Le secteur des médias bouillonne en Côte d'Ivoire depuis que le Conseil National de la Presse (CNP) de Raphaël Lakpé a fait injonction, aux entreprises de presse, de se conformer à la loi. Se prononçant sur le processus d'assainissement de ce secteur, Glodé Francelin, Secrétaire général du Syndicat autonome des agents de la presse privée de Côte d'Ivoire (SAAPPCI) exhorte les patrons de presse à œuvrer pour le bien-être de leurs employés.
Le Patriote : Le Bureau du GEPCI a rencontré récemment la ministre de la Communication pour demander à l'Etat de subventionner les journaux dès lors que les entreprises éditrices de ces titres sont désormais en règle vis- à-vis de la loi. Quelle est votre analyse face à cette exigence des patrons de presse?
Francelin Glodé : Je ne ferai pas d'analyse particulière de ces propos. Mais, je voudrais souhaiter que cela ne soit pas une échappatoire pour les patrons de presse. C'est-à-dire faire croire à l'opinion publique que les patrons de presse ne doivent pas payer correctement leurs employés parce que l'Etat ne les aide pas. C'est vrai que l'Etat de Côte d'Ivoire doit continuer les efforts qu'il a commencés depuis la création du Fonds de soutien au développement de la presse (FSDP) en décembre 2007. Mais, subordonner cela au bon fonctionnement de son entreprise, n'est pas du tout professionnel pour un chef d'entreprise. Les sociétés éditrices des journaux sont d'abord des structures privées qui fonctionnent comme telles. Donc, elles ne doivent pas attendre tout de l'Etat. En suivant le secteur de la presse depuis 2007, vous constatez avec moi que chaque année, des subventions sont accordées aux entreprises, il y a eu l'annulation d'arriérés d'impôts, l'annulation du BIC (Impôts sur le bénéfice commercial) et la réduction de l'impôt minimum forfaitaire à 1 million de FCFA pour les entreprises de presse. Le FSDP a subventionné également un mois d'impression des journaux en 2011 et trois mois en 2012. Chaque entreprise en règle peut faire financer son fonctionnement à hauteur de 10 millions de FCFA par le Fonds de garantie logé dans une banque de la place. Pour son investissement, ce financement qui, il faut le noter, est un prêt, peut aller jusqu'à 100 millions de FCFA. Puisque les patrons ont accumulé beaucoup d'arriérés de cotisations à la CNPS, cela leur a permis d'obtenir facilement des moratoires. Je pense sincèrement que pour une entreprise qui se veut sérieuse, cela peut lui permettre de tenir la route. Pendant que ces efforts sont faits, beaucoup de patrons ont continué à employer leur personnel au noir. C'est pourquoi, le SAAPPCI ne remerciera jamais assez le président du Conseil National de la Presse (CNP), Raphaël Lakpé et son conseil qui ont pris à bras le corps l'assainissement du secteur de la presse.
LP : Le CNP a levé la sanction de plusieurs entreprises de presse avec le retour de la quasi-totalité des titres suspendus en son temps. Qu'est- ce qui a pu bien se passer ?
FG : Le CNP a pour mission de veiller à l'application des règles relatives à la création des entreprises de presse. Pour s'assurer de l'existence de ces entreprises, le CNP a donc entrepris une tournée dans les rédactions et s'est rendu compte que beaucoup d'entreprises de presse fonctionnaient dans l'informel. Il a donc sommé ces dernières de se mettre à jour. La liste de celles qui l'ont fait a été rendue publique. Celles à qui il manquait des pièces ont été mises en demeure. Et celles que j'appellerais « entreprises fantômes» ont été suspendues. Et après le délai qui leur a été accordé, elles se sont mises à jour. Comme l'objectif n'est pas de fermer les entreprises pour créer le chômage, mais d'assainir le milieu, je pense que c'est normal qu'une société, qui s'est conformée aux conditions de création d'une entreprise de presse, soit autorisée à fonctionner. Mais, il faut signaler que pour cette première phase, le CNP n'a tenu compte que de l'indexation à la convention des salaires des journalistes professionnels et professionnels de la communication des entreprises visitées.
