Sauf changement de dernière minute, c’est en principe le 31 octobre prochain (dans 45 jours) que les Ivoiriens éliront leur nouveau président. La fixation de cette date, après plusieurs échecs, ne laisse pas le secteur privé indifférent, chez qui, l’espoir semble renaître.
Un nouveau vent plein d’espoir semble souffler sur le secteur privé ivoirien. Ce qui présage certainement la fin de la mauvaise conjoncture et de l’immobilisme économique dans lesquels la Côte d’Ivoire végète depuis le déclenchement de la crise militaro-politique de septembre 2002. Toute chose ayant conduit au déclassement géopolitique et économique du pays. Avec des indicateurs en constante régression. Le secteur privé ne fonctionne plus de façon optimale dans un environnement devenu délétère. Selon les chiffres de la Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire (Cgeci), les investissements privés qui représentaient 15% du Pib en 1980, ne sont plus que de 7% en 2008. Une tendance régressive qui affecte également les investissements publics qui ne représentent plus que 3% du Pib contre 13% en 1980. Conséquences : plusieurs activités ont enregistré des pertes de compétitivité tragiques au plan international.
Renouer avec la sous-région
L’appareil productif veut tourner rapidement cette triste page de son histoire. Et la fixation de la date des élections présidentielles au 31 octobre prochain est, selon les dirigeants d’entreprises, le signe d’une reprise progressive. Ils se trouvent désormais dans un nouvel état d’esprit, marqué par une préparation tous azimuts afin d’attaquer de façon efficiente la relance économique et repositionner la Côte d’Ivoire dans l’économie sous-régionale et régionale. Elu depuis mardi à Abidjan, à la tête de la Fédération des organisations patronales de l’Afrique de l’ouest (Fopao), Jean Kacou Diagou, président de la Cgeci estime que les opérateurs économiques ont le droit d’espérer et d’être confiants. «C’est l’espoir que nous avons afin que ces élections puissent avoir lieu à la bonne date. Je crois qu’à 45 jours des échéances, nous pouvons tenir ce pari. Le président l’a dit : les cartes d’électeur et les cartes d’identité sont déjà imprimées. Je crois que, sur le plan technique, il n’y a pas de problème. C’est plutôt aux politiciens de s’approprier cette date-là», souligne le président du patronat ivoirien. Estimant que son élection à la Fopao est la preuve que l’économie ivoirienne peut rebondir très rapidement, si bien évidemment la situation sociopolitique retrouve la normalité avec les joutes présidentielles en perspective. Le premier responsable du groupe Nsia est plus critique sur les trente premières années d’indépendance des économies de la sous-région et notamment celle de la Côte d’Ivoire. Une période qui s’est caractérisée par la prédominance du politique sur l’économique. Mais aussi, par l’adoption d’un modèle économique où l’Etat est le seul créateur d’emplois et de richesse. Un système fondé sur l’apport massif de capitaux extérieurs qui n’a cependant pas permis le développement des Etats. C’est justement pour mettre le politique face à ses responsabilités que le patronat a initié, depuis 2009, des rencontres de «vérités» avec les principaux candidats à l’élection présidentielle. Si les quatre candidats et membres du Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp) et le leader du Parti ivoirien des travailleurs (Pit) sont déjà passés devant le patronat, ce n’est pas le cas pour le chef de l’Etat. Mais en attendant, les grands employeurs espèrent voir un environnement beaucoup plus favorable aux affaires, une fois que le nouveau président ivoirien sortira des urnes. Ce sentiment est partagé par la Fédération nationale des industries et services de Côte d’Ivoire (Fnisci). Le président de cette structure Joseph Désiré Bilé explique que l’économie nationale accuse un recul de 10 ans du fait de l’aggravation de la crise et la pauvreté s’est accentuée dans plusieurs secteurs d’activités. «Beaucoup de pays ont profité de l’immobilisme qu’il y avait en Côte d’Ivoire. Par exemple au Mali et au Burkina, il y a des choses qui se développent et dont nous ne pouvons pas bénéficier parce que nous sommes sous embargo», déplore-t-il. Avant de préciser que tous les programmes de reconstruction et de relance économique sont rédigés. Les hommes et les compétences sont également sur place. Pour M. Bilé, il ne reste plus qu’aux politiciens de laisser le temps aux opérateurs économiques de les mettre en œuvre. De son point de vue, l’organisation des élections va certainement booster l’ouverture véritable du marché. Un nouveau contexte qui va donner lieu à la reprise des investissements et permettre de créer de nouveaux emplois.
