x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Faits Divers Publié le mercredi 22 septembre 2010 | Nord-Sud

Escroquerie, charlatanisme…: Comment le faux maraboutage conduit en prison

Abidjan est devenu la plaque tournante du vaste réseau de faux marabouts qui vivent d’escroquerie. Nous avons approché quelques victimes qui nous racontent leurs mésaventures.

Son dernier coup fourré remonte au 3 août dernier. Sanou Amidou, 37 ans, est marabout à Abobo-Centre ; il a juré sur son chapelet avant de flouer K. D., 41 ans, un acheteur de produits. Sanou lui a vendu 1 kilogramme d’or dont il n’est jamais entré en possession. Pour mener à bien son affaire, le marabout change d’identité et se fait appeler Kouakou Mathias. K.D., naïf qu’il est, tombe aussitôt dans le panneau. «Il m’a expliqué au téléphone qu’il travaille dans une mine d’or à Séguéla et qu’il a 1 kg d’or en sa possession. Il m’a dit qu’avant, il vendait son or à une dame installée maintenant en France. Mais cette dernière lui a laissé le numéro d’un certain Jean-Pierre, son client», raconte l’acheteur dupé. «Il m’a dit qu’il était effectivement disposé à payer l’or à 15.000 FCFA le gramme. J’ai rendu compte à Kouakou Mathias, qui a indiqué qu’il me fera parvenir l’or par l’intermédiaire d’un certain Siriki», souligne la victime. Selon elle, il devait vendre le minerai à Jean-Pierre à raison de 15.000 FCFA/g. Ce qui représentait en tout 15.000.000 FCFA. «Kouakou Mathias m’a assuré que pour ses amis de la mine, l’or est vendu à 5.000FCFA/g. Donc, je devais remettre après la vente de 1 kg d’or, 5.000.000 FCFA à Siriki. Je devais garder le reste de l’argent, c’est-à-dire les 10.000.000 FCFA jusqu’à ce qu’il vienne à Abidjan pour qu’on fasse le partage. Mais au finish, l’or en question n’était pas du vrai. En route pour le 21ème arrondissement, Siriki a prétexté une diarrhée pour descendre. Je me suis opposé et nous nous sommes retrouvés au commissariat», relate K. D.. Auparavant, en février 2010, Sanou avait utilisé la même ruse pour arnaquer T. D., 56 ans, mécanicien-garagiste à Abobo-Avocatier. Sanou lui a indiqué qu’il travaillait cette fois-ci à la mine d’or de Touba. En complicité avec un certain Devares, Sanou promet de l’or à T. D., mais il devait débourser 1.500.000 FCFA pour recevoir 30.000.000 FCFA après la vente du précieux minerai. Le coup est quasiment bien ficelé par Sanou puisque le mécanicien décide de donner, dans un premier temps, 700.000FCFA à un jeune homme qui était l’envoyé du marabout. «Séance tenante, un homme qui se présente comme un membre du CCI, (Ndlr : Centre de commandement intégré), m’appelle pour me menacer. Il m’a dit que c’est avec ma complicité que ses travailleurs volent son or et que, dans tous les cas, ils connaissent où je travaille et que si je ne leur fais pas un transfert de 800.000FCFA, ils s’en prendraient à moi», raconte-t-il. Pris de peur-panique, T. D. va exécuter à la lettre la demande de son interlocuteur. «J’ai obéi et remis les 800.000FCFA à l’un de leurs chauffeurs qui vient d’Abengourou. Nous nous sommes retrouvés à N’dotré, où j’ai donné l’argent main à main», précise le mécano. La troisième et dernière victime du sulfureux marabout se nomme D. M., 37 ans, commerçant.

Des histoires à dormir debout et…

Sanou s’est présenté à lui, courant novembre 2009, sous l’identité de Koné qui souhaitait lui faire parvenir 0,5kg d’or par l’entremise d’un certain Zongo, qui devait le livrer à un homme nommé Le Blanc. «Il m’a demandé de lui faire un virement bancaire de 250.000 FCFA. Je lui ai dit que je n’avais pas cette somme mais plutôt 175.000 FCFA. Je lui ai envoyé cet argent par une agence de transfert d’argent», rapporte-t-il devant l’officier de police du 21ème arrondissement. Les choses vont tourner court deux jours plus tard quand Zongo présente à D. M., au PK18, un sachet contenant «l’or en question». «Le Blanc n’appelant pas, Zongo est retourné avec l’or. Koné m’a appelé, il voulait que je lui expédie 250.000 FCFA encore. Je lui ai dit que je n’avais plus d’argent. Il m’a demandé alors de lui faire un transfert d’unités. J’en ai fait pour 75.000 FCFA qu’il devait convertir en argent pour venir lui-même s’occuper de la vente de l’or», renseigne-t-il. Cependant, Koné ne viendra pas au rendez-vous. Pis, il ordonne à sa victime de lui envoyer «encore 250.000FCFA». D. M. se démène pour expédier finalement 120.000 FCFA à son «invisible fournisseur d’or». En fin de compte, il est roulé dans la farine. «J’ai demandé dès cet instant à Koné ce qui se passe vu que je ne voyais plus Zongo, ni l’or et que je devais tout le temps faire des transferts. Depuis ce jour, tous leurs contacts ont été coupés», ajoute le commerçant. Toutefois, D. M. parviendra à mettre la main sur «celui qui se faisait passer pour Koné, c’est-à-dire Sanou Amidou». Il est venu se livrer, sans le savoir, aux mains du commerçant au quartier Dokui. Le tribunal des flagrants délits du Plateau a mis fin au parcours retors du marabout. Il a pris 5 ans fermes avec une amende de 100.000FCFA pour escroquerie et tentatives d’escroquerie portant sur un montant de 1.895.000FCFA.

Autre lieu, même histoire de maraboutage. Diomandé Mamadou, né le 4 mai à Séguéla, n’est pas un enfant de chœur. Il a soutiré la somme de 780.000Fcfa à son tuteur en lui promettant monts et merveilles. Pour comprendre ce qui s’est passé, il faut remonter au 11 juin 2010. Ce jour-là, à la faveur de la Coupe du monde de football, S. T.-le tuteur du marabout- devise avec ses collègues chauffeurs à la gare routière d’Adjamé. Le sujet de la conversation est le match France-Uruguay qui venait de prendre fin par un nul (1-1). « Il était presque 21h. Un individu m’a interpellé. Il m’a dit qu’il me connaissait. J’étais surpris. Il s’est présenté sous le nom de Koné. Selon lui, il est marabout. Et cela fait deux jours qu’il est arrivé du Burkina pour rencontrer l’un de ses clients qui devait lui remettre de l’argent. Selon lui, il avait fait un travail pour ce dernier. Donc, il était venu prendre sa récompense. Mais le client en question avait disparu. Il m’a dit que cela faisait deux jours qu’il n’avait pas mangé », nous explique S. T.. Le chauffeur de 33 ans, employé par une compagnie de Transport , fait le trajet Abidjan-Dabou. Il habite Gesco (Yopougon) et travaille à la nouvelle gare routière, à Adjamé. Pris de pitié, S. T. lui offre le couvert et le gîte. « J’ai accepté de l’héberger chez moi. On lui a accordé toute l’attention. Ce même jour, vers 3 h, après une séance de prière, il m’a réveillé pour m’exposer une série de problèmes. Je devais faire des sacrifices pour attirer l’abondance. Il a réclamé la somme de 300 mille Fcfa que je lui ai remise, affirme le transporteur. L’argent, poursuit-il, devait servir à l’achat de mouton et d’autres artifices au Burkina Faso ».

Plusieurs millions Fcfa pompés

Selon Koné, il était capable de fructifier les affaires de son tuteur. « Il m’a remis un bidon contenant une eau parfumée. Je devais suivre le traitement durant 45 jours. En fait, il m’avait hypnotisé et je ne faisais qu’obéir à ses consignes », soutient S. T., en ajoutant qu’il a remis en tout la somme de 780 mille Fcfa à Koné Mamadou. Ce dernier lui aurait indiqué que le car qui le transportait à son retour au Burkina a fait un accident entre Ouangolodougou et Ferké et qu’il y aurait eu 15 morts et plusieurs blessés. En réalité, Mamadou avait monté ce scénario pour tromper la vigilance de son tuteur afin de lui soutirer encore de l’argent. « Il m’a dit qu’on devait reprendre les sacrifices. Pour cela, il a exigé la somme de 80 mille Fcfa. C’est ainsi que je lui ai tendu une souricière », raconte le chauffeur de 33 ans, en précisant qu’il s’est rendu au commissariat de police du 27ème arrondissement, pour le dénoncer. Koné Mamadou est donc cueilli, lundi, à la gare routière par des flics. Il est mis en garde-à-vue et accusé d’escroquerie portant sur la somme de 780 mille Fcfa. Selon le plaignant, il réclame le remboursement de son argent. Accusé de charlatanisme et d’escroquerie, Mamadou est jugé et reconnu coupable des faits mis à sa charge par le tribunal des flagrants délits du Plateau. Il est condamné à douze mois de prison. Une fois libre, il doit verser la somme de 780 mille Fcfa à la victime qui s’est constituée partie civile.

Une enquête de Bahi K.
PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Titrologie

Toutes les vidéos Titrologie à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