LP : Il est dit que le CNP s'est laissé avoir par de fausses déclarations, car il est incompréhensible que des entreprises n'ayant pas de comptabilité, ne payant pas ses journalistes à la convention, n'ayant aucun travailleur déclaré à la CNPS aient remis les titres qu'elles éditent sur le marché !
FG : Vous avez tout à fait raison. Nous avons été saisis par des travailleurs pour des cas d'intimidation, la signature des contrats de travail laconiques, antidatés et comportant des termes flous. En tout cas, nous avons eu copie de contrats de travail qui juridiquement n'en sont pas ! Je ne doute pas, un seul instant, de la vigilance du CNP. Il y a beaucoup de moyens de contrôle qui peuvent permettre, avec la gestion moderne des entreprises, de démasquer les fraudeurs qui font de fausses déclarations. Mais, je le répète, le CNP n'a demandé que les pièces qui prouvent que l'entreprise est constituée. Je lui demande donc d'aller plus loin en cherchant à vérifier le bon fonctionnement des entreprises de presse, notamment par la vérification des contrats de travail, l'attestation de mise à jour de la CNPS, c'est-à dire si le patron paie effectivement ses déclarations CNPS et tous les états financiers (bilans, états 301, Disa, grands livres etc). Cela permettra à l'organe de régulation d'être plus efficace et de savoir si les entreprises de presse sont gérées comme de vraies entreprises ou des boutiques de quartier. J'invite également les travailleurs de la presse à coopérer avec les agents du CNP en leur donnant les informations pouvant leur permettre de débusquer les patrons fraudeurs. Ensuite au niveau du SAAPPCI, nous nous tenons à leurs dispositions pour les assister en cas de menace. Qu'ils nous informent de toute fraude. Il y va de notre avenir, de l'avenir de notre profession.
LP : A quelle étape se situe justement le processus d'application de la Convention, surtout que les patrons disent être prêts désormais?
FG : Les patrons sont désormais prêts ! Mais, c'est une bonne pour nous ! Nos attendons que le CNP convoque les syndicats et les patrons pour dire aux derniers que, conformément aux résolutions des Etats généraux de la presse de Yamoussoukro, ils doivent indexer les salaires de leurs travailleurs à la Convention collective annexe des journalistes professionnels et professionnels de la Communication du 12 février 2008. Les Etat généraux de la presse ont demandé au GEPCI de se conformer à la loi. Il s'agit bien de la loi N°2004-643 du 14 décembre 2004 portant régime juridique de la presse. C'est elle qui fixe les conditions de création d'entreprise de presse que le CNP, à notre grande joie, a fait obligation aux patrons de respecter.
Cette même loi stipule qu'avant la parution de son journal, le patron doit adresser « une lettre d'engagement écrite, datée et signée par le Directeur à respecter et appliquer scrupuleusement la Convention collective interprofessionnelle régissant le secteur de la presse». Il n'existe qu'une seule convention dans notre secteur d'activités, c'est celle cosignée, sans contrainte aucune, par M. Dénis Kah Zion, alors président du GEPCI, Guillaume Gbato, Secrétaire du seul syndicat qui existait à l'époque en présence du ministre Ibrahim Sy Savané en qualité de tutelle technique et Hubert Oulaye, en tant que ministre de la Fonction publique et de l'Emploi. C'est donc cette convention qui doit être appliquée. Nous attendons que le CNP convoque les responsables syndicaux et les patrons de presse pour son application entière. Parce qu'un journaliste mal logé, mal soigné, mal nourri, qui se déplace difficilement, ne saurait être un journaliste professionnel. D'ailleurs, vous convenez avec moi que les salaires de la convention dont nous parlons aujourd'hui sont dépassés si l'on s'en tient au coût de la vie et aux charges du journaliste ivoirien aujourd'hui. Payer le journaliste à plus d'un million aujourd'hui n'est pas cher payé ! Donc que nos patrons nous donnent ce minimum que nous demandons.
