La cohésion sociale du village de Lopou, dans le département de Dabou, est actuellement précaire. En cause, le maintien de M. Diby Réné, comme chef de ce village contre la volonté de la génération Nigbessi au pouvoir. Le dernier rebondissement de cette affaire, la semaine dernière, a mis le village en émoi. Nous nous y sommes attardés.
Lopou, village situé à une quinzaine de kilomètre de Dabou vit une crise de chefferie. La plus grave de son histoire, sans doute. Mais de quoi s’agit-il exactement ? Effet, suite à une lettre de démission de ses fonctions de chef de village adressée le 10 janvier 2011 par le Dr Diby Réné Djedjemel, ancien ministre des sports, au préfet du département, le village avait de façon consensuelle demandé au chef démissionnaire d’en assurer l’intérim jusqu’au 31 janvier 2012. Cela en vertu du principe de la gouvernance par génération. C’est qu’au moment où le chef Diby rendait sa démission, la génération M’Borman au pouvoir et dont il est issu, disposait encore de 18 mois de gouvernance avant le terme du mandat dont jouit chaque génération. Selon le procès verbal de la réunion du 13 juillet 2011, présidé par le préfet de Dabou d’alors, M. Zougbo Léon Ahipo, la génération sortante et celle montante se sont accordée sur l’intérim que devrait assurer le chef Diby René jusqu’à la date du 31 décembre 2012. Aussi ont-ils choisi un nouveau chef, en la personne de Nomel Mélèdje Cocody à qui il a été assigné une mission de stage aux côtés du chef intérimaire Diby. Sur la base de cette réunion consensuelle, présidée par le préfet de Dabou et consignée dans un Procès verbal, la génération Nigbessi qui a pris le pouvoir en janvier 2013, investit alors Nomel Mélèdje Cocody. Ce, conformément à ce qui était convenu et accepté par tous.
Il convient, pour une meilleure compréhension de la situation qui prévaut dans ce village, de savoir que chez les adjoukrou, le pouvoir coutumier, s’exerce par des classes d’âge. Chaque génération qui prend le pouvoir est alors appelée à gérer administrativement et politiquement le village pendant 8 ans aux termes desquels, elle cède le pouvoir à la génération cadette et ainsi de suite. Cette gouvernance par alternance qui emprunte à la démocratie, est bien reconnue par l’administration dont le rôle s’en trouve ainsi facilité. Ainsi donc, en avril dernier, les patriarches du village saisissent le sous-préfet de Lopou, Mme Koné Fatoumata, à l’effet d’une consultation populaire pour consacrer leur nouveau chef dans ses fonctions administratives. Une saisine qui, il faut le préciser, a ressassé au souvenir de l’autorité les différentes étapes consensuelles par lesquelles la communauté villageoise est passée. De cette saisine, le village reçoit une oreille attentive de la part de Mme le Sous-préfet qui manifeste son attachement à la cohésion de la population.
Donnant suite à la requête de la communauté villageoise, Mme le sous-préfet se rend à Lopou le 02 septembre dernier pour y procéder à la consultation populaire souhaitée. Elle marque, après la présentation des civilités, un intérêt à savoir si c’était vraiment la génération Nigbessi qui avait désormais en main la gouvernance du village. La réponse est affirmative. Puis, elle s’assure aussi du choix de Nomel Mélèdje Cocody comme nouveau chef.
Un grain de sable dans la machine
Là aussi la réponse est affirmative. Mais le chef sortant, Diby Réné, présent à cette consultation, dénonce « une procédure viciée». « Qu’ai-je fait pour qu’on cherche un nouveau chef à une consultation populaire alors que le poste n’est pas vacant. La preuve c’est que je détiens encore mon arrêté préfectoral de nomination. Cela n’a pas été abrogé. Qu’on me dise ce qui se passe ?», s’adresse t-il à Mme le sous-préfet. Laquelle réplique aussitôt en ces termes : « Monsieur le ministre, je ne connaissais Nomel Cocody ni d’Adam, ni d’Eve. C’est vous-même qui me l’aviez présenté comme votre futur successeur après décembre 2012. En la matière vous savez bien que l’administration ne choisit pas de chef pour un village. Mais lorsqu’il arrive qu’un chef soit choisi nous avons pour devoir d’organiser une consultation populaire pour infirmer ou confirmer le choix du village. C’est après cela que le préfet peut prendre un arrêté pour le confirmer.»
