Les ménages continuent de souffrir. L’eau a cessé de couler dans les robinets de certains quartiers d’Abidjan. L’électricité également se fait rare. Reportage !
Plusieurs communes de la capitale économique ivoirienne sont soumises à des coupures intempestives d’eau et d’électricité qui causent de réels désagréments aux populations. Nous avons sillonné quelques quartiers pour toucher du doigt l’ampleur de cette situation et le calvaire des populations qui en découle. Ce mardi, à Marcory-Anoumabo, Amy Senou, le tuyau du robinet à la main, s’approvisionne en eau dans les environs de son domicile. «Je suis ici depuis 6 h parce que depuis trois jours, il n’y a pas une seule goutte d’eau chez moi», se plaint-elle. Les bassines, les bidons, les cuvettes s’entrechoquent. La fatigue se sent sur le visage. Le besoin en eau est plus fort que le soleil qui frappe en ce jour. Selon Madame Senou, c’est une question de chance. «Seules les personnes ayant installé des suppresseurs ont souvent de l’eau dans leurs robinets. Souvent même, il n’y a pas d’eau malgré les suppresseurs», confie-t-elle. Cette dame rencontrée à la fontaine explique que les coupures d’eau riment avec celles de l’électricité. «Il faut que les autorités politiques pensent à nous. Je vis dans ce quartier depuis 25 ans, et c’est cette situation que nous subissons depuis toujours», se lamente Meman Brobo, une autre femme venue s’approvisionner, l’air abattue. Elle explique que le coin était bondé de monde ce matin (mardi) parce qu’il n’y a pas d’eau dans les foyers. Et pour cela, les familles sont obligées de se doucher une seule fois par jour. Cap est mis sur un autre sous-quartier de la commune, où nous rencontrons Nadjénéba Cissoko qui se tord de douleur après avoir parcouru une longue distance. Une grosse bassine pleine d’eau sur la tête, visiblement épuisée, s’efforce de regagner son domicile. Elle confie qu’elle peut transporter de l’eau pour un coût de 500F par jour, en raison d’une bassine à 50F. «Ce n’est pas facile. Nous avons des compteurs à la maison, mais c’est rare d’avoir de l’eau. Les robinets sont le plus souvent à sec. Nous attendons souvent entre minuit et 6 heures du matin. Et souvent, par coup de chance, nous nous ravitaillons un peu», informe-t-elle. Même si la réalité diffère d’une zone à une autre, à l’évidence, l’eau, source de vie, manque à de nombreux endroits aux populations du district d’Abidjan. A certains endroits, elle coule rarement. A d’autres, la pénurie est totale, voire sur plusieurs jours. Et quand l’eau vient dans ces conditions incertaines, la pression reste faible.
C’est le cas à Koumassi-Remblais, où Fatou Koné explique qu’elle loue le service d’un jeune tous les deux jours. «J’ai signé un contrat avec un jeune homme qui a une charrette. Il s’arrange à me trouver de l’eau quand je le sollicite. Pour cela, je débourse 1500F. C’est vraiment pénible», soutient-elle. Elle révèle que même quand il y a de l’eau, la pression reste faible. Et c’est à peine qu’elle s’approvisionne. Dans la même zone du Remblais, les habits trempés de sueur, Abdoul Sawadogo s’efforce de pousser une charrette dans laquelle il a chargé des bidons d’eau de 20 litres. Le rythme de sa respiration est saccadé. Par intervalles réguliers, il marque une pause pour souffler, avant de reprendre le chemin. «Ce n’est pas facile d’avoir l’eau ici. Voyez-vous, on parcourt de longues distances. Je vais approvisionner les familles qui habitent en hauteur. C’est ce qui me permet de me prendre en charge», confie le jeune homme, qui explique qu’il se rend chez les vendeuses d’eau qui ont pu installer des suppresseurs, dans les quartiers voisins. Quant à Any Goulin, une autre riveraine, elle indique que ces coupures intempestives troublent la quiétude des populations. Cela fait trois nuits successives que je ne dors pas. Je veille pour pouvoir remplir mes bidons. Quand il n’y a pas d’électricité, il n’y a pas d’eau. On peut passer une semaine sans eau, ni électricité. Même quand nous avons de l’électricité, c’est pendant