D. Ali n’a pas froid aux yeux. Encore moins la langue dans sa poche. Il distribue les images de Canal+Horizons à Adjamé. Quand nous commençons, ce matin, la conversation avec lui, au sujet des descentes musclées que préparent les responsables de Canal+Horizons, voici ce qu’Ali dit clairement: « On les attend. Ce n’est pas la première fois. Nous sommes au courant de l’affaire. Mais, cela ne m’effraie pas dans la mesure où je travaille avec les techniciens de Canal. On se connaît. J’ai pu étendre mon réseau avec leur complicité. Vous savez, je verse la somme de 250.000Fcfa par mois comme pot-de-vin à certains responsables de Canal. Donc, je ne suis pas inquiet ». Ali est rompu au métier de la distribution des images de Canal. Cela fait une décennie, selon lui, qu’il le fait. Dans un quartier de la commune du maire Sylla Issouf, où il habite, notre interlocuteur refuse de nous donner l’identité des agents qui auraient reçu des pots-de-vin.
«Nous pas bouger»
Cependant, il explique comment il a pu étendre son réseau «d’abonnés» qui compte 1000 clients aujourd’hui. «J’ai débuté en 2000 avec un décodeur. Je l’ai acheté à 80.000Fcfa avec un abonnement de trois mois. Le client devait payer 3000Fcfa par mois. Le client avait droit à huit chaînes de télévision dont Canal+. A l’aide de câbles, on fait l’interconnexion entre nos clients. Le décodeur installé, dans un lieu sûr, assure la distribution des images. Au fil du temps, ma clientèle a augmenté. Aujourd’hui, je compte un millier de clients malgré la concurrence. L’abonné paie maintenant 2000Fcfa au lieu de 3000Fcfa pour avoir accès à une dizaine de chaînes. Imaginez-vous un peu ce que je pouvais avoir à la fin du mois.», nous confie cet ancien étudiant de l’université de Bouaké. Il est titulaire d’une licence en Anglais. De 2000 à 2010, avance Ali, il s’est procuré dix décodeurs pour répondre à la demande qui ne cesse de s’accroître. Son business marche à merveille. «J’ai payé un terrain que j’ai construit. Je donne du boulot à une dizaine de jeunes du quartier. Je pense que tout le monde ne peut pas s’offrir un abonnement normal. Donc, nous aidons ceux qui n’ont pas assez de moyen en leur proposant nos services », argumente Charly, un autre distributeur illégal. C’est à juste titre qu’il voit d’un mauvais œil la traque aux fraudeurs. L’opération, selon les organisateurs, est encadrée par les forces de défense et de sécurité (Police et gendarmerie). Pour lui, la chasse aux revendeurs est vouée à l’échec. Charly avance que l’opération ne l’inquiète pas. «Je pense que c’est une bombe qui, si elle éclate, des employés de Canal risquent de prendre un coup sérieux. Les gens doivent attaquer le mal à la racine. Donc, la lutte doit commencer au sein même de Canal », insiste-t-il. La détermination des distributeurs illégaux des images de Canal+Horizons est palpable. A Abobo, K. Cédric, propriétaire de cinq décodeurs vend les images à une centaine de foyers. Cédric affirme qu’il ne craint rien car selon lui, la fraude prend racine au sein de l’entreprise Canal+Horizons. «C’est quand tu veux manger seul qu’il y a problème. Il faut mouiller la barbe de tout monde. Nos complices sont les distributeurs agrés par Canal. Il y a aussi certains techniciens de la maison qui monnaient leur silence. Si on s’attaque à nous, alors nous allons dénoncer ces personnes-là », clame le jeune homme de 32 ans qui a quitté en 2006 son atelier de couture pour se consacrer entièrement à la commercialisation «frauduleuse » d’images. C’est vrai qu’il ne donne pas son chiffre d’affaires mais Cédric ne se plaint pas de son « métier ». En raison de 2000Fcfa par mois et par abonné, il a pu investir dans l’immobilier et le transport. « On fait ça pour aider ceux qui ne peuvent pas regarder d’autres chaînes à part la télévision nationale », indique-t-il. Ecoutant notre conversation, C. Bangali s’invite au débat et prend position. « On ne peut pas s’abonner correctement. La raison est toute simple. Le coût de l’abonnement est élevé. Il y a aussi les conditionnalités qui sont trop dures. On vous demande de signer un contrat d’abonnement individuel, un plan d’habitation…Tout ceci pour quoi faire ? Donc, si nous pouvons avoir Canal à un prix accessible-2000 Fcfa alors cela nous arrange», soutient Bangali, vigile dans une entreprise de sécurité privée de la place. Il fait partie des clients de Cédric. Selon lui, il reçoit douze chaînes de télévision donc les programmes de Canal+ Horizons. Comme lui, S. Félicien profite aussi du réseau de la centaine de distributeurs illégaux disséminés à travers Abidjan.