Mécontent de se voir rappeler ses propres confidences sur la place publique, le chef Diby René claque alors la porte de la consultation populaire. Refusant d’assister à ce qui apparaissait à ses yeux comme un procès public. Finalement, la consultation populaire confirme Nomel Mélèdje Cocody comme nouveau chef. Mais coup de théâtre, l’autorité reviendra sur ses pas le 24 septembre 2013 avec des nouvelles, jugées sidérantes par la communauté villageoise. En question, le maintien du chef Diby René à la tête de Lopou. Pourquoi alors avoir tenu des consultations populaires ? Pourquoi après avoir rendu sa démission dans laquelle, il mentionne noir sur blanc : «Je n’accepterai jamais d’être la pomme de discorde et encore moins une entrave à la bonne marche et au développement du village », le ministre Diby Réné revient sur sa décision ? Pour en savoir les motivations, nous avons joint le concerné qui a justifié sa démission suite à une tentative d’humiliation qu’il aurait subi de la part d’une frange de la jeunesse. «Tout est parti d’une plantation appartenant à la famille Yacé pour laquelle j’ai émis des propositions pour éviter un certain nombre de problèmes qui s’annonçait. Et j’ai été hué par des jeunes qui avaient été montés contre moi. Je n’ai pas supporté cette conspiration et c’est suite à ces incompréhensions que j’ai rendu ma démission ; sans faux-fuyants. Et c’est eux-mêmes qui sont revenus me voir pour me demander de rester. Je n’accepte pas donc de partir dans l’opprobre », s’est-il défendu. Estimant qu’il a beaucoup apporté au village de Lopou pour être payé en monnaie de singe. «L’assemblée s’est discréditée en matière des choix des chefs. D’ailleurs, quand on nomme un chef, c’est à vie sauf s’il commet une malversation ou une faute lourde. Qu’on me dise ce qu’on me reproche, après tout ce que j’ai fait pour ce village», insiste le ministre Réné Diby. Pourtant, si l’on ne s’attarde pas sur son bilan, on lui oppose en revanche à la fois sa démission libre et spontanée et le fait qu’il n’appartient pas à l’actuelle génération au pouvoir. Deux faits incontestables. Le climat au village est bien délétère en ce moment. «L’administration ne peut pas créer le désordre dans un village.», rappelait Mme le sous-préfet à l’occasion des consultations populaires. Qui du Dr Diby René ou de Nomel Mélèdje Cocody garantira l’ordre et la paix à Lopou ? La réponse est bien loin d’échapper à la conscience des autorités administratives locales.
Alexandre lebel Ilboudo
Lopou, village situé à une quinzaine de kilomètre de Dabou vit une crise de chefferie. La plus grave de son histoire, sans doute. Mais de quoi s’agit-il exactement ? Effet, suite à une lettre de démission de ses fonctions de chef de village adressée le 10 janvier 2011 par le Dr Diby Réné Djedjemel, ancien ministre des sports, au préfet du département, le village avait de façon consensuelle demandé au chef démissionnaire d’en assurer l’intérim jusqu’au 31 janvier 2012. Cela en vertu du principe de la gouvernance par génération. C’est qu’au moment où le chef Diby rendait sa démission, la génération M’Borman au pouvoir et dont il est issu, disposait encore de 18 mois de gouvernance avant le terme du mandat dont jouit chaque génération. Selon le procès verbal de la réunion du 13 juillet 2011, présidé par le préfet de Dabou d’alors, M. Zougbo Léon Ahipo, la génération sortante et celle montante se sont accordée sur l’intérim que devrait assurer le chef Diby René jusqu’à la date du 31 décembre 2012. Aussi ont-ils choisi un nouveau chef, en la personne de Nomel Mélèdje Cocody à qui il a été assigné une mission de stage aux côtés du chef intérimaire Diby. Sur la base de cette réunion consensuelle, présidée par le préfet de Dabou et consignée dans un Procès verbal, la génération Nigbessi qui a pris le pouvoir en janvier 2013, investit alors Nomel Mélèdje Cocody. Ce, conformément à ce qui était convenu et accepté par tous.
Il convient, pour une meilleure compréhension de la situation qui prévaut dans ce village, de savoir que chez les adjoukrou, le pouvoir coutumier, s’exerce par des classes d’âge. Chaque génération qui prend le pouvoir est alors appelée à gérer administrativement et politiquement le village pendant 8 ans aux termes desquels, elle cède le pouvoir à la génération cadette et ainsi de suite. Cette gouvernance par alternance qui emprunte à la démocratie, est bien reconnue par l’administration dont le rôle s’en trouve ainsi facilité. Ainsi donc, en avril dernier, les patriarches du village saisissent le sous-préfet de Lopou, Mme Koné Fatoumata, à l’effet d’une consultation populaire pour consacrer leur nouveau chef dans ses fonctions administratives. Une saisine qui, il faut le préciser, a ressassé au souvenir de l’autorité les différentes étapes consensuelles par lesquelles la communauté villageoise est passée. De cette saisine, le village reçoit une oreille attentive de la part de Mme le Sous-préfet qui manifeste son attachement à la cohésion de la population.