quelques heures. C’est vraiment difficile», déplore-t-elle. Un coup d’œil nous permet de voir de longues rangées de bidons de diverses capacités devant des installations de fortune. Une activité commerciale s’est développée autour de la pénurie d’eau. Pendant les échanges, Adjara Koné, vendeuse d’eau, nous montre une pile de bidons. «Ceux-ci attendent d’être remplis, selon l’ordre d’arrivée. Nos prix varient entre 25 et 75 F. Ce qui peut nous rapporter 2500, voire 3000 F par jour», nous informe-t-elle. Autre sous-quartier, où les populations se plaignent régulièrement, Abobo-Sagbé. L’eau est également un liquide rare. Sarah Soumahoro, en compagnie d’un groupe de femmes de la cour commune où elle habite, parcourt, tous les jours, de longues distances à la recherche d’eau. «Chaque jour, nous nous rendons jusqu’à la gare ou au quartier Marley entre 2h et 5h du matin pour acheter le contenu d’une barrique d’eau à 250 F pour nos familles. Le jour où on doit faire la lessive, nous achetons le double», nous confie-t-elle, visiblement vannée. Pour avoir de l’eau, ces mères de famille se privent de sommeil, bravent les intempéries et prennent des risques. Sarah Soumahoro indique qu’il est difficile de traverser les rails tard dans la nuit. «Notre commune est le nid de l’insécurité. Nous sommes souvent victimes d’agression, mais on n’a pas le choix. Nous sommes à la fois privés d’eau et d’électricité. Méritons-nous tout cela ? C’est pitoyable !», dénonce-t-elle. Madame Soumahoro souhaite que l’Etat trouve des solutions à leurs problèmes d’’eau et d’électricité: leurs priorités.
Fatou Sylla
Plusieurs communes de la capitale économique ivoirienne sont soumises à des coupures intempestives d’eau et d’électricité qui causent de réels désagréments aux populations. Nous avons sillonné quelques quartiers pour toucher du doigt l’ampleur de cette situation et le calvaire des populations qui en découle. Ce mardi, à Marcory-Anoumabo, Amy Senou, le tuyau du robinet à la main, s’approvisionne en eau dans les environs de son domicile. «Je suis ici depuis 6 h parce que depuis trois jours, il n’y a pas une seule goutte d’eau chez moi», se plaint-elle. Les bassines, les bidons, les cuvettes s’entrechoquent. La fatigue se sent sur le visage. Le besoin en eau est plus fort que le soleil qui frappe en ce jour. Selon Madame Senou, c’est une question de chance. «Seules les personnes ayant installé des suppresseurs ont souvent de l’eau dans leurs robinets. Souvent même, il n’y a pas d’eau malgré les suppresseurs», confie-t-elle. Cette dame rencontrée à la fontaine explique que les coupures d’eau riment avec celles de l’électricité. «Il faut que les autorités politiques pensent à nous. Je vis dans ce quartier depuis 25 ans, et c’est cette situation que nous subissons depuis toujours», se lamente Meman Brobo, une autre femme venue s’approvisionner, l’air abattue. Elle explique que le coin était bondé de monde ce matin (mardi) parce qu’il n’y a pas d’eau dans les foyers. Et pour cela, les familles sont obligées de se doucher une seule fois par jour. Cap est mis sur un autre sous-quartier de la commune, où nous rencontrons Nadjénéba Cissoko qui se tord de douleur après avoir parcouru une longue distance. Une grosse bassine pleine d’eau sur la tête, visiblement épuisée, s’efforce de regagner son domicile. Elle confie qu’elle peut transporter de l’eau pour un coût de 500F par jour, en raison d’une bassine à 50F. «Ce n’est pas facile. Nous avons des compteurs à la maison, mais c’est rare d’avoir de l’eau. Les robinets sont le plus souvent à sec. Nous attendons souvent entre minuit et 6 heures du matin. Et souvent, par coup de chance, nous nous ravitaillons un peu», informe-t-elle. Même si la réalité diffère d’une zone à une autre, à l’évidence, l’eau, source de vie, manque à de nombreux endroits aux populations du district d’Abidjan. A certains endroits, elle coule rarement. A d’autres, la pénurie est totale, voire sur plusieurs jours. Et quand l’eau vient dans ces conditions incertaines, la pression reste faible.