Des réformes courageuses
Dans ces conditions, les opérateurs économiques n’auront plus besoin forcément de l’Etat pour faire face à la concurrence. Toutes les entreprises devront donc se battre. La tutelle estime, pour sa part, que la tenue des élections pour le 31 octobre, loin d’être la fin de tous les problèmes du secteur privé, peut être considérée comme un indicateur. «Nous espérons que le 31 octobre sera la bonne date. Mais, c’est surtout une indication au secteur privé pour bien montrer que les autorités politiques ont finalement décidé de faire le break pour créer un environnement dans lequel les entreprises vont évoluer définitivement», argumente Moussa Dosso, ministre de l’Industrie et de la promotion du secteur privé. C’est vrai que les Ivoiriens attendent tous les élections, laisse-t-il entendre, mais le secteur privé doit être prêt pour la sortie de crise. Une chose extrêmement importante aux yeux du ministre qui reconnaît qu’il faut corriger certains dysfonctionnements et engager des réformes hardies. «Notre propre environnement réglementaire doit être revu. Il faut qu’on puisse s’engager courageusement à réformer l’ensemble des différents codes. Il s’agit du code des investissements, des télécoms, du code minier... Les propositions visant à alléger la fiscalité ne me semblent pas de nature à donner un véritable coup de démarrage particulièrement aux petites et moyennes entreprises», fait remarquer Moussa Dosso. Pour lui, les entreprises ivoiriennes présentent encore de nombreuses faiblesses et méconnaissent souvent le contenu de certains dossiers notamment les Accords de partenariat économique (Ape) et le Programme de remise à niveau des industries sous-régionales. Concernant ce programme, il regrette que ce soient seulement quatre entreprises ivoiriennes qui ont été primées à Ouagadougou. Un chiffre insignifiant eu égard à la taille du secteur privé ivoirien. Un des projets sur lequel le ministre de l’Industrie entend insister, reste le Doing business (qui mesure la réglementation des affaires dans 183 pays). «Il faut aussi améliorer la création des entreprises. Je n’ai vraiment pas bien compris pourquoi on met autant de temps à créer des entreprises en Côte d’Ivoire. Il faut créer des guichets uniques pour aller vite», propose-t-il. A l’en croire, son département attend toujours les conclusions du séminaire de Yamoussoukro sur Côte d’Ivoire 2040 initié par le patronat. «C’est un programme ambitieux qui va donner les moyens au secteur privé mais surtout de partager avec les autorités politiques, une vision que les entreprises ont souhaitée et qui est totalement en phase avec les ministères techniques donc avec le gouvernement», conclut le patron de l’industrie.
Cissé Cheick Ely
Un nouveau vent plein d’espoir semble souffler sur le secteur privé ivoirien. Ce qui présage certainement la fin de la mauvaise conjoncture et de l’immobilisme économique dans lesquels la Côte d’Ivoire végète depuis le déclenchement de la crise militaro-politique de septembre 2002. Toute chose ayant conduit au déclassement géopolitique et économique du pays. Avec des indicateurs en constante régression. Le secteur privé ne fonctionne plus de façon optimale dans un environnement devenu délétère. Selon les chiffres de la Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire (Cgeci), les investissements privés qui représentaient 15% du Pib en 1980, ne sont plus que de 7% en 2008. Une tendance régressive qui affecte également les investissements publics qui ne représentent plus que 3% du Pib contre 13% en 1980. Conséquences : plusieurs activités ont enregistré des pertes de compétitivité tragiques au plan international.