Sept fraudeurs déférés à la Maca
Face aux accusations de complicité et la riposte organisée par les revendeurs, nous avons approché Canal+Horizons. Joint par téléphone, M. De Longévile, directeur-projets nuance les affirmations selon lesquelles des agents seraient de connivence avec les distributeurs frauduleux. «La complicité peut exister mais toutes les enquêtes internes ont démontré qu’il n’existe pas de complicité. Nous avons un personnel dont nous maîtrisons les mouvements par des méthodes de contrôle et de supervision appropriées. Je signale que l’opération a démarré hier (mercredi, ndlr) dans les communes de Yopougon, Port-Bouët et Abobo. Sept personnes ont été interpellées. Ce n’est pas une action sporadique. Elle va continuer au-delà de la période de la coupe du monde. Il s’agit de traquer ceux qui exploitent illégalement notre réseau. Nous voulons donner un contenu juridique à cette opération. Nous avons pris attache avec un cabinet d’avocats. Donc, nous allons démanteler les installations des distributeurs non agréés. Je crois que tout le monde a intérêt à ce qu’ils disparaissent parce que ces personnes ne paient aucune taxe, aucun impôt », confie le directeur-projets de Canal+Horizons en annonçant que les jours à venir, un communiqué de presse précisera les noms de tous les distributeurs agréés. Selon lui, les individus appréhendés mercredi lors des descentes musclées ont été déférés au parquet général, hier. Et, l’affaire est en instruction. Concernant le coût réel du manque à gagner lié à la fraude sur les décodeurs, M. Longévile dit ne pas avoir en sa possession les chiffres exacts. Cependant, il affirme que sa société subie un préjudice estimé à plusieurs centaines de millions Fcfa. «Pour endiguer le mal, nous avons mis en place une politique de prix accessible à tout le monde. Nous avons conçu des packs d’abonnements. Les prix varient en fonction du choix des programmes. Il y a cinq types d’abonnement à savoir : Evasion ; Premium ; Premium plus ; Prestige, Excellence. Les prix varient entre 7 .000Fcfa et 22.500Fcfa. En plus, nous organisons des campagnes de promotion où les prix des abonnements sont réduits », explique M. Longévile convaincu que la nouvelle politique de prix adoptée par Canal+Horizons est accessible à toutes les bourses.
Ouattara Moussa
N.B : Nous avons changé les noms des revendeurs pour préserver leur sécurité.
«Nous pas bouger»
Cependant, il explique comment il a pu étendre son réseau «d’abonnés» qui compte 1000 clients aujourd’hui. «J’ai débuté en 2000 avec un décodeur. Je l’ai acheté à 80.000Fcfa avec un abonnement de trois mois. Le client devait payer 3000Fcfa par mois. Le client avait droit à huit chaînes de télévision dont Canal+. A l’aide de câbles, on fait l’interconnexion entre nos clients. Le décodeur installé, dans un lieu sûr, assure la distribution des images. Au fil du temps, ma clientèle a augmenté. Aujourd’hui, je compte un millier de clients malgré la concurrence. L’abonné paie maintenant 2000Fcfa au lieu de 3000Fcfa pour avoir accès à une dizaine de chaînes. Imaginez-vous un peu ce que je pouvais avoir à la fin du mois.», nous confie cet ancien étudiant de l’université de Bouaké. Il est titulaire d’une licence en Anglais. De 2000 à 2010, avance Ali, il s’est procuré dix décodeurs pour répondre à la demande qui ne cesse de s’accroître. Son business marche à merveille. «J’ai payé un terrain que j’ai construit. Je donne du boulot à une dizaine de jeunes du quartier. Je pense que tout le monde ne peut pas s’offrir un abonnement normal. Donc, nous aidons ceux qui n’ont pas assez de moyen en leur proposant nos services », argumente Charly, un autre distributeur illégal. C’est à juste titre qu’il voit d’un mauvais œil la traque aux fraudeurs. L’opération, selon les organisateurs, est encadrée par les forces de défense et de sécurité (Police et gendarmerie). Pour lui, la chasse aux revendeurs est vouée à l’échec. Charly avance que l’opération ne l’inquiète pas. «Je pense que c’est une bombe qui, si elle éclate, des employés de Canal risquent de prendre un coup sérieux. Les gens doivent attaquer le mal à la racine. Donc, la lutte doit commencer au sein même de Canal », insiste-t-il. La