillis par Jean Eric ADINGRA
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