Réalisée par Jean- Antoine Doudou
Le Patriote : Le Bureau du GEPCI a rencontré récemment la ministre de la Communication pour demander à l'Etat de subventionner les journaux dès lors que les entreprises éditrices de ces titres sont désormais en règle vis- à-vis de la loi. Quelle est votre analyse face à cette exigence des patrons de presse?
Francelin Glodé : Je ne ferai pas d'analyse particulière de ces propos. Mais, je voudrais souhaiter que cela ne soit pas une échappatoire pour les patrons de presse. C'est-à-dire faire croire à l'opinion publique que les patrons de presse ne doivent pas payer correctement leurs employés parce que l'Etat ne les aide pas. C'est vrai que l'Etat de Côte d'Ivoire doit continuer les efforts qu'il a commencés depuis la création du Fonds de soutien au développement de la presse (FSDP) en décembre 2007. Mais, subordonner cela au bon fonctionnement de son entreprise, n'est pas du tout professionnel pour un chef d'entreprise. Les sociétés éditrices des journaux sont d'abord des structures privées qui fonctionnent comme telles. Donc, elles ne doivent pas attendre tout de l'Etat. En suivant le secteur de la presse depuis 2007, vous constatez avec moi que chaque année, des subventions sont accordées aux entreprises, il y a eu l'annulation d'arriérés d'impôts, l'annulation du BIC (Impôts sur le bénéfice commercial) et la réduction de l'impôt minimum forfaitaire à 1 million de FCFA pour les entreprises de presse. Le FSDP a subventionné également un mois d'impression des journaux en 2011 et trois mois en 2012. Chaque entreprise en règle peut faire financer son fonctionnement à hauteur de 10 millions de FCFA par le Fonds de garantie logé dans une banque de la place. Pour son investissement, ce financement qui, il faut le noter, est un prêt, peut aller jusqu'à 100 millions de FCFA. Puisque les patrons ont accumulé beaucoup d'arriérés de cotisations à la CNPS, cela leur a permis d'obtenir facilement des moratoires. Je pense sincèrement que pour une entreprise qui se veut sérieuse, cela peut lui permettre de tenir la route. Pendant que ces efforts sont faits, beaucoup de patrons ont continué à employer leur personnel au noir. C'est pourquoi, le SAAPPCI ne remerciera jamais assez le président du Conseil National de la Presse (CNP), Raphaël Lakpé et son conseil qui ont pris à bras le corps l'assainissement du secteur de la presse.
LP : Le CNP a levé la sanction de plusieurs entreprises de presse avec le retour de la quasi-totalité des titres suspendus en son temps. Qu'est- ce qui a pu bien se passer ?
FG : Le CNP a pour mission de veiller à l'application des règles relatives à la création des entreprises de presse. Pour s'assurer de l'existence de ces entreprises, le CNP a donc entrepris une tournée dans les rédactions et s'est rendu compte que beaucoup d'entreprises de presse fonctionnaient dans l'informel. Il a donc sommé ces dernières de se mettre à jour. La liste de celles qui l'ont fait a été rendue publique. Celles à qui il manquait des pièces ont été mises en demeure. Et celles que j'appellerais « entreprises fantômes» ont été suspendues. Et après le délai qui leur a été accordé, elles se sont mises à jour. Comme l'objectif n'est pas de fermer les entreprises pour créer le chômage, mais d'assainir le milieu, je pense que c'est normal qu'une société, qui s'est conformée aux conditions de création d'une entreprise de presse, soit autorisée à fonctionner. Mais, il faut signaler que pour cette première phase, le CNP n'a tenu compte que de l'indexation à la convention des salaires des journalistes professionnels et professionnels de la communication des entreprises visitées.