C’est le cas à Koumassi-Remblais, où Fatou Koné explique qu’elle loue le service d’un jeune tous les deux jours. «J’ai signé un contrat avec un jeune homme qui a une charrette. Il s’arrange à me trouver de l’eau quand je le sollicite. Pour cela, je débourse 1500F. C’est vraiment pénible», soutient-elle. Elle révèle que même quand il y a de l’eau, la pression reste faible. Et c’est à peine qu’elle s’approvisionne. Dans la même zone du Remblais, les habits trempés de sueur, Abdoul Sawadogo s’efforce de pousser une charrette dans laquelle il a chargé des bidons d’eau de 20 litres. Le rythme de sa respiration est saccadé. Par intervalles réguliers, il marque une pause pour souffler, avant de reprendre le chemin. «Ce n’est pas facile d’avoir l’eau ici. Voyez-vous, on parcourt de longues distances. Je vais approvisionner les familles qui habitent en hauteur. C’est ce qui me permet de me prendre en charge», confie le jeune homme, qui explique qu’il se rend chez les vendeuses d’eau qui ont pu installer des suppresseurs, dans les quartiers voisins. Quant à Any Goulin, une autre riveraine, elle indique que ces coupures intempestives troublent la quiétude des populations. Cela fait trois nuits successives que je ne dors pas. Je veille pour pouvoir remplir mes bidons. Quand il n’y a pas d’électricité, il n’y a pas d’eau. On peut passer une semaine sans eau, ni électricité. Même quand nous avons de l’électricité, c’est pendant quelques heures. C’est vraiment difficile», déplore-t-elle. Un coup d’œil nous permet de voir de longues rangées de bidons de diverses capacités devant des installations de fortune. Une activité commerciale s’est développée autour de la pénurie d’eau. Pendant les échanges, Adjara Koné, vendeuse d’eau, nous montre une pile de bidons. «Ceux-ci attendent d’être remplis, selon l’ordre d’arrivée. Nos prix varient entre 25 et 75 F. Ce qui peut nous rapporter 2500, voire 3000 F par jour», nous informe-t-elle. Autre sous-quartier, où les populations se plaignent régulièrement, Abobo-Sagbé. L’eau est également un liquide rare. Sarah Soumahoro, en compagnie d’un groupe de femmes de la cour commune où elle habite, parcourt, tous les jours, de longues distances à la recherche d’eau. «Chaque jour, nous nous rendons jusqu’à la gare ou au quartier Marley entre 2h et 5h du matin pour acheter le contenu d’une barrique d’eau à 250 F pour nos familles. Le jour où on doit faire la lessive, nous achetons le double», nous confie-t-elle, visiblement vannée. Pour avoir de l’eau, ces mères de famille se privent de sommeil, bravent les intempéries et prennent des risques. Sarah Soumahoro indique qu’il est difficile de traverser les rails tard dans la nuit. «Notre commune est le nid de l’insécurité. Nous sommes souvent victimes d’agression, mais on n’a pas le choix. Nous sommes à la fois privés d’eau et d’électricité. Méritons-nous tout cela ? C’est pitoyable !», dénonce-t-elle. Madame Soumahoro souhaite que l’Etat trouve des solutions à leurs problèmes d’’eau et d’électricité: leurs priorités.
Fatou Sylla