Donnant suite à la requête de la communauté villageoise, Mme le sous-préfet se rend à Lopou le 02 septembre dernier pour y procéder à la consultation populaire souhaitée. Elle marque, après la présentation des civilités, un intérêt à savoir si c’était vraiment la génération Nigbessi qui avait désormais en main la gouvernance du village. La réponse est affirmative. Puis, elle s’assure aussi du choix de Nomel Mélèdje Cocody comme nouveau chef.
Un grain de sable dans la machine
Là aussi la réponse est affirmative. Mais le chef sortant, Diby Réné, présent à cette consultation, dénonce « une procédure viciée». « Qu’ai-je fait pour qu’on cherche un nouveau chef à une consultation populaire alors que le poste n’est pas vacant. La preuve c’est que je détiens encore mon arrêté préfectoral de nomination. Cela n’a pas été abrogé. Qu’on me dise ce qui se passe ?», s’adresse t-il à Mme le sous-préfet. Laquelle réplique aussitôt en ces termes : « Monsieur le ministre, je ne connaissais Nomel Cocody ni d’Adam, ni d’Eve. C’est vous-même qui me l’aviez présenté comme votre futur successeur après décembre 2012. En la matière vous savez bien que l’administration ne choisit pas de chef pour un village. Mais lorsqu’il arrive qu’un chef soit choisi nous avons pour devoir d’organiser une consultation populaire pour infirmer ou confirmer le choix du village. C’est après cela que le préfet peut prendre un arrêté pour le confirmer.»
Mécontent de se voir rappeler ses propres confidences sur la place publique, le chef Diby René claque alors la porte de la consultation populaire. Refusant d’assister à ce qui apparaissait à ses yeux comme un procès public. Finalement, la consultation populaire confirme Nomel Mélèdje Cocody comme nouveau chef. Mais coup de théâtre, l’autorité reviendra sur ses pas le 24 septembre 2013 avec des nouvelles, jugées sidérantes par la communauté villageoise. En question, le maintien du chef Diby René à la tête de Lopou. Pourquoi alors avoir tenu des consultations populaires ? Pourquoi après avoir rendu sa démission dans laquelle, il mentionne noir sur blanc : «Je n’accepterai jamais d’être la pomme de discorde et encore moins une entrave à la bonne marche et au développement du village », le ministre Diby Réné revient sur sa décision ? Pour en savoir les motivations, nous avons joint le concerné qui a justifié sa démission suite à une tentative d’humiliation qu’il aurait subi de la part d’une frange de la jeunesse. «Tout est parti d’une plantation appartenant à la famille Yacé pour laquelle j’ai émis des propositions pour éviter un certain nombre de problèmes qui s’annonçait. Et j’ai été hué par des jeunes qui avaient été montés contre moi. Je n’ai pas supporté cette conspiration et c’est suite à ces incompréhensions que j’ai rendu ma démission ; sans faux-fuyants. Et c’est eux-mêmes qui sont revenus me voir pour me demander de rester. Je n’accepte pas donc de partir dans l’opprobre », s’est-il défendu. Estimant qu’il a beaucoup apporté au village de Lopou pour être payé en monnaie de singe. «L’assemblée s’est discréditée en matière des choix des chefs. D’ailleurs, quand on nomme un chef, c’est à vie sauf s’il commet une malversation ou une faute lourde. Qu’on me dise ce qu’on me reproche, après tout ce que j’ai fait pour ce village», insiste le ministre Réné Diby. Pourtant, si l’on ne s’attarde pas sur son bilan, on lui oppose en revanche à la fois sa démission libre et spontanée et le fait qu’il n’appartient pas à l’actuelle génération au pouvoir. Deux faits incontestables. Le climat au village est bien délétère en ce moment. «L’administration ne peut pas créer le désordre dans un village.», rappelait Mme le sous-préfet à l’occasion des consultations populaires. Qui du Dr Diby René ou de Nomel Mélèdje Cocody garantira l’ordre et la paix à Lopou ? La réponse est bien loin d’échapper à la conscience des autorités administratives locales.
Alexandre lebel Ilboudo