LP : Il est dit que le CNP s'est laissé avoir par de fausses déclarations, car il est incompréhensible que des entreprises n'ayant pas de comptabilité, ne payant pas ses journalistes à la convention, n'ayant aucun travailleur déclaré à la CNPS aient remis les titres qu'elles éditent sur le marché !
FG : Vous avez tout à fait raison. Nous avons été saisis par des travailleurs pour des cas d'intimidation, la signature des contrats de travail laconiques, antidatés et comportant des termes flous. En tout cas, nous avons eu copie de contrats de travail qui juridiquement n'en sont pas ! Je ne doute pas, un seul instant, de la vigilance du CNP. Il y a beaucoup de moyens de contrôle qui peuvent permettre, avec la gestion moderne des entreprises, de démasquer les fraudeurs qui font de fausses déclarations. Mais, je le répète, le CNP n'a demandé que les pièces qui prouvent que l'entreprise est constituée. Je lui demande donc d'aller plus loin en cherchant à vérifier le bon fonctionnement des entreprises de presse, notamment par la vérification des contrats de travail, l'attestation de mise à jour de la CNPS, c'est-à dire si le patron paie effectivement ses déclarations CNPS et tous les états financiers (bilans, états 301, Disa, grands livres etc). Cela permettra à l'organe de régulation d'être plus efficace et de savoir si les entreprises de presse sont gérées comme de vraies entreprises ou des boutiques de quartier. J'invite également les travailleurs de la presse à coopérer avec les agents du CNP en leur donnant les informations pouvant leur permettre de débusquer les patrons fraudeurs. Ensuite au niveau du SAAPPCI, nous nous tenons à leurs dispositions pour les assister en cas de menace. Qu'ils nous informent de toute fraude. Il y va de notre avenir, de l'avenir de notre profession.
LP : A quelle étape se situe justement le processus d'application de la Convention, surtout que les patrons disent être prêts désormais?
FG : Les patrons sont désormais prêts ! Mais, c'est une bonne pour nous ! Nos attendons que le CNP convoque les syndicats et les patrons pour dire aux derniers que, conformément aux résolutions des Etats généraux de la presse de Yamoussoukro, ils doivent indexer les salaires de leurs travailleurs à la Convention collective annexe des journalistes professionnels et professionnels de la Communication du 12 février 2008. Les Etat généraux de la presse ont demandé au GEPCI de se conformer à la loi. Il s'agit bien de la loi N°2004-643 du 14 décembre 2004 portant régime juridique de la presse. C'est elle qui fixe les conditions de création d'entreprise de presse que le CNP, à notre grande joie, a fait obligation aux patrons de respecter.
Cette même loi stipule qu'avant la parution de son journal, le patron doit adresser « une lettre d'engagement écrite, datée et signée par le Directeur à respecter et appliquer scrupuleusement la Convention collective interprofessionnelle régissant le secteur de la presse». Il n'existe qu'une seule convention dans notre secteur d'activités, c'est celle cosignée, sans contrainte aucune, par M. Dénis Kah Zion, alors président du GEPCI, Guillaume Gbato, Secrétaire du seul syndicat qui existait à l'époque en présence du ministre Ibrahim Sy Savané en qualité de tutelle technique et Hubert Oulaye, en tant que ministre de la Fonction publique et de l'Emploi. C'est donc cette convention qui doit être appliquée. Nous attendons que le CNP convoque les responsables syndicaux et les patrons de presse pour son application entière. Parce qu'un journaliste mal logé, mal soigné, mal nourri, qui se déplace difficilement, ne saurait être un journaliste professionnel. D'ailleurs, vous convenez avec moi que les salaires de la convention dont nous parlons aujourd'hui sont dépassés si l'on s'en tient au coût de la vie et aux charges du journaliste ivoirien aujourd'hui. Payer le journaliste à plus d'un million aujourd'hui n'est pas cher payé ! Donc que nos patrons nous donnent ce minimum que nous demandons.
Réalisée par Jean- Antoine Doudou