détermination des distributeurs illégaux des images de Canal+Horizons est palpable. A Abobo, K. Cédric, propriétaire de cinq décodeurs vend les images à une centaine de foyers. Cédric affirme qu’il ne craint rien car selon lui, la fraude prend racine au sein de l’entreprise Canal+Horizons. «C’est quand tu veux manger seul qu’il y a problème. Il faut mouiller la barbe de tout monde. Nos complices sont les distributeurs agrés par Canal. Il y a aussi certains techniciens de la maison qui monnaient leur silence. Si on s’attaque à nous, alors nous allons dénoncer ces personnes-là », clame le jeune homme de 32 ans qui a quitté en 2006 son atelier de couture pour se consacrer entièrement à la commercialisation «frauduleuse » d’images. C’est vrai qu’il ne donne pas son chiffre d’affaires mais Cédric ne se plaint pas de son « métier ». En raison de 2000Fcfa par mois et par abonné, il a pu investir dans l’immobilier et le transport. « On fait ça pour aider ceux qui ne peuvent pas regarder d’autres chaînes à part la télévision nationale », indique-t-il. Ecoutant notre conversation, C. Bangali s’invite au débat et prend position. « On ne peut pas s’abonner correctement. La raison est toute simple. Le coût de l’abonnement est élevé. Il y a aussi les conditionnalités qui sont trop dures. On vous demande de signer un contrat d’abonnement individuel, un plan d’habitation…Tout ceci pour quoi faire ? Donc, si nous pouvons avoir Canal à un prix accessible-2000 Fcfa alors cela nous arrange», soutient Bangali, vigile dans une entreprise de sécurité privée de la place. Il fait partie des clients de Cédric. Selon lui, il reçoit douze chaînes de télévision donc les programmes de Canal+ Horizons. Comme lui, S. Félicien profite aussi du réseau de la centaine de distributeurs illégaux disséminés à travers Abidjan.
Sept fraudeurs déférés à la Maca
Face aux accusations de complicité et la riposte organisée par les revendeurs, nous avons approché Canal+Horizons. Joint par téléphone, M. De Longévile, directeur-projets nuance les affirmations selon lesquelles des agents seraient de connivence avec les distributeurs frauduleux. «La complicité peut exister mais toutes les enquêtes internes ont démontré qu’il n’existe pas de complicité. Nous avons un personnel dont nous maîtrisons les mouvements par des méthodes de contrôle et de supervision appropriées. Je signale que l’opération a démarré hier (mercredi, ndlr) dans les communes de Yopougon, Port-Bouët et Abobo. Sept personnes ont été interpellées. Ce n’est pas une action sporadique. Elle va continuer au-delà de la période de la coupe du monde. Il s’agit de traquer ceux qui exploitent illégalement notre réseau. Nous voulons donner un contenu juridique à cette opération. Nous avons pris attache avec un cabinet d’avocats. Donc, nous allons démanteler les installations des distributeurs non agréés. Je crois que tout le monde a intérêt à ce qu’ils disparaissent parce que ces personnes ne paient aucune taxe, aucun impôt », confie le directeur-projets de Canal+Horizons en annonçant que les jours à venir, un communiqué de presse précisera les noms de tous les distributeurs agréés. Selon lui, les individus appréhendés mercredi lors des descentes musclées ont été déférés au parquet général, hier. Et, l’affaire est en instruction. Concernant le coût réel du manque à gagner lié à la fraude sur les décodeurs, M. Longévile dit ne pas avoir en sa possession les chiffres exacts. Cependant, il affirme que sa société subie un préjudice estimé à plusieurs centaines de millions Fcfa. «Pour endiguer le mal, nous avons mis en place une politique de prix accessible à tout le monde. Nous avons conçu des packs d’abonnements. Les prix varient en fonction du choix des programmes. Il y a cinq types d’abonnement à savoir : Evasion ; Premium ; Premium plus ; Prestige, Excellence. Les prix varient entre 7 .000Fcfa et 22.500Fcfa. En plus, nous organisons des campagnes de promotion où les prix des abonnements sont réduits », explique M. Longévile convaincu que la nouvelle politique de prix adoptée par Canal+Horizons est accessible à toutes les bourses.
Ouattara Moussa
N.B : Nous avons changé les noms des revendeurs pour préserver leur sécurité.