Renouer avec la sous-région
L’appareil productif veut tourner rapidement cette triste page de son histoire. Et la fixation de la date des élections présidentielles au 31 octobre prochain est, selon les dirigeants d’entreprises, le signe d’une reprise progressive. Ils se trouvent désormais dans un nouvel état d’esprit, marqué par une préparation tous azimuts afin d’attaquer de façon efficiente la relance économique et repositionner la Côte d’Ivoire dans l’économie sous-régionale et régionale. Elu depuis mardi à Abidjan, à la tête de la Fédération des organisations patronales de l’Afrique de l’ouest (Fopao), Jean Kacou Diagou, président de la Cgeci estime que les opérateurs économiques ont le droit d’espérer et d’être confiants. «C’est l’espoir que nous avons afin que ces élections puissent avoir lieu à la bonne date. Je crois qu’à 45 jours des échéances, nous pouvons tenir ce pari. Le président l’a dit : les cartes d’électeur et les cartes d’identité sont déjà imprimées. Je crois que, sur le plan technique, il n’y a pas de problème. C’est plutôt aux politiciens de s’approprier cette date-là», souligne le président du patronat ivoirien. Estimant que son élection à la Fopao est la preuve que l’économie ivoirienne peut rebondir très rapidement, si bien évidemment la situation sociopolitique retrouve la normalité avec les joutes présidentielles en perspective. Le premier responsable du groupe Nsia est plus critique sur les trente premières années d’indépendance des économies de la sous-région et notamment celle de la Côte d’Ivoire. Une période qui s’est caractérisée par la prédominance du politique sur l’économique. Mais aussi, par l’adoption d’un modèle économique où l’Etat est le seul créateur d’emplois et de richesse. Un système fondé sur l’apport massif de capitaux extérieurs qui n’a cependant pas permis le développement des Etats. C’est justement pour mettre le politique face à ses responsabilités que le patronat a initié, depuis 2009, des rencontres de «vérités» avec les principaux candidats à l’élection présidentielle. Si les quatre candidats et membres du Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp) et le leader du Parti ivoirien des travailleurs (Pit) sont déjà passés devant le patronat, ce n’est pas le cas pour le chef de l’Etat. Mais en attendant, les grands employeurs espèrent voir un environnement beaucoup plus favorable aux affaires, une fois que le nouveau président ivoirien sortira des urnes. Ce sentiment est partagé par la Fédération nationale des industries et services de Côte d’Ivoire (Fnisci). Le président de cette structure Joseph Désiré Bilé explique que l’économie nationale accuse un recul de 10 ans du fait de l’aggravation de la crise et la pauvreté s’est accentuée dans plusieurs secteurs d’activités. «Beaucoup de pays ont profité de l’immobilisme qu’il y avait en Côte d’Ivoire. Par exemple au Mali et au Burkina, il y a des choses qui se développent et dont nous ne pouvons pas bénéficier parce que nous sommes sous embargo», déplore-t-il. Avant de préciser que tous les programmes de reconstruction et de relance économique sont rédigés. Les hommes et les compétences sont également sur place. Pour M. Bilé, il ne reste plus qu’aux politiciens de laisser le temps aux opérateurs économiques de les mettre en œuvre. De son point de vue, l’organisation des élections va certainement booster l’ouverture véritable du marché. Un nouveau contexte qui va donner lieu à la reprise des investissements et permettre de créer de nouveaux emplois.
Des réformes courageuses
Dans ces conditions, les opérateurs économiques n’auront plus besoin forcément de l’Etat pour faire face à la concurrence. Toutes les entreprises devront donc se battre. La tutelle estime, pour sa part, que la tenue des élections pour le 31 octobre, loin d’être la fin de tous les problèmes du secteur privé, peut être considérée comme un indicateur. «Nous espérons que le 31 octobre sera la bonne date. Mais, c’est surtout une indication au secteur privé pour bien montrer que les autorités politiques ont finalement décidé de faire le break pour créer un environnement dans lequel les entreprises vont évoluer définitivement», argumente Moussa Dosso, ministre de l’Industrie et de la promotion du secteur privé. C’est vrai que les Ivoiriens attendent tous les élections, laisse-t-il entendre, mais le secteur privé doit être prêt pour la sortie de crise. Une chose extrêmement importante aux yeux du ministre qui reconnaît qu’il faut corriger certains dysfonctionnements et engager des réformes hardies. «Notre propre environnement réglementaire doit être revu. Il faut qu’on puisse s’engager courageusement à réformer l’ensemble des différents codes. Il s’agit du code des investissements, des télécoms, du code minier... Les propositions visant à alléger la fiscalité ne me semblent pas de nature à donner un véritable coup de démarrage particulièrement aux petites et moyennes entreprises», fait remarquer Moussa Dosso. Pour lui, les entreprises ivoiriennes présentent encore de nombreuses faiblesses et méconnaissent souvent le contenu de certains dossiers notamment les Accords de partenariat économique (Ape) et le Programme de remise à niveau des industries sous-régionales. Concernant ce programme, il regrette que ce soient seulement quatre entreprises ivoiriennes qui ont été primées à Ouagadougou. Un chiffre insignifiant eu égard à la taille du secteur privé ivoirien. Un des projets sur lequel le ministre de l’Industrie entend insister, reste le Doing business (qui mesure la réglementation des affaires dans 183 pays). «Il faut aussi améliorer la création des entreprises. Je n’ai vraiment pas bien compris pourquoi on met autant de temps à créer des entreprises en Côte d’Ivoire. Il faut créer des guichets uniques pour aller vite», propose-t-il. A l’en croire, son département attend toujours les conclusions du séminaire de Yamoussoukro sur Côte d’Ivoire 2040 initié par le patronat. «C’est un programme ambitieux qui va donner les moyens au secteur privé mais surtout de partager avec les autorités politiques, une vision que les entreprises ont souhaitée et qui est totalement en phase avec les ministères techniques donc avec le gouvernement», conclut le patron de l’industrie.
Cissé Cheick Ely