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Société Publié le jeudi 7 juillet 2011 | Le Patriote

Interview / Pr Flavien Traoré (porte-parole de la CNEC) : “Si les travaux de réhabilitation tardent, ce sera l`année blanche”

Pour le porte-parole de la Coordination Nationale des Enseignants du Supérieur et Chercheur de Côte d'Ivoire (CNEC) le Pr. Flavien Traoré, si les travaux de réhabilitation traînent, la Côte d'Ivoire ne sera pas à l'abri d'une année blanche. Entretien
Le Patriote : Cela fait plus de deux mois que les universités d'Abidjan sont fermées. L'année académique peut-elle encore être sauvée ?

Pr. Flavien Traoré : Pour que l'année puisse être sauvée, il faut fixer une date de rentrée. Or, jusqu'à présent, nous n'avons pas encore cette date. Si elle est fixée, les Unités de Formation et de Recherche (UFR) qui sont suffisamment avancées dans leurs programmes finiront probablement l'année. Celles qui en sont incapables, peuvent faire le maximum d'unités de valeur (UV) possibles. Par contre, pour les UFR qui sont dans une situation telle qu'elles ne peuvent pas sauver l'année, je pense qu'il est sage de déclarer l'année blanche. Ce, pour repartir sur une nouvelle base. Mais ce que nous souhaitons, c'est que toutes les universités, toutes les UFR, commencent la rentrée au même moment.

L.P. : Qui doit fixer la date de la rentrée ?
Pr. F.T. C'est le ministre de l'Enseignent supérieur et de la Recherche scientifique, en collaboration avec les présidents d'universités et les directeurs généraux des grandes écoles publiques. Cette date ne peut être fixée qu'après un certain nombre de travaux minimum à réaliser.

L.P. : Lesquels ?
Pr. F.T. : Les portes des bureaux des enseignants ont été fracturées et pillées, les climatiseurs et matériels informatiques volés. Je n'oublie pas le manque de matériels didactiques. Donc, il faut des travaux minimum pour que les enseignants puissent réintégrer leurs bureaux. Même s'ils sont réintégrés et qu'il n'y a pas d'Administration minimum, il est difficile de reprendre les cours. La rentrée pourrait être fixée à condition que ces travaux minimum soient faits. Il faut rendre les bureaux des enseignants habitables. S'ils ne sont pas fonctionnels, on ne peut avoir les enseignants sur le campus à plus forte raison, parler de démarrage des cours.

LP : Décréter une année blanche arrange t-elle aujourd'hui la Côte d'Ivoire ?
Pr.F.T : Il faut reconnaître d'abord qu'il y a eu une grave crise postélectorale qui a chamboulé tous les secteurs d'activités du pays. Et celui de l'enseignement supérieur y a payé un lourd tribut. Les universités d'Abidjan ont été pillées et saccagées. Nous devons voir si le temps qui nous reste peut permettre de valider les diplômes. Si on réalise qu'il ne nous reste pas assez de temps pour valider les diplômes, qu'on ne se gêne pas. On déclare purement et simplement une année blanche. Ce n'est pas une question d'arranger le pays ou pas. Une année blanche est comme un redoublement pour un étudiant. Alors que redoubler ou reprendre une année n'est pas aussi grave que ça. Le chevauchement des années académiques n'arrangent pas également les choses. Ça crée une certaine tension. Qu'on ne se voile pas la face, nos universités ont été confrontées à d'énormes difficultés. Avec le chevauchement des années académiques aujourd'hui, nos diplômes ne sont pas reconnus à l'extérieur. Par exemple, si vous avez un DEA en Côte d'Ivoire, lorsque vous allez à l'extérieur on vous fait reprendre le DEA. La menace d'une année blanche ne doit pas être une psychose. On arrête tout et on repart sur de nouvelles bases. Pourvu qu'on règle tous les problèmes liés à cet ordre d'enseignement. En réalité, ce sont les étudiants et parents d'élèves qui s'alarment. Qu'ils sachent que si d'aventure cela advienne, qu'il considère que c'est un redoublement. Le Sénégal a connu deux années blanches.

L.P. : Selon vous qu'est-ce qui explique le non démarrage des travaux de réhabilitation?
Pr. F.T. : Difficile de répondre. Je pense que le gouvernement est mieux placé pour donner une réponse à cette interrogation. A ma connaissance, une évaluation a été faite par le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Construction, de l'Assainissement et de l'Urbanisme. Mais, il faut reconnaître que les travaux n'ont pas encore commencé. Certainement que le gouvernement attend que lui soit communiqué un budget final afin qu'il procède à un décaissement. Pour aller plus vite, il faut commencer par les travaux minimum, qui se limitent aux portes, fenêtres, à la climatisation, l'électricité, et à la cuvette de W.C. Ce pour que les enseignants puissent réintégrer leurs bureaux et relancer la machine. Et à moyen terme, on pourra réhabiliter bâtiment par bâtiment. Si on veut tout réhabiliter en même temps, j'ai bien peur qu'on ait encore une année, pour le faire. Parce que les dégâts ont été énormes à l'Université d'Abobo-Adjamé.

L.P. : Qu'adviendra t-il si ces travaux tardent encore ?
Pr. F.T. : On ira inéluctablement vers une année blanche. Mais, il faut faire la part des choses. L'université peut commencer, c'est-à-dire qu'on peut avoir une administration minimum, les enseignants peuvent regagner leurs locaux et on peut reprendre les cours. Et plus tard, on verra le cas des résidences universitaires. C'est vrai qu'il y a la question des étudiants handicapés qui est quand même douloureuse. Mais, en dehors de ça, les cités universitaires ne peuvent abriter plus de 30 % des étudiants. Si on veut vraiment sauver l'année académique, pour les questions d'infrastructures il faut procéder à des réparations minimum. On peut trouver par exemple des tentes de l'Onuci qui sont très vastes et qui peuvent servir d'amphis, pour les salles de TD et TP. On pourrait par exemple penser à des préfabriqués dans un premier temps. Pour les matériels didactiques, on peut s'adresser à des partenaires extérieurs pour équiper les différents laboratoires. Cela dit, il faut aussi penser à la satisfaction de toutes nos revendications.

LP : Vous êtes, semble t-il, confrontés à sérieuses difficultés…
P.F.T: Effectivement, nos salaires ne sont pas payés tôt à la fin des mois. Des efforts ont été faits pendant les deux derniers mois, on espère que cela va se poursuivre. Les primes de recherche de décembre 2010 n'ont pas encore été payées alors que nous sommes en juin 2011 et qu'il faut encore payer une autre prime. Les glissements catégoriels ne sont pas exclus. Depuis 2000, certains ont changé de grade, mais ils n'ont pas encore perçu leurs nouveaux salaires. Il y a également la question des heures complémentaires qui n'est pas réglée de façon rationnelle. Tous ces problèmes doivent en principe être bien réglés pour éviter qu'il y ait des mécontentements pouvant entraîner les perturbations des cours. Nous souhaitons ensuite qu'une commission puisse être mise en place pour étudier les possibilités de règlement de ces problèmes à partir d'un chronogramme bien établi. Si ce chronogramme est respecté je pense que du côté des enseignants, il n'y aura pas de problèmes. Pour les étudiants, il faut également voir s'il n'y a pas d'arriérés de bourses. En fait, une commission spéciale doit statuer sur ces problèmes pour qu'on ne retombe plus dans les erreurs du passé, avec en prime des arrêts de cours répétés. Le fait que le Président Ouattara accède à la Magistrature Suprême, est un espoir pour la Côte d'Ivoire. Je souhaite vivement que ce soit un espoir pour l'enseignement supérieur et la recherche scientifique qui dans tous les pays surtout ceux dits émergeants est le fer de lance du développement économique, social et culturel.

Réalisée par Anzoumana Cissé
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