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Politique Publié le jeudi 16 septembre 2010 | Le Nouveau Courrier

L’importance de la libéralisation

Il est rare de mettre en relation ces deux thématiques en apparence disjointes, mais dont la considération conjointe permet facilement d’identifier des politiques propres à promouvoir la croissance et le développement. Et l’objet de mon intervention d’aujourd’hui, c’est de contribuer au débat en tentant de mettre en exergue le lien étroit qui peut exister entre la religion et le développement économique et social, en mettant en perspective des actions permettant de profiter au mieux de cette relation.
Tout d’abord, il convient de baliser le terrain à travers un minimum de définition, notamment en ce qui concerne le premier terme. Cette balise s’impose d’autant plus qu’au fil des siècles, le concept de religion a énormément évolué. Dans le contexte de cette réflexion, la religion s’entend comme un ensemble de rites, croyances généralement (mais pas forcément) théistes, basés sur des règles (éthiques ou pratiques), des symboles ou des dogmes adoptés comme conviction par une société ou un groupe d’individus. Je choisis délibérément de ne pas limiter la religion aux croyances théistes (qui postulent l’existence d’un Être Suprême) comme ce fut le cas dès l’Antiquité. Cela s’explique par le fait que ce qui m’intéresse, en rapport avec le développement que je définis comme un ensemble de transformations économiques et sociales impulsées par l’action, c’est certainement l’aspect des convictions qui régissent les comportements des groupes d’individus concernés.
Cela dit, je dois également avouer que l’idée de rapprocher ces deux thèmes, outre ma passion pour le progrès de l’Afrique, m’est venue en lisant l’ouvrage rédigé par Xavier Couplet et Daniel Heuchenne en 1998 intitulé «Religions et développement» (aux éditions Economica). Dans leur démarche, les auteurs ont découvert qu’en moyenne, «un juif, un confucianiste ou un protestant produit 3 fois plus qu'un catholique, 8 fois plus qu'un orthodoxe, 14 fois plus qu'un musulman et 20 à 30 fois plus qu'un bouddhiste, un animiste ou un hindou». Toutefois, selon ces spécialistes, la relation n'est pas aussi simple en raison des multiples dimensions (économique, mais aussi politique, sociale...) du développement. Cette relation, si elle existe, s’exprimerait à travers les préceptes à caractère économique (comme par exemple l'interdit du prêt), les pratiques affectant les comportements démographiques ou de consommation (le jeûne) et les concepts «qui forgent la mentalité profonde des individus ».
Mais de mon point de vue, il est un aspect de la religion ou de sa pratique qui est d’une importance capitale pour les questions de développement. Il s’agit de la capacité d’une religion à favoriser le « vivre ensemble » dans un Etat multi-communautaire. Car avant même de mettre en action les avantages ou les inconvénients inhérents aux convictions censées formater les comportements des adeptes, il faut que la religion en question soit compatible avec l’idée de la démocratie contemporaine. Pour illustrer mon propos, je veux ramener chacun aux multiples affrontements interreligieux qui ont émaillé la période récente dans plusieurs pays africains. Au Nigeria, en Guinée, et même en Côte d’Ivoire où, après environ 40 ans de tolérance mutuelle, l’entrée en politique de certaines personnalités s’est faite au prix de l’instauration d’un désamour imaginaire entre chrétiens et musulmans.
On l’aura compris, l’impact (positif ou négatif) de la religion sur l’objectif de développement d’une nation dépend, en premier lieu, de la capacité des différentes croyances à cohabiter intelligemment dans le cadre d’une démocratie. Et cela est une question existentielle.
Mais bien plus, tant que les religions ne seront pas parvenues à se tolérer, en plaçant le bien-être des individus et le bien-être social avant leur recherche d’hégémonie, leur expansion sera un frein au développement.
C’est pourquoi, à mon humble avis, dans tous les pays du monde, et en particulier en Afrique, la religion devrait se mettre au service du développement, c’est-à-dire de l’amélioration des conditions de vie des populations. Pour ce faire, et comme l’appartenance à une religion doit d’abord être perçue comme un déterminant du bien-être individuel et collectif, il est nécessaire d’en libéraliser la pratique.
Je m’explique : aucune religion ne devrait être promue par un Etat à la situation de monopole, et chaque citoyen de tout pays devrait avoir la latitude de choisir librement les croyances auxquelles il souhaite adhérer, pourvu que celles-ci soient compatibles avec les règles de l’Etat. Ce faisant, on s’assure non seulement que les communautés religieuses cohabitent naturellement, mais surtout, on instaure une certaine concurrence émulative entre les croyances, de sorte qu’il ne peut qu’y avoir convergence vers des convictions et des pratiques efficaces du point de vue du développement. Dans ces conditions, si l’on aboutit à un monopole, ce sera alors un monopole naturel, dans lequel aucun des individus ne se sent contraint religieusement.

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