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Politique Publié le vendredi 27 août 2010 | Nord-Sud

Campagne pour le maintien du flou : Une presse qui menace le 31 octobre

© Nord-Sud Par DR
Sortie de crise: les accords politiques de Ouagadougou mis à rude épreuve
Photo d`archives. Photo d`archives. Passation de charges à la Commission électorale indépendante (CEI) entre l`ancien président, Robert Mambé Beugré et le nouveau, Youssouf Bakayoko (photo)
Aussi curieux que cela puisse paraître, le journal proche du parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci), le Nouveau Réveil de Denis Kah Zion, s’est attaqué à Nord-Sud Quotidien. Nous avons eu le malheur de demander à la Commission électorale indépendante (Cei) de hâter le pas vers le 31 octobre, date officielle du premier tour de la présidentielle.

Incroyable mais vrai ! Dans une Côte d’Ivoire sous perfusion, avec une population à bout de souffle, alors que tous les leaders politiques crient à tue-tête qu’ils sont pressés d’aller à l’élection présidentielle, il est interdit de demander à la Commission électorale indépendante (Cei) d’accélérer la cadence pour satisfaire cette aspiration nationale légitime. L’interdiction n’a pas été décrétée par le pouvoir politique, encore moins le judiciaire. Elle émane de la presse. Plus précisément du Nouveau Réveil (ou Réveil nouveau, peut-être). La sentence s’est abattue lourdement sur Nord-Sud Quotidien qui a osé exiger de Youssouf Bakayoko, ci-devant président de la Cei, d’informer les Ivoiriens sur ce qu’il entreprenait pour le respect de l’échéance du 31 octobre, date retenue pour le premier tour de l’élection présidentielle. Dans son édition d’hier, ce journal a écrit ces lignes: « Dans ce registre (ndlr, attaques contre le président de la Cei), un journal s’illustre de façon toute particulière, Nord-Sud Quotidien de Méité Sindou, aujourd’hui porte-parole du Premier ministre, Guillaume Soro. La véhémence singulière des articles publiés par ce confrère (ndlr, sic) contre la Cei fait croire au règlement de comptes ». Inutile d’imposer au lecteur un argumentaire plus léger qu’une feuille morte.

Nous relevons seulement dans la suite de l’article, des phrases qui ont de quoi hérisser les cheveux sur la tête. Lisons : « Du côté de la Cei, l’on ne comprend pas cette attitude des collaborateurs du Premier ministre. Mais en même temps, on refuse de se laisser envahir par les émotions. La politique n’est pas un jeu d’enfants de chœur et rien, aucun acte n’est gratuit. » Quid du terme ‘’jeu’’ que nous refusons d’utiliser pour un processus qui engage la vie de la Nation et de chaque Ivoirien.

Mais, le journal a lâché le mot qu’il ne fallait pas. En toute candeur.

La Cei dans la politique

La politique. Or donc, la Cei fait de la politique, que certains pourraient qualifier de politique politicienne. Qu’écrivions-nous depuis quelques jours ? Que cette institution était empêtrée dans des conflits d’intérêts politiques, parce que sa commission centrale et son bureau sont composés de représentants des partis politiques. Basée sur le consensus, la prise de décision s’en trouve alourdie. Pis, la nouvelle équipe installée en avril ne semble pas mettre les techniciens au-devant des opérations pour une bonne planification des tâches. Elle peine à donner de la visibilité sur sa capacité à tenir les délais. En définitive, le Nouveau Réveil nous apprend que l’indépendante commission fait de la politique, alors que la seule mission qui lui est imposée est l’organisation des élections. Dont acte.

Ensuite, le journal qui s’est mué en avocat défenseur de la nonchalance de la Cei, a repris, en intégralité, l’interview que nous, avons accordée au conseiller spécial du Premier ministre, dans notre édition de mercredi. Alain Lobognon y donne des précisions sur les manquements de la Cei. Si l’intention était d’apporter la contradiction aux propos de M. Lobognon, il aurait fallu répondre point par point, avec des arguments techniques. Mais, l’interview a été plaquée, sans analyse et sans commentaire. Nous nous réjouissons de l’intérêt accordé à un entretien qui éclaire les Ivoiriens. Mais, la courtoisie aurait voulu que le journal de Denis Kah Zion, ci-devant président du Groupement des éditeurs de presse de Côte d’Ivoire (Gepci) dont Méité Sindou est l’un des membres-fondateurs, demande au moins notre accord. Nous lui en faisons grâce. Enfin, sans doute faut-il rappeler à ceux en qui brûle aujourd’hui d’un amour intense pour Youssouf Bakayoko, les conditions de la nomination de celui-ci. Pour sortir le processus de paix du bourbier dans lequel l’avait plongé la double dissolution (Cei et Gouvernement), le Premier ministre s’était mis à la recherche du candidat du consensus pour remplacer Robert Beugré Mambé à la tête de la Cei.

Comment Bakayoko est arrivé à la Cei


Ce dernier devait être membre du Pdci comme l’ancien président. Guillaume Soro y consacra les journées des 16, 17 et 18 avril. Sur sa tablette, Essy Amara, ancien ministre des Affaires étrangères, Réné Amani, ancien ministre de la Défense et Youssouf Bakayoko. Les deux premiers ont décliné l’offre, pour des raisons personnelles. Soro a obtenu le consensus autour du nom de son ancien ministre des Affaires étrangères. Même si ce dernier n’était pas le candidat du Pdci, il a finalement été nommé. De son parti et du journal qui lui est proche, il a reçu un soutien du bout des lèvres. Les écrits sont là pour l’attester. D’où vient-il que le même Youssouf Bakayoko devienne aujourd’hui un fétiche ? Si Guillaume Soro a œuvré pour que Bakayoko soit là où il est, c’est pour organiser, dans les meilleures conditions, l’élection présidentielle. Cette mission n’est pas négociable. C’est ainsi que malgré le soutien qu’il lui a apporté par le passé, le Premier ministre n’a pas hésité à le presser pour que la Cei accouche enfin d’une date pour l’élection présidentielle. Alors que l’institution proposait une période vague aux Ivoiriens. Une fois la date fixée, il faut travailler d’arrache-pied pour la tenir. En commençant par les jalons importants qui restent. Et, c’est face aux risques de dérapage, dans le temps, que le Premier ministre a demandé à ses services de chercher à savoir ce que tramait la très indépendante Cei. Il a eu le nez creux. Car, la Cei faisait de la politique en sous-main (Selon le Nouveau Réveil) au lieu de préparer le scrutin. La preuve, pas moins de trois chronogrammes ont été distillés depuis, alors qu’une bonne planification n’en aurait livré qu’une seule aux Ivoiriens. Pis encore, la volonté de voir l’institution travailler avec ses experts pour une accélération du processus a buté sur un refus ferme de la Cei. Si Youssouf Bakayoko veut tenir l’engagement pris devant tous d’organiser vite le scrutin, il n’a pas besoin d’une campagne de presse. Il lui suffit d’apporter des réponses pratiques et hardies aux préoccupations formulées. Les Ivoiriens verront alors qui ne veut pas des élections. Toute autre alternative procèdera de ce jeu politique que certains affectionnent tant. Elle se fera sans nous.

Kesy B. Jacob
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