criminels? Tandis que la bande sahélo- saharienne est devenue le « terrain de jeu » favori des islamistes radicaux, les côtes du golfe de Guinée sont de plus en plus écumées par des pirates.
L’axe du crime organisé qui partait de l’Erythrée à la Somalie en passant par Djibouti, est aujourd’hui en concurrence avec un autre qui longe le Golfe de Guinée depuis Lagos au Nigeria jusqu’aux côtes ivoiriennes. Et qui inclue certains pays de l’hinterland notamment le Mali, le Niger et leur grand voisin l’Algérie ; pays avec lequel ces deux pays sahéliens partagent plusieurs centaines de kilomètres de frontières. Après avoir momentanément délaissé le Sahara algérien, leur base arrière pendant de longues années, c’est dans le vaste désert au nord du Mali et du Niger que les jihadistes ont installé leur sanctuaire. Dans ce vaste territoire qui échappe au contrôle de l’administration des pays qui le bordent, les groupes organisés ont développé toutes sortes de trafics dont les plus lucratifs restent l’écoulement de la drogue, les prises d’otages et la piraterie. Plusieurs ressortissants de pays occidentaux sont depuis des années, entre les mains de ces hommes qui espèrent les échanger contre de très fortes rançons. La stratégie avait payé jusqu’à une époque récente où les puissances occidentales obtenaient la libération des otages contre des mallettes de dollars. Aujourd’hui, nombre de pays occidentaux ont compris que ces rançons ne faisaient que fructifier les activités de ces groupes et perpétuer leur existence. La libération des otages, au besoin par la force des armes, semble désormais être la solution privilégiée par nombre de pays. La France qui a opté pour cette solution, a tenté en 2011 de libérer deux de ses ressortissants enlevés à Niamey, au Niger. L’opération qui a tourné court, n’a pas empêché Paris de tenter encore en janvier dernier, toujours sans succès, la libération par la force, de l’un de ses ressortissants gardé par les shebabs somaliens. La guerre que l’armée française mène actuellement au Nord Mali, n’a pas pour seul objectif de permettre à ce pays de recouvrer son intégrité territoriale. L’opération « Serval » vise aussi à nettoyer la zone devenue le nid des hors-la-loi. Le massif des Ifoghas au Nord de Kidal que la chasse française pulvérise depuis plusieurs jours, serait le lieu de détention de nombreux otages.
Les côtes du Golfe de Guinée, une autre zone criminogène
Le Golfe de Guinée, cette sinueuse bande côtière d’un millier de kilomètres que partagent le Nigeria, le Bénin, le Togo, le Ghana et la Côte d’Ivoire, n’aura plus bientôt rien à envier au Golfe d’Aden, situé entre la Corne de l’Afrique (Somalie) et la péninsule arabique(Yémen). Cette voie navigable fréquentée par les tankers qui transportent le brut nigérian vers l’Europe et les Etats-Unis, est depuis quelques années hantée par de nombreux pirates. Jusqu’au début de ce deuxième millénaire, le phénomène était circonscrit aux larges de Cotonou, la capitale béninoise et de Lagos, la mégalopole nigériane. Attaques de navires, vols à main armée, trafics d’armes et de stupéfiants, traite d’êtres humains, étaient les activités principales de ces bandes criminelles essentiellement composées de Nigérians. Au Nigeria seulement, quelque 98 actes de piraterie ont été commis en mer entre 2008 et 2012. Le Géant de l’Afrique, qui a très vite pris la mesure du danger pour son économie essentiellement basée sur l’or noir dont il est le premier producteur africain, a renforcé la sécurité le long de ses côtes, tout comme le Bénin. Les deux voisins ont par ailleurs accru leur coopération en la matière. Résultat : les pirates de plus en plus traqués, se sont déportés vers les côtes togolaises et ivoiriennes moins sécurisées. L’attaque d’un pétrolier français le weekend dernier aux larges d’Abidjan, porte à trois le nombre de navires détournés en cinq mois dans les eaux territoriales ivoiriennes. Plusieurs raisons expliquent l’évolution du phénomène. La plupart de ces pays du Golfe de Guinée ne disposent presque pas de moyens pour combattre le fléau. Les quelques vedettes et hors-bord dont ils disposent, n’arrivent pas à venir à bout des pirates souvent lourdement armés. En plus, la région souffre d’un manque de coordination entre les gardes-côtes qui n’échangent aucune information en matière de sécurité maritime. Incapables de faire face seuls à la piraterie transfrontalière, les pays du continent sont une fois de plus obligés de se tourner vers les puissances occidentales dont les navires sont la proie de ces bandes organisées. Le 10 janvier 2013, l’Union européenne a lancé une nouvelle initiative pour lutter contre la piraterie dans le Golfe de Guinée. Le projet dont le sigle en Anglais est CRIMGO (Route maritimes critiques du Golfe de Guinée), concerne 7 Etats côtiers que sont le Bénin, le Cameroun, la Guinée Equatoriale, le Gabon, le Nigeria, São Tomé-et- Principe et le Togo. Il permettra la formation des gardes-côtes et la mise en place d’un réseau permettant l’échange d’informations entre les pays et les agences de la région. L’UE qui y participe avec une enveloppe de 2 milliards 947 millions de FCFA, ne fait pas que de la philanthropie. L’Europe voulait avant tout sécuriser la route où transitent 13% de ses importations de pétrole et 6% de son gaz. En rendant ces eaux plus sûres, l’Union européenne sécurise aussi ses importations et ses exportations dans une sous-région où la balance commerciale est largement en sa faveur. En avril prochain, 25 chefs d’Etats africains vont se donner rendez- vous à Yaoundé au Cameroun, pour réfléchir au problème et tenter d’y trouver des solutions. L’Afrique qui caracole aujourd’hui en tête des autres continents en matière de croissance économique, a tout intérêt à sécuriser ses eaux maritimes qui constituent la voie de son développement.
Charles d’Almeida
L’axe du crime organisé qui partait de l’Erythrée à la Somalie en passant par Djibouti, est aujourd’hui en concurrence avec un autre qui longe le Golfe de Guinée depuis Lagos au Nigeria jusqu’aux côtes ivoiriennes. Et qui inclue certains pays de l’hinterland notamment le Mali, le Niger et leur grand voisin l’Algérie ; pays avec lequel ces deux pays sahéliens partagent plusieurs centaines de kilomètres de frontières. Après avoir momentanément délaissé le Sahara algérien, leur base arrière pendant de longues années, c’est dans le vaste désert au nord du Mali et du Niger que les jihadistes ont installé leur sanctuaire. Dans ce vaste territoire qui échappe au contrôle de l’administration des pays qui le bordent, les groupes organisés ont développé toutes sortes de trafics dont les plus lucratifs restent l’écoulement de la drogue, les prises d’otages et la piraterie. Plusieurs ressortissants de pays occidentaux sont depuis des années, entre les mains de ces hommes qui espèrent les échanger contre de très fortes rançons. La stratégie avait payé jusqu’à une époque récente où les puissances occidentales obtenaient la libération des otages contre des mallettes de dollars. Aujourd’hui, nombre de pays occidentaux ont compris que ces rançons ne faisaient que fructifier les activités de ces groupes et perpétuer leur existence. La libération des otages, au besoin par la force des armes, semble désormais être la solution privilégiée par nombre de pays. La France qui a opté pour cette solution, a tenté en 2011 de libérer deux de ses ressortissants enlevés à Niamey, au Niger. L’opération qui a tourné court, n’a pas empêché Paris de tenter encore en janvier dernier, toujours sans succès, la libération par la force, de l’un de ses ressortissants gardé par les shebabs somaliens. La guerre que l’armée française mène actuellement au Nord Mali, n’a pas pour seul objectif de permettre à ce pays de recouvrer son intégrité territoriale. L’opération « Serval » vise aussi à nettoyer la zone devenue le nid des hors-la-loi. Le massif des Ifoghas au Nord de Kidal que la chasse française pulvérise depuis plusieurs jours, serait le lieu de détention de nombreux otages.
Les côtes du Golfe de Guinée, une autre zone criminogène
Le Golfe de Guinée, cette sinueuse bande côtière d’un millier de kilomètres que partagent le Nigeria, le Bénin, le Togo, le Ghana et la Côte d’Ivoire, n’aura plus bientôt rien à envier au Golfe d’Aden, situé entre la Corne de l’Afrique (Somalie) et la péninsule arabique(Yémen). Cette voie navigable fréquentée par les tankers qui transportent le brut nigérian vers l’Europe et les Etats-Unis, est depuis quelques années hantée par de nombreux pirates. Jusqu’au début de ce deuxième millénaire, le phénomène était circonscrit aux larges de Cotonou, la capitale béninoise et de Lagos, la mégalopole nigériane. Attaques de navires, vols à main armée, trafics d’armes et de stupéfiants, traite d’êtres humains, étaient les activités principales de ces bandes criminelles essentiellement composées de Nigérians. Au Nigeria seulement, quelque 98 actes de piraterie ont été commis en mer entre 2008 et 2012. Le Géant de l’Afrique, qui a très vite pris la mesure du danger pour son économie essentiellement basée sur l’or noir dont il est le premier producteur africain, a renforcé la sécurité le long de ses côtes, tout comme le Bénin. Les deux voisins ont par ailleurs accru leur coopération en la matière. Résultat : les pirates de plus en plus traqués, se sont déportés vers les côtes togolaises et ivoiriennes moins sécurisées. L’attaque d’un pétrolier français le weekend dernier aux larges d’Abidjan, porte à trois le nombre de navires détournés en cinq mois dans les eaux territoriales ivoiriennes. Plusieurs raisons expliquent l’évolution du phénomène. La plupart de ces pays du Golfe de Guinée ne disposent presque pas de moyens pour combattre le fléau. Les quelques vedettes et hors-bord dont ils disposent, n’arrivent pas à venir à bout des pirates souvent lourdement armés. En plus, la région souffre d’un manque de coordination entre les gardes-côtes qui n’échangent aucune information en matière de sécurité maritime. Incapables de faire face seuls à la piraterie transfrontalière, les pays du continent sont une fois de plus obligés de se tourner vers les puissances occidentales dont les navires sont la proie de ces bandes organisées. Le 10 janvier 2013, l’Union européenne a lancé une nouvelle initiative pour lutter contre la piraterie dans le Golfe de Guinée. Le projet dont le sigle en Anglais est CRIMGO (Route maritimes critiques du Golfe de Guinée), concerne 7 Etats côtiers que sont le Bénin, le Cameroun, la Guinée Equatoriale, le Gabon, le Nigeria, São Tomé-et- Principe et le Togo. Il permettra la formation des gardes-côtes et la mise en place d’un réseau permettant l’échange d’informations entre les pays et les agences de la région. L’UE qui y participe avec une enveloppe de 2 milliards 947 millions de FCFA, ne fait pas que de la philanthropie. L’Europe voulait avant tout sécuriser la route où transitent 13% de ses importations de pétrole et 6% de son gaz. En rendant ces eaux plus sûres, l’Union européenne sécurise aussi ses importations et ses exportations dans une sous-région où la balance commerciale est largement en sa faveur. En avril prochain, 25 chefs d’Etats africains vont se donner rendez- vous à Yaoundé au Cameroun, pour réfléchir au problème et tenter d’y trouver des solutions. L’Afrique qui caracole aujourd’hui en tête des autres continents en matière de croissance économique, a tout intérêt à sécuriser ses eaux maritimes qui constituent la voie de son développement.
Charles d